Rwanda Actualité – Edition Octobre 2013

SOMMAIRE:

Editotial

  1. Le Parlement Européen se prononce

  2. Eléctions législatives : Paul Kagame, plus fort au Rwanda

  3. Le Président rwandais critiqué pour son rôle dans la région des Grands Lacs

  4. La jeunesse harcelée

  5. Culpabilisation collective des Hutu

  6. HRW déplore la prise de contrôle de la Liprodhor

  7. L’Ambassadeur britannique rend visite à Victoire Ingabire Umuhoza

EDITORIAL

 

ET POURTANT ON CONTINUE A LES SOUTENIR

Il est connu que le régime instauré au Rwanda par le Front Patriotique Rwandais du Président Paul Kagame après sa victoire militaire en juillet 1994 est un  régime totalitaire muselant opposition, presse, liberté d’association et d’expression. Les actes d’intimidations, les menaces et persécutions répétées faites par la police et le DMI (Directorate of Military Intellegence), en complicité avec le Haut Conseil de la presse, aux journalistes et les mesures restrictives prises en l’encontre de la presse par  le gouvernement rwandais  en violation de la loi sur la presse, sont toujours d’actualité. Les droits de l’homme sont foulés au pied avec une arrogance qui confine à la provocation.

Le génocide rwandais est devenu pour le Front Patriotique Rwandais (FPR)  un « fonds de commerce » inépuisable pour réaliser n’importe quel projet macabre. En effet le génocide est mis au service des intérêts d’une minorité au pouvoir, désireuse de s’y maintenir coûte que coûte, et il est utilisé par le régime à des fins politiciennes d’exclusion.

Une réelle opposition  à l’intérieur du pays qui revendique l’ouverture de l’espace politique est vue comme une menace à une situation que le FPR considère comme acquise, à savoir : le contrôle total de la politique et de la société rwandaise.

Le fondement du régime au pouvoir au Rwanda repose sur trois piliers considérés comme  monopo- les, à savoir:

a)  le statut  du FPR comme “autorité morale”;

b) le statut des Tutsi comme “seuls victimes” du génocide;

c)  le statut des hutu comme “criminels”.

Ces trois piliers constituent en fait la base de légitimité du FPR.

En outre, l’interprétation étendue de l’idéologie du génocide érige en infraction l’expression d’opinions dissidentes. C’est sur cette base  que Victoire Ingabire Umuhoza a été arrêtée et  condamnée.

Actuellement, incomparablement plus lourde de conséquences, une instrumentalisation qui consiste à criminaliser en bloc l’ethnie hutu menace l’avenir de la paix civile. En effet une campagne  dont l’objectif  majeur est d’amener chaque jeune hutu à se sentir, toujours et en tout lieu, coupable du génocide, en d’autres termes  à se sentir coupable des crimes commis par d’autres Hutu, bat son plein.

L’ethnisme contamine plus que jamais l’espace public rwandais sans que les dirigeants s’y opposent. En effet, la logique ethniste reste bien vivante au cœur des messages officiels au plus haut niveau. Dans ce cadre, la campagne de culpabilisation collective des Hutu a été lancée par le Président Paul Kagame lui-même le 30 juin 2013 devant des centaines de jeunes.

Pendant que le régime rwandais, en collaboration avec celui de l’Ouganda, continue de déstabiliser l’est de la RD Congo, au prix d’innombrables souffrances : pillages, vols, assassinats, déplacements de plus d’un million de personnes, misère indescriptible… l’appui international dont ils continuent  à jouir continue à bloquer toute vraie solution à la crise congolaise.

  1. LE PARLEMENT EUROPEEN SE PRONONCE SUR VICTOIRE INGABIRE UMUHOZA ET SUR LE RESPECT DES DROITS AU RWANDA[1]

Le 23 mai 2013, une courageuse résolution d’urgence (2013/2641- RSP) a été adoptée par le Parlement de l’Union européenne dans le cadre des débats portant sur les cas de violation des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit concernant la situation au Rwanda. Mais davantage encore, cette résolution du Parlement européen a mis en avant le procès dont fait l’objet l’opposante politique Victoire Ingabire Umuhoza, une femme qui transperce d’une lumière saisissante la pénombre du chemin long et tortueux de la démocratie et de l’État de droit au Rwanda. Elle a été parfois appelée la « Aung San Suu Kyi africaine ». Victoire Ingabire est une femme politique rwandaise, présidente des Forces Démocratiques Unifiées (FDU) une coalition de partis d’opposition au Rwanda. La résolution retrace son calvaire en ces années au Rwanda.

 

Après 16 ans d’absence du pays, en janvier 2010, au regard  de la situation politique, elle décide de quitter les Pays-Bas, revenir au Rwanda et se présenter aux élections présidentielles. Alors que, comme reconnaît le déclaration UE, « les activités politiques de Mme Ingabire se sont axées, entre autres, sur l’état de droit, la liberté d’association politique et l’autonomisation des femmes au Rwanda », les autorités lui créent bientôt des problèmes et son parti n’est pas enregistré ; d’autres partis d’opposition subissent le même sort.

En août 2010, les élections sont remportées, avec 93 % des suffrages, par le président sortant, Paul Kagame, chef du Front patriotique rwandais (FPR). Au Rwanda, dit encore la déclaration, « le FPR demeure le parti politique dominant au Rwanda sous le président Kagame, et contrôle la vie publique dans le contexte d’un système de parti unique où les personnes formulant des critiques à l’encontre des autorités rwandaises font l’objet de harcèlements, d’intimidations et sont mises en prison. »

Le 14 octobre 2010, Victoire Ingabire est arrêtée par les autorités rwandaises, accusée entre autres d’idéologie génocidaire et de collaboration avec les Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda, le groupe d’opposition armée qui se trouve essentiellement dans l’est de la République Démocratique du Congo (RD Congo).

« Le 30 octobre 2012, Victoire Ingabire a été condamnée à huit ans de prison, alors deux de ses chefs d’accusation étaient déjà prescrits, et qu’elle a été acquittée des quatre autres ». Elle est « jugée coupable de conspiration visant à nuire aux autorités en ayant recours au terrorisme, et coupable de minimiser le génocide de 1994, sur la base de ses relations présumées avec les FDLR ». Alors que le ministère public requiert l’emprisonnement à perpétuité, elle est condamnée en première instance à 8 ans de prison.

Le 25 mars 2013, Victoire prend la parole lors de son procès en appel et demande un réexamen des preuves. Les eurodéputés estiment que « l’accusation d’’idéologie du génocide’ et de ‘divisionnisme’ portée à l’encontre de Victoire Ingabire illustre l’intolérance du gouvernement rwandais à l’égard ’ pluralisme politique ». Ils citent un autre exemple : « Bernard Ntaganda, fondateur du parti PS-Imberakuri, a été condamné à quatre ans d’emprisonnement au titre d’accusations de mise en danger de la sécurité nationale, de « divisionnisme » et de tentatives d’organiser des manifestations sans autorisation »

« En avril 2013, – continue le document du Parlement UE – lors de son procès en appel devant la Cour suprême, alors qu’elle avait été déclarée non coupable des six chefs d’accusation portées contre elle par le ministère public, elle a été condamnée sur de nouveaux chefs d’accusation qui ne s’appuyaient pas sur des documents juridiques et qui, d’après son avocat, n’ont pas été présentés durant le procès; (…) les deux nouveaux chefs d’accusation incluaient le négationnisme/révisionnis me et la haute trahison ».

 « En mai 2013, après avoir témoigné contre Victoire Ingabire devant la Haute Cour rwandaise en 2012, quatre témoins de l’accusation et un co-accusé ont révélé à la Cour suprême que leurs témoignages avaient été falsifiés ».

Dans l’ensemble, affirment les eurodéputés « le procès, qui a débuté en 2011, est considéré par de nombreux observateurs comme fondé sur des motifs politiques; (…) le droit et le système judiciaire nationaux rwandais enfreignent les conventions internationales auxquelles le Rwanda est partie, en particulier le pacte international relatif aux droits civils et politiques, que le gouvernement rwandais a signé le 16 juillet 1997, et notamment ses dispositions sur la liberté d’expression et de pensée ».

« Depuis le 16 avril 2012, Mme Ingabire boycotte son procès pour protester contre les intimidations et les procédures illégales d’interrogation utilisées contre certains de ses co-accusés, à savoir les anciens membres du FDLR suivants: le Lieutenant-Colonel Tharcisse Nditurende, le Lieutenant-Colonel Noël Habiyaremye, le Capitaine Jean Marie Vianney Karuta et le Major Vital Uwumuremyi, ainsi que contre la décision de la Cour de raccourcir l’audition d’un témoin de la défense, Mme Kayitesi Claire, qui accuse les autorités rwandaises de fabrication de preuves. »

Pour les eurodéputés « le respect des droits de l’homme fondamentaux, y compris le pluralisme politique et la liberté d’expression et d’association, sont gravement restreints au Rwanda, ce qui rend difficile le fonctionnement des partis d’opposition et le travail des journalistes qui voudraient exprimer des opinions critiques ».

C’est ainsi que le Parlement européen exprime sa position, dont voici quelques extraits. Il

« fait part de sa vive préoccupation au sujet du procès en première instance de Victoire Ingabire, qui ne respectait pas les normes internationales, en premier lieu en ce qui concerne son droit à la présomption d’innocence, et était basé sur des preuves fabriquées et des aveux de co-accusés qui ont été placés en détention militaire au Camp Kami, où on aurait eu recours à la torture pour leur extorquer lesdits aveux.

 condamne fermement la nature politiquement motivée du procès, la poursuite d’opposants politiques et l’issue décidée à l’avance du procès; demande au système judiciaire rwandais de garantir un appel rapide et équitable à Mme Victoire Ingabire, dans le respect des normes fixées par le droit rwandais et le droit international;

– demande à l’Union européenne d’envoyer des observateurs pour le procès en appel de Victoire Ingabire;

– rappelle que les libertés de réunion, d’association et d’expression sont des composantes essentielles de toute démocratie, et estime que ces principes font l’objet de graves restrictions au Rwanda;

– condamne toute forme de répression, d’intimidation et de détention à l’égard de militants politiques, de journalistes et de défenseurs des droits de l’homme; demande instamment aux autorités rwandaises de libérer immédiatement toutes les personnes et tous les militants emprisonnés ou condamnés pour le seul exercice de leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique; à cet égard, invite instamment les autorités rwandaises à adapter le droit national afin de garantir la liberté d’expression;

– exprime sa préoccupation au vu du fait que 19 ans après que le FPR a pris le pouvoir, et deux ans après la réélection du président Kagame, le Rwanda ne dispose toujours pas de parti politique d’opposition en exercice;

– appelle les autorités rwandaises à garantir la séparation des pouvoirs administratif, législatif et judiciaire, et en particulier l’indépendance du système judiciaire, et à promouvoir la participation de partis d’opposition, dans un contexte de respect mutuel et de dialogue inclusif faisant partie d’un processus démocratique;

 – estime que la loi de 2008 sur l’idéologie du génocide utilisée pour accuser Victoire Ingabire a servi d’instrument politique pour museler les critiques du gouvernement;

 – souligne que, dans le contexte des travaux internationaux en faveur du développement au Rwanda, il convient d’accorder une priorité bien plus importante aux droits de l’homme, à l’état de droit ainsi qu’à une gouvernance transparente et responsable;

– demande à l’Union européenne, en collaboration avec d’autres donateurs internationaux, d’exercer une pression continue afin d’encourager la réforme en faveur des droits de l’homme au Rwanda.

« Le 13 septembre 2012, Victoire Ingabire – ainsi que deux autres figures politiques du Rwanda, Bernard Ntaganda et Déogratias Mushayidi, tous emprisonnés actuellement à Kigali – a été nommée pour le Prix Sakharov du Parlement européen pour la liberté de l’esprit », rappelle le document.

 

 

  1. ELECTIONS LEGISLATIVES: PAUL KAGAME, PLUS FORT QUE JAMAIS AU RWANDA

       

Les forces en camp

Lundi 16 septembre, quelque six millions de Rwandais votaient pour leurs députés, qui siégeront pendant cinq ans. Les Rwandais étaient appelés aux urnes pour départager 355 candidats répartis sur quatre listes représentants quatre partis politiques. Tout d’abord, la coalition formée par le Front patriotique rwandais (FPR), mouvement du président Paul Kagamé, et 6 partis présentait 80 candidats. Ensuite, le Parti social-démocrate (PSD), dirigé par l’actuel ministre de l’éducation, avec 64 candidats et le Parti libéral (PL), dont le leader est le ministre des sports, avec 62.

Le PS-Imberakuri participe quant à lui pour la première fois à des élections législatives alors même que le parti est privé de son chef de file, Bernard Ntaganda, en prison depuis 2010 pour atteinte à la sûreté de l’Etat et  » divisionisme « . Suite à des divisions, le parti serait représenté par des loyalistes proches du FPR. Seuls quatre candidats se présentaient à titre indépendant. Le président de l’Assemblée nationale est issu de la majorité présidentielle.

 

 

 

Les résultats

Le taux de participation a été de 97, 5 %. Selon les résultats finaux annoncés le 16 septembre par la Commission électorale nationale (NEC), la coalition dominée par le FPR obtient 76,22% des suffrages exprimés. Elle recueille 4 439 948 voix sur les 5 825 483 suffrages exprimés, a détaillé le secrétaire exécutif de la NEC, Charles Munyaneza. Loin derrière suivent le PSD et le PL, crédités respectivement de 13,03% et 9,29% des voix. Les bulletins nuls ou blancs ne représentent que 0,96 %. Un minimum de 5% des voix est exigé pour entrer à la Chambre des députés.

Une opposition qui peine à exister

Les partis ont reçu l’autorisation de s’implanter sur l’ensemble du territoire et de mener campagne il y a à peine six mois. L’opposition est implicitement exclue du jeu démocratique… Le Parti démocratique vert, qui a été autorisé le 9 août 2013 (trois jours avant la date limite de dépôt des candidatures), a préféré se retirer de la course, affirmant manquer de temps pour mener campagne. Une autre raison est peut-être qu’en 2010, le vice-président du parti, André Kwasa Rwigereka, a été retrouvé décapité… Les Forces démocratiques unifiées (FDU), présidées par Victoire Ingabiré, emprisonnée depuis son retour d’exil en 2010, sont toujours interdites. Le PDP Imanzi, malgré plusieurs tentatives, n’a pas réussi à se faire enregistrer. De plus, son président, Déo Mushayidi est lui-aussi en prison.

Il faut dire que le régime du président Paul Kagamé a prouvé son efficacité à contrôler la scène politique nationale tant le FPR perpétue une forme de monopartisme démocratique grâce à la coalition qu’il a mis en place. Pourtant, ces élections revêtaient tous les apparats de la démocratie dans le cadre d’un multipartisme… de façade.

Dès le début de la campagne électorale, des signes inquiétants de dérives autoritaires étaient manifestes. Pour une opposition ostracisée, cela se traduit par des difficultés à mener campagne, de nombreux obstacles à l’enregistrement des candidats, l’impossibilité de proférer des critiques lors des rares débats publics et surtout des menaces à l’encontre des leaders d’opposition quand ils ne sont pas jetés en prison ou leurs partis interdits… Ce résultat, même s’il est validé par la Commission électorale – seules quelques irrégularités marginales ont été observées –, ne confère donc pas un caractère démocratique à l’événement tant les partis présents sont autant de satellites du FPR. D’où nombre d’observateurs ont trop vite admis que ce scrutin était sans enjeux[2].

Des commentaires

« La population est totalement dépolitisée. Si le taux de participation est aussi fort [97,5 %], c’est que tout le monde est fiché. Ce qui incite la population à aller voter, c’est la peur. Dans cette situation, on ne peut pas parler de plébiscite du pouvoir », déplore un chercheur présent à Kigali. Il faut dire que le comportement brutal de Kagamé, qui surveille tout et tout le monde – au point que la rue évoque même « l’œil omniscient de Kagamé » – a généré des tensions au sein même du FPR.

Un officiel rwandais de passage à Paris reconnaissait avec dépit qu’« on admet que Kagamé soit un homme fort, mais on ne peut pas le respecter car il ne s’est jamais comporté comme un chef d’Etat. Il est toujours resté un chef du service de sécurité, poste qu’il occupait en Ouganda dans sa jeunesse. Il est finalement craint pour ce qu’il est réellement. » Un homme fort qui ne peut se passer de ces élections pour démontrer à tous – y compris au sein de son propre parti – sa domination sans pareille.

« Les législatives étaient l’opportunité de voir s’il y avait des fissures au sein du FPR et donc un possible changement de régime à terme, explique un analyste de la politique de l’Afrique des Grands Lacs. Ce qu’il en ressort, c’est un renforcement du régime et de Kagamé lui-même. »  L’enjeu de ces élections est avant tout de préparer l’échéance de 2017. Paul Kagamé sera alors au terme de son second mandat de président et ne pourra en briguer un autre qu’à condition de modifier la Constitution. Et pour cela, il lui faut un parlement dévoué à sa cause.

 

Limogeage

Si le 9 février M. Kagamé annonçait lors d’une réunion du Conseil exécutif du FPR ne pas souhaiter se représenter, il précisait que « c’est au peuple rwandais de décider de cette proposition [pour un troisième mandat]. Je ne peux pas non plus fuir mes responsabilités. »

« Tout le monde se pose des questions pour 2017, reconnaît un universitaire. Soit Kagamé se représente, c’est le scénario que souhaitent les jeunes technocrates car ils l’idolâtrent et c’est grâce à lui qu’ils sont actuellement dans les sphères du pouvoir. Les historiques, qui tendent à être remplacés par cette nouvelle génération, préféreraient, eux, un départ de Kagamé pour éviter un système à la Museveni [président de l’Ouganda depuis 1986] ou Mugabe [président du Zimbabwe depuis 1987]. On pourrait finalement s’acheminer vers un modèle à la chinoise. Comme pour Deng Xiaoping, l’homme fort de Kigali pourrait garder l’armée et céder le pouvoir politique à un autre petit à petit. »

Face à ce flou entretenu par Paul Kagamé lui-même, ce qui est sûr, c’est qu’il vaut mieux se poser des questions plutôt que de prendre la parole. Le 24 mai, le ministre de la justice Tharcisse Karugarama l’a compris à ses dépens. Suite à une interview accordée au Guardian, où il avait appelé à ce que le président ne se représente pas – conformément à la Constitution –, le général-major Paul Kagamé lui a fait savoir qu’il était limogé.

 

 

  1. LE PRESIDENT RWANDAIS CRITIQUĖ POUR SON ROLE DANS LA REGION

 

Performances budgétaires  et déstabilisation de la RD Congo

Le président rwandais s’appuie sur un bilan économique plutôt flatteur (8,2 % de croissance annuelle moyenne ces cinq dernières années) et l’application d’une bonne gouvernance appuyée par une lutte contre la corruption réelle lui confère la confiance des bailleurs de fonds internationaux.

Un rapport d’autant plus important pour le Rwanda que le pays tire plus de 40 % de son budget de l’aide étrangère. « L’aide internationale est conditionnée moins aux droits de l’homme qu’à la bonne gouvernance. La démocratie n’est pas une condition nécessaire à son octroi », rappelle le chercheur indépendant André Guichaoua.

 « C’est au seuil de 99,9 % que le Rwanda a bien utilisé son budget 2011-2012. Mais certains défis sont à souligner comme l’excès du budget dans le ministère de la défense« , a fait observer le patron de la coopération à l’ambassade d’Allemagne, M. Jolke Oppewal, le 22 janvier.

Mais depuis que l’ONU a publié, le 12 octobre 2012, un rapport d’un groupe d’experts indépendants prouvant que le Rwanda déstabilise son voisin, la République démocratique du Congo (RD Congo), en finançant la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23) qui dispute à l’armée congolaise le contrôle des Kivus, ces provinces de RD Congo frontalières du Rwanda et immensément riches en minerais, le président rwandais ne peut plus se poser uniquement en faire-valoir des Occidentaux qui démontre que l’aide à l’Afrique n’est pas un gâchis sans espoir et qu’un pays africain peut devenir un exemple de redressement spectaculaire (après le génocide de 1994).

 

Gel des aides

Avec ces manœuvres, Paul Kagamé est tombé quelque peu en disgrâce auprès d’Etats qui l’avaient toujours soutenu jusqu’à présent. Son pays est tombé temporairement sous le coup du gel de quelques aides de certains bailleurs – Pays-Bas, Royaume-Uni, Allemagne, Banque africaine de développement. Sa réaction ne s’est pas fait attendre et dans une interview à Jeune Afrique, le président rwandais a dénoncé ces procédés en s’insurgeant contre le fait que ces aides soient utilisées « comme un moyen de contrôle politique ».

Il était donc capital pour Kagamé de voir son pouvoir légitimé sans contestation dans les urnes pour pouvoir faire pression sur la communauté internationale au moment où le Rwanda est fort critiqué pour l’appui en hommes, armes, munitions donné au mouvement rebelle M23.

« Le Rwanda s’imagine toujours comme un Etat assiégé (…).. La communauté internationale se montre indulgente car il y a des intérêts économiques à défendre qui sont colossaux, principalement autour des minerais », a déclaré un cadre de l’ONU.

 

Bourse des matières premières

Le 23 janvier 2013, en marge du Forum de Davos, Paul Kagamé, en plein scandale sur sa présumée implication dans la déstabilisation de l’Est de la RD Congo, annonçait la création à Kigali pour le troisième trimestre 2013 d’une bourse des matières premières de l’Afrique de l’Est (EAX) au côté de Jendayi Frazer, ancienne sous-secrétaire d’Etat américaine aux Affaires africaines sous l’administration George W. Bush, fondatrice de 50 Ventures qui soutient le projet.

Le but vanté par les promoteurs est d’accroître la transparence des marchés des produits de la région des Grands Lacs et de développer des marchés à terme en Afrique orientale. Pour Bienvenue-Marie Bakumanya, journaliste congolais au Potentiel, « la création de cette bourse permet avant tout au président rwandais de contourner le verrou créé par la loi Dodd-Frank de 2010 sur le commerce des minerais de la zone de conflit en RDC. C’est une tentative de blanchiment de ressources naturelles de la RDC. »

Avec fermeté et assurance, entre pressions militaires et opportunité économique, Paul Kagamé, pour calmer les esprits, fait de l’EAX un argument diplomatique.  » Il utilise cette bourse comme un élément déterminant dans la stabilité de la région et un début de pacification possible avec la RD Congo, évoque un spécialiste de la région. Cela permettrait surtout de légaliser le trafic organisé par le Rwanda et surtout de pérenniser les taxes sur les minerais. Dans son jeu d’évitement, il doit donc montrer sa puissance, même au sein de son pays. «  A l’évidence, les enjeux dépassent de loin la seule scène politique rwandaise.

 4.     UNE JEUNESSE HARCELEE 

Harcelée pour harceler

Global Campaign for Rwandan Human Rights (GCRHR) accuse le leader du gouvernement Front patriotique rwandais (FPR) d’utiliser la peur et la déstabilisation psychologique sur les jeunes. Dans son rapport « Harcelé pour harceler au nom de la dignité » publié le 19 avril, l’ONG a déclaré que le gouvernement rwandais et les services de sécurité « forcent les jeunes à participer à des activités dans le but d’aider le gouvernement à promouvoir son image et contrôler son peuple. ».

Le GCRHR dit qu’il a découvert et catalogué « diverses méthodes utilisées par les dirigeants du FPR visant à contraindre les jeunes à prendre part à diverses actions, ce qui provoque une peur extrême des autorités et une déstabilisation psychologique. » Ce faisant, le régime serait occupé à tenter de sécuriser son pouvoir politique et « minimiser toute menace à son remplacement », indique le rapport.

Le rapport a recueilli plusieurs interviews de témoins et victimes affirmant que les services de sécurité nationale de renseignement rwandais (NISS) et le parti FPR, au pouvoir, « contraignent les jeunes à participer à des activités qui visent à modifier et façonner leur croyance sur le régime du FPR ». Leur [le NISS et le FPR] but étant de « peindre et construire une image positive du pays au niveau international et espionner sa propre population ».

Les recherches menées par le GCRHR affirment que les jeunes qui ont été engagés dans la formation obligatoire de deux mois dite « éducation civique » destinée aux élèves du secondaire, ont subi « une détresse profonde et un découragement qui les amènent à vivre dans une extrême crainte des autorités ». En outre, la plupart des participants ont également dit avoir subi « une déstabilisation psychologique » après l’expérience.

Dans les camps de BUSOGO, dans la province du Nord, il est reporté que les jeunes sont regroupés en fonction de leurs « backgrounds ou origines ethniques ». L’éducation donnée au groupe tutsi parle de l’unification, du patriotisme et du contrôle de ceux « qui sont enclins à commettre un génocide ». Dans le groupe hutu, le message est que toutes les suggestions, idées, selon lesquelles le FPR aurait commis des crimes contre les Hutu sont considérées comme étant une négation du génocide et si cela arrive, cela devrait être signalé et traité par la loi « en conséquence ». Qui plus est, une personne avec de telles croyances ou toute personne qui laisse penser que « beaucoup de Rwandais sont illégalement emprisonnés ou harcelés par les autorités » est un ennemi de l’Etat.

« Pour les jeunes qui ont fait l’expérience de ces camps (aux mains des autorités du FPR, des agents et des militaires), soit personnellement, à travers un membre de la famille ou par l’intermédiaire d’amis proches, ces camps leur enseignent et forcent de croire des idées différentes de ce qu’ils ont; cette expérience leur laisse une détresse profonde. Plusieurs cas de dépressions nerveuses, de suicides et tentatives de suicide chez les jeunes qui ont participé à ces jeunes camp ont été rapportés« , affirme le rapport.

 

Le recrutement pour des rebelles en RDC

Les chercheurs du GCRHR ont également constaté que les camps sont utilisés comme un réservoir de recrutement pour la formation de groupes rebelles dans l’Est du Congo. « Il y a eu des cas de disparition de jeunes après qu’ils aient participé à des camps d’entraînement (…). Depuis 2007, c’est un secret de polichinelle que ces jeunes disparus ont été envoyés pour rejoindre des groupes rebelles en RD Congo, rebelles qui sont soutenus par le gouvernement rwandais. » Un évadé des groupes armés en RD Congo a déclaré au GCRHR que le FPR sélectionne ceux qui seront envoyés au Congo sur base de leurs compétences linguistiques en swahili, du niveau d’éducation atteint à l’école secondaire et de leur statut social.

Transmettre des idées

Les entretiens tenus avec les « anciens et actuels fonctionnaires du gouvernement rwandais » révèlent que la stratégie du FPR est de cibler les jeunes âgés entre 16 et 30 ans parce que « ce groupe d’âge n’a pas connu la guerre civile des années 1990, ni le génocide rwandais de 1994 ou ne l’ont connu qu’étant des  enfants en bas âge. ». De telle sorte, leurs croyances sur ces événements sont plus enclines à être façonnées par l’éducation. En outre, ce groupe d’âge constitue un grand pouvoir politique, car ils représentent 40% de la population rwandaise et plus de 60% des électeurs.

GCRHR a constaté que l’enseignement donné à cette jeunesse ciblée, à propos de l’histoire du pays ainsi que ses  valeurs culturelles, est en faveur de « l’idéologie du FPR » qui présente la force armée du parti en tant que leader héroïque qui « a aidé à renverser la mauvaise et discriminante histoire du Rwanda. ». Ceux qui adhèrent à cette nouvelle croyance « deviennent des supporteurs, partisans ou potentiels promoteurs et protecteurs de l’idéologie du FPR. ». C’est d’eux que les idées politiques du FPR sont ainsi transmises. En outre, ceux qui questionnent ou critiquent « la moindre idée de l’idéologie officiellement approuvée » seraient « arrêtés, harcelés, marginalisés, contraints à l’exil ou disparaissent ».

 

Formation d’espions

Le rapport mentionne également la formation secrète d’élus « fraîchement diplômés » de Nasho, à l’Est du Rwanda. Les étudiants sont censés être formés à « la méthodologie militaire de pointe, de communication et de persuasion, diverses méthodes pour identifier un ennemi de l’Etat, et les méthodes d’espionnage ». À la fin du programme d’un an, les étudiants sont employés par le gouvernement « à différents niveaux », où, entre autres, ils ont « la tâche particulière de surveiller secrètement leurs collègues et de produire des rapports quotidiens ou hebdomadaires au secrétariat du FPR, au service des renseignements militaires (DMI) ou au NISS ».

Les chercheurs du GCRHR signalent également des réunions et des formations organisées par les ambassades rwandaises et hauts commissariats pour les jeunes de la diaspora, y compris ceux détenteurs de bourses d’étude. « Au cours des formations, des rencontres et des camps qui sont organisés dans le cadre de ce programme, les jeunes sont informés et guidés sur les différentes activités et les méthodes à utiliser afin de satisfaire ou de contribuer au programme de la jeunesse diaspora et au programme de l’étudiant. Ils sont également tenus de signaler aux ambassades et hauts commissariats des informations sur tout Rwandais qui cherche asile ou refuge dans les pays où ils résident. Et doivent signaler tous les groupes d’opposition ainsi que leurs activités. »

Basée à Londres, Global Campaign for Rwandan Human Rights se veut être une « campagne internationale relative aux droits humains créé pour promouvoir et soutenir les droits de l’homme de tous les Rwandais ». L’enquête de dix mois a inclus un nombre total de 43 témoins, la plupart d’entre eux appartenant à un groupe d’âge de 19 à 35 ans et a été menée afin de « peindre un tableau complet de la situation actuelle au Rwanda en ce qui concerne la jeunesse ».

Pour la collecte des données, GCRHR a interviewé « des jeunes étudiant et travaillant au Rwanda » ainsi que « des jeunes étudiants internationaux bénéficiaires de différentes bourses, établis en Angleterre et aux USA, ainsi que « des jeunes demandeurs d’asile au Royaume-Uni, en Belgique, France, Irlande et aux Etats-Unis« . En outre, des anciens et des actuels responsables du gouvernement ont également été entendus. [3]

 

 

  1. CULPABILISATION COLLECTIVE DES HUTU

 

Le peuple rwandais n’est pas au bout de ses peines

Depuis le 30 juin 2013, la campagne visant à convaincre chaque jeune hutu de se sentir, toujours et en tout lieu, coupable des crimes qui auraient été commis par d’autres Hutu bat son plein. Cette campagne a été lancée par le président Paul Kagame lui- même à Kigali le 30 juin 2013 devant des centaines de jeunes.

C’était à l’initiative d’un jeune « illuminé » du nom de Edouard Bamporiki qui se présente comme un « artiste et écrivain » mais que d’aucuns perçoivent comme un habile escroc. Ce grand garçon de 29 ans a en effet fondé une association «Youth Connect » vite repérée et sponsorisée par « Imbuto Fondation », une riche fondation créée et présidée par la First Lady elle-même, Jeannette Kagame Nyiramongi. Ce sont donc ces deux associations qui ont organisé cette rencontre.

C’est à cette occasion que le « jeune » Edouard Bamporiki a exposé ce qu’il a appelé sa trouvaille. Lui qui avait 10 ans en 1994 a affirmé avoir été traumatisé en apprenant plus tard qu’il était d’origine hutu, cette ethnie qui avait commis des crimes abominables. Depuis, il vivrait dans la honte et le remord et c’est pourquoi il a entrepris la démarche de demander pardon aux Tutsi pour les crimes que les Hutu ont commis, comme une thérapie qui l’a depuis lors soulagée. Car, croit-il, ces crimes ont été commis au nom des Hutu, donc tous les Hutu. Même ceux qui n’ont pas commis de crimes, même ceux qui n’étaient pas encore nés, même ceux qui naîtront dans l’avenir…, devraient toujours se sentir coupables et demander pardon aux Tutsi.

Ceux qui l’ont entendu ont d’abord cru à une séance de transes délirantes, mais en ont ensuite eu le cœur net quand Paul Kagame s’est levé et a soutenu l’idée de Bamporiki après avoir fustigé les Hutu en général en évoquent des histoires abracadabrantesques comme par exemple celle de sa sœur qui, dans les années 60, aurait subi des séances publiques d’humiliation devant sa classe consistant à presser son nez pour s’assurer que le nez des Tutsi n’était pas constitué d’un os ! Cela toutefois ne s’est jamais produit comme l’ont témoigné par la suite les anciennes collègues de classe de Madame Catherine April (Avril), la grande sœur de Kagame, que ce soit à Byimana ou à l’Ecole Sociale de Karubanda à Butare !

Le meeting du 30 juin 2013 constituait donc bien un lancement, par Edouard Bamporiki interposé[4], d’une vaste campagne visant à culpabiliser « aussi »  la génération hutu de 1994 qui commençait à se sentir ne pas être concernée par les crimes de 1994.

Et depuis cette date, la presse du FPR ne cesse de diffuser cette campagne d’auto-flagellation de la jeunesse hutu. Et chaque occasion est bonne pour « prêcher la bonne nouvelle » comme savent si bien le faire les « griots et fous du Roi » comme Boniface Rucagu. En retour, ces « hutu de service » sont bien gratifiés. Le jeune aventurier Edouard Bamporiki lui-même vient d’être mis sur la liste des prochains députés du FPR qui seront installés après le simulacre d’élections législatives prévues le 16 septembre 2013.

 

Réactions indignées

Les réactions n’ont pas tardé. Les formations politiques d’opposition (FDU-RNC, RDI-Rwanda Rwiza, …) ont vivement protesté contre cette campagne de stigmatisation d’une partie de la population par le régime du FPR qui foule au pied le principe élémentaire de droit qui consacre que la responsabilité est individuelle en matière pénale. Les organisations de la Société Civile (CLIIR, RiFDP,…) ont aussi joint leurs voix à ce concert d’indignation. Même la redoutable association IBUKA, qui défend les intérêts de rescapés tutsi, s’est, dans un premier temps, désolidarisée de cette campagne avant d’être rappelée à l’ordre et de se ranger derrière la position du président Kagame et son épouse dans cette campagne de déshumanisation des Hutu.

Epiphénomène ou un vaste projet ?

Cette campagne se situe dans la droite ligne dans la réalisation d’un plan général concocté par les stratèges du FPR et visant l’élimination du pouvoir et de l’avoir des Hutu en procédant génération par génération.

Depuis sa prise du pouvoir en 1994, le FPR s’est attelé à « éliminer » la génération des Hutu qui étaient alors aux affaires. Cette élimination a fait recours à tous les moyens : massacres planifiés (fours crématoires au parc national Akagera, massacres de Kibeho, bombardement des camps de réfugiés hutu de l’ex-Zaïre, etc.) ; Gacaca (« la quasi-totalité des hutus masculins âgés de plus de 14 ans en 1994 a été jugée! »)[5], etc. Bref, ceux qui ne sont pas morts ont été emprisonnés ; que ce soit au Rwanda ou à travers le monde. D’autres sont devenus des parias infréquentables ou des « zombies » et donc improductifs et par voie de conséquence politiquement et économiquement inoffensifs. Le sort de cette génération a donc été réglé.

C’est maintenant le tour de la génération des années 1994 et après (tous ceux qui ont moins de 30 ans). L’élimination « physique » n’est plus facilement praticable et n’atteindrait pas facilement ses objectifs sans provoquer des vagues. Qu’à cela ne tienne ! Elle doit être « éliminée moralement » grâce au processus psychologique dit self-fulfilling prophecy qui consiste à les convaincre de se considérer comme des criminels pour être nés hutu et qu’ils n’ont la vie sauve et ne sont en liberté que par la bonté des Tutsi. Il en sera de même dans une vingtaine d’années lorsqu’il sera question « d’éliminer » la génération suivante, sauf peut-être que le FPR aura entretemps trouvé une autre astuce ou pourra recourir  à la manière la plus simple et directe si les circonstances du moment le lui permettent. Qui a dit « génocide » ?[6]

  1. HRW DEPLORE LA PRISE DE CONTROLE DE LA LIPRODHOR

Human Rights Watch (HRW) dénonce le changement à la tête de la Ligue Rwandaise pour la Promotion et la Défense des Droits de l’Homme (la LIPRODHOR). Selon l’ONG de défense des droits humains, une équipe soupçonnée d’être favorable au gouvernement de Kigali aurait pris le contrôle de l’organisation lors d’une réunion le 21 juillet, au cours de laquelle un nouveau conseil d’administration aurait été sélectionné en violation des règlements de la LIPRODHOR et de la loi nationale rwandaise sur les ONGS. Pour HRW, c’est une tentative pour dompter la seule ONG encore indépendante, et connue pour son courage à dénoncer les abus de l’Etat.

Le 24 juillet, l’Office rwandais de la gouvernance – l’organe étatique chargé de la supervision des organisations non gouvernementales nationales – a adressé une lettre à la LIPRODHOR prenant acte de la décision et reconnaissant le nouveau conseil d’administration, signale une responsable de HRW, Carina Tertsakian. « Le mouvement national des droits humains du Rwanda a été presque détruit par une combinaison d’intimidations, de menaces, de manipulations, d’infiltrations et d’obstacles administratifs de la part de l’État » a constaté HRW dans un communiqué. « La plupart des militants des droits humains les plus en vue ont fui le pays. Les actions du gouvernement pour réduire au silence les groupes de défense des droits humains s’inscrivent dans une tendance plus générale d’intolérance à la critique, qui s’étend aux journalistes indépendants et aux partis d’opposition », poursuit l’ONG. La LIPRODHOR était la dernière organisation nationale efficace et indépendante de défense des droits humains au Rwanda, a déploré Mme Carina Tertsakian[7].

  1. L’AMBASSADEUR BRITANNIQUE REND VISITE A MME VICTOIRE INGABIRE

 

Ce mercredi 18 septembre 2013, l’ambassadeur britannique accrédité à Kigali a rendu visite, à la prison centrale de Kigali, à Madame Victoire Ingabire Umuhoza, Présidente des FDU-Inkingi, prisonnière politique depuis 3 ans, et qui attend le jugement en appel.

Au cours de leurs entretiens, les deux interlocuteurs ont évoqué la situation politique au Rwanda. Cette dernière a été dominée par les dernières élections législatives, auxquelles aucun parti d’opposition authentique  n’a été autorisé de participer.

Ces élections ont été suivies par une chasse aux sorcières qui a culminé en une quarantaine d’arrestation dans les rangs des étudiants, des chauffeurs de taxis et des membres de l’opposition accusés de soutenir les revendications de ces derniers .

Les deux interlocuteurs ont aussi parlé de la situation dans la Sous-région des Grands Lacs, marquée par la recrudescence des combats entre l’armée régulière congolaise et la rébellion du M23, soutenue, selon les Nations Unies, par le Rwanda.

Madame Victoire Ingabire Umuhoza en a profité pour demander à l’ambassadeur britannique d’intercéder auprès de son gouvernement, afin qu’il accompagne plus fermement le processus de démocratisation des institutions politiques rwandaises.[8]

 

 

(…) Le  48ème anniversaire de l’indépendance de notre pays intervient au moment où notre pays traverse les moments les plus difficiles de son histoire. Moments difficiles caractérisés par la confiscation des droits et des  libertés fondamentaux, l’oppression sous toutes ses formes, les emprisonnements arbitraires, les assassinats…Nos aïeux à qui nous rendons un vibrant hommage aujourd’hui et qui ont défendu leurs droits et libertés, doivent nous servir d’exemples et nous inciter à continuer à exiger le rétablissement de nos droits et libertés.  En outre, l’histoire des peuples à travers le monde est toujours là pour nous apprendre que tout peuple qui lutte pour ses droits et libertés fondamentaux finit par les acquérir. Gardons aussi espoir  qui nous oblige à aller jusqu’au bout ;  engageons-nous à unir toutes nos potentialités avec courage et abnégation jusqu’à la victoire totale et irréversible de la démocratie, de l’Etat de droit, de l’unité dans la diversité, de la justice équitable et de la réconciliation, de la paix et du développement durable dans notre pays. (…)

 Victoire Ingabire Umuhoza, le 1er juillet 2010,

à l’occasion du 48ème anniversaire de l’indépendance du Rwanda,

 



Source : europarl.europa.eu Cf. aussi l’article d’Élise Le Gall du 17 juin 2013, www.cdiph.ulaval.ca

[2] Tristan Coloma dans le Monde.fr  du 24.09.2013, extraits.

[3] Jane Nishimwe, le 30 mai 2013, Extraits. Version originale en anglais par Jane Nishimwe, traduit par Arlette Ngoboka. Jambonews.net

[4] L’instrumentalisation du jeune Bamporiki ne peut tromper personne. La philosophie du FPR considérant tous les enfants hutu comme imbus de la fameuse « idéologie du génocide » est une constante. La députée Rose Mukankomeje a déclaré un jour : « Les enfants hutu ont tété l’idéologie du génocide dans le sein de leurs mamans ». Le président Kagame lui-même, dans une interview à l’hebdomadaire Jeune Afrique, a déclaré que les enfants hutu naissent avec une idéologie du génocide » (JA n° 2302 du 20 au 26 février 2005).

[5] « Entre 1,2 et 1,5 million de personnes ont été jugées pour crimes de génocide ou idéologie génocidaire. Si on restitue ce chiffre dans le cadre global de la population, on peut dire que la quasi-totalité des hutus masculins âgés de plus de 14 ans en 1994 a été jugée! Dans ces conditions là, la justice a-t-elle été rendue? N’est-elle pas elle-même susceptible d’être taxée de justice ethnique? N’a-t-elle pas introduit une globalisation sur les coupables du génocide, faisant de toute une ethnie, un peuple génocidaire? » (André Guichaoua, interview au lejdd.fr le 7 avril 2010).

[6] Par Jane Mugeni 08/08/2013. Extraits.

[7] Mme Carina Tertsakian, Voice of America (Washington, DC)15.08.2013

[8] FDU-Inkingi/   Boniface Twagirimana,Vice Président Intérimaire / 19.09.2013