Congo Actualité n. 445

LA PERSISTANCE DES VIOLENCES AU NORD KIVU ET EN ITURI, MALGRÉ L’ÉTAT DE SIÈGE

SOMMAIRE

1. UN PROJET DE LOI D’HABILITATION DU GOUVERNEMENT
a. La proposition du Conseil des Ministres
b. Le Sénat l’adopte
c. L’Assemblée Nationale la rejette et saisit la Cour Constitutionnelle
d. Le Sénat clôture la session ordinaire, mais il reste disponible pour des séances par visioconférence
e. Le Bureau de l’Assemblée Nationale propose la poursuite de la session parlementaire par la convocation de séances plénières en format réduit
2. LA PROROGATION DE L’ÉTAT DE SIÈGE
3. LA PERSISTANCE DES VIOLENCES MALGRÉ L’ÉTAT DE SIÈGE
a. Au Nord Kivu
b. En Ituri

1. UN PROJET DE LOI D’HABILITATION DU GOUVERNEMENT

a. La proposition du Conseil des Ministres

Le 11 juin, le gouvernement a adopté un projet de loi d’habilitation pour lui permettre de légiférer sur certaines matières sans passer par le Parlement. Ce projet de loi permettrait de clôturer la session ordinaire dans les délais constitutionnels et d’éviter une session extraordinaire dans le contexte d’une recrudescence de la Covid-19,  Une fois adopté, ce projet de loi d’habilitation, permettra au gouvernement de proroger l’état de siège décrété sur une partie du territoire national sans passer par le parlement qui, officiellement, doit clôturer ce 15 juin 2021  la session ordinaire de mars 2021. Face aux sénateurs de l’Union sacrée, le Président de la République Félix Tshisekedi avait déjà demandé de  réserver une suite favorable à ce projet.[1]

Le 14 juin, le Vice-premier Ministre, Ministre des Affaires Étrangères, Christophe Lutundula, a présenté devant les sénateurs le projet de loi  d’habilitation adopté en conseil des ministres. D’après le Chef de la diplomatie congolaise, cette habilitation aura une durée de trois mois en vue de permettre au gouvernement de proroger l’état de siège et d’engager les réformes dans le domaine fiscal et dans celui de la réglementation du numérique. Selon le Ministre Lutundula, «ces mesures sont destinées à primo: proroger l’état de siège sur une partie de la République Démocratique du Congo; secundo réguler l’état de siège et l’état d’urgence sanitaire, conformément à l’article 85 alinéa 3 de la constitution; et tertio: accroître et rationaliser la mobilisation des recettes intérieures, notamment par les recours aux technologies numériques qui permettent de lutter efficacement contre la corruption et le coulage des recettes publiques».
Ce projet de loi d’habilitation sera examiné en première lecture au Sénat. Il sera transmis à l’Assemblée nationale pour seconde lecture. Un fois adopté au parlement, le projet de loi permettra au gouvernement de la République de légiférer pendant la période des vacances parlementaires (trois mois). C’est ce mardi 15 juin 2021 que va se clôturer la session parlementaire de mars.[2]

b. Le Sénat l’adopte

Le 14 juin, conformément aux dispositions de l’article 129 de la Constitution, le Sénat a adopté, en première lecture, le projet  de loi portant habilitation du gouvernement à légiférer par ordonnances-lois sur certaines matières qui relèvent du domaine de la loi. Ces matières sont:
– la prorogation de l’état de siège
– les modalités d’application de l’état de siège
– la réglementation du numérique
– l’accroissement et la rationalisation des recettes intérieures.
Sur 94 sénateurs qui ont participé au vote, 90 ont voté «pour», 1 seul a voté «non» et 3 autres se sont abstenus.
Si le gouvernement a facilement obtenu l’autorisation du Sénat pour légiférer sur les matières liées à l’état de siège, les sénateurs ont émis beaucoup de réserves avant d’autoriser le gouvernement à prendre des mesures du domaine de la loi dans les secteurs des finances publiques ainsi que du numérique. Ils estiment que les finances et le numérique sont «extrêmement sensibles».
Ce projet de loi sera envoyé à l’Assemblée nationale pour y subir une seconde lecture. En cas d’adoption en des termes identiques, il sera transmis au président de la République pour promulgation.
Cette loi prend effet dès sa promulgation et cesse de plein droit dans les 90 jours. En effet, selon l’article 129 de la Constitution, le gouvernement peut demander soit au sénat, soit à l’assemblée nationale l’autorisation à légiférer par ordonnances loi, quitte à ce que, lors de la reprise de la session ordinaire suivante, le parlement puisse ratifier les ordonnances lois qui auraient été prises. En effet, cet article stipule:  « Le Gouvernement peut, pour l’exécution urgente de son programme d’action, demander à l’Assemblée nationale ou au Sénat l’autorisation de prendre, par ordonnances-lois, pendant un délai limité et sur des matières déterminées, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. Ces ordonnances-lois sont délibérées en Conseil des ministres. Elles entrent en vigueur dès leur publication et deviennent caduques si le projet de loi de ratification n’est pas déposé devant le Parlement au plus tard à la date limite fixée par la loi d’habilitation (…) Les ordonnances-lois délibérées en Conseil des ministres et ratifiées ne peuvent être modifiées dans leurs dispositions que par la loi. Les ordonnances-lois cessent de plein droit de produire leurs effets en cas de rejet du projet de loi de ratification ».[3]

c. L’Assemblée Nationale la rejette et saisit la Cour Constitutionnelle

Le 14 juin, la conférence des présidents de l’Assemblée nationale a décidé de poursuivre avec les travaux parlementaires au-delà du 15 juin, date prévue pour la clôture de la session parlementaire de mars. D’après Joseph Lembi Libula, rapporteur de l’Assemblée nationale, cette décision fait suite à l’ajout des nouvelles matières dans le calendrier des travaux: «Il s’agit de l’inscription au calendrier de la présente session de nouvelles matières, à savoir l’élaboration du calendrier de désignation des nouveaux membres de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI), ainsi que le suivi de l’évolution de l’état de siège, conformément à l’article de 144 de la constitution».
Le rapporteur de l’Assemblée nationale justifie l’ajout du premier point en rapport avec la CENI, du fait que les deux chambres du parlement ont déjà adopté la loi organique visant la réforme de cette institution d’appuie à la démocratie: «Il est urgent que l’Assemblée Nationale élabore et mette en oeuvre le calendrier de désignation des animateurs de la Ceni, d’autant plus que la loi organique votée par les deux chambres est déjà transmise au niveau du chef de l’Etat pour promulgation. Cela permettra à la Ceni de s’installer et commencer à remplir ses obligations».
Concernant la seconde matière relative à l’état de siège proclamé par le Chef de l’État dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, le rapporteur souligne que l’assemblée nationale doit jouer son rôle de prorogation après chaque 15 jours: «Il n’y aura donc pas de clôture officielle de la session, parce que l’Assemblée Nationale est appelée aux prorogations successives de l’état de siège tous les 15 jours. Et cela conformément à l’article 144 de la constitution qui dit exactement que, en cas d’état de siège, l’Assemblée Nationale se réunit de droit. Si elle était en session ordinaire, cette session continue et la clôture sera retardée. Si elle n’était pas en session ordinaire, une session extraordinaire devait être convoquée». Cette décision de la conférence des présidents intervient après l’adoption par le Sénat du projet de loi d’habilitation dans l’objectif d’attribuer au gouvernement les compétences de légiférer les lois pendant la période des vacances parlementaires.[4]

Le 15 juin, l’Assemblée nationale a rejeté l’examen, en deuxième lecture, du projet de loi d’habilitation du gouvernement, déjà adopté par le Sénat. Lors de la plénière qui devait sanctionner la fin de la session de mars, la Chambre basse du Parlement a estimé que voter cette loi allait à l’encontre de l’article 144 de la Constitution qui dispose: «En application des dispositions de l’article 85 de la présente Constitution, l’état de siège, comme l’état d’urgence, est déclaré par le Président de la République. L’Assemblée nationale et le Sénat se réunissent alors de plein droit. S’ils ne sont pas en session, une session extraordinaire est convoquée à cet effet conformément à l’article 116 de la présente Constitution. La clôture des sessions ordinaires ou extraordinaires est, de droit, retardée pour permettre, le cas échéant, l’application des dispositions de l’alinéa précédent.
L’état d’urgence ou l’état de siège peut être proclamé sur tout ou partie du territoire de la République pour une durée de trente jours. L’ordonnance proclamant l’état d’urgence ou l’état de siège cesse de plein droit de produire ses effets après l’expiration du délai prévu à l’alinéa trois du présent article, à moins que l’Assemblée nationale et le Sénat, saisis par le Président de la République sur décision du Conseil des ministres, n’en aient autorisé la prorogation pour des périodes successives de quinze jours (…)». Selon le rapporteur de l’Assemblée nationale, Joseph Lembi Libula, l’Assemblée nationale va donc continuer à siéger pour statuer, entre autres, sur la question de l’état de siège et l’élaboration du calendrier de désignation des membres de la CENI.[5]

Le 17 juin, le Président de l’Assemblée nationale, Christophe Mboso, a saisi la Cour Constitutionnelle pour s’assurer s’il y avait lieu de clôturer la session comme le prévoit l’article 115 ou il faut retarder sa clôture comme l’exige l’article 144 al. 2 et 3 en cas d’état de siège. Mboso a pour sa part affirmé la nécessité de prendre une décision précise: clôturer la session ordinaire comme mesure de précaution contre la troisième vague de coronavirus ou respecter les dispositions de la constitution.[6]

d. Le Sénat clôture la session ordinaire, mais il reste disponible pour des séances par visioconférence

Le 28 juin, après avoir voté la loi portant prorogation de l’état de siège en Ituri et au Nord-Kivu, le Sénat a clôturé la session ordinaire de mars. Dans son discours de clôture, le président du Bureau, Bahati Lukwebo, a précisé que, «selon les dispositions de l’Arrêt R. Const. 1584 de la Cour Constitutionnelle rendu sur requête de l’Assemblée Nationale en interprétation de l’article 144 alinéas 2 et 3 de la Constitution, selon lesquelles « les chambres parlementaires peuvent clôturer leur session de manière exceptionnelle, et demeurer disponibles tous les quinze jours pour proroger ou non l’état de siège », la clôture ce jour de la session de mars 2021 est justifiée». Et d’ajouter: «En sus de l’Arrêt R. Const 1584, le rebondissement très inquiétant de la propagation de la maladie à Coronavirus constitue un cas de force majeur à la poursuite des activités du Sénat».
Pour les prochaines prorogations de l’Etat de siège, il a insisté sur la nécessité que l’Assemblée nationale vote la loi d’habilitation, qui permettra au Président de la République de proroger l’état de siège par ordonnance-loi délibérée en Conseil des ministres.
Le Président du Sénat Bahati Lukwebo a informé la plénière sur les modalités de travail après la clôture de la session parlementaire de mars 2021, alors que l’état de siège est toujours en vigueur dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu. En cas de la non prise en compte par l’Assemblée nationale, du projet d’habilitation du gouvernement, les sénateurs se réuniront par visioconférence pour autoriser ou non la prorogation de l’état de siège.[7]

e. Le Bureau de l’Assemblée Nationale propose la poursuite de la session parlementaire par la convocation de séances plénières en format réduit

Le 29 juin, à l’issue de la conférence des présidents, le rapporteur de l’Assemblée Nationale, Joseph Lembi Libula, a déclaré que, suite aux dispositions de l’arrêt R.const. 1584 de la Cour Constitutionnelle, en interprétation de l’article 144 sur l’état de siège, les députés vont poursuivre avec les travaux de la session parlementaire de mars.  Il a précisé que cet article ne permet pas à l’Assemblée nationale de clôturer la session, pendant que l’état de siège est déclaré, malgré la résurgence de la troisième vague de la pandémie de Covid-19. Selon Joseph Lembi Libula, «il a été décidé à l’unanimité que l’Assemblée nationale ne va pas clôturer la session et qu’elle va continuer à siéger en format réduit. Et cela par rapport aux mesures prises par le gouvernement qui ne permettent pas à l’Assemblée nationale de siéger régulièrement, en format normal». A l’en croire, seulement 60 députés nationaux vont commencer à se réunir en plénière. S’il y a vote, le bureau et la conférence des présidents vont voter à la place de l’Assemblée plénière.[8]

Le 1er  juillet, le Bureau de l’Assemblée nationale a présenté, au cours d’une plénière, le projet de résolution visant à organiser les séances plénières en format réduit pour des raisons sanitaires tel que décidé lors de la dernière réunion de la conférence des présidents de l’assemblée nationale.
Le projet de résolution relatif à l’organisation des assemblées plénières en format réduit de l’Assemblée nationale lue par Colette Tshomba, rapporteur de l’Assemblée nationale. comporte 3 articles à savoir:
Article 1: l’Assemblée plénière de l’assemblée nationale siège dorénavant à format réduit et décide sur toutes les questions relevant de sa compétence et selon l’évolution de la situation jusqu’à la rentrée parlementaire de la session ordinaire du 15 septembre 2021;
Article 2: le format réduit comprend le bureau de l’assemblée nationale, les délégués des bureaux des groupes parlementaires, des commissions permanentes et du comité des sages. Les honorables députés ainsi délégués siégeront dorénavant de manière rotative ;
Article 3: la présente résolution entre en vigueur à la date de son adoption par l’assemblée plénière.
Ce projet de résolution a été rejeté en bloc par les députés nationaux toute tendance confondue qui l’ont jugé non-conforme à l’esprit de la constitution.
Le député Daniel Mbau a affirmé que «cette résolution entre en conflit avec l’article 101 de la Constitution qui dispose ce qui suit: le député national est le représentant de la nation et tout mandat impératif est nul. Nulle part dans la constitution il est dit que le député peut se faire représenter par un autre député, parce que lui-même est porteur d’un mandat. Cette forme de délégation de pouvoir est donc inconstitutionnelle … Vu l’impérativité de la loi d’une part et d’autre part la nécessité de la sécurité sanitaire, nous estimons que, s’il faut déléguer à titre exceptionnel, cette délégation puisse porter sur une matière précise, c’est-à-dire la prorogation de l’état de siège exclusivement, selon l’évolution de la situation et jusqu’à la rentrée de la session du 15 septembre».
Selon le député national Eliezer Ntambwe, la résolution présentée par le Bureau rassemble beaucoup au projet de loi d’habilitation du gouvernement déjà rejeté par l’Assemblée nationale.
Pour lui, la résolution proposée contient le risque d’abus dans la prise de certaines décisions qui engageraient non seulement les 60 députés nationaux, mais tous les 500. Il insiste que la matière soit limitée uniquement à l’état de siège: «Si on veut que nous puissions adopter cette résolution, nous devons la reformuler et bien déterminer la matière pour laquelle nous allons céder une partie de notre pouvoir».
Sur demande de plusieurs députés, la plénière a décidé d’envoyer ce projet de résolution à une commission spéciale, pour réécriture et limitation des matières. En effet, si le projet adopté par la conférence des présidents avait été conçu pour traiter une seule matière, celle de la prorogation de l’état de siège, celui présenté par le bureau de l’Assemblée nationale concerne une habilitation à statuer aussi sur toutes les matières.
Le bureau de l’Assemblée nationale, par le biais de son 2ème vice-président, Vital Banywesize, qui faisait office du président, a demandé aux différentes composantes de déléguer leurs membres devant faire partie de la commission spéciale.[9]

2. LA PROROGATION DE L’ÉTAT DE SIÈGE

Le 25 juin, le gouvernement a adopté un nouveau Projet de Loi portant autorisation de la prorogation de l’état de siège en Ituri et au Nord Kivu, pour une période de 15 jours prenant cours le 6 juillet 2021.[10]

Le 26 juin, au cours d’un point de presse à Goma (Nord Kivu), le Président de la République, Félix Tshisekedi, a reconnu la responsabilité des quelques officiers de l’armée, de certaines communautés, des certains pays voisins et des quelques sociétés minières dans les violences  sanglantes qui secouent l’Est de la RD Congo. Pour cela, il a décidé de radicaliser l’administration militaire dans les deux provinces du Nord Kivu et de l’Ituri, secouées par des cycles des violences meurtrières. Selon lui, l’objectif est de restaurer totalement la paix, la stabilité  et la sécurité dans ces deux entités: «A un certain moment, il fallait se poser la question de savoir pourquoi la violence continue, malgré les moyens qu’on met, malgré les décisions qu’on prend. Il y a  parfois des responsabilités dans notre armée malheureusement, il y a des responsabilités dans nos communautés, il y a des responsabilités aussi par rapport aux pays voisins, des incursions, il y a des responsabilités parfois des certaines sociétés qui travaillent dans les secteurs miniers. L’état de siège était donc devenu une nécessité». Et d’ajouter: «Tout cela nécessitait un contrôle rigoureux et un suivi très efficace, ce qui n’a pas été fait ou n’a pas donné des bons résultats jusqu’ici. Peut-être maintenant en essayant la radicalisation ou la militarisation de l’administration, nous aurons des bons résultats et je crois que cette décision produira ses effets».[11]

Le 28 juin, le Sénat a adopté le projet de loi autorisant la prorogation de l’état de siège dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu. À l’issue du vote, sur 91 sénateurs présents, tous ont voté oui. Par ce vote, le Sénat autorise en première lecture la prorogation de l’état de siège dans les provinces précitées pour une durée de 15 jours à dater du 5 juillet 2021. Ce projet de loi adopté sera transmis à l’Assemblée nationale pour la seconde lecture en vue de sa promulgation par le Chef de l’État.[12]

Le 1er juillet, l’Assemblée nationale a adopté en seconde lecture, la prorogation de l’état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri. Sur les 340 députés qui ont pris part au vote, tous ont voté oui. De ce fait, l’état de siège sera une fois de plus prorogé de 15 jours.[13]

Le 5 juillet, le Président de la République Félix Tshisekedi a promulgué la loi qui prolonge de 15 jours l’état de siège en vigueur depuis le 6 mai dernier dans les deux provinces du Nord Kivu et de l’Ituri. Il a aussi signé une ordonnance portant création, organisation et fonctionnement d’un Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (PDDRC-S). Le PDDRC-S résulte de la fusion du programme national de Désarmement, Démobilisation et Réinsertion (DDR) et du programme de Stabilisation et Reconstruction des zones sortant des conflits armés (STAREC). Il est un service public placé sous la haute autorité du président de la République, de qui il reçoit des orientations et à qui il doit rendre compte de son exécution.[14]

3. LA PERSISTANCE DES VIOLENCES MALGRÉ L’ÉTAT DE SIÈGE

a. Au Nord Kivu

Le 29 juin, 10 civils, tous habitants de la ville de Beni en province du Nord-Kivu, ont été enlevés par des rebelles ADF dans les quartiers Rwangoma et Paida, près du Parc National des Virunga. Ces 10 civils, dont 8 de la cellule Kithahomba et 2 de la cellule Mapendo, ont été enlevés aux heures matinales pendant qu’ils se rendaient dans leurs champs pour se ravitailler en vivres. «Nos membres des familles ont été pris en otage près de la rivière Mamoma, les uns à Nyaleke et les autres à Mayangose. Mon mari est parmi les otages», a indiqué Masika Tsongo, la femme de l’un des otages. La semaine antérieure, 9 autres personnes ont été enlevées dans la même commune vers Kalau et ses environs.[15]

Le 30 juin, pendant la nuit, au moins dix civils, dont quatre femmes, ont été tués dans une nouvelle attaque des combattants des Forces Démocratiques Alliées (ADF), au quartier Rwangoma, dans la ville de Beni. Selon les témoins, l’attaque a débuté à 23 heures (heure locale) et a duré plusieurs heures. Plusieurs maisons  et des boutiques ont été incendiées. Ce qui surprend c’est qu’ils ciblaient les domiciles et appelaient à la porte citant soit le nom d’un enfant ou soit encore ceux des responsables du domicile ciblé, ce qui laisse entendre qu’ils étaient accompagnés par des collaborateurs originaires du coin. Les assaillants auraient utilisé comme pisteurs des civils kidnappés la veille dans les champs périphériques de Rwangoma.[16]

Le 5 juillet, au moins trois civils ont été tués dans une embuscade tendue par des combattants des Forces Démocratiques Alliées (ADF) au village de Ratsangwele, à 4 kilomètres de Loselose, dans le secteur de Ruwenzori (territoire de Beni) au Nord-Kivu. Le fait a eu lieu à 10 heures (heure locale). Les victimes avaient quitté la localité voisine de Nzenga sur une moto, pour se rendre au champ.[17]

Le 6 juillet, le porte-parole des opérations militaires Sokola 1, le lieutenant Antony Mwalushayi, a annoncé que l’armée a arrêté 3 autres collaborateurs des ADF, à Kasindi, dans le territoire de Beni. Il s’agit de 2 femmes et d’ un homme: Madame Kanyere Lukando Asiya, pharmacienne et âgée de 40 ans, Madame Kanyere Sikuli Mariamu Charmante, de 22 ans et Mr Issa Yusufu Mbitse, tenancier d’une boutique à la frontière de Kasindi et âgé de 27 ans. Les trois personnes arrêtées sont de nationalité congolaise. «Elles apportaient parfois un appui logistique, mais aussi des transactions financières à travers leurs téléphones. Nous avons les numéros des transactions. Nous avons aussi des informations sur les modes de collaboration», a déclaré Lieutenant Anthony Mwalushayi.[18]

b. En Ituri

Le 1er juillet, le porte-parole de l’armée en Ituri, le lieutenant Jules Ngongo, a annoncé que, lors d’affrontements qui ont duré 72 heures, l’armée a neutralisé 13 miliciens, dont 9 Maï-Maï du groupe Kyandenga et 4 combattants des ADF, à Ndimo et Otomabere, dans la chefferie Walese-Vonkutu en territoire d’Irumu. L’armée a aussi récupéré 4 armes AK-47.[19]

Le 1er juillet, neuf personnes, dont 5 hommes et 4 femmes, ont été sauvagement tuées par une foule en colère dans le quartier Mambila Kipe Yayo de Komanda, centre commercial situé à 75 km au Sud de Bunia, dans le territoire d’Irumu. C’était lors d’une manifestation populaire pour protester contre l’insécurité causée par des rebelles ADF dans cette entité territoriale. Les victimes, toutes membres de la communauté ethnique des Banyabwisha provenant du Nord-Kivu, étaient soupçonnées de collaboration avec les ADF. D’autres civils qui étaient recherchés par les manifestants pour subir le même sort, ont été sauvés de justesse, grâce à l’intervention des casques bleus bangladais qui les ont conduits aux forces de l’ordre.[20]

Le 4 juillet, le président de la société civile de la chefferie de Bahema Nord, en territoire de Djugu, Charité Banza, a affirmé que, depuis le 2 juillet, plus de treize personnes ont été tuées et plusieurs maisons détruites, lors de plusieurs incursions des miliciens de la Coopérative pour le développement du Congo (CODECO) dans de trois villages du territoire de Djugu.[21]

Le 6 juillet, dans un communiqué de presse, le porte-parole des FARDC en Ituri, le lieutenant Jules Ngongo, a affirmé que, depuis la semaine passée, le commandant du secteur opérationnel en Ituri, le général Rigobert Kasongo Maloba a installé son QG à Komanda, pour diriger les opérations. Des hélicoptères de combat ont été mis en contribution, afin de pilonner les bastions ADF. Il a précisé que, «grâce aux bombardements des hélicoptères de combats de l’armée, de 10h à 15h le lundi 5 juillet, les FARDC ont détruit 5 bastions (Masangalo, Mugulumugulu, Belu 2, Mont Aina et Zunguluka) des ADF/MTM situés à l’Est de la RN4, axe Komanda-Beni au Sud du territoire d’Irumu … La zone de Komanda, trois antennes, pont Loya, Idou, toutes ces localités sont occupées par nos forces armées et nous allons consolider nos positions».
Le président de la société civile de Komanda, Daniel Herabo, a confirmé la présence des autorités du secteur opérationnel à Komanda. Il a également confirmeé le renfort militaire arrivé dans la zone, mais il n’a pas parlé du bombardement des positions des combattants ADF par l’aviation de l’armée: «Nous avons vu le renfort de notre armée arriver. Depuis deux jours, les forces sont en pleine opération, mais dire qu’on a déjà pilonné les bastions ADF, je dirai non. Les ADF occupent toujours Antenne, Idou, Zunguluka dans la forêt, même Ndalia au bord de la RN4».[22]

[1] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 12.06.’21
[2] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 14.06.’21
[3] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 14.06.’21; Radio Okapi, 15.06.’21
[4] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 15.06.’21
[5] Cf Radio Okapi,16.06.’21
[6] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 17.06.’21
[7] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 29.06.’21
[8] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 29.06.’21
[9] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 02.07.’21; Clément Muamba – Actualité.cd, 02.07.’21
[10] Cf Actualité.cd, 26.06.’21
[11] Cf Radio Okapi, 27.06.’21
[12] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 28.06.’21
[13] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 01.07.’21
[14] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 05.07.’21
[15] Cf Bantou Kapanza Son – 7sur7.cd, 30.06.’21
[16] Cf Yassin Kombi – Actualité.cd, 01.07.’21; Azarias Mokonzi – Politico.cd, 01.07.’21
[17] Cf Yassin Kombi  – Actualité.cd, 05.07.’21
[18] Cf Isaac Kisatiro – 7sur7.cd, 06.07,’21; Actualité.cd, 06.07.’21
[19] Cf Bantou Kapanza Son – 7sur7.cd, 01.07.’21
[20] Cf Radio Okapi, 02.07.’21
[21] Cf Radio Okapi, 04.07.’21
[22] Cf Séraphin Banangana – 7sur7.cd, 06.07,’21; Patrick Maki – Actualité.cd, 06.07.’21