Congo Actualité 175

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: Quand le recours à la réconciliation devient abusif

1. NEWS

2. LE DIALOGUE ENTRE LE GOUVERNEMENT ET LE M23 À KAMPALA

3. QUESTION DE POINTS DE VUE

4. UNE FORCE INTERNATIONALE POUR COMBATTRE LES GROUPES ARMÉS

 

 

ÉDITORIAL: Quand le recours à la reconciliation devient abusif

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RDC : arrestation du chef de l’UFRC à Uvira

Africatimes

La Société civile du Nord-Kivu exige au gouvernement congolais et à la Conférence internationale pour la région de Grands lacs (CIRGL) de mettre un terme aux négociations qui se tiennent à Kampala (Ouganda) entre ses représentants et ceux des rebelles du M23, estimant que « le but de ce dialogue (évaluer l’accord de paix du 23 mars 2009 signé entre le gouvernement et le CNDP) est atteint ».

 

Dans leur déclaration officielle du lundi 11 février, les responsables de la coordination provinciale de la Société civile du Nord-Kivu estiment que le point le plus important concernant l’évaluation de l’Accord de paix du 23 mars 2009 est déjà vidé.

Ce point étant, selon eux, le plus important inscrit dans l’agenda des pourparlers, ils appellent à l’arrêt des discussions.

« Les travaux ne devraient s’arrêter qu’à l’évaluation de l’accord du 23 mars 2009 et non de négocier avec le M23. Nous pensons que le gouvernement devrait s’abstenir de partager le pouvoir avec le M23 ou d’intégrer ses éléments dans la police et dans l’armée parce que ce serait encourager les autres groupes armés à considérer que la prise des armes est un mode de revendication pour accéder au pouvoir », a affirmé sur Radio Okapi son porte-parole Omar Kavota.

« Caractère budgétivore »

La société civile du Nord-Kivu demande aussi au parlement d’initier un audit sur les fonds affectés à ces pourparlers, au motif qu’« il faut que la population connaisse tout ce qui a été géré comme fonds pace qu’aux yeux du peuple, ces pourparlers revêtent de plus en plus un caractère budgétivore ».

Le 24 janvier 2013, la Voix des sans voix (VSV) et l’Association africaine pour la défense des droits de l’homme (Asadho) avaient réclamé dans une déclaration  « l’arrêt immédiat » des négociations de Kampala.

« Seul un dialogue national peut mettre fin à la crise sécuritaire dans l’Est de la RDC », avait-elle proposé, alléguant que « la poursuite de cette rencontre deviendra budgétivore».

Katanga: Roger Meece « préoccupé par la situation sécuritaire et humanitaire » à Pweto (553)

Africatimes

 

Le représentant spécial du secrétaire général de l’Onu en RDC et chef de la Mission de Nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco), Roger Meece, s’est rendu mardi 12 février à Pweto, chef-lieu du territoire du même nom dans la province du Katanga, où l’activisme de groupes armés à provoqué le déplacement de plus 300.000 personnes ces derniers jours.

 

séjour au Katanga depuis le lundi 11 février, le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en RDC, s’est dit préoccupé par la situation sécuritaire et humanitaire qui prévaut à Pweto, en proie à l’activisme des miliciens Maï-Maï depuis plusieurs semaines.

Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires (Ocha), les attaques des milices contre des villages de ce territoire ont déjà provoqué le déplacement de près de 300 000 personnes qui vivent  désormais dans des conditions difficiles.

Roger Meece a déclaré que sa visite à Pweto  lui donne « l’opportunité de mieux connaître la situation sur le terrain actuellement » .

Le patron de la Monusco a affirmé qu’il entend discuter avec les autorités locales de l’action qui pourrait être menée, indiquant étudier la possibilité d’une intervention de la mission onusienne pour sécuriser cette partie du pays.

C’est depuis plusieurs semaines que certains territoires de la province du Katanga font face à des attaques des miliciens.

Au début du mois de janvier dernier, les habitants de cinq villages des territoires voisins de Pweto et Kasenga avaient trouvé refuge dans des localités lointaines après des incursions des miliciens Maï-Maï.

Dans une lettre ouverte adressée le samedi 9 novembre 2012 au président de la République et au  représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies en RDC, l’ONG de défense des droits de l’homme Justicia, basée à Lubumbashi, avait demandé un déploiement des casques bleus de la Monusco dans les territoires de Mitwaba, Malemba Nkulu, Pweto et Manono.

Interrogé par Radio Okapi en janvier, le ministre congolais de l’Intérieur, Richard Muyej, avait reconnu que la situation sécuritaire dans ces territoires était « préoccupante », accusant notamment le groupe Maï-Maï de Gédéon de se livrer à « des actes de terrorisme, de tueries, de vols et de destructions méchantes ».

RDC : arrestation du chef de l’Union des forces révolutionnaires du Congo

Africatimes

 

Le chef de l’Union des forces révolutionnaires du Congo (UFRC), une coalition de groupes armés basée dans le Sud Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo, a été arrêté à Uvira, a-t-on appris de source officielle lundi à Bukavu.

 

Gustave Bagayamukwe Tadji a été arrêté dimanche dans cette localité située au sud de Bukavu sur les bords du lac Tanganyka, a déclaré Désiré Kyakwima, attaché de presse du gouverneur du Sud Kivu. Il devrait être transféré rapidement à Kinshasa.

M. Bagayamukwe avait annoncé mi-janvier la création de l’UFRC, un mouvement « politico-militaire » dont l’objectif était de renverser le régime du président Joseph Kabila.

Dans une note transmise à l’AFP lors de sa création, l’UFRC souhaitait l’organisation d’élections démocratiques et l’instauration rapide d’un ordre politique nouveau ». Elle proposait notamment la création d’organes nationaux de la transition et le début de la réforme du système de défense et sécurité à partir de la province du Sud-Kivu ».

Les provinces de l’Est de la RDC dont le Nord et le Sud-Kivu, riches en minerais (coltan, cassitérite, or. . .), sont en proie à des troubles provoqués par des groupes armés. Depuis mai, l’armée concentre sa lutte sur le Mouvement du 23 mars (M23) – soutenu selon l’ONU par le Rwanda et l’Ouganda voisins, ce que ces pays nient.

Une force internationale neutre doit être déployée entre la RDC et le Rwanda pour combattre ces groupes armés. L’UFRC dans son communiqué avait demandé « l’annulation de l’envoi d’une force extérieure, aussi neutre soit-elle, pour garantir la paix dans toute la région ».

AFP

Bunia : l’auditorat militaire interrompt les poursuites judiciaires contre le chef milicien Cobra Matata

Radio Okapi

 

L’auditorat militaire de garnison de Bunia (Province Orientale) a décidé d’interrompre les poursuites judiciaires contre le chef milicien Matata Banaloki alias « Cobra Matata » et ses hommes. Selon l’auditeur militaire de Bunia, le major Kumbu Ngoma, cette décision a été prise « pour privilégier la paix dans la province ». Le chef milicien a exprimé le 17 janvier dernier sa volonté de réintégrer les rangs de l’armée congolaise.

 

« On a décrété la surséance de ces poursuites pour privilégier la recherche de la paix publique et la sécurité de la population, d’autant plus que l’Etat congolais a une obligation constitutionnelle de protéger le peuple », a déclaré le major Kumbu Ngoma.

Au mois de mars 2012, un dossier d’informations judiciaires à charge de Cobra Matata et ses hommes a été ouvert à l’auditorat militaire de garnison de Bunia pour meurtres, viols et création d’un mouvement insurrectionnel.

« Ces poursuites sont suspendues au profit des négociations politiques, pour privilégier la paix et la sécurité en Ituri », a expliqué l’auditeur militaire.

« D’ailleurs, a-t-il précisé, une délégation d’officiers de l’état-major des FARDC venue de Kinshasa négocie depuis une semaine avec Cobra Matata pour tenter de le convaincre de regagner les rangs de l’armée avec sa milice ».

Au terme de ces pourparlers, le chef milicien et ses hommes devront communiquer à l’Etat-major des FARDC la date de leur regroupement pour réintégrer l’armée.

« S’il ne réintègre pas l’armée, nous allons rouvrir son dossier devant la justice et ce sera de sa faute », a indiqué le major Kumbu Ngoma.

De son côté, Cobra Matata a promis de réagir prochainement à la suspension des poursuites judiciaires à son encontre.

Répondant à l’appel que lui a lancé le lieutenant-général François Olenga, chef d’Etat-major des forces terrestres, Cobra Matata s’est récemment dit disposé à réintégrer les rangs des FARDC avec ses hommes.

«L’appel du général Olenga est conforme à notre volonté de réintégrer les FARDC. C’est d’ailleurs un de nos désidératas. Je le remercie infiniment», a confié le chef milicien.

Cobra Matata est un ancien milicien devenu colonel des FARDC avant de redevenir milicien. Il exige notamment le grade de général de brigade pour réintégrer l’armée.

LA JUSTICE, SEUL PREALABLE POUR LA PAIX

Congo Actualité n. 174 – Editorial par Reseau Paix pour le Congo

LA JUSTICE, SEUL PREALABLE POUR LA PAIX

De nouvelles divergences.

À propos des pourparlers entre la délégation gouvernementale et celle du Mouvement du 23 Mars (M23) en cours à Kampala, de nouvelles divergences ont fait craindre la suspension du dialogue lui-même. Selon ses revendications exprimées au sujet du troisième point à l’ordre du jour, relatif aux questions politiques, économiques et sociales, le M23 met totalement en cause l’ordre institutionnel existant. Concrètement, le M23 réclame l’annulation des élections du 28 novembre 2011, la dissolution du Sénat et des Assemblées provinciales, la mise en place d’un Conseil National de transition chargé de a) Réviser la Constitution; b) Former un gouvernement de transition; c) Mettre en place les autres institutions de la République; d) Restructurer la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI); e) Organiser les élections générales en commençant par les locales et en finissant avec les présidentielles. D’autre part, la délégation du gouvernement a fermement rejeté ces revendications du M23.

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Congo actualité n. 174

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: La justice, seul préalable pour la paix

1. LE DIALOGUE ENTRE LE GOUVERNEMENT ET LE M23 À KAMPALA

2. LES ATERMOIEMENTS ET LES CONTRADICTIONS DE LA COMMUNITÉ

    INTERNATIONALE

3. LA SOCIÉTÉ CIVILE NE DEMORD PAS

4. LE PIÈGE DE LA NEGOCIATION

 

ÉDITORIAL: La justice, seul préalable pour la paix

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Rwanda-EXCLUSIF : Un autre document implique Paris dans le génocide des Tutsis : AFRIKARABIA

Rwanda-EXCLUSIF : Un autre document implique Paris dans le génocide des Tutsis : AFRIKARABIA.

 

Après les révélations du Parisien, Afrikarabia apporte un autre document accablant contre le capitaine de gendarmerie français Paul Barril. Il apparaît plus que jamais comme l’homme de main de Paris dans le génocide contre les Tutsis du Rwanda en 1994.

Document Barril confid déf.jpgLe « Contrat d’assistance » retrouvé dans les archives de l’ancien gouvernement génocidaire à Kigali, capitale du Rwanda, est daté du 28 mai 1994. Il est signé du « Capitaine Barril », élisant domicile à sa société SECRETS, 12, avenue de la Grande Armée, dans le XVe arrondissement de Paris, et porte une seconde signature : « Son Excellence Monsieur le Premier Ministre » Jean Kambanda. Ce dernier n’était pas une oie blanche : il purge aujourd’hui une peine de prison à perpétuité pour son rôle dans le génocide des Tutsis et le massacre des Hutus démocrates en 1994.

Bagatelle pour un massacre

La date n’est pas insignifiante. Au 28 mai 1994, deux mois après le début du génocide, le Rwanda était un charnier à ciel ouvert. Dans ce pays grand comme la Belgique, plus de 900 000 personnes avaient déjà été assassinées, hommes, femmes, enfants, bébés, vieillards. Les tueurs fanatisés avaient souvent précédé de sévices atroces l’exécution de tous ces civils sans défense, uniquement coupables d’être nés tutsis. Mais l’horreur, ou la simple morale, ne semblaient pas la préoccupation majeure de capitaine en disponibilité Paul Barril. Il « s’engage à fournir une aide sur le plan humain et matériel au Rwanda ». Sur le plan humain, « 20 hommes spécialisés », c’est-à-dire 20 mercenaires. Sur le plan matériel, l’équipement sophistiqué de ces mercenaires, et surtout des cartouches de Kalachnikov et de mitrailleuses, par millions, des obus, des grenades par milliers… A ce niveau, on arrondit la facture : il y en a pour 3 millions de dollars, la moitié payable d’avance. Compte tenu de l’inflation, ça représente en valeur d’aujourd’hui entre 5 et 6 millions d’euros.

Objectif : tuer Paul Kagame

Pour l’occasion, le capitaine de la Gendarmerie française se fait aussi payer le solde d’une précédente facture : 130 000 dollars pour « l’Opération insecticide » engagée par le président rwandais Juvénal Habyarimana un an plus tôt, en 1993. Insecticide est un nom de code que les Rwandais comprennent bien : on qualifie d’insectes (plus précisément de cafards, de blattes), les rebelles du Front patriotique rwandais (FPR), pour la plupart des Tutsis de la diaspora qui veulent forcer le régime à leur retour au pays.
Selon nos informations, « l’Opération insecticide » visait à assassiner Paul Kagame, le leader de la rébellion, dans son QG de Mulindi, une usine à thé abandonnée à l’est du Rwanda.

La question récurrente du rôle de la France dans le génocide

Ce « contrat d’assistance » n’était pas connu de la mission d’information parlementaire française dite « Mission Quilès », du nom de son  président, qui voulait documenter le rôle de la France au Rwanda depuis 1990, date du début de la guerre civile. En 1998, Paul Quilès n’avait même pas osé interroger Paul Barril, considéré comme intouchable et trop dangereux.
Le « Rapport Quilès » n’a, en conséquence, livré qu’une analyse édulcorée de l’implication de l’Elysée et du corps expéditionnaire français dans la guerre civile au Rwanda, qui devait aboutir au génocide.
Aussi, depuis 1994, l’implication de hauts responsables politiques et militaires français dans la préparation du génocide des Tutsis est une question qui continue à tarauder les médias et l’opinion publique. Non seulement en France, mais aussi au Rwanda, en Europe, en Afrique. Ainsi que les intellectuels du monde entier. Et le rôle du capitaine Paul Barril semble central.

Revenons au signal déclencheur de ce génocide et du massacre des Hutu démocrates : l’attentat du 6 avril 1994 contre le Mystère-Falcon du président Habyarimana, qui a aussi coûté la vie à l’équipage composé de trois Français. C’est le capitaine Paul Barril qui fut l’instigateur de  la plainte de la veuve du copilote français et provoqua ainsi l’enquête confiée en 1998 au juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière pour identifier les responsables de l’attentat. Au passage, Barril fournit aux enquêteurs – visiblement sous sa coupe – un ex-espion rwandais avec qui il entretenait des relations d’affaires, Fabien Singaye, qu’il fait promouvoir interprète assermenté. Par le jeu des alliances matrimoniales, Fabien Singaye est lié à la famille Habyarimana, partie civile à l’instruction. Une « curiosité » que les avocats de la famille Habyarimana se sont bien gardés de signaler au juge. Ce ne fut pas la moindre anomalie de la procédure.

Boomerang judiciaire

Reprise et mieux documentée par le juge Marc Trévidic, cette enquête revient en boomerang contre le capitaine de gendarmerie honoraire, qui semble avoir été la cheville ouvrière des autorités française dans le soutien aux forces génocidaires.
Il a fallu beaucoup d’énergie et de temps au juge Marc Trévidic pour progresser. Les documents sont rares, les témoins souvent manipulés. Les archives de l’Elysée furent, selon toute vraisemblance, largement « purgées » avant leur dépôt à la Fondation François Mitterrand, celles de l’ambassade du Rwanda à Paris ont également été « triées » à l’été 1994 avec l’aide de « Services » français. Celles du Quai d’Orsay, de la DGSE et de la DRM restent couvertes par le « Secret Défense ». Bien des hommes qui savaient la vérité sur le rôle de la France et de Barril sont morts. Le lieutenant colonel Ephrem Rwabalinda,  correspondant des Français au sein des anciennes Forces armées rwandaises, a été liquidé par ses compagnons d’armes en juillet 1994 au moment où il s’apprêtait à fuir en Europe pour faire des révélations. Le lieutenant colonel Ntahobari, attaché militaire de l’ambassade du Rwanda à Paris durant le génocide, est par malchance (?) décédé en région parisienne au moment où il promettait au juge Bruguière des éléments nouveaux, etc.,
Il faut donc s’en remettre à des fragments de documentation ayant échappé aux « nettoyeurs » pour se faire une idée encore générale de l’implication de Paris dans un génocide qui a provoqué environ un million de morts en trois mois.

Des morts suspectes juste avant repentance

Paul Barril semble avoir joué le rôle d’interface entre l’Elysée et le groupe d’exterminateurs de Tutsi au Rwanda. L’homme est lui-même décrit comme un individu peu contrôlable devenu, après avoir quitté la Gendarmerie nationale, un tueur à sang froid mû uniquement par l’appât du gain. Né le 13 avril 1946 à Vinay, en Isère, lui-même fils d’un gendarme à la carrière honorable, il atteint la notoriété en devenant co-fondateur puis commandant du prestigieux Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) pendant deux ans avant de participer à la création de la cellule antiterroriste de l’Élysée sous le premier septennat de François Mitterrand. Le GIGN lui a permis de cotôyer les services de renseignement français, notamment comme nageur de combat à la base secrète de la DGSE d’Aspretto, en Corse,  il fréquente aussi les nationalistes du FLNC. Dans le milieu interlope du renseignement, du trafic d’armes et du terrorisme, le gendarme perd vite ses bases éthiques. Le président de la République a une petite manie qu’exploitent ses courtisans : il adore les ragots, surtout ceux d’alcôve. Il se régale des comptes-rendus d’écoutes téléphoniques, d’apprendre qui couche avec qui dans le Tout-Paris. A la cellule de l’Elysée, véritable police politique du régime Mitterrand, Paul Barril fait merveille : écoutes téléphoniques hors normes, notamment de journalistes, filatures, opérations de désinformation…

Les exploits de « l’enfumeur »

Barril est surnommé « l’enfumeur »  par ses collègues gendarmes. Il n’a pas son pareil pour mêler le vrai et le faux, et surtout pour se mettre en scène. Son maître en la matière est François de Groussouvre, conseiller spécial de François Mitterrand pour les affaires de Renseignement… et les affaires de cœur du Président.  De Grossouvre est son rabatteur de jolies femmes, surtout il a la haute main sur les services d’espionnage et contre-espionnage. Il protège particulièrement Mazarine, la fille cachée de François Mitterrand, et sa mère Anne Pingeot. Paul Barril deviendra à la fois homme de confiance, confident, occasionnellement garde du corps aussi bien de François de Grosssouvre que de Mazarine et sa mère.

Patatras, François Miterrand le force à quitter la cellule de l’Elysée à la suite d’un retentissant scandale : une affaire de « terroristes irlandais » montée de toutes pièces par Barril et d’autres gendarmes dévoyés. Mais le flamboyant capitaine reste proche de Groussouvre quil l’a introduit auprès du président du Rwanda Juvénal Habyarimana. Pour commencer, Barril lui vend un portique de sécurité et un écran anti-balles. Ensuite, avec l’aide de Fabien Singaye, il s’introduit dans le système de Renseignement rwandais et obtient de juteux contrats.

De juteux contrats

Notre consoeur du Parisien Elisabeth Fleury vient de révéler l’un d’entre eux. Dans le milieu mercenaire, on ne s’embarrasse pas de papier à en-tête. Comme le « Contrat d’assistance » du 28 mai 1994,  c’est une lettre de quelques lignes, tapée à la machine, signée par Augustin Bizimana, le ministre de la Défense rwandais. S’adressant « au Capitaine Paul Barril ». Augustin Bizimana (aujourd’hui encore recherché par le Tribunal Pénal International) lui écrit : « Monsieur,… la situation dans mon pays devient de plus en plus critique… Vu l’évolution actuelle du conflit, je vous confirme mon accord pour recruter, pour le gouvernement rwandais, 1000 hommes devant combattre aux côtés des Forces Armées Rwandaises. » La missive est datée du 27 avril 1994, un mois avant le « Contrat d’assistance ». Les soldats des FAR sont plus occupés à tuer et à piller qu’à combattre les troupes du FPR, aussi ils reculent sur tous les fronts.

« Paul Barril, à cette époque, c’est la France »

Le Parisien écrit : « Lorsqu’il est sollicité par le ministre de la Défense rwandais, le capitaine Barril n’est pas n’importe qui. « Paul Barril, à cette époque, c’est la France, résume une source judiciaire. Officiellement, Barril est d’abord chargé d’« une mission d’infiltration » au service du gouvernement rwandais, avant d’être sollicité par la veuve Habyarimana pour enquêter sur les auteurs de l’attentat. Officieusement, son rôle est nettement plus discutable ».

Un vieillard agité de tremblements

Capture d’écran 2013-01-25 à 08.31.11.pngInterrogé à trois reprises par l’équipe singulièrement peu performante de la Division nationale antiterroriste, Paul Barril s’était tiré de questions à peine gênants par des pirouettes.
Réinterrogé en juillet dernier par les gendarmes du juge Trévidic, l’homme a perdu de sa superbe. Celui qui se plaisait à faire circuler des photos le représentant un énorme revolver 357 Magnum en mains (une arme dont la balle peut couper un homme en deux), qui se targuait d’être le meilleur tireur d’élite de la Gendarmerie française, apparaît un sexagénaire prématurément vieilli, agité de tremblements, souffrant sans doute de la maladie de Parkinson. Lui qui a si longtemps et si impunément manipulé les journalistes se  plaint des médias qui le présentent « injustement » comme un homme impliqué dans l’attentat du 6 avril 1994.  Il affirme qu’il ne s’est jamais rendu au Rwanda plus de deux ou trois jours de suite. Il confirme qu’il a été présenté à Habyarimana par Grossouvre « avant 1990 » et qu’il était chargé d’infiltrer « les Tutsi du FPR » pour les retourner. Il reconnaît avoir agi d’abord avec Groussouvre puis avec Fabien Singaye. Il prétend à présent qu’il effectuait des missions ponctuelles au Rwanda sans recevoir d’argent, seulement des billets d’avion et le remboursement de ses frais.

Mais parfois le naturel de « l’enfumeur » reprend le dessus. Paul Barril joue les diplomates de haute volée. Il affirme que c’est à son instigation que Paul Kagame « et quatre personnes dont je ne me rappelle plus les noms » sont venus à Paris en septembre 1991 pour négocier « les accords d’Arusha ». Il se présente comme agissant pour François Mitterrand afin d’aider Habyarimana à assurer la paix. Mais à d’autre moments il présente la guerre au Rwanda comme opposant « les Hutu et les Tutsi » et bien sûr il était dans le camp des Hutu.

Un alibi pour le 6 avril ?

Le plus intéressant est qu’il présente un alibi pour le 6 avril 1994. Curieusement, il s’agit d’une sorte d’attestation d’huissier à qui il aurait montré son visa et les tampons d’entrée et de sortie des Etats-Unis, où il aurait passé une quinzaine de jours missionné par la Garantie Mutelle des Fonctionnaires (GMF). Mais il s’avère aujourd’hui qu’il possédait à l’époque deux passeports français à son nom.

Paul Barril aurait été appelé par Agathe Habyarimana qu’il aurait rencontrée « complètement désemparée » par la mort de son mari pour faire une enquête sur l’attentat. On lui demande s’il ne travaille pas plutôt pour Mobutu. Il esquive en disant qu’il est allé voir aussi Mobutu en venant par Goma, et qu’un hélicoptère Gazelle l’a ensuite emmené au nord du Rwanda près de la frontière, puis à Kigali. Il insiste sur le fait qu’il était seul.
On lui présente ses précédentes dépositions et ses contradictions. Paul Barril élude encore, il ne se souvent plus. Notamment pour les lance-missiles qu’il n’aurait pas eu vraiment dans ses mains. On lui rappelle ses déclarations dans « Guerres secrètes à l’Elysée », un livre de souvenirs où il règle ses comptes après le suicide de Grossouvre, intervenu curieusement le 7 avril 1994, 24 heures après l’attentat.

Une citation accablante

Paul Barril y écrit page 176 : « J’ai appris le décès de celui que je considérais comme le général en chef d’une nouvelle armée de l’ombre, apte à rétablir la France [François de Grossouvre], sur une colline perdue au centre de l’Afrique, au moment où les officiers tutsis du Front patriotique rwandais (FPR), formés et conseillés par la C. I. A., préparaient les premiers mouvements de l’offensive qui devait leur assurer le pouvoir à Kigali, capitale du Rwanda, ainsi que le contrôle de toute la région des Grands Lacs. François Durand de Grossouvre est mort le 7 avril 1994, peu avant 20 heures. Exactement 24 heures avant, le 6 avril à la même heure, l’avion du président rwandais Habyarimana a explosé en plein vol, au-dessus du palais présidentiel de Kigali, frappé traîtreusement par deux missiles soviétiques sol air SAM 16. Leurs numéros de série indiquent qu’ils ont appartenu à l’armée irakienne. Peut-être ont-ils été récupérés par les soldats américains après la guerre du Golfe. Dans ce cas devrait-on y voir une manipulation de la C. I. A. ? Mais pourquoi ? Ou plutôt, afin de ménager les intérêts de qui, à Kigali, et au Rwanda en général ? »

Que faisait Paul Barril à Kigali le 6 ou le 7 avril, selon son propre aveu ? Il répond que le livre était en partie un roman, un « roman-enquête » et que tout n’était pas vrai. Il dit que c’était « pour faire bouger les choses ».

« Des témoignages à l’africaine »

On lui rappelle les « 80 enregistrements de témoins ayant assisté à l’attentat » dont il avait fait grand cas en 1994 dans la presse, notamment le quotidien Le Monde. Non, il n’a pas ces enregistrements, il avait simplement pris des notes », et puis c’était des témoignages « à l’africaine » (?) dont il ne se souvient pas clairement.
On lui demande ses liens avec Singaye. Il dit que c’est lui qui l’a présenté aux enquêteurs du juge Bruguière. Il reconnaît savoir que Singaye était un agent des services de renseignement. Il dit qu’il était très bien renseigné et qu’il l’aidait à enquêter sur l’attentat, « pour la défense des familles des trois militaires français de l’équipage ». On lui demande à quel titre il enquêtait. Il bafouille une vague réponse.
Barril explique que l’avion a  été abattu sur ordres de Kagame dont les hommes suivaient l’arrivée par des lunettes infra rouge. Et que les deux tirs sont partis du même endroit du camp militaire des FAR à Kanombe (il avait présenté auparavant une version bien différente, visiblement il a intégré l’expertise balistique communiquée au juge Trévidic en janvier 2012, et qui semble innocenter le FPR).

Des déclarations à géométrie variable

Pressé par ses anciens collègues gendarmes qui « connaissent la musique » , Paul Barril s’énerve progressivement. A la fin, un enquêteur lui indique qu’on va perquisitionner ses différents domiciles (trois résidences en France, dont une en montagne). Il répond qu’il ne peut assister aux perquisitions vu son état de santé. Paul Barril ironise sur l’idée qu’on pourrait demander à perquisitionner sa résidence au Qatar, et que ça n’arrangerait pas les relations entre le Qatar et la France. Humilié et mortifié d’être traité en témoin ordinaire, cet homme qui a fait trembler tant de politiciens français n’est plus que l’ombre de lui-même mais voudrait se donner de l’importance. Il ajoute que puisque c’est comme ça, il ne donnera pas les documents qu’il avait apportés. Et il refuse de signer le procès-verbal d’audition, ce qui est acté.

Récompensé par la République française pour quels services ?

Les perquisitions engagées n’ont pas été sans résultat car si Barril a souvent fait le ménage chez les autres, il avait négligé bureaux et demeures personnels. Les gendarmes ont mis la main sur quelque 800 pages de pièces accablantes, une sorte de « best of » des turpitudes de la Françafrique. L’inusable Barril était de tous les trafics d’armes, de bien des magouilles…On a ainsi découvert la demande de 1000 mercenaires pour aider au génocide contre les Tutsi, et une copie du « contrat d’assistance » passé entre Barril et le gouvernement rwandais daté du 28 mai 1994, dont le premier exemplaire avait été trouvé à Kigali. Selon Le Parisien, le juge Trévidic a réinterrogé le capitaine Barril sur ces documents le 20 décembre dernier. Ce contrat d’assistance « n’a jamais existé », prétend l’intéressé. Les factures? « Cela ne s’est jamais fait. » Il prétend que tout ça tout cela « c’est de la mayonnaise africaine. »
« Une mayonnaise de près d’un million de morts » observe notre consoeur Elisabeth Fleury. En juin 1994, juste après le génocide, Paul Barril a été promu capitaine honoraire de la Gendarmerie française. Pour quels services rendus ?

Jean-François DUPAQUIER

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RDC: l’ONU veut des troupes et des drones pour relancer le processus de paix

NEW YORK (Nations unies), 26 jan 2013 (AFP) – Huit présidents africains doivent se rencontrer lundi à Addis Abeba pour relancer le processus de paix en République démocratique du Congo (RDC), où l’ONU veut envoyer une « unité d’intervention » et des drones pour « neutraliser » les groupes rebelles.
Dans l’est de la RDC, l’armée affronte depuis avril le Mouvement du 23 mars (M23), une rébellion que l’ONU dit soutenue par le Rwanda et l’Ouganda voisins –ce que nient les deux pays. Depuis décembre, de laborieux pourparlers de paix sont en cours à Kampala.
Les présidents de la RDC, du Rwanda, du Burundi, de l’Ouganda, de l’Angola, du Congo-Brazzaville, de l’Afrique du Sud et de la Tanzanie doivent se rencontrer lundi à Addis Abeba en marge du 20e sommet de l’Union africaine et y signer un accord pour relancer le processus de paix dans la région, a-t-on appris auprès de responsables de l’ONU.
Parallèlement à ces efforts diplomatiques, l’ONU souhaite aussi renforcer sa mission en RDCongo avec une « unité d’intervention » forte de 2.500 hommes pour s’attaquer au M23 et aux autres groupes rebelles présents dans la région.
La Tanzanie et l’Afrique du Sud sont candidates pour contribuer à cette unité qui prêterait main forte aux quelque 17.000 hommes de la Mission de l’ONU pour la stabilisation du Congo (Monusco), selon des diplomates onusiens.
« Il ne s’agit pas simplement de maintien de la paix, il s’agit de mise en oeuvre de la paix », souligne un responsable onusien des opérations de maintien de la paix.
Ces trois bataillons vont « neutraliser la menace représentée par les groupes armés grâce à des opérations ciblées contre leurs structures de commandement ou contre des sites spécifiques », a poursuivi ce responsable s’exprimant sous couvert d’anonymat.
Le Conseil de sécurité de l’ONU a également autorisé le déploiement de drones pour surveiller la frontière entre la RDC et le Rwanda. Les responsables onusiens espèrent que ces drones et l’unité d’intervention pourront être opérationnels d’ici trois mois.
Un émissaire de l’ONU pour les Grands Lacs
Parallèlement, les responsables onusiens travaillent toujours sur l’accord politique qui doit être paraphé à Addis Abeba, mais sont optimistes quant au fait qu’il devrait être signé lundi.
Cette force d’intervention plus solide de l’ONU « fait partie du lot d’ensemble que le secrétaire général (Ban Ki-moon) veut présenter à la région, en plus du cadre politique qui est selon nous essentiel pour régler le problème », poursuit un autre responsable de l’ONU.
« Les dirigeants de la région sont d’accord pour travailler ensemble, pour s’occuper des problèmes sous-jacentes –économiques, militaires, politiques– et pour être contraints à le faire », poursuit-il.
Plusieurs accords de paix régionaux ont été signés et ont fait long feu depuis la fin des années 1990, mais l’ONU espère que ce nouveau texte sera plus efficace parce qu’il vise à en rendre « responsables » les dirigeants des pays signataires, souligne ce responsable.
L’accord doit établir des critères propres à chaque pays pour mettre fin à la violence, dont la mise en oeuvre sera vérifiée. Les huit présidents signataires se rencontreront deux fois par an pour évoquer les moyens de ramener la paix en RDC.
M. Ban devrait également nommer un émissaire « de haut rang » pour la région des Grands Lacs.
L’est de la RDC, riche en cassitérite, or, coltan et autres minerais, vit depuis des décennies au rythme de conflits régionaux, rébellions et mutineries.
Un émissaire de l’ONU pourrait travailler avec l’Union africaine pour amener les groupes rebelles et le gouvernement à « se pencher sur les causes premières de la violence, dont ses racines économiques et le rôle des gouvernements voisins dans les réseaux de trafic des ressources naturelles de RDC », pointe John Prendergast, ancien conseiller de l’administration américaine sur les questions africaines.
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