SOMMAIRE
ÉDITORIAL: QUEL SORT POUR LES MANIFESTATIONS DU COMITÉ LAÏC DE COORDINATION?
- LA DECLARATION DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO
- LA TROISIÈME MARCHE DU COMITÉ LAÏC DE COORDINATION
- L’annonce
- Les adhésions
- Les critiques
- À la veille de la manifestation
- Le jour de la manifestation
- Bilans et évaluations
- Procédures judiciaires
ÉDITORIAL: QUEL SORT POUR LES MANIFESTATIONS DU COMITÉ LAÏC DE COORDINATION?
1. LA DECLARATION DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO
Le 17 février, à l’issue d’une Assemblée Plénière Extraordinaire organisée à Kinshasa du 15 au 17 février, les Évêques de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) ont publié une déclaration dans laquelle ils ont déploré
«1. La répression sanglante des marches pacifiques (le 31 décembre 2017 et le 21 janvier 2018);
- La campagne de dénigrement et de diffamation de l’Eglise catholique et sa hiérarchie, notamment du cardinal Laurent Monsengwo, archevêque de Kinshasa;
- L’extension inquiétante des zones d’insécurité;
4° L’Application sélective et biaisée des dispositions de l’Accord de la Saint-Sylvestre 2016;
5° La polémique autour de la «machine à voter.
En particulier, les Évêques se sont posé la question suivante: pourquoi tant de morts, de blessés, d’arrestations, d’enlèvements, d’attaques des paroisses et des communautés ecclésiastiques, d’humiliations, de tortures, d’intimidations, de profanations des églises et d’interdictions de prier? Quels crimes ont-ils commis ces chrétiens et citoyens congolais qui, pacifiquement, réclamaient l’application intégrale de l’Accord du 31 décembre 2016?».
Parmi les recommandations,
«a. La CENCO réaffirme l’urgence d’aller aux élections en 2018 et demande avec insistance l’application intégrale et effective des dispositions en souffrance de l’Accord de la Saint-Sylvestre, notamment: le parachèvement des mesures de décrispation du climat politique, la redynamisation de la CENI, les dispositions relatives au Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC).
- Elle demande aux autorités compétentes de:
– Annuler les édits interdisant les manifestations pacifiques, engager des poursuites judiciaires à l’encontre de ceux qui ont commis des actes délictueux à l’occasion des marches organisées par le Comité Laïc de Coordination (CLC) et prendre des dispositions appropriées pour encadrer les marches pacifiques, comme cela se fait sous d’autres cieux.
– Arrêter les poursuites et les menaces à l’endroit des organisateurs des marches pacifiques qui n’ont fait qu’exercer leurs droits reconnus par la Constitution.
– Rendre crédible et effective l’autorité de l’Etat pour sauvegarder l’intégrité du territoire national, protéger les frontières et assurer la sécurité de la population ainsi que de ses biens.
- La CENCO se dit «perplexe» par le fait que l’introduction de la machine à voter dans le système électoral congolais ne fasse pas l’unanimité. Pour les évêques, ce manque de unanimité prédit les contestations de résultats de prochaines élections. Par conséquent, la CENCO invite la CENI à lever l’équivoque et les suspicions autour de la «machine à voter» en acceptant sa certification par des experts nationaux et internationaux.
- Au Peuple congolais, la CENCO recommande de demeurer débout et vigilant, de prendre son destin en main notamment par la prière et par des initiatives de nature à barrer pacifiquement la route à toute tentative de confiscation ou de prise de pouvoir par des voies non démocratiques et anticonstitutionnelles.
- À la Communauté internationale, la CENCO demande de continuer à accompagner la République Démocratique du Congo dans le processus électoral et à placer le bien du Peuple congolais au-dessus de ses intérêts. Enfin, les Évêques ont rendu hommage aux morts et aux blessés et ont exprimé leur proximité et compassion aux familles éprouvées par la perte des leurs durant les marches du 31 décembre 2017 et du 21 janvier 2018».[1]
2. LA TROISIÈME MARCHE DU COMITÉ LAÏC DE COORDINATION
a. L’annonce
Le 9 février, sur demande du Comité Laïc de Coordination (CLC), une messe a été célébrée à la Cathédrale Notre-Dame du Congo, à Kinshasa, pour honorer la mémoire des victimes de la marche du 21 janvier, organisée par les chrétiens catholiques.
Dans son homélie, l’abbé François Luyeye, curé de la paroisse Notre Dame de la sagesse de l’Université de Kinshasa, a déclaré que «la marche des chrétiens ne s’arrêtera pas. Nous avons le devoir sacré de continuer le bon combat pour l’émergence d’un Congo nouveau, où l’homme qu’il faut sera à la place qu’il faut. Les initiatives du Comité laïc de coordination sont à applaudir, et nous en attendons d’autres». Plusieurs diplomates, opposants et activistes ont pris part à cette célébration présidée par l’archevêque de Kinshasa, Laurent Monsengwo.[2]
Le 10 février, dans un communiqué, le Comité Laïc de Coordination (CLC) a annoncé une nouvelle marche le 25 février. Cette marche traduit, pour le CLC, une manière de « dire non à la dictature », premier obstacle à l’organisation des élections libres, transparentes et apaisées.
«Lors des marches pacifiques du 31 décembre 2017 et du 21 janvier 2018, plus de 3.000.000 de Congolais ont marché pacifiquement pour réclamer l’application intégrale de l’Accord de la Saint Sylvestre. Comme seule réponse, le pouvoir a choisi une répression sanglante, affichant ainsi la persistance de son arrogance, de son mépris, de son insouciance. Bref, il a démontré son refus catégorique de prendre en considération les revendications de toute une nation.
Notre peuple ne croit plus en la volonté politique des dirigeants actuels d’assurer une alternance pacifique du pouvoir.
En effet, les nombreuses fenêtres d’opportunité leur offertes tant par la communauté nationale qu’internationale ont été volontairement et systématiquement rejetées, réaffirmant ainsi leur volonté de se maintenir au pouvoir sans respect de toute procédure démocratique.
Ce peuple a donc décidé de se mettre résolument debout, pour barrer la route à la présente dictature, premier obstacle à l’organisation des élections libres, transparentes et apaisées. Nous voulons des élections!
Oui nous voulons des élections libres, démocratiques, transparentes et inclusives. Nous ne voulons pas des élections truquées et manipulées d’avance, qui ne garantissent pas la paix, ni avant, ni après.
Pour la 3ème fois, le Comité Laïc de Coordination invite le Peuple Congolais à poursuivre la marche jusqu’à la victoire finale. Nous irons jusqu’au bout de ce régime irrespectueux de la Constitution et de l’Accord de la Saint-Sylvestre. À travers ces manifestations pacifiques, le peuple congolais ne demande que l’application de l’Accord de la Saint-Sylvestre, un Accord largement soutenu aussi par l’ensemble de la Communauté internationale.
Ce 25 février 2018, où que nous soyons, au Congo ou à l’étranger, quelles que soient nos appartenances religieuses, associatives, politiques ou professionnelles;
LEVONS-NOUS ET MARCHONS pour dire NON à la dictature; DRESSONS NOS FRONTS ET MARCHONS pour dire NON à toutes les atrocités dont notre peuple est victime; DEBOUT CONGOLAIS ET MARCHONS! SOYONS PRETS à affronter le pire, pour arracher le meilleur, à savoir le respect de notre dignité d’homme et de femme».[3]
b. Les adhésions
Le 12 février, le porte-parole de l’UDPS, Augustin Kabuya, a annoncé que le congrès du parti, prévu du 26 au 27 février prochain, a été reporté au mois de mars prochain à cause de la marche des chrétiens catholiques prévue le 25 février. «Il est question de mobiliser la base pour la marche programmée le 25 février par les laïcs. On a reporté le congrès pour le mois de mars», a-t-il dit. C’est pour «soutenir la marche programmée le 25 février par le comité laïc de coordination», indique un communiqué rendu public par le département de communication de ce parti de l’opposition. Selon le même communiqué, c’est dans le soucis de faire un front commun pour augmenter la pression sur le pouvoir de Kinshasa que l’Udps invite ses combattants à se mobiliser: «Il est prié à tous les combattants et combattantes de répondre massivement à cette marche».[4]
Le 15 février, à l’occasion du 36è anniversaire de l’UDPS, le secrétaire général du parti, Jean-Marc Kabund, a insisté sur l’idée d’une « courte transition sans Joseph Kabila » pour l’organisation des élections crédibles et apaisées, en poursuivant: «c’est pourquoi nous invitons tous les combattants de l’UDPS à répondre massivement à la marche du 25 février 2018 lancée par le CLC … Nous collaborons ensemble et c’est sur un même pieds d’égalité que nous allons vaincre». Pour rappel, les USA et le Royaume-Uni sont opposés à une transition sans Kabila. Les deux puissances occidentales insistent sur la tenue des élections en décembre 2018 au plus tard.[5]
Le 19 février, le Président de la jeunesse de l’UDPS, David Mukeba, a annoncé son total soutien à la marche des laïcs catholiques ce 25 février sur l’ensemble du territoire national: «Cette croisade ne prendra fin que le jour où le peuple Congolais entendra le son du départ de ce régime sanguinaire. L’appel du CLC est tombé dans de très bonnes oreilles. Nous sommes en train d’affûter nos armes pour non seulement répondre à cet appel, mais pour prendre une part active à cette action de libération de notre pays».[6]
Le 19 février, au cours d’une conférence de presse, l’Abbé Donatien Nshole a démenti l’existence d’un partenariat entre les partis de l’opposition, dont l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), et l’église catholique. Selon le secrétaire général de la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO), l’église n’est pas dans la logique de l’opposition.
«Il n’y a pas de duo entre l’église catholique et l’opposition. Je le souligne avec force. L’église défend l’application intégrale de l’accord de la Saint-Sylvestre», a-t-il déclaré. «L’UDPS est dans la logique d’une transition sans Kabila, tandis que le CLC est dans celle de l’application de l’Accord» de la Saint-Sylvestre 2016, soit une transition avec Kabila, a-t-il souligné. Et de préciser que «l’Eglise catholique ne soutient pas l’opposition, mais réclame l’application de l’Accord» signé sous son égide il y a plus d’un an. Quant à la participation des partis politiques et de certains leaders de l’opposition aux différentes marches des chrétiens, initiées par le Comité Laïc de Coordination (CLC) de l’église catholique, l’Abbé Donatien Nshole a rappelé qu’ils participent non comme des politiciens mais plutôt comme des hommes de bonne volonté qui soutiennent la démarche. «A lire les instructions données par le CLC, ils ont insisté pour que les partis politiques ne viennent pas en politiciens. Ceux qui devraient venir devraient s’afficher en chrétiens catholiques ou comme tout homme de bonne volonté qui soutient la marche», a-t-il ajouté.
Le secrétaire général de la CENCO, Donatien N’shole a été amené à faire cette mise au point, pour réaffirmer la neutralité de l’Eglise, après les déclarations du secrétaire général de l’UDPS, sur le succès dans la mobilisation des marches des Laïcs. La moitié de manifestants sont de l’UDPS, avait affirmé Jean Marc Kabund. Pour rappel, selon lui, l’Eglise et l’Udps, en partenariat, contribuent à 50 pourcents chacun, l’un avec ses fidèles, l’autre avec ses militants.[7]
Le 22 février, dans un communiqué, le Groupe des 7 (G7) a appelé ses combattants à répondre « massivement » à la marche pacifique qu’organise le Comité laïc de coordination (CLC), dimanche 25 février prochain, en vue d’exiger l’application intégrale de l’Accord de Saint Sylvestre 2016.
Dans un autre communiqué, l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) a invité tous ses membres ainsi que tous les Congolais épris de justice et de paix, à «prendre part à la marche pacifique organisée par le CLC ce dimanche 25 février 2018». L’UDPS compte accentuer la pression sur le pouvoir de Kinshasa par le canal de l’appel de ce collectif des laïcs catholiques.
La Dynamique de l’Opposition aussi a «invité la population congolaise à être nombreuse dans les églises, dans les rues, avenues et boulevards», dimanche 25 février, dans le cadre de l’appel du Comité laïc de coordination (CLC) pour «dire non à la dictature». Pour Martin Fayulu, coordonnateur de cette structure, «l’instauration d’une transition sans le président Kabila reste l’unique chemin pouvant permettre la préparation des élections crédibles».[8]
c. Les critiques
Le 17 février, à l’issue d’une réunion extraordinaire sur l’évolution de la situation politique, les « Jeunes leaders » du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD), en tant que chrétiens, ont pris l’étonnante décision de «participer à toutes les messes qui seront organisées par le Comité Laïc de Coordination (CLC) dans toutes les paroisses de Kinshasa, afin de prier pour la Nation et mettre en échec tous les plans machiavéliques des ennemis de la RDC et de son vaillant peuple. Et si nous allons constater qu’il y a des gens qui veulent créer des troubles, nous allons empêcher que les gens créent ces troubles». Ces « Jeunes leaders » fustigent le comportement « irresponsable et antipatriotique » des leaders de l’opposition « en mal de positionnement » qui, selon eux, instrumentalisent l’Eglise catholique pour assouvir leurs ambitions politiques au détriment des chrétiens catholiques. «Il ne s’agit pas d’une marche des catholiques, mais de l’opposition radicalisée. En témoignent les déclarations de Jean-Marc Kabund [secrétaire générale de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), pour qui les manifestants sont à 50 % des fidèles catholiques, à 50 % des militants de l’UDPS», a expliqué Papy Pungu Lwamba, président des Jeunes Leaders. «Nous connaissons leurs méthodes: ils vont sortir des paroisses armés de cocktails Molotov. Pour rétablir l’ordre, nous userons de tous les moyens à notre disposition. Il faut bien comprendre qu’il s’agit d’un complot et que nous défendons notre patrie», a déclaré sans ambages Papy Pungu Lwamba. «Ce n’est pas une décision stratégique de la Ligue des Jeunes du PPRD. C’est une initiative des Jeunes Leaders et qui relève du domaine de la foi», a assuré son président Patrick Nkanga Bekonda, qui est également conseiller politique de Joseph Kabila.[9]
Le 17 février, dans une lettre adressée au gouverneur de la ville de Kinshasa, « l’Alliance des Kabilistes musulmans (Akam/PPRD) » informe qu’elle « organise une marche pacifique le 25 février 2018, en vue de soutenir la tenue des élections le 23 décembre 2018 ». En accusant l’Église catholique de chercher à « déstabiliser Joseph Kabila« , un des signataires de la lettre, Mondo Moussa, a affirmé que cinq marches partiront de 5 mosquées pour aller « dans cinq paroisses catholiques », afin d’inviter les chrétiens à « se préparer à gagner les élections et non à créer des troubles dans le pays« . Officiellement, ce mouvement se présentant comme musulman et proche du PPRD n’est reconnu ni par le parti présidentiel, ni par la communauté musulmane de la RD Congo, minoritaire avec environ 10% de la population. Les membres de Akam «n’ont rien à voir avec la communauté islamique. On ne les reconnait donc pas», a déclaré Cheick Ali Mwinyi M’Kuu, représentant légal de la communauté musulmane. «Ils ne sont ni affiliés, ni connus du parti présidentiel», a pour sa part affirmé Me Tunda Ya Kasende, secrétaire général adjoint du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD).[10]
Le 23 février, le coordonnateur de la Nouvelle Génération pour l’Émergence du Congo (NOGEC), Constant Mutamba, a appelé les jeunes congolais à «se dissocier de toute manifestation tendant à troubler l’ordre public, à retarder le processus électoral et à manipuler la jeunesse pour des intérêts personnels». Le coordonnateur de la NOGEC a ajouté: «en ce qui concerne l’organisation des élections, on a déjà posé tous les cadres, aussi bien légal que politique, à savoir la loi électorale et le calendrier électoral. Pendant la session de mars il va y avoir le vote de la loi sur la répartition des sièges… Donc nous pensons que les différentes manifestations organisées par les laïcs catholiques visent à retarder les élections». Constant Mutamba qui dit craindre d’éventuels troubles ou affrontements qui risquent d’occasionner des morts comme ce fut le cas le 31 décembre 2017 et 21 janvier 2018, invite les jeunes à la vigilance et à ne pas céder à la manipulation ce 25 février 2018.[11]
Le 23 février, l’ancien Ministre des Affaires Intérieures, Emmanuel Ramazani Shadari, a affirmé à son successeur, Henri Mova, qu’il devra faire face à d’énormes défis dont les actions du Comité laïc de coordination (CLC) et de l’église catholique qu’il qualifie de mouvements anarchistes à label chrétien: «Il s’agit notamment de l’activisme des cellules de nouveaux mouvements anarchistes à label chrétien érigé en groupe de pression pour le respect de l’application de l’accord du 31 décembre 2016 : CLC, église catholique. Je vous recommande de demeurer vigilant vis-à-vis- des menaces d’apparition d’une guerre de religion sur fonds de l’activisme anarchiste de certains groupes qui se réclament de certaines idéologies prétendument chrétiennes. Sous le couvert de piété et d’angélisme se terrent des procédés anarchistes».
En réaction, le secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), l’abbé Donatien Nshole, s’est dit étonné des propos d’Emmanuel Ramazani Shadari. Il a rappelé que le CLC et l’Eglise catholiques ne font que plaider pour le respect de l’accord de la Saint Sylvestre afin d’aller aux élections dans la paix: «Je ne comprends pas cette prise de position, à moins qu’il ne soit pas bien informé des objectifs et des revendications du CLC et de ce que demande l’Eglise catholique. Je crois que ce sont ceux qui ne veulent pas appliquer l’accord qui ne sont responsables. Parce que l’objectif de l’accord c’est de sortir pacifiquement de la crise. Le CLC comme la CENCO ne demandent pas autre chose que d’appliquer cet accord du 31 décembre 2016. Alors allez-y comprendre qu’on considère comme dangereux ceux qui demandent simplement qu’on applique l’accord». Pour le secrétaire général de la CENCO, que l’Eglise soit traitée de mouvement anarchiste par ceux-là même qui sont responsables de la crise actuelle est une véritable inversion des valeurs. «Comment le mouvement est anarchique? Le droit de manifester est constitutionnel. Mais il faut voir le fonds du problème au lieu de passer à côté. Nous voulons tous des élections. Mais nous voulons que ce soit des élections apaisées et qui mettraient fin à la crise. C’est ça être dangereux? Alors il y a maintenant un inversement des valeurs dans ce pays».[12]
Le 24 février, à l’issue de la 53ème session de son Comité exécutif national tenue à Kinshasa du 19 au 23 février, l’Eglise du Christ au Congo (ECC) a rendu publique une déclaration finale dans laquelle le président national de cette communauté chrétienne protestante, le Révérend Docteur André Bokundoa, a confié: «Nous protestons contre les marches convoquées par le Comité Laïc de Coordination, de l’Eglise Catholique». Il le dit plus clairement encore en ces termes: «Nous protestons, contre les manifestations publiques organisées le jour du Seigneur, le dimanche. Comme protestant, je suis contre ce que la bible ne m’autorise pas de faire et que les hommes m’invitent à faire».[13]
d. À la veille de la manifestation
Le 24 février, le gouverneur de la ville de Kinshasa, André Kimbuta, a refusé de prendre acte de la marche projetée par le Comité laïc de coordination (CLC) le 25 février. Dans un communiqué, le gouverneur a fait remarquer qu’il a convié les organisateurs de cette marche à une séance de travail pour » examiner les modalités pratiques », conformément à l’article 7 du décret-loi No 196 du 29 janvier 1999 portant réglementation des manifestations et des réunions publiques en RDC.
«En n’ayant pas donné suite à mon invitation, vous avez privé les services compétents en charge du maintien de l’ordre public des informations nécessaires pour une évaluation et un encadrement conséquent de votre manifestation. Faute de ces éléments importants, dont notamment l’itinéraire à suivre, la ville ne saurait prendre acte de votre manifestation parce que ne pouvant en garantir un encadrement efficient», argumente M. Kimbuta.
D’autre part, dans un communiqué, l’Association Congolaise pour l’Accès à la Justice (ACAJ), a accusé le gouverneur de Kinshasa d’avoir refusé de recevoir deux avocats, mandatés par le CLC, pour le représenter à la séance de travail relative à la marche de ce 25 février, exigeant la présence physique de ses membres. Selon le communiqué, André Kimbuta aurait même refusé de recevoir et analyser le document des itinéraires et points de ralliement élaboré à son intention par le CLC. «Certainement, l’invitation du Gouverneur avait, en réalité, pour but de faire arrêter les membres du CLC», a conclu l’ACAJ. En effet, lors d’une conférence de presse jeudi dernier, le ministre de la justice, Alexis Thambwe Mwamba avait affirmé que les autorités sont toujours à la recherche des membres du CLC “en cavale”.
Par ailleurs, le commissaire Provincial de la police, le général Sylvano Kasongo, a promis d’empêcher ceux qui tenteront de troubler l’ordre public. «Le gouverneur nous a écrit qu’il n’a pas pris acte de la marche de demain. Il nous a instruit de prendre toutes les dispositions pour sécuriser la population et empêcher quiconque qui tentera de troubler l’ordre public», a affirmé le général Sylvano Kasongo qui, par ailleurs, a recommandé aux policiers de ne pas faire usage des balles réelles: «J’ai dit aux policiers de ne pas tirer sur la population qui est une population civile et qui n’est pas armée. Nous avons d’autres méthodes de maintenir l’ordre public. On a le matériel non létal. On n’a pas droit de tirer sur la population avec des balles réelles. Nous serons fermes demain, nous serons stricts. Mais nous serons courtois».[14]
Le 24 février, vers 17h00, un groupe des « jeunes leaders » du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD) ont envahi l’enclos de la paroisse Notre Dame du Congo, dans la commune de Gombe. Habillés en majorité en T- short blancs et coiffés des bérets rouges sur la tête, ces jeunes ont été déployés sur l’avenue du 24 novembre par des bus TRANSCO.
Certains d’entre eux ont affirmé avoir «l’intention de passer nuit à la paroisse, pour exprimer leur opposition à l’appel du CLC à la marche populaire de ce dimanche». Conduits par Papy Mpungu, président du mouvement Jeunes Leaders du PPRD, ces jeunes reprochent à l’Eglise Catholique de «avoir fait des paroisses des endroits des revendications politiques, en laissant accès facile aux opposants, pour qu’ils puissent participer aux différentes messes et autres initiatives». La messe de 18h00 a été annulée. Quatre jeeps de la police étaient stationnées à quelques mètres de la paroisse. Finalement, vers 20h00, la police a prié les jeunes de quitter les lieux. Dans une vidéo largement partagé sur des réseaux sociaux, Papy Mpungu demande aux jeunes leaders de se rendre par groupe à des messes et d’interpeller les prêtres qui vont participer aux marches, afin de les laisser entre les mains des policiers.[15]
e. Le jour de la manifestation
Le 25 février, à Kinshasa, dans plusieurs paroisses, la Police nationale congolaise a étouffé la marche organisée par le Comité Laïc de Coordination (CLC).
À la cathédrale Notre Dame, l’église était à moitié pleine. La plupart des fideles n’ont pas pris part au culte dominical. Après la messe, le prêtre a prié pour la purification de la grotte qui, selon les fideles, a été profanée par les jeunes du parti présidentiel (PPRD) samedi soir. Pendant que les fideles s’apprêtaient à sortir de la cathédrale pour marcher, la police a tiré sur des dizaines de jeunes qui s’étaient déjà massés le long du boulevard de la Libération (Ex 24 novembre), attendant la fin de la messe.
À la paroisse Saint-Benoit de Lemba, une personne âgée d’une trentaine d’années et membre d’un mouvement citoyen dénommé collectif 2016, Rossy Mukendi, a été tué par balle au moment où les manifestants sortaient de la paroisse pour entamer la marche après l’office religieux. La mort a été constatée à l’hôpital Saint-Joseph de Limete où il avait été transporté d’urgence.
À la paroisse Saint Pie X, dans la commune de Ngiri-Ngiri, où était présent le président de l’UNC Vital Kamerhe, les manifestants ont été dispersés après avoir entamé la marche. Deux personnes ont été légèrement blessées.
Deux autres personnes ont été atteintes par balles à l’église Saint François-Xavier de Masina.
A la paroisse Saint-François de Sales à Kintambo, connue pour la mort de la jeune aspirante Deshade Kapangala lors de la précédente mobilisation, les manifestants sont sortis entamant la marche mais, après avoir parcouru une centaine des mètres, ils ont été dispersés par la police.
À la paroisse Saint-Joseph de Matonge, après avoir aperçu à l’intérieur de l’église la présence de jeunes gens dont l’origine était douteuse et redoutant une infiltration, les fidèles ont décidé de ne pas aller en dehors de l’enceinte de la paroisse et d’organiser leur marche à l’intérieur même de la paroisse.
À la paroisse Saint Michel, dans la commune de Bandalungwa, à peine sortis du culte, les fidèles Catholiques ont été dispersés par les forces de l’ordre.[16]
À Kisangani, la police a réprimé la marche organisée par le CLC. Les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes et de tirs à balles réelles. Les manifestants de plusieurs paroisses voulaient converger vers la cathédrale Notre Dame du très Saint rosaire, lieu du départ de leur marche vers le gouvernorat de province, mais ils ont été repoussés par la police. Aux environs de 9h30, alors que les chrétiens sortaient de la messe célébrée à la cathédrale, les forces de l’ordre ont utilisé des gaz lacrymogènes et des armes automatiques pour étouffer le début de la marche à partir de cette même cathédrale. Les organisateurs de la marche ont enregistré quelques blessés et des arrestations. Parmi des personnes arrêtées figurent trois prêtres qui accompagnent les fidèles de leurs paroisses.
À Lubumbashi, des chrétiens qui ont tenté de marcher après la première messe à la cathédrale Saint Pierre et Paul ont été dispersés par la police. Le député national Fabien Mutomb, membre de l’UDPS, était à la tête de cette marche. L’on a aussi enregistré des échauffourées entre des jeunes et des éléments de la police du côté de la paroisse Sainte Bernadette dans la commune Katuba. Les policiers ont tiré des coups de feu et interpelé un jeune homme.
À Mbandaka, la marche des chrétiens catholiques a connu une importante affluence. Les manifestants qui venaient de la paroisse Saint-Paul et ceux de la paroisse Martyrs de l’Ouganda ont fait jonction au niveau des avenues Révolutions et Ipeco. C’est à ce moment-là que les forces de l’ordre ont tiré à balles réelles pour les disperser. Un jeune homme qui rentrait chez lui après la marche a été abattu à bout portant par balle par un policier qui a pris fuite après son forfait. Les jeunes gens du quartier en colère ont saccagé le centre de formation de la police de Mbandaka III et incendié les habitations d’un major de la police et du policier meurtrier fuyard.
À Goma, la marche annoncée par le CLC n’a pas eu lieu, à cause du déploiement des agents de la police et de la police militaire, depuis tôt le matin, dans des points stratégiques de la ville, notamment autour de la cathédrale de Virunga. Deux militants, un de la Lutte pour le changement (LUCHA) et un autre de l’UDPS, ont été interpelés à la sortie de la première messe et acheminés au poste de la police à Munzenze.
À Beni, c’était aux environs de 9 heures locales que les militants de la LUCHA ont commencé leur marche, avec comme point de départ la paroisse catholique Saint Gabriel de Malepe et, via le Rondpoint Kabila, comme point de chute, l’hôtel de Ville de Beni. Sur leur itinéraire, ces jeunes ont été soutenus par des taximen moto qui les suivaient en klaxonnant. Ils ont été dispersés par la police à l’aide des gaz lacrymogènes. Par la suite, une vingtaine de militants de la LUCHA ont été embarqués dans une voiture de la police qui est allée les abandonner à plus ou moins 15 kilomètres du centre-ville sur la nationale N°4, axe Beni-Oicha.
À Butembo, ce sont les sympathisants du mouvement citoyen Veranda Mutsanga qui sont descendus dans la rue, mais ils ont été dispersés par la police.[17]
f. Bilans et évaluations
Le 25 février, dans un communiqué, le Comité Laïc de Coordination (CLC) a affirmé que «le peuple congolais a encore répondu massivement à son nouvel appel pour une troisième manifestation. Plus de trois millions de Congolais ont marché à Kinshasa et dans plusieurs villes de province, pour dire non à la dictature, obstacle majeur à l’application stricte et intégrale de l’Accord de la Saint-Sylvestre, et exiger que le Président Joseph Kabila dise publiquement qu’l ne sera pas candidat à sa propre succession … Nous l’avons déjà dit: il n’y aura pas de répit pour le pouvoir en place tant que nous n’aurons pas retrouvé notre dignité et notre liberté».[18]
Le 26 février, dans un communiqué publié à Kinshasa, la responsable de la mission de l’ONU en RDC, Leïla Zerrougui, a fourni un bilan provisoire d’au moins 2 morts (1 à Kinshasa et l’autre à Mbandaka), 47 blessés et plus de 100 arrestations sur l’ensemble du territoire national.
La Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies en RDC, Leïla Zerrougui, a appelé les autorités congolaises à «mener des enquêtes crédibles sur ces incidents et à prendre les sanctions appropriées». La cheffe de la MONUSCO a par ailleurs invité toutes les parties prenantes à faire preuve de retenue et a souligné l’importance de respecter les droits du peuple congolais à la liberté d’expression et au droit de manifester pacifiquement. Mme Zerrougui a également demandé à tous les acteurs politiques congolais de jouer un rôle constructif dans la mise en œuvre de l’accord du 31 décembre 2016 qui, selon elle, «demeure l’unique voie viable devant mener à la tenue d’élections».[19]
Le 26 février, dans une interview, Marie-Ange Mushobekwa, ministre congolaise des Droits humains, a confirmé le bilan de deux morts, l’un à Kinshasa et l’autre à Mbandaka. La ministre a dit «regretter» que ces personnes soient mortes et a indiqué que des enquêtes sont en cours, à l’issue desquelles les responsabilités seront établies et des sanctions décrétées.[20]
Le 27 février, dans un communiqué, la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO) a donné un bilan de «149 marches pacifiques organisées sur l’ensemble du territoire national, dont 66 ont été étouffées dans les enceintes des paroisses, 67 dispersées par balles et gaz lacrymogène dans les rues et 16 régulièrement encadrées par les forces de l’ordre». Toujours selon le communiqué, «le bilan de la répression fait état de 2 morts par balles, 32 blessés, dont 13 par balles, et 76 interpellations». Les services de monitoring de la CENCO ont signalé «la présence, dans beaucoup de paroisses, de jeunes étranges qui insinuaient aux manifestants d’aller au-delà des périmètres prédéfinis et qui les incitaient aux dérapages». La CENCO félicite tous les compatriotes qui «se sont mobilisés pacifiquement, refusant toute provocation à la violence».
La CENCO dénonce également «l’instrumentalisation, par certains partis politiques, des jeunes gens, pour torpiller de l’intérieur la marche des chrétiens, en y introduisant la violence. L’occupation de la cathédrale Notre Dame du Congo le samedi 24 février 2018 par des jeunes délinquants en est une triste illustration». Enfin, la CENCO dénonce aussi les interventions des forces de l’ordre dans plusieurs paroisses: «Nous condamnons l’usage de la force exercée à l’endroit des compatriotes, dont certains sont morts et d’autres torturés ou blessés, alors qu’ils n’ont posé aucun acte contraire à la loi fondamentale qui régit le pays».[21]
Au sujet de la marche organisée par le Comité Laïc de coordination (CLC), le porte-parole de la Majorité présidentielle, André Alain Atundu, a estimé que les chrétiens catholiques sont manipulés par des opposants en manque de positionnement: «Les chrétiens catholiques sont dépités par cette manipulation d’un groupe, une manipulation confusionniste. Au début, les chrétiens étaient convaincus qu’il s’agissait d’une initiative des chrétiens catholiques, mais après les déclarations sans ambages du secrétaire général de l’UDPS, cette connivence a mis en mal beaucoup de chrétiens. Et ils en sont arrivés à se demander pour qui travaille ce groupe, pourquoi ces manœuvres qui auront finalement comme résultat de retarder les élections. Pour la Majorité présidentielle, la conclusion est simple: les politiciens radicalisés du Rassemblement se cachent derrière les chrétiens, instrumentalisent ces chrétiens pour créer une atmosphère de chaos, de désordre politique, pour remettre à l’honneur leur plan initial de prise de pouvoir par des moyens non démocratiques, de préférence par la violence et la rue».
Mais pour Christophe Lutundula, vice-président du G7 et membre du rassemblement de l’opposition, c’est un faux procès que la majorité fait à l’UDPS et à ses alliés du Rassemblement, une tentative de distraire l’opinion publique. «Ceux qui tuent, qui répriment, qui pillent la République pour conserver le pouvoir en violation des lois, ce sont ceux-là qui donnent des leçons et qui prétendent que les démocrates et de paisibles citoyens veulent faire un coup d’Etat. Ces manifestations démontrent que le pouvoir ne survit que grâce à la répression, à l’usage des armes et des caisses de l’Etat». Pour le rassemblement de l’opposition, les marches des chrétiens sont bel et bien organisées par les comités laïcs de coordination, répondant à l’appel de la conférence épiscopale. Et si les fidèles, toutes tendances confondues, y ont répondu massivement, c’est qu’ils souhaitent l’ouverture de l’espace politique avant les élections.[22]
Le 27 février, dans son allocution à la 37ème session du Conseil des Droits de l’homme de l’ONU, la ministre des Droits humains, Marie-Ange Mushobekwa, a souligné les difficultés rencontrées pour encadrer les marches organisées par le CLC: «Comment faire lorsque les organisateurs de ces manifestations choisissent les 167 paroisses répertoriées comme point de départ dans une ville de plus 10.000.000 d’habitants? Comment faire lorsque les organisateurs de cette marche n’indiquent aucun itinéraire aux autorités urbaines? Comment faire lorsqu’on voit certains jeunes torses nus avec des bandeaux rouges sur leurs têtes tenant des banderoles avec des messages politiques violents dans les églises et usant des sifflets en plein culte? Comment faire lorsque certains fidèles catholiques, ne partageant pas les mêmes opinions et convictions politiques que ceux qui sont proches d’une frange de l’opposition, ne peuvent plus aller librement à la messe, craignant d’être lynchés?». Selon Marie-Ange Mushobekwa, «les lieux de culte ne peuvent jamais être profanés, ni par certains éléments indisciplinés des forces de l’ordre, ni par certains manifestants proches de l’opposition, ni par d’autres proches d’un parti de la majorité avec des bérets rouges sur la tête scandant des menaces dans la cour d’une paroisse. Ces actes sont tous condamnables».[23]
Le 2 mars, lors d’une conférence de presse à propos, entre autre, des marche initiée par le CLC, le porte-parole de la Majorité Présidentielle (MP), Alain Atundu, a dénoncé ce qu’il considère comme «l’instrumentalisation de l’Eglise catholique par certains politiciens» ayant come objectif réel celui de prendre le pouvoir par des moyens non-démocratiques. Le porte-parole de la Majorité Présidentielle (MP), Alain Atundu, a déclaré que, «il paraît étrange et curieux qu’une marche politique utilise les instruments de culte comme si le dogme, la liberté de foi était menacée par les institutions de la République. Cette alliance de l’Eglise en tant que cheval et du politique en tant que chevalier, ne sert pas la cause de la foi ni la démocratie dans notre pays. En réalité, l’Eglise catholique est instrumentalisée comme cheval de Troie des ambitions de certain politiciens tapis à l’intérieur des églises. Des chapelets, des bibles et des crucifix brandis pendant ces marches, cachent, derrière, des ambitions politiques contraires à la constitution et à l’accord du 31 décembre. Le président Kabila ne partira que par la voie des urnes».[24]
g. Procédures judiciaires
Le 26 février, la police nationale congolaise a annoncé l’arrestation du policier qui aurait abattu à Lemba (Kinshasa) l’activiste Rossy Mukendi Tshimanga lors la marche organisée par le Comité laïc de coordination (CLC) dimanche 25 février à Kinshasa. D’après un communiqué de la police rendu public dans la soirée, il s’agit du brigadier Tokis Kumbo, matricule 1198511210674, de l’Escadron mobile d’intervention Mont-Amba. Selon le communiqué de presse de la PNC, le policer incriminé «a tiré des balles en caoutchouc en direction de M. Mukendi, pour défendre son commandant d’unité, Lokeso Koso Carine, agressée par la foule». Une version démentie par plusieurs témoins qui affirment que Rossy Mukendi était allé fermer le portail de l’église Saint-Benoît pour empêcher le jet de gaz lacrymogènes dans le lieu saint.
Pour l’Association Congolaise pour l’Accès à la Justice (ACAJ), le décès de Rossy Mukenedi Tshimanda est un meurtre prémédité par les forces de sécurité. Le président de cette ONG, Me Georges Kapiamba, a en effet déclaré que la victime faisait l’objet des menaces de mort depuis quelques temps, à la suite de son activisme contre le pouvoir en place. Marié et père de deux enfants, Rossy Mukendi Tshimanga laisse une veuve et deux enfants. Il dirigeait le mouvement citoyen «Collectif 2016».[25]
Le 27 février, le tribunal de garnison de Mbandaka a condamné à perpétuité et au renvoi définitif de la police l’agent de l’ordre reconnu auteur du meurtre d’un jeune manifestant lors de la marche organisée dimanche 25 février par le Comité laïc de coordination (CLC) à Mbandaka (Equateur).
Le policier de la force navale Obed Agbe Kingbele a été reconnu coupable du meurtre d’Eric Boloko, jeune manifestant décédé à la suite de ses blessures par balles lors de la marche des fidèles catholiques dimanche à Mbandaka. D’après des témoins, Eric Boloko, élève en 6ème année humanités à l’Institut Moteyi, a été tué à bout portant, avant que son meurtrier ne prenne la fuite. Au terme d’un procès en flagrance organisé un jour après ce meurtre, l’agent Agbe a été condamné à la prison à perpétuité et au paiement de 150 000 USD de dommages et intérêts à la famille de la victime. Plusieurs activistes des droits de l’homme présents à Mbandaka ont déploré le caractère expéditif de ce procès, estimant qu’il visait simplement à protéger les vrais responsables de ce meurtre.[26]
[1] Cf http://cenco.org/declaration-de-la-conference-episcopale-nationale-du-congo-a-lissue-de-lassemblee-pleniere-extraordinaire-du-15-au-17-fevrier-2018/
[2] Cf AFP – Africatime, 09.02.’18
[3] Cf Le Phare – Kinshasa, 12.02.’18 http://www.lephareonline.net/25-fevrier-3me-marche-laics-catholiques/
[4] Cf Stanys Bujakera Tshiamala – Actualité.cd, 12.02.’18; Grevisse Tekilazaya – Cas-info.ca, 12.02.’18; Alphonse Muderhwa – 7sur7.cd, 12.02.’18
[5] Cf Joseph Kazadi Mamba – 7sur7.cd, 15.02.’18
[6] Cf Jeff Kaleb Hobiang – 7sur7.cd, 20.02.’18
[7] Cf Auguy Mudiayi – Actualité. cd, 19.02.’18; Daniel Ngoie – 7sur7.cd, 20.02.’18
[8] Cf Roberto Tshahe – Cas-info.ca, 22.02.’18
[9] Cf mediacongo.net, 19.02.’18; Livier Liffran – Jeune Afrique, 22.02.’18
[10] Cf AFP – Mediacongo.net, 22.02.’18 http://www.mediacongo.net/article-actualite-35633.html
[11] Cf Jeff Kaleb Hobiang – 7sur7.cd, 24.02.’18
[12] Cf Radio Okapi, 24.02.’18
[13] Cf Daniel Ngoie – 7sur7.cd, 24.02.’18
[14] Cf Radio Okapi, 24.02.’18; Auguy Maudiayi – Actualité.cd, 24.02.’18
[15] Cfr Radio Okapi, 25.02.’18
[16] Cf Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 25.02.’18
[17] Cf Radio Okapi, 25.02.’18
[18] Cf 7sur7.cd, 26.02.’18 https://7sur7.cd/new/2018/02/bilan-provisoire-clc-de-la-marche-du-25-fevrier-3-morts-plusieurs-blesses-et-arrestations/
[19] Cf Radio Okapi, 26.02.’18
[20] Cf RFI, 26.02.’18
[21] Cf http://cenco.org/communique-du-secretariat-general-de-la-cenco-sur-le-bilan-de-la-manifestation-du-25-fevrier-2018/
[22] Cf RFI, 26.02.’18
[23] Cf Will Cleas Nlemvo – Actualité.cd, 28.02.’18
[24] Cf Radio Okapi, 02.03.’18; Will Cleas Nlemvo – Actualité.cd, 02.03.’18
[25] Cf Radio Okapi, 27.02.’18
[26] Cf Radio Okapi, 27.02.’18