Congo Actualité n. 436

UNE PETITE TOUX DES ÉVÊQUES FAIT MONTER LA FIÈVRE DANS CERTAINS MILIEUX DE LA PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE

SOMMAIRE

1. UN MESSAGE DE LA CENCO
a. « Déchirez votre cœur et non vos vêtements. Le Peuple attend toujours »
b. La réaction de la Direction des services de la communication de la Présidence
c. Un réaménagement des services de la presse et de la communication attachés à la Présidence
2. LE NOUVEAU BUREAU DÉFINITIF DU SÉNAT
3. ÉLECTIONS 2023 DÉJÀ HYPOTHÉTIQUES?

1. UN MESSAGE DE LA CENCO

a. « Déchirez votre cœur et non vos vêtements. Le Peuple attend toujours »

Réuni du 22 au 25 février 2021 à Kinshasa, le Comité Permanent de la CENCO a produit un message intitulé «Déchirez votre cœur et non vos vêtements.  (Joël 2,13). Le Peuple attend toujours». Le Secrétaire général de la CENCO, l’Abbé Donatien Nshole, a délivré ce message à la presse le 1er mars 2021 au centre interdiocésain, à Kinshasa. Le voici:
«Nous nous sommes penchés entre autres sur la situation socio-politique, sécuritaire et humanitaire de notre pays.
Situation sociale et politique.
Nous avons assisté à la fin de la coalition dont nous avons dénoncé à maintes reprises l’inefficacité. Ce qui a donné lieu à l’avènement de l’Union Sacrée de la Nation et au changement des animateurs de grandes institutions.
Cependant, ces changements ont été opérés dans une atmosphère de tensions et de manière à se poser des questions sur la moralité de ces actes.
Tout en félicitant les nouveaux animateurs des Institutions de la République, nous les invitons à se mettre au travail conformément aux dispositions légales en privilégiant le bien-être de la population et la cohésion nationale.
L’adhésion massive à l’Union Sacrée de la Nation ne doit pas être motivée seulement par le positionnement politique. Il ne suffit pas de changer simplement de camps politiques (vêtements), faut-il encore rompre avec les antivaleurs (cf. Joël 2, 13) et s’engager à travailler (cœur).
Raison pour laquelle, seuls les hommes et les femmes qui ont fait preuve d’une bonne éthique dans leur passé et qui ont une expérience dans le domaine requis, soucieux du bien-être de la population, méritent d’être cooptés pour gérer les Institutions de l’Etat et les entreprises publiques. Le Peuple sera frustré de voir revenir au pouvoir ceux qui ont participé au pillage, à l’insécurité, à la violation des droits humains, et ne font aucun signe de repentance et de conversion.
Nous sommes convaincus que le bien-être du Peuple congolais passera nécessairement par la consolidation de la démocratie. Ainsi, les reformes électorales et celles de la loi portant organisation et fonctionnement de la CENI en vue d’améliorer la gouvernance électorale devraient figurer parmi les priorités du prochain Gouvernement.
Situation sociale et économique.
A l’instar de tous les pays du monde, la RDC subit les effets néfastes de la covid-19. Tout en rendant grâce à Dieu de nous avoir épargnés du pire redouté à cause de la précarité de notre système sanitaire, nous sommes préoccupés par la négation de la réalité par une bonne partie de nos compatriotes. Ce qui justifie le relâchement presque général de l’observation des mesures barrières vivement recommandées par les autorités sanitaires.
Nous saluons avec beaucoup de joie la réouverture des écoles et des universités à partir de ce 22 février. Cependant, il importe que les enseignants soient motivés pour aider les élèves et les étudiants à rattraper le retard dû à la longue interruption des cours. La modicité des salaires et de frais de fonctionnement, le non payement des Nouvelles Unités (NU) et des Non Payés (NP), l’insuffisance et le délabrement des infrastructures scolaires, risquent de porter gravement atteinte à la qualité de l’enseignement. Par ailleurs, l’Eglise Catholique qui a assuré la mise en pratique de la gratuité dans 98,8% de ses écoles, reste disponible à collaborer avec l’Etat congolais pour une gestion saine de l’enseignement et pour la consolidation et la pérennisation de la gratuité de l’enseignement de base.
Sur le plan économique, tout en reconnaissant les efforts faits par les gouvernants pour stabiliser le franc congolais, nous sommes préoccupés par le fait que la situation de la population congolaise ne s’améliore pas du tout au quotidien.
Cette situation justifiée aujourd’hui en partie par la crise de la covid-19 est un défi majeur pour le gouvernement attendu à qui nous proposons, comme antidote: la rigueur dans les dépenses publiques, l’équilibre entre les dépenses relatives au fonctionnement des institutions et celles destinées aux programmes du développement du pays.
En outre, le Gouvernement devrait doter le pays d’une politique de décentralisation économique effective et de développement régional qui transforme les provinces en véritables centres de production, de distribution, d’échanges et de consommation des biens et des services. Il est surprenant que l’on se soit préoccupé de la subdivision des provinces, sans s’investir réellement pour leur intégration par des routes adéquates et d’autres voies de communication.
Situation sécuritaire et humanitaire.
La situation sécuritaire de notre pays, notamment dans la partie Est, reste délétère et aggravée par la présence récurrente des groupes armés que l’Armée nationale, appuyée par la MONUSCO, n’arrive toujours pas à éradiquer.  Les massacres des populations, les enlèvements et le déplacement des personnes, dans le Nord-Kivu et en Ituri, et récemment l’assassinat ignoble de l’Ambassadeur d’Italie en RD Congo avec son Garde de corps et le Chauffeur, le prouvent à suffisance.
RECOMMANDATIONS.
Face à la situation qui prévaut actuellement dans notre pays et soucieux de la consolidation de la démocratie ainsi que de l’amélioration de conditions de vie de la population, nous en appelons:
Au Peuple congolais:
– Ne pas tomber dans l’attentisme, mais de s’inscrire dans la dynamique du changement;
– Veiller à défendre à tout prix ses droits fondamentaux;
– Ne pas se comporter en complice des auteurs de violence en cédant aux sentiments tribaux, ethniques et partisans;
– Veiller au strict respect des mesures barrières contre la covid-19 afin d’éviter une catastrophe qui ne serait pas facile à maîtriser.
Au Président de la République, en sa qualité de garant de la Nation:
– Veiller toujours davantage à garantir la cohésion nationale et la sécurité sur toute l’étendue du territoire national;
– Garantir le respect de la Constitution et des lois de la République;
– Tenir compte du profil éthique des membres du prochain Gouvernement et des gestionnaires des entreprises publiques.
Au Gouvernement:
– Prendre en compte les cris de la population qui croupit dans la misère;
– S’atteler à combler le fossé créé entre la majorité de la population et une minorité qui a concentré entre ses mains les richesses du pays;
– Inscrire parmi les priorités les réformes électorales et celles de la loi portant organisation et fonctionnement de la CENI, en vue d’améliorer la gouvernance électorale et de consolider la démocratie;
– Tout mettre en œuvre pour gagner le pari de l’organisation des élections crédibles, transparentes et apaisées en 2023 et pas plus tard;
– Régulariser la situation des enseignants, notamment les Nouvelles Unités et les Non Payés afin de consolider et pérenniser la gratuité de l’enseignement de base.
Au Parlement:
– Consacrer, en priorité, à la session de mars les lois sur les reformes électorales et sur l’organisation de la CENI afin de garantir la tenue des élections dans le respect du délai constitutionnel (2023) et d’éviter tout prétexte pour un glissement quelconque.
– Se préoccuper de voter des lois qui concourent à l’amélioration des conditions de vie de la population».[1]

b. La réaction de la Direction des services de la communication de la Présidence

Le 2 mars, la Direction des services de communication du président de la République a réagi à la dernière sortie médiatique de la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO). Voici un extrait du communiqué publié sur sa page Facebook officielle:
«… En relançant le débat sur la tenue des prochaines élections constitutionnellement fixées en 2023, il y a lieu de s’interroger sur la raison du scepticisme de la CENCO, dans la mesure où le moindre soupçon de « glissement du mandat » n’a jamais effleuré l’esprit de celui à qui les Congolais ont confié leur destinée par la voie des urnes en décembre 2018, le Président Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo …
Par ailleurs, cet intérêt toujours soutenu des prélats catholiques, bien que compréhensible dans un environnement où les langues se sont définitivement déliées grâce au nouveau leadership incarné par le Président de la République, traduit néanmoins un engagement excessif qui les places paradoxalement loin de leur sacerdoce et des lieux de culte. Des discours aux senteurs politiques, des accointances avec des officines obscures; tout ça est digne d’un activisme insurrectionnel et, cerise sur le gâteau, atteste des attitudes partisanes, contraires à leur statut social.
La question de l’organisation des élections est du domaine exclusif de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). L’immixtion de la Cenco dans ce qui ne relève pas de sa compétence est simplement ahurissante, voire provocante pour des pères spirituels mués, pour le besoin de la cause, en politiques engagés au détriment de leurs brebis livrés à eux-mêmes. On se souvient tous de ces pics lancés au lendemain de la proclamation des résultats de la présidentielle de décembre 2018 qui donnaient Félix-Antoine Tshisekedi vainqueur, lesquels traduisaient manifestement leur sentiment de dépit face à la tournure des évènements.
Des résultats entérinés par la Cour constitutionnelle mais pour lesquels la Cénco avait trouvé à redire, prétextant qu’ils ne correspondaient pas à ceux collectés par sa propre mission d’observation. Entretemps, les preuves attendues pour confirmer la victoire de son protégé, le héros de Genève, n’ont jamais été présentées à la Haute Cour.
Rappelons à ce sujet que la Cenco avait poussé l’outrecuidance jusqu’à devancer la Ceni – pourtant le seul organe habilité – dans la diffusion des résultats par ses propres canaux, violant ainsi gravement autant la Constitution, la loi électorale que la Charte de bonne conduite en la matière …
La CENCO veut certes porter la croix des sans voix en parlant insécurité, santé, autosuffisance alimentaire, bonne gouvernance, éducation, lutte contre la corruption etc. Mais il s’agit-là d’autant des chantiers prioritaires pour lesquels le Chef de l’État s’investit corps et âme et ne ménage aucun effort. La gratuité scolaire qui ne semble pas plaire aux écoles conventionnées catholiques vient en première ligne puisqu’elle concerne nos enfants, l’avenir de la RDC.
À cela s’ajoutent des réformes au niveau institutionnel qui touchent notamment le système électoral, la CENI, la loi électorale, la fiscalité… dont les projets de loi y relatifs sont en attente d’être examinées au Parlement, cette institution dont la majorité a basculé, laquelle donnera les coudées franches au Président de la République dans la matérialisation de sa vision au profit de ses concitoyens. Nous sommes en présence d’un processus qui avance et qui aboutira avec le concours de tous les patriotes. Il n’y aura pas de place à la magie!
A présent qu’un brin d’éclaircie commence à poindre à l’horizon, la sortie de la CENCO apparait comme un coup de pied gratuit dans une fourmilière, sans savoir exactement ce qui en résulterait».[2]

Le 3 mars, dans une interview à la presse, le porte parole du chef de l’État, Kasongo Mwema, a affirmé que «la sortie médiatique de la direction de la presse présidentielle a été une intervention personnelle qui n’engage pas le Chef de l’État. Si tel était le cas, le communiqué aurait été signé par le Directeur de cabinet. Il est vrai qu’il y a eu un article qui est sorti, signé par la direction des services de communication présidentielle qui a semé le doute, mais je ne veux pas rentrer dans les problèmes d’organisation interne, il faut considérer cela comme une précipitation puisqu’il y a des procédures pour publier un article de service de communication du chef de l’État, je n’ai pas l’impression que toutes les procédures aient été respectées».
Kasongo Mwema a précisé que la présidence de la République n’a jamais donné son avis sur la déclaration des évêques catholiques réclamant les élections dans le délai constitutionnel: «Le Chef de l’État n’a jamais nié la nécessité d’organiser les élections en 2023. Les évêques et la population congolaise, doivent se tranquilliser, il n’y a dans l’esprit du Chef de l’État aucune intention de franchir la limite des échéances constitutionnelles». Il a enfin invité les uns et les autres à ne pas prêter au président Tshisekedi «des intentions farfelues» sur ce sujet.[3]

c. Un réaménagement des services de la presse et de la communication attachés à la Présidence

Le 5 mars, le Président Félix Tshisekedi Tshilombo a pris deux ordonnances.
La  première ordonnance porte sur l’organisation et le fonctionnement du cabinet du Président de la république. Ce texte apporte un réaménagement des différents services de la présidence de la république. Parmi les changements figure la fusion des services de la presse présidentielle et de ceux de la communication.
L’ancienne configuration s’articulait sur deux services: communication et presse.
Le service de communication du Chef de l’Etat avait pour mission la gestion de l’image du Chef de l’Etat, la préparation des contacts de Félix Tshisekedi avec les médias, la collecte des données politique et socio-culturelles par le biais des enquêtes sur le terrain et les sondages. Il avait également comme tâche de contribuer à la conception des projets des discours, messages et allocutions du Président de la République. Ce service était dirigé par un directeur de communication assisté d’un adjoint.
Le service de la presse présidentielle, pour sa part, était chargé de couvrir toutes les activités du président de la République, traiter et diffuser les informations relatives aux activités du président et de son cabinet, élaborer le monitoring de la presse nationale et internationale. Ce service était dirigé par un directeur de la presse assisté également d’un adjoint.
Dans le nouveau setup, les deux services ont été unifiés et deviennent la cellule de la communication, au sein de laquelle il y aura un service de presse (scripto-audiovisuel), un autre qui s’occupera des relations publiques et un dernier qui sera chargé du digital. Le projet est d’améliorer la coordination et le fonctionnement des activités de communication autour du chef de l’Etat.
Aux termes de la deuxième ordonnance,  le Président de la république a nommé  Erick Nyindu Directeur de la cellule de communication de la présidence de la république. Le porte-parolat sera toujours assuré par Tharcisse Kasongo Mwema (titulaire) et Tina Salama (adjointe).
Erick Nyindu a étudié la philosophie à l’Université Libre de Bruxelles (Belgique) avant d’entamer la carrière journalistique. Il a presté comme présentateur à Télé Matonge. Il s’est fait remarquer à Télé Bruxelles avant d’être recruté à TV5.[4]

2. LE NOUVEAU BUREAU DÉFINITIF DU SÉNAT

Le 20 février, le président du bureau d’âge, León Mamboleo, a annoncé le calendrier relatif à l’organisation de l’élection des membres du bureau définitif du sénat. Le voici:
22 février 2021: concertation des forces politiques.
23 février 2021: dépôt des candidatures.
24 février 2021: examen des candidatures et affichage des listes des candidats retenus.
25 février 2021: examen des recours.
26  au 27 février 2021 : campagne électorale.
– Plénière d’audition des messages des candidats.
– Le premier jour, le questeur adjoint, le questeur et le rapporteur adjoint.
– Le deuxième jour, le rapporteur, le deuxième vice-président et le président.
2 mars 2021: élection et installation du bureau définitif.
À noter que l’attribution des postes se fait de la manière suivante:
– Président: Grand-Kivu;
– 1er vice-président: Grand Kasaï;
– 2ème vice-président: Grand Équateur;
– Rapporteur: Grand Katanga;
– Rapporteur adjoint: Opposition (FCC);
– Questeur: Grande Orientale;
– Questeur adjoint: Grand Bandundu.
Pour rappel, six membres de l’ancien bureau de la chambre haute du Parlement avaient démissionné, suite à des pétitions de déchéance initiées contre eux, excepté le 1er vice-président Samy Badibanga. Ce dernier est le seul qui n’avait pas démissionné car, le 5 février, la plénière avait rejeté une motion de défiance présentée contre lui par un groupe de sénateurs du FCC.[5]

Le 24 février, le Bureau d’âge a publié la liste définitive des candidats retenus pour les élections des membres du Bureau définitif prévues le 02 mars. Au total, 17 candidats sont en lice pour 6 postes à pourvoir, en dehors de celui du premier vice-président, poste non vacant occupé par Samy Badibanga Ntita, seul rescapé du bureau Thambwe Mwamba. Il est à noter qu’aucune candidature n’a été rejetée. Voici les candidats retenus par la commission présidée par le sénateur Evariste Boshab  et les postes respectifs
Président:
Bahati Lukwebo Modeste (de l’Alliance des Forces Démocratiques du Congo et Alliés /AFDC-A);
 2e Vice-président:
– Ngerengo N’vene Valentin (du Mouvement de Libération du Congo [MLC] de Jean-Pierre Bemba);
– Endundo Bononge José (de l’Union Nationale des Démocrates Chrétiens [UNADEC], membre de Ensemble pour la République de Moïse Katumbi).
– Sanguma Temongonde Mossai;
Rapporteur:
– Kanimbu Shindany Michel (candidat indépendant, mais également membre de l’Union sacrée de la Nation).
Rapporteur adjoint:
– Kabamba Isabelle,
– Ngudianza Nefertiti (membre de l’Union Sacrée de la Nation),
– Bul’ An’ Sung Nathalie (Avenir du Congo de Patrick Bolonia (ACO),
– Lelo Nzazi Rolly;
Questeur :
– Bakomito Gambu Jean;
– Makangu Kabongo Erick Georges;
– Agito Amela Carole;
– Fikiri Alimasi Dieudonné;
– Bayukita Makula James (Président des parlementaires de l’UDPS et alliés – Grande Orientale).
 Questeur adjoint:
– Mukalay Kionde;
– Ilanga Bakonga Reagan;
– Kidima Nzumba Ida.[6]

Le 2 mars, les sénateurs ont procédé à l’élection des membres du Bureau définitif.
Voici la composition du nouveau directoire de la chambre haute du parlement:
Président: Bahati Lukwebo (élu avec 89 voix sur 98 votants)
1er vice-président: Samy Badibanga (déjà membre du précédent Bureau)
2e Vice-président: Sanguma Temongonde Mossai
Rapporteur: Kanimbu Shindany Michel
Rapporteur adjoint: Bul’ An’ Sung Nathalie
Questeur: Agito Amela Carole
Questeur adjoint: Kidima Nzumba Ida
Le bureau définitif du Sénat affiche désormais complet, sans un seul membre issu des rangs de Moïse Katumbi et de Jean-Pierre Bemba, respectivement présidents d’Ensemble pour la République et du Mouvement de Libération du Congo (MLC). Ils se sont neutralisés, car chacun d’entre eux avait aligné un candidat au poste de 2ème vice-président du Sénat, en se faisant ainsi concurrence.
Lors d’un premier tour du vote, le candidat de Moïse Katumbi, José Endundo Bononge avait obtenu 40 voix et celui de Jean-Pierre Bemba, le sénateur N’vene Gerengbo, a bénéficié des 8 voix de ses collègues. L’autre candidat à ce poste, Mossai Sanguma avait recueilli 49 voix.
Faute de majorité absolue, un deuxième tour s’imposait entre les deux premiers.
Deuxième, José Endundo s’est désisté, ouvrant ainsi un boulevard au candidat Sanguma.
Et sans surprise, le sénateur Mossai Sanguma, resté candidat unique, a été élu au second tour, deuxième vice-président du Sénat avec 85 voix.
Au terme de l’élection et de l’installation dudit bureau, son président, Modeste Bahati Lukwebo, a clôturé la session extraordinaire de février.
Avec ce vote, Félix Tshisekedi achève le processus de changement des animateurs de principales institutions du pays.[7]

Le 5 mars, Samy Badibanga Ntita a démissionné de son poste de 1er vice-président du Sénat. L’annonce a été faite par le président du Sénat Bahati Lukwebo lors de la cérémonie de reprise et remise entre le Bureau d’âge et son Bureau et en évoquant des raisons de « convenance personnelle ».
Selon certaines indiscrétions, cette démission intervient un jour après l’arrivée de Moïse Katumbi à Kinshasa, où il aurait rencontré le Premier ministre, avant d’être reçu par le chef de l’État tard dans la soirée. Les mêmes indiscrétions renseignent que Badibanga Ntita aurait été « sacrifié » pour satisfaire le camp Katumbi au bureau de cette chambre haute du parlement, en lui cédant ce fauteuil, après la déception d’ « Ensemble pour la République » lors de l’élection du 2 mars dernier. En contrepartie, Badibanga pourrait être nommé ministre au sein du gouvernement de Sama Lukonde.[8]

3. ÉLECTIONS 2023 DÉJÀ HYPOTHÉTIQUES?

A moins de 3 ans des prochaines élections, le débat sur cette question refait surface dans la classe politique. Ce, après la récente déclaration des évêques de la CENCO sur la nécessité d’organiser les élections «en 2023 et pas plus tard».

Le 7 mars, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a clôturé un atelier concernant le renforcement de la logistique électorale. Sur le plan logistique, selon le président de la CENI, Corneille Nangaa, il faudra recycler les anciens matériels, les mettre à jour et en acquérir d’autres, en tentant compte du fichier qui sera reconstitué:  «certains matériels acquis en 2005, en 2011, en 2016 et 2018, sont encore là. Et pour les élections de 2023, il sera question de les recycler. Les machines à voter sont là, les kits d’enrôlement sont là, il sera juste question de les mettre à jour, d’en ajouter d’autres, car le nombre d’électeurs va augmenter et procéder aux acquisitions d’autres matériels qui ne sont pas recyclables. C’est ce qu’on appelle les matériels à usage unique qu’on utilise une fois et qu’on jette mais l’essentiel des matériels est bel et bien présent».
Corneille Nangaa a affirmé que pour 2023 le défi logistique va continuer, surtout avec l’état des routes qui se sont dégradées d’avantage mais également avec les projections sur les électeurs à inscrire sur la liste électorale. Selon lui, les projections tourneront autour de 50 millions d’électeurs pour les élections de 2023, soit 10 millions d’électeurs de plus que lors de celle de 2018.  A en croire Nangaa dans la base données de la CENI, la cartographie électorale indique 26 provinces sur l’ensemble du territoire national, 32 villes, 312 communes et 2 815 quartiers en milieu urbain, 145 territoires, 734 secteurs et chefferies, 6.085 groupements et plus de 88.000 villages en milieu rural.[9]

Le 7 mars, à l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), le parti du Président Félix Tshisekedi, l’on s’est dit prêt à aller aux élections, mais à condition que la population soit préalablement identifiée. C’est le secrétaire général du parti présidentiel, Augustin Kabuya, qui l’a affirmé: «L’UDPS est pressée d’aller aux élections mais à une seule condition, qu’on puisse identifier les Congolais. Qui est Congolais et qui ne l’est pas, parce que nous ne voulons pas qu’il y ait des troubles comme lors des dernières élections».
Pour rappel, Richard Ilunga, directeur général de l’Office National d’Identification de la Population (ONIP), avait déclaré en septembre 2020 que le recensement général de la population devrait coûter 350 millions USD. L’ONIP avait appelé les députés nationaux et sénateurs à prendre en compte l’identification de la population dans la loi de finances 2021. L’opération projetée pour cette année 2021, aurait pu se clôturer en décembre 2022, soit une année avant les élections.[10]

Le 8 mars, dans une interview, un membre de la  plénière de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI), Gustave Omba, s’est montré sceptique quant à la tenue des élections en 2023. Il a expliqué son scepticisme par le retard de près d’une année déjà cumulé dans les préparatifs de la tenue des élections. «L’atelier des logisticiens qui vient de se clôturer c’est juste une action à trompe œil: beaucoup des matériels de la commission électorale nationale indépendante aujourd’hui dans l’ensemble du pays ont été détournés, vendus, d’autres matériels sont devenus défectueux parce que les conditions d’entreposage posent problème», a dit ce membre de la plénière de la CENI. À l’en croire, plusieurs faits et contraintes démontrent à suffisance que la tenue des élections dans le délai est hypothétique: «Le vrai problème se trouve du côté des moyens financiers. Quand on parcoure le budget de l’État, on constate qu’on ne réserve pas grand-chose aux élections et le pays est en train de traverser une crise économique très grave. Aujourd’hui le contexte économique et social fait que l’État n’a pas de moyens suffisants. Je ne sais pas comment pourra-t-on arriver à organiser ces élections. Déjà les agents de la CENI ne sont pas payés, ils ont un salaire réduit à 60% à 70%, il faut d’abord les mettre dans les conditions de travail … Nous avons déjà 11 à 12 mois de retard et il est absolument nécessaire de lever le plus vite possible les options sur les modalités de renouveler le fichier électoral … On ne doit pas seulement se limiter aux questions techniques, mais il y a aussi des questions d’ordre légal. Il faut revisiter la loi sur l’organisation et le fonctionnement de la CENI et la loi électorale. Mais pour que ces réformes se fassent, il faut d’abord qu’il ait une évaluation. C’est l’évaluation avec toutes les parties prenantes qui dira la lumière sur ce qui peut faire objet de la réforme. Donc il y a une partie législative qu’il faut faire par rapport à la réforme et puis la partie technique que la CENI est appelée à faire».[11]

[1] Cf Cenco.org, 01.03.’21   http://www.cenco.org/dechirez-votre-coeur-et-non-vos-vetements-joel-213/
[2] Cf Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 02.03.’21   https://www.7sur7.cd/2021/03/02/rdc-la-sortie-de-la-cenco-apparait-comme-un-coup-de-pied-gratuit-dans-une-fourmiliere
[3] Cf Siméon Isako – Cas-info.ca, 03.03.’21
[4] Cf Actualité.cd, 06.03.’21
[5] Cf Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 19.02.’21; Berith Yakitenge – Actualité.cd, 21.02.’21
[6] Cf Berith Yakitenge – Actualité.cd, 24.02.’21; Siméon Isako – Cas-info.ca, 24.02.’21
[7] Cf Actualité.cd, 02.03.’21; Jephté Kitsita – 7sur7-cd 03.03.’21
[8] Cf Actualité.cd, 05.03,’21; mediacongo.net, 05.03.’21
[9] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 08.03.’21; Fonseca Mansianga – Actualité.cd, 07.03.’21
[10] Cf Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 08.03.’21
[11] Cf Clément Muamba – Actualité.cd, 09.03.’21