Congo Actualité n. 293

SOMMAIRE:

ÉDITORIAL: LES DÉCISIONS D’AUJOURD’HUI, FONDAMENTALES POUR LES ÉLECTIONS DE DEMAIN

  1. L’OUVERTURE DU DIALOGUE
  2. TROIS DÉCLARATIONS
  3. LES PRINCIPALES QUESTIONS SOULEVÉES
  4. L’OPPOSITION SUSPENDE SA PARTICIPATION

ÉDITORIAL: LES DÉCISIONS D’AUJOURD’HUI, FONDAMENTALES POUR LES ÉLECTIONS DE DEMAIN

 

 

1. L’OUVERTURE DU DIALOGUE

Le 1er septembre, le facilitateur du dialogue, Edem Kodjo, a ouvert les travaux de ce forum qui se déroulera à la cité de l’Union africaine à Kinshasa. Côté opposition, le grand absent du dialogue c’est le Rassemblement des Forces acquises au changement, une plateforme politique qui, rangée derrière Etienne Tshisekedi, comprend plusieurs partis et coalitions politiques (l’UDPS, le G7, la Dynamique de l’Opposition, l’Alternance pour la République) qui soupçonnent le gouvernement congolais, mais aussi la Céni et la majorité, de tout faire pour maintenir le président Kabila au-delà de son deuxième et dernier mandat, qui se termine en décembre 2016. Certains opposants ont cependant choisi de rejoindre le dialogue. Parmi ces participants: Vital Kamerhe de l’UNC, Jean-Lucien Bussa du CDER, et Samy Badibanga (opposition parlementaire).[1]

Désigné co-modérateur du dialogue, Vital Kamerhe, bien que non inscrit sur la liste des orateurs du jour, a improvisé une intervention fort remarquée, en marge de l’ouverture du dialogue. A l’instar de ses prédécesseurs à la tribune, il a déploré l’absence des leaders de l’UDPS (Tshisekedi), du G7 (Mwando, Lumbi, Kyungu, Endundo, Kamitatu, Banza, Lutundula), de la Dynamique (Matungulu, Fayulu, Sessanga). Voici quelques extraits de son intervention:

«Nous sommes ici pour parler du Congo, pas de nos ambitions. Nous sommes ici pour appliquer la résolution 2277 du Conseil de sécurité des Nations Unies. Elle fait mention du respect de notre Constitution et souligne, de la manière la plus claire, que nous devons discuter ici et maintenant de l’organisation des élections pour l’alternance démocratique, sans casse, de façon apaisée dans notre pays. Elle a prévu aussi des préalables pour un climat apaisé.

S’agissant de ces préalables, quelques prisonniers de guerre et d’opinion ont recouvré la liberté ; geste appréciable. C’est un pas dans la bonne direction mais 5 (cinq) chaines restent fermées au Katanga. Nous encourageons le pouvoir à aller jusqu’au bout dans la libération des prisonniers politiques et de guerre. En ouvrant les médias, c’est tout le monde qui va gagner. Ça va élever le pouvoir et non l’humilier.

La Résolution 2277 parle d’un dialogue inclusif. Mais il y a des absents dans la salle. C’est pourquoi, nous allons lancer un appel fraternel à nos frères de l’UDPS, de G7 et des autres alliés de l’UDPS de venir nous rejoindre. D’ailleurs, les gens de la Majorité l’ont démontré à l’issue des travaux du comité préparatoire. Je n’ai pas noté qu’ils ont demandé un troisième mandat pour le président Kabila. Le document est là. En tout cas, cela ne viendra pas de nous et nous ne l’accepterons pas.

Donc, ceux qui sont dehors, qu’ils viennent ici avec leur sagesse et intelligence, pour qu’ensemble nous puissions donner à notre peuple un calendrier électoral consensuel. D’aucuns diront que la Constitution a déjà prévu la date de l’élection présidentielle. C’est vrai. Mais alors, pourquoi la Résolution 2277 prévoit le dialogue? C’est parce que tout le monde est conscient que nous sommes en train d’entrer dans la crise, sinon en pleine crise. C’est pourquoi nous devons convenir ensemble, pour que nous disions au peuple congolais, à l’issue de ces travaux et de la manière la plus claire, la date de l’élection présidentielle et la date de la passation de pouvoir.

Nous sommes entre nous et certainement nous devons nous entendre. C’est pourquoi, je demande qu’on puisse suspendre ces travaux un ou de deux jours; le temps pour harmoniser les listes et je m’engage personnellement, avec les amis de l’Opposition, à solliciter l’appui de l’Eglise catholique, pour aller rencontrer les amis de l’UDPS et alliés et à ceux du G7, pour qu’ils nous disent pourquoi ils ne sont pas là et pour les inviter à venir avec nous. Il n’y a pas de piège qu’on ne saura pas démonter. Ensemble, nous pouvons démontrer à notre peuple que nous sommes capables d’oublier nos ambitions et de privilégier les intérêts supérieurs de la Nation».[2]

La démarche de Vital Kamerhe surprend d’autant que il a brillé par ses absences aux rencontres de l’Opposition visant l’unité d’action pour obtenir un Dialogue inclusif, notamment le Conclave de Genval en juin dernier, les échanges avec le Panel et la Communauté internationale à Paris, le meeting du 31 juillet à Kinshasa, etc. Attendu plus d’une fois chez Tshisekedi à Bruxelles, il trouvait toujours un prétexte pour faire faux bond. On le voit mal se présenter sur Petunias à Limete et convaincre Tshisekedi ainsi que ces partenaires du Rassemblement de revoir leur position sans que ne soit respecter au préalable leurs conditions de participation au Dialogue.

Toutefois, avec cette «ouverture» de Kamerhe, le président Joseph Kabila et son ancien allié devraient au final avoir une «justification», au cas où l’aile Tshisekediste persisterait dans ses retranchements, en tenant unilatéralement le Dialogue sur sa formule actuelle. Dans ce cas, la rue serait l’ultime option pour le Rassemblement.[3]

Peter Kazadi, conseiller juridique d’Etienne Tshisekedi, a rejeté la proposition de médiation que Vital Kamerhe a faite pour tenter de convaincre le Rassemblement à rejoindre le Dialogue: «Nous n’avons pas besoin de voir Kamerhe faire des bons offices. Kamerhe n’a fait que retourner dans sa famille naturelle. Kamerhe est venu à la rescousse de son chef Joseph Kabila en fin mandat et veut lui donner un autre mandat. Nous allons leur barrer la route».[4]

Selon Olivier Kamitatu, vice-président du G7, Vital Kamerhe doit chercher la solution chez Joseph Kabila et non au G7 ou auprès de l’UDPS. Les préalables ont été fixés et rappelés à maintes et reprises par le Rassemblement. Des mesures de libération ont été prises par le pouvoir, mais elles ne sont que de la poudre aux yeux jetée par le régime au visage de la Communauté Internationale pour s’exonérer de sa responsabilité dans la fermeture de l’espace politique. Quatre préalables demeurent non négociables:

«– Le retour de Moise Katumbi en homme libre en RDC pour participer au dialogue

– La libération sans condition de Jean-Claude Muyambo, Eugène Diomi, Huit Mulongo et de tous les détenus politiques

– La fin des dédoublements des partis politiques (MSR, ARC, pdc, Aco, etc.)

– La réouverture des médias fermés notamment ceux de Moise Katumbi».[5]

La Dynamique de l’Opposition aussi dit de ne pas être concernée par cette offre de médiation.

«Depuis plusieurs mois, Monsieur Vital Kamerhe négocie son retour au Gouvernement et a entrepris un travail de sape de l’Opposition en général et de la Dynamique de l’Opposition en particulier. La Dynamique de l’Opposition rappelle son auto-exclusion et lui dénie la qualité de prendre un engagement quelconque en son nom et le met en garde», dit le communiqué de la Dynamique de l’opposition signé par Freddy Matungulu.[6]

Le 2 septembre, l’Opposition Républicaine (OR) de Léon Kengo Wa Dondo a suspendu sa participation au dialogue pointant du doigt l’absence du caractère inclusif de ce forum. Pour sa part, Steve Mbikayi ne se dit pas surpris et pense qu’il n’est pas correct de considérer l’OR comme faisant partie de l’opposition: «Il se pose un problème avec l’OR de Kengo. Elle n’était pas sur la liste de l’opposition au comité préparatoire. Il était question de clarifier son statut, étant donné qu’elle est dans le gouvernement et partage le programme du gouvernement. En tant que telle, elle devrait être dans un groupe comme allié du pouvoir ou du gouvernement».[7]

Le 2 septembre, les travaux du dialogue ont été suspendus. Cette pause permet aux délégués de différentes composantes qui prennent part à ce forum d’harmoniser leurs listes. Les travaux du dialogue reprendront le 5 septembre.[8]

Le 5 septembre, après deux jours de suspension, on a repris les travaux du dialogue politique. Les délégués ont adopté l’ordre du jour, conforme à celui établi lors du comité préparatoire. Les délégués ont continué à harmoniser leurs listes, en revoyant à la hausse (25 participants par composante) leurs quotas respectifs. Selon la facilitation, les effectifs passent de 200 à 285, soit 93 délégués pour la Majorité présidentielle, 93 pour l’Opposition, 64 pour la Société civile, 5 pour l’Opposition Républicaine et 30 pour les personnalités.[9]

2. TROIS DÉCLARATIONS

Le 5 septembre, dans une lettre adressée au chef de l’Etat, l’Association Africaine de Défense des Droits de l’homme (ASADHO) estime que le dialogue politique organisé en RDC risque de prolonger son mandat de président de la République.

Pour l’ASADHO, la feuille de route du dialogue adoptée par les participants au comité préparatoire prévoit à l’ordre du jour la conclusion d’un accord politique.

«Nous présumons que cet accord va non seulement renvoyer l’élection présidentielle au-delà du délai fixé par la constitution, mais aussi prolonger le mandat qui vous a été donné, non pas par la classe politique, mais par le peuple», écrit l’ASADHO dans sa lettre signée par son président national, Me Jean-Claude Katende.

Selon cette lettre, «un tel accord serait une atteinte grave à la souveraineté du peuple congolais».

L’ASADHO dit croire que l’ordre du jour du dialogue tel que défini par les membres du comité préparatoire «ne peut pas résoudre la crise congolaise». Cet ordre du jour, à en croire cette association, est conçu pour trouver des solutions aux problèmes des individus, pas à ceux du pays.

«Connaissant notre classe politique, nous ne doutons pas qu’il y aura plus de confusion dans le pays après le dialogue national qu’avant. Il apparait clairement qu’à l’issue du dialogue national, le pays et la démocratie s’en trouveront plus affaiblis qu’avant», écrit l’ASADHO.

L’association de Jean-Claude reste convaincue que «la volonté de la majorité présidentielle est de garder le pouvoir coûte que coûte». Face à cette situation, l’ASADHO appelle «au sens élevé de responsabilité» du chef de l’Etat, pour «épargner le pays d’une crise de légalité et de légitimité» qui affecterait toutes les institutions du pays.

Selon cette structure, le peuple veut la démocratie, l’alternance et le transfert pacifique du pouvoir.

L’ASADHO invite Joseph Kabila à «ramener toutes les conclusions ou résolutions du dialogue à ce que la constitution prévoit et à ce que le peuple veut», afin de sauver le pays, la démocratie et son propre honneur.[10]

Le 6 septembre, dans un communiqué de presse, le G7 appelle le Peuple congolais à «rejeter les conclusions anticonstitutionnelles qui sortiraient du forum de la Cité de l’Unité africaine regroupant le PPRD et ses alliés».

Par ailleurs, le G7 invite les Congolais à «participer activement aux actions programmées par le Rassemblement pour le respect de la Constitution et l’organisation d’élections véritablement démocratiques, en vue de l’alternance politique».

Enfin, le G7 demande avec insistance à la communauté internationale de «suspendre son accompagnement à ce dialogue facilité par Monsieur Edem Kodjo, en réalité sous le pilotage de la Majorité présidentielle, car il n’est pas inclusif au sens de la Résolution 2277 du Conseil de sécurité des Nations Unies et n’a d’autres finalités que de différer de plusieurs années l’élection du nouveau Président de la République et de dépecer l’Etat congolais».[11]

Le 6 septembre, dans un communiqué, la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (Cenco) a posé deux conditions à sa participation au dialogue: le caractère inclusif du dialogue et le respect absolu de la Constitution, en précisant bien qu’elle se réserve le droit de se retirer, si ce cadre est violé. Selon la Cenco, seulement «un dialogue inclusif, c’est-à-dire un dialogue incluant aussi les grandes familles politiques de l’opposition, donnerait plus de chance au pays d’aboutir à la résolution de la crise actuelle de manière consensuelle et durable».

Pour la Cenco, «le dialogue devrait se dérouler dans le respect absolu du cadre constitutionnel. Seul un dialogue qui respecte la Constitution, socle de notre jeune démocratie, en particulier, dans ses articles verrouillés ayant trait au mandat présidentiel et à l’alternance démocratique au pouvoir, est capable de ramener la paix, de renforcer la cohésion nationale et d’offrir des meilleures conditions pour la tenue des élections libres, démocratiques et transparentes».

La Cenco rappelle que «ces conditions justifient sa participation au dialogue par son délégué. La Cenco ne pourra pas maintenir sa participation à ce dialogue si le respect de ces exigences fondamentales n’était plus assuré».[12]

3. LES PRINCIPALES QUESTIONS SOULEVÉES

Le 6 septembre, le dialogue national est entré dans le vif du sujet, avec l’exposé de la Commission électorale. Au cœur du débat, le respect des délais constitutionnels pour l’organisation de l’élection présidentielle. La plénière a été présidée par le co-modérateur Vital Kamerhe, membre de l’opposition politique. À propos de la problématique de la révision du fichier électoral (listes des électeurs), le président de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI), Corneille Nangaa, a présenté trois options possibles pour la poursuite du processus électoral.

Il s’agit, en premier lieu, de la validation du fichier électoral actuel, jugé «corrompu, infecté et non adapté». Il a souligné que cette option renferme néanmoins des imperfections. Il a fait constater que le fichier 2011 contient des faiblesses intrinsèques, notamment la présence de 450.000 doublons et de 1.300.000 personnes décédées, la présence des omis, l’existence des groupements sans électeurs, le mauvais rattachement des électeurs dans le site de vote, pour ne pas parler de l’absence de 8,5 millions de nouveaux majeurs et de 4,5 millions de Congolais vivant à l’étranger.

En second lieu, il a évoqué la «révision partielle» du fichier électoral, en y incorporant des nouveaux électeurs, notamment les nouveaux majeurs et les Congolais de l’étranger. La troisième et dernière option présentée par le président de la CENI est la refonte totale du fichier électoral. Corneille Nangaa a souligné que, dans tous les cas, il n’est plus possible, aujourd’hui, d’aller aux élections dans les délais constitutionnels.

Selon la facilitation de l’Union africaine, pour ce qui est de l’enrôlement des électeurs, il existe une divergence de quelques semaines entre les Nations unies et la commission électorale. Pour la refonte du fichier, l’ONU prévoit dix mois et demi à partir de la fin juillet 2016, quand la commission électorale parle de 16 mois et un jour à partir de février 2016. Un nouveau fichier électoral serait donc au mieux disponible entre la mi-juin et fin juillet 2017.[13]

Le 7 septembre, les participants au dialogue politique national ont débattu sur la problématique du fichier électoral.

L’option choisie par la Commission électorale, la plus longue, mais la plus fiable, c’est de refondre le fichier complètement. Ce qui pourrait entraîner un retard de près d’un an dans l’organisation de la présidentielle. Plusieurs parties prenantes au Dialogue s’accordent sur la refonte totale du fichier électoral. Cependant la question budgétaire reste la plus grande inconnue étant donné qu’il faudra trouver une somme de 310.000.000 de dollars pour terminer la révision du fichier.

Pour la majorité présidentielle aussi, la solution est celle privilégiée par la commission électorale, une refonte totale du fichier électoral. En effet, le rapporteur de la délégation de la majorité au dialogue national, She Okitundu, a affirmé: «Il ne sert à rien de s’entêter à respecter le délai constitutionnel, si on veut ne pas exclure 17 millions de Congolais (les nouveaux majeurs et les Congolais résidents à l’étranger)du droit de vote. Il faut nécessairement prendre en considération la proposition faite par la Céni».

Le ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, co-modérateur du dialogue pour le compte de la Majorité présidentielle, estime qu’il est «totalement impossible» d’organiser les élections, notamment la présidentielle, dans le délai constitutionnel, c’est-à-dire au cours de cette année 2016. Pour sa part, le co-modérateur de l’opposition, Vital Kamerhe, a indiqué que sa composante s’en tient toujours au respect de la Constitution. Il estime donc nécessaire de trouver un consensus sur un accord politique pour sortir de l’impasse électorale.

Si l’option d’une refonte totale du fichier électoral est confirmée par les délégués au dialogue national, la présidentielle ne pourra se tenir qu’après juillet 2017. C’est par volonté de ne pas entériner le glissement du calendrier électoral que les principales forces de l’opposition, le Rassemblement et le MLC, ont refusé de participer à ce dialogue, persuadées qu’il servirait essentiellement à permettre à Joseph Kabila de se maintenir au pouvoir après la fin de son deuxième et dernier mandat présidentiel.[14]

Le 8 septembre, les délégués au dialogue politique national ont auditionné le rapport de l’Organisation internationale de Francophonie (OIF) sur le processus électoral en RDC

Dans son rapport, l’expert électoral de l’OIF, le général Sangare, a confirmé les mêmes données fournies par la CENI à savoir: 1,6 millions des morts repris dans le fichier de 2011, omissions de 8,5 millions de nouveaux majeurs et 4,5 millions des Congolais de l’étranger ainsi que la présence de 450.000 doublons. Le général Sangare a présenté la refonte totale du fichier électoral comme seule alternative pour organiser les élections dans un climat apaisé. Il a entre autres donné des délais pour l’organisation de chacune de ces élections: 105-135 jours pour la présidentielle, 182 jours pour ce qui est des législatives et 278 jours s’il faut commencer par les élections locales.[15]

Le 8 septembre, le président de la CENI, Corneille Nangaa, a présenté aux délégués du dialogue trois propositions concernant l’ordre de succession des élections (11 scrutins, dont 4 directs et 7 indirects). La première séquence consiste à organiser les législatives provinciales et locales, suivies des scrutins indirects, puis de la présidentielle et des législatives nationales. C’est l’idée préférée de la majorité présidentielle.

Pour la deuxième séquence, la CENI organiserait la présidentielle et les législatives nationales, les législatives provinciales et locales, suivies des scrutins indirects. Il s’agit de la solution privilégiée par l’opposition et la communauté internationale.

La troisième séquence consiste à organiser tous les scrutins directs le même jour, suivis des scrutins indirects. Les délégués au dialogue devront se prononcer sur l’un des trois scenarii.

La CENI a affirmé qu’elle ne pourra proposer un calendrier qu’en fonction du choix qui sera opéré ainsi que des contraintes budgétaires, sans oublier le contexte opérationnel.

Par ailleurs, au cours de la même séance, le ministre de la Justice a annoncé pour le vendredi 9 septembre la libération de 110 prisonniers qui avaient bénéficié de la loi d’amnistie de 2014.[16]

Le 9 septembre, le débat en plénière a donné l’occasion aux participants au dialogue de donner leurs suggestions en rapport avec les séquences des élections, le fichier électoral, la sécurisation des élections et le financement du processus électoral.

Pour la délégation de l’opposition, en tout cas, c’est clair. Il faut la présidentielle d’abord et au plus vite pour éviter toute possibilité à Joseph Kabila de se maintenir au pouvoir. «La présidentielle d’abord, c’est même une ligne rouge», a dit Jean-Lucien Bussa, son porte-parole. «Il n’y a pas débat, l’enjeu majeur aujourd’hui, c’est l’alternance démocratique. Et l’alternance démocratique est symbolisée par l’élection du président. A Sun City, il a été clair que le contrat se résumait à deux choses essentielles : dans ce pays, aucune personne ne peut prendre le pouvoir par la force. Mais dans ce pays aussi, personne ne peut conserver le pouvoir en violation de la Constitution»,a-t-il poursuivi.

La majorité, en revanche, considère que les élections locales constituent un arriéré démocratique dans le pays et qu’il faut donc les privilégier. Le porte-parole de la délégation de la majorité, She Okitundu, a estimé que «c’est un arriéré électoral qui date depuis très longtemps et par conséquent, toutes les élections se valent. Il n’y a pas lieu de privilégier l’élection présidentielle par rapport aux élections locales. Parce que nous sommes dans un cas de décentralisation et pour que la décentralisation soit effective, il faut que l’autorité locale soit proche des populations».[17]

À la fin de la plénière, trois groupes thématiques ont été proposés pour examiner en commissions pendant deux jours, samedi et lundi, toutes les préoccupations soulevées par les différentes composantes.

La première commission va se pencher sur tout ce qui est relatif aux élections, entre autres sur la question du fichier électoral et de l’ordre d’organisation des 11 scrutins à venir.

Les deuxième et troisième commissions devront faire des propositions relatives à la sécurisation du processus électoral et aux mesures de confiance entre les parties.

Pour aider les délégués à formuler des propositions, la facilitation de l’Union africaine a distribué un questionnaire. Des propositions formulées «sur la base des exposés faits par la Céni, l’ONU, l’OIF et les débats qui ont suivi». Mais la délégation de l’opposition à proposé une autre voie, pour rester dans le cadre constitutionnel. Selon plusieurs participants, des négociations parallèles devraient avoir lieu: entre majorité et opposition mais aussi, via le groupe de soutien international, avec le Rassemblement et le MLC qui boycottent toujours ces discussions.

Les participants ne vont reprendre les travaux en plénière que mardi 13 septembre.[18]

Des participants ont posé la question de savoir comment le pays sera dirigé lorsque les mandats des élus actuels arriveront à terme, en novembre prochain. La feuille de route du dialogue prévoit la signature d’un « accord politique » à la fin du forum. A mi-parcours du dialogue, la majorité plaide pour une transition gérée de manière consensuelle avec l’opposition et la société civile. La question cruciale est de savoir quel rôle compte jouer le président sortant Joseph Kabila dans cette éventuelle transition. Ses partisans souhaitent le voir rester en poste jusqu’à l’élection de son successeur. Mais les partis d’opposition représentés au forum souhaitent voir le président Kabila céder son fauteuil au président du Sénat, Léon Kengo. Il n’est pas exclu que, dans les tout prochains jours, les deux parties puissent s’entendre sur l’une ou l’autre des formules.[19]

Certaines personnalités ont demandé au facilitateur la suspension des travaux, afin d’inclure dans le dialogue l’autre frange de l’opposition ayant boycotté ces travaux, afin d’avoir un forum inclusif.

Face à la presse, Edem Kodjo a confirmé que des tractations sont en cours, pour permettre au Rassemblement de l’opposition de rejoindre les assises du dialogue: «Le problème que nous notons aujourd’hui c’est l’absence encore des franges entières de l’Opposition. Cela ne veut pas dire que l’Opposition n’est pas présente dans la salle. Je dis et je redis que le Dialogue est ouvert à tout le monde. Que les portes sont ouvertes. Et que les bras sont également ouverts. Pour ceux qui n’y sont pas, il y a des stratégies déployée en cours». Mais, la Majorité présidentielle s’y est opposée, estimant que l’inclusivité est bel et bien perceptible avec une large représentation au dialogue de toutes les couches de la population.[20]

Le 11 septembre, dans une interview, le député national Jean-Claude Vuemba n’y est pas allé par quatre chemins lorsqu’il s’est agi de situer les responsabilités dans la crise politique actuelle. Il a pointé d’un doigt accusateur le président Kabila qu’il considère comme le responsable de la crise. Pour lui, le chef de l’Etat doit démissionner pour mettre fin à la crise. Mais avant de démissionner il doit avouer sa faute aux congolais, a dit Jean-Claude Vuemba. Pour ce cadre du Rassemblement, «Kabila doit dire aux Congolais qu’il a échoué à assurer le bon fonctionnement des institutions et partant doit rendre le tablier». Selon lui, «il n’y a pas d’autre façon pour résoudre cette crise politique, artificiellement provoquée par la majorité présidentielle pour maintenir Kabila au pouvoir de manière inconstitutionnelle». D’après le vice-président de Alternative pour la République (AR), «la solution à la crise actuelle passe par le respect de la constitution».[21]

4. L’OPPOSITION SUSPENDE SA PARTICIPATION

Le 12 septembre, Vital Kamerhe et l’opposition ont suspendu leur participation au Dialogue. Raison évoquée: la séquence électorale telle que voulue par la majorité présidentielle: commencer par les locales pour finir par la présidentielle. Pour l’opposition, cela équivaut à donner un mandat de facto au président Kabila. Selon un proche de Vital Kamerhe, l’Opposition ne rentrera dans la salle que lorsqu’elle aura la garantie que la séquence électorale sera inversée. Selon l’opposition, la priorité doit être accordée à la présidentielle, car c’est elle qui cristallise la crise politique actuelle.[22]

Selon son communiqué, «l’Opposition politique a accepté de participer au Dialogue politique national inclusif conformément à la Résolution 2277 du Conseil de sécurité des Nations Unies, en vue de prévenir le chaos consécutif aux atteintes portées à la Constitution et au régime constitutionnel de notre pays par la Majorité au pouvoir, suite à son refus de d’organiser l’élection présidentielle dans le délai constitutionnel…

En ce qui concerne l’importante question de la séquence électorale, l’Opposition politique considère que le scrutin à la base du dérèglement constitutionnel de notre pays étant le présidentiel, c’est par ce scrutin que doit commencer la séquence Election pour rattraper le temps constitutionnel…

La Majorité, comme si déjà l’inconstitutionnalité manifeste de la non-tenue du scrutin présidentiel ne suffisait pas, veut gagner du temps par des manœuvres politiciennes, en préconisant l’organisation prioritaire des élections locales. Sans nier l’importance et la constitutionnalité desdites élections, l’Opposition politique considère néanmoins qu’il n’y a pas urgence à les organiser en premier lieu, et en période de crise, dans sa séquence électorale.

Etant donné ces positions diamétralement opposées sur une question aussi essentielle du dialogue politique national inclusif, respectueuse de la Constitution et conscience des attentes du peuple, l’Opposition a décidé, ce jour, jusqu’à nouvel ordre, de suspendre sa participation aux travaux desdites assises».[23]

Pour Vital Kamerhe, le président de l’UNC et chef de cette délégation de l’opposition, la résolution 22-77 du Conseil de Sécurité de l’Onu prévoyait une priorité donnée à la présidentielle et aux législatives, et il faut donc que la communauté internationale fasse respecter les textes qui sont les cadres de ce dialogue, à savoir la Constitution, la résolution 22-77 et la charte de l’Union africaine.[24]

Le porte-parole de la Majorité Présidentielle au Dialogue, She Okitundu, fait valoir que la question électorale relève de la souveraineté nationale. En cela, il s’oppose à la résolution 2277 du Conseil de sécurité. Pour lui cette résolution n’est qu’une recommandation et elle n’a pas un caractère obligatoire. Il met en avant le respect de la souveraineté nationale, en affirmant: «Les questions électorales relèvent de la souveraineté d’un pays. Il faut continuer à discuter pour trouver un compromis politique».[25]

À la suite de la suspension de la participation de l’opposition au dialogue, le facilitateur Edem Kodjo a annoncé que des consultations avaient commencé, pour permettre la reprise des travaux.

L’opposition avait accepté la refonte totale du fichier électoral, en insistant toutefois sur la réduction des délais ainsi que sur leur respect. S’agissant de la séquence des élections, l’Opposition avait plaidé pour commencer par la présidentielle couplée aux législatives nationales et provinciales. Pour ce qui est du budget, les délégués de l’opposition ont demandé au gouvernement de liquider les arriérés des exercices budgétaires antérieurs et en incluant l’exercice 2017.[26]

[1] Cf RFI, 01.09.’16

[2] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 02.09.’16

http://www.lepotentielonline.com/index.php?option=com_content&view=article&id=15104:dialogue-trois-jours-pour-convaincre-le-rassemblement&catid=85&Itemid=472

[3] Cf Eric Wemba – Le Phare – Kinshasa, 02.09.’16; Politico.cd, 03.09.’16

[4] Cf Actualité.cd, 01.09.’16

[5] Cf Actualité.cd, 02.09.’16

[6] Cf Actualité.cd, 02.09.’16

[7] Cf Actualité.cd, 03.09.’16

[8] Cf Radio Okapi, 02.09.’16

[9] Cf Actualité.cd, 05.09.’16 ; Bijou Kuloso – Direct.cd, 05.09.’16

[10] Cf Radio Okapi, 06.09.’16

[11] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 07.09.’16

http://www.lepotentielonline.com/index.php?option=com_content&view=article&id=15161:dialogue-de-kabila-et-kodjo-une-conspiration-qui-sera-rejetee-par-le-peuple&catid=85&Itemid=472

[12] Cf Congoforum.be, 07 09 16

http://www.congoforum.be/fr/nieuwsdetail.asp?subitem=41&newsid=205538&Actualiteit=selected

[13] Cf ACP – Kinshasa, 06.09.’16; RFI, 07.09.’16

[14] Cf RFI, 07.09.’16; Radio Okapi, 08.09.’16

[15] Cf ACP – Kinshasa, 08.09.’16

[16] Cf Radio Okapi, 09.09.16

[17] Cf RFI, 09.09.’16

[18] Cf Radio Okapi, 09.09.’16; RFI, 10.09.’16

[19] Cf BBC – Afrique, 09.09.’16

[20] Cf Radio Okapi, 09.09.’16; Politico.cd, 09.09.’16

[21] Cf 7sur7.cd, 11.09.’16

[22] Cf 7sur7.cd, 12.09.’16

[23] Cf Le Phare – Kinshasa, 13.09.’16 http://www.lephareonline.net/communique-relatif-a-suspension-de-participation-de-lopposition-politique-aux-travaux-dialogue-politique-national-inclusif/

[24] Cf RFI, 12.09.’16

[25] Cf 7sur7.cd, 12.09.’16

[26] Cf Radio Okapi, 12.09.’16; Patient Ligodi – Actualité.cd, 12,09.’16