SOMMAIRE
1. RAPPORT SUR LES CONFLITS EN TERRITOIRE DE DJUGU, DANS LA PROVINCE DE L’ITURI / DE DÉCEMBRE 2017 À SEPTEMBRE 2019
2. VIOLENCES À DJUGU ET À MAHAGI (ITURI): L’IMPLICATION DE LA CODECO
1. RAPPORT SUR LES CONFLITS EN TERRITOIRE DE DJUGU, DANS LA PROVINCE DE L’ITURI / DE DÉCEMBRE 2017 À SEPTEMBRE 2019
Bureau Conjoint des Nations Unies pour les Droits de l’homme
Hcdh – Monusco
Janvier 2020 [1]
0. RÉSUMÉ
Depuis décembre 2017, la province de l’Ituri, et plus spécifiquement le territoire de Djugu, est affectée par des violences de grande ampleur commises dans un contexte de tensions interethniques entre les communautés Lendu et Hema notamment, et qui ont occasionné plusieurs centaines de victimes ainsi que des déplacements massifs de population.
De décembre 2017 à septembre 2019, au moins 701 personnes ont été tuées, 168 autres blessées et 142 personnes ont été victimes de violences sexuelles. Dans différents villages du territoire de Djugu, on a aussi documenté au moins 218 cas d’extorsion, de pillage et/ou de destruction de maisons, écoles et centres de santé.
Les violences ont causé le déplacement massif des habitants du territoire de Djugu. Près de 57.000 personnes se seraient réfugiées en Ouganda et plus de 556.356 autres se seraient déplacées vers les territoires voisins et à proximité de la ville de Bunia depuis février 2018.
Parmi les victimes, un grand nombre a été tué ou blessé lors d’attaques menées par des groupes de personnes armées présumées appartenir à la communauté Lendu contre diverses localités habitées par les Hema dans le territoire de Djugu. Les corps de nombreuses victimes Hema ont été mutilés et certains démembrés et emportés par les assaillants Lendu.
On a également constaté des actes de représailles par des membres de la communauté Hema contre des membres de la communauté Lendu entre décembre 2017 et mai 2018. Ces représailles ont causé, notamment des incendies de villages et des attaques isolées contre des membres de la communauté Lendu.
Les attaques perpétrées par les assaillant Lendus semblent avoir été planifiées et organisées dans le but d’infliger des pertes graves et un traumatisme à long terme aux membres de la communauté Hema vivant dans le territoire de Djugu, afin de les empêcher de retourner dans leurs villages et de pouvoir ainsi reprendre le contrôle de leurs terres.
L’un des enjeux majeurs des attaques est, en effet, le contrôle des terres par les Lendu. Ces derniers considèrent les terres du territoire de Djugu comme leur propriété ancestrale et exigeraient une frontière claire entre eux et les populations Hema. La barbarie qui caractérise ces attaques – notamment des décapitations de femmes et d’enfants à la machette, des démembrements, le fait d’emporter certaines parties des corps des victimes comme des trophées de guerre – reflète la volonté des assaillants de traumatiser de façon durable les populations Hema, de les contraindre à fuir et à ne plus revenir dans leurs villages.
I. CONTEXTE
A. Origine des tensions entre communautés Hema et Lendu dans la province de l’Ituri
La province de l’Ituri (65.658 km2) est située au nord-est de la République démocratique du Congo.
Elle compte 5 territoires (Djugu, Aru, Mahagi, Irumu et Mambasa), 45 collectivités et 5 cités.
En 2015, sa population était estimée à environ 5.281.533 habitants. Elle est composée de différentes communautés, en majorité des Alur (27%), concentrés à Mahagi, des Lendu (24%) et des Hema (18%) dans les territoires d’Irumu et Djugu, ainsi que des Lugbara (12%) dans le territoire d’Aru.
Les Lendu (majoritairement cultivateurs) et les Hema (majoritairement éleveurs) se sont affrontés à maintes reprises autour des enjeux fonciers. Dans l’ensemble, les Lendu et les Hema vivent séparément dans leurs chefferies (pour les Hema) et secteurs (pour les Lendu) respectifs. Cependant, les deux communautés coexistent dans un certain nombre de villages. Dans d’autres localités, de petits ilots de communautés Hema sont entourés par des villages Lendu. De plus, dans plusieurs localités, les Hema louent et cultivent des terres appartenant aux Lendu.
Entre 1999 et 2003, la province de l’Ituri avait été l’épicentre d’affrontements violents et de massacres entre les deux communautés, Lendu et Hema. Communément désigné comme «le conflit de l’Ituri» ou «la guerre de l’Ituri», ce conflit initialement foncier, portant sur les limites des terres, s’est vite transformé en guerre ethnique.
Selon le bilan établi par les Nations Unies, entre janvier 2002 et décembre 2003, environ 8.000 civils ont été victimes de meurtres, plus de 600.000 civils ont fui leurs villages d’origine, des milliers d’enfants âgés de 7 à 17 ans ont été enrôlés de force ou volontairement par des groupes armés, d’innombrables femmes ont été enlevées et ont été victimes de violences sexuelles, et des villages entiers ont été détruits. Le conflit intercommunautaire a pris des allures politiques et économiques dans tout l’ensemble de l’Ituri.
B. Première vague de violences: affrontements intercommunautaires (décembre 2017 – mai 2018)
Après plusieurs années d’une relative accalmie, deux incidents dans le territoire de Djugu en juin et décembre 2017 ont servi de déclencheurs à une nouvelle vague de violences intercommunautaires de décembre 2017 à mai 2018.
Le 10 juin 2017, le décès d’un prêtre à la paroisse de Drodro a été le point de repère de la cristallisation des tensions entre les communautés Hema et Lendu. Pour les Lendu, il s’agirait d’un meurtre dont les auteurs présumés seraient le curé et le vicaire de la paroisse, tous deux de la communauté Hema. Les deux hommes ont été arrêtés le 12 juin 2017, et le Procureur de la République a ordonné leur remise en liberté le 22 juin 2017. La communauté Lendu a considéré leur libération comme une injustice et une provocation.
Le 16 décembre 2017, un homme de la communauté Lendu du village Tete a été battu par un groupe de jeunes de la communauté Hema venus de Maze, à l’entrée du marché d’Uzi. Cet incident aurait servi de prétexte à des règlements de comptes entre des membres des deux communautés. A partir de cette date, jusqu’au mois de mai 2018, le territoire de Djugu a été le théâtre d’actes de violence opposant des membres des communautés Hema et Lendu.
Le BCNUDH a pu confirmer que les attaques ont été menées principalement par des membres de la communauté Lendu. Les assaillants, souvent accompagnés de femmes et d’enfants, ont mené des incursions dans les villages en grand nombre (100 à 300 personnes) pendant la nuit et portaient des armes blanches (machettes, flèches, lances) et quelques-uns des armes à feu.
Le BCNUDH a également documenté des actes de violences de la part des Hema, en réponse aux attaques des Lendu.
C. Deuxième vague de violences: Attaques contre les forces gouvernementales (septembre 2018 – mai 2019)
Entre septembre 2018 et mai 2019, la situation sécuritaire dans le territoire de Djugu a été marquée par des attaques répétitives contre les positions des FARDC par des assaillants Lendu.
De septembre 2018 à mai 2019, 24 attaques ont eu lieu contre les forces de défense et sécurité, avec un bilan d’au moins 72 militaires et quatre policiers tués, 39 militaires blessés et des armes emportées par des assaillants Lendu. Il n’est pas exclu que les armes et munitions emportées par les assaillants aient servi à perpétrer les attaques contre des civils Hema enregistrées dès le début du mois de juin 2019.
D. Troisième vague de violences (à partir de juin 2019)
Le 10 juin 2019, lors d’une embuscade, quatre membres de la communauté Lendu dont un commerçant influent de la localité de Kobu, dans la collectivité Walendu Djatsi, ont été assassinés par des inconnus armés au village Zibiti, chefferie de Mambisa. Des membres de la communauté Lendu ont accusé les Hema de cet assassinat. Cet incident a déclenché des nouvelles attaques à partir du mois de juin.
Ainsi, entre les 10 et 14 juin 2019, des assaillants Lendu ont mené une série d’attaques contre des villages et des camps de déplacés abritant des membres de la communauté Hema dans plusieurs localités des territoires de Djugu et Mahagi. A l’issue de cette nouvelle vague de violences, les populations Hema se sont massivement déplacées vers des zones plus sûres de la province.
A la suite des opérations militaires des FARDC contre les assaillants armés dans le territoire de Djugu, une accalmie relative a été observée en juillet et août 2019.
Cependant, au début du mois de septembre 2019, les attaques des Lendu contre des civils Hema ont connu une hausse significative et, dans certains cas, ont pris pour cible les personnes déplacées dans les sites du territoire de Djugu, notamment à Roo, Bule et Drodro. Les villages attaqués sont géographiquement proches des groupements Lendu.
E. Auteurs présumés
i. Organisation des assaillants Lendu
Le groupe des assaillants a pendant longtemps entretenu le flou sur son identité et sa structure organisationnelle.
Des informations recueillies indiquent un degré d’organisation limité des attaques menées par des membres de la communauté Lendu dans le cadre d’affrontements intercommunautaires entre décembre 2017 et mai 2018. A partir de septembre 2018, les attaques menées par des assaillants Lendu dénotent un degré d’organisation important, qui s’est progressivement renforcé au cours des deuxième et troisième phases de violences.
Le mode opératoire, le caractère planifié et organisé des attaques, les équipements utilisés depuis septembre 2018 (armes de gros calibre, radios, etc.) laissent peu de doute sur le statut de groupe armé/milice.
Un membre de la communauté Lendu arrêté par les FARDC en mai 2019 et identifié comme le leader d’un groupe local a rapporté avoir été recruté en février 2018, par une «association de jeunes». Selon ses déclarations, son groupe aurait des camps d’entrainements dans la forêt Vu à Masungu, en Walendu-Tatsi, et serait affilié à la Coopérative de Développement économique du Congo (CODECO) sous la direction présumée d’un certain «Ngudjolo». La CODECO, initialement nommée CODEZA (Coopérative de développement économique du Zaïre), était à l’origine une coopérative agricole de solidarité paysanne dans la chefferie des Walendu Bindi, fondée par Bernard Yonga Tshopena Kakado avant la guerre d’Ituri en 1999. Kakado serait devenu un chef de guerre de la milice FRPI ainsi que le féticheur principal. Condamné pour crimes de guerre le 9 août 2010, il est décédé en prison un an plus tard. En ce qui concerne le dénommé Ngudjolo, plusieurs prénoms ont été utilisés pour le désigner, dont Justin, Mathieu, Innocent et Mateso.
En juin 2019, «Ngudjolo » a déclaré sur une radio locale être le leader du «groupe armé de la forêt de Wago», décrétant être à la tête d’une force de 2.350 hommes organisés, armés et entrainés, pour défendre la population Lendu contre la communauté Hema qu’il accusait de préparer le retour d’un influent chef Hema avec des hommes armés. Il s’agit du chef «Kawa» de Tchomia, qui avait été expulsé de la province suite à la guerre en Ituri en 2002.
Quelques jours plus tard, le gouverneur aurait reçu une communication écrite de ce groupe armé, demandant l’établissement d’une zone neutre entre les communautés Lendu et Hema, un arrêt des opérations militaires dans la région, le cantonnement du groupe et la remise en liberté des prisonniers Lendu.
En octobre 2019, une faction d’assaillants Lendu a envoyé des messages à l’intention des autorités provinciales pour solliciter des pourparlers visant à leur intégration dans les FARDC.
Récemment, à partir du mois d’octobre 2019, « Ngudjolo » a revendiqué, à travers un communiqué, être le chef d’état-major général du groupe armé Union des Révolutionnaires pour la Défense du Peuple Congolais (URDPC). Ce communiqué s’adressait aux leaders communautaires et forces vives du groupement Buba dans le secteur de Walendu Pitsi, territoire de Djugu, et exigeait que les populations fournissent sur une base hebdomadaire, la somme de 150.000 francs congolais et des vivres pour la ration de sa 2e brigade basée à Linga, en attendant l’aboutissement de discussions engagées entre ce groupe et le gouvernement pour un éventuel pré cantonnement de ses hommes. Il n’est pas exclu qu’il y ait un lien entre les attaques commises dans le territoire de Djugu depuis septembre 2018 et le groupe armé nouvellement déclaré URDPC.
Toutes ces informations indiquent qu’il pourrait s’agie non seulement d’un ou de plusieurs groupes armés constitués de membres de la communauté Lendu: la CODECO et l’URDPC..
ii. Mode opératoire des assaillants Lendu
La première phase de violences présente un mode opératoire plus ou moins «classique» de conflit intercommunautaire, avec des attaques et des ripostes par des membres des communautés Lendu et Hema. Pendant cette phase, il n’y a pas eu de confirmation d’utilisation d’armes à feu, les assaillants utilisant des armes blanches et des incendies.
Cependant, au cours de la deuxième phase de violences, on a observé une évolution de la nature du conflit, avec des changements dans les acteurs impliqués, leur mode opératoire et la cible des attaques. A partir de septembre 2018, des assaillants Lendu ont démontré des capacités à mener des attaques planifiées et simultanées, qui ont eu pour cible principale les forces étatiques déployées en réponse aux violences intercommunautaires, avec peu de dommages collatéraux.
Les attaques visant des positions des forces gouvernementales ont ciblé des forces inférieures en nombre et de moindre capacité face aux assaillants, dans des localités isolées, notamment sur les rives du lac Albert. Ces attaques auraient été motivées par le besoin d’armes et munitions pour augmenter les capacités du groupe armé.
Au cours de la troisième phase de violences, on a noté un nouveau changement de cibles et de mode opératoire. Des assaillants Lendu ont à nouveau ciblé les populations civiles. En revanche, ces attaques n’ont pas généré de riposte de la part de la communauté Hema.
II. VIOLATIONS DES DROITS DE L’HOMME
A. Cadre général
Si lors de la première vague des violences, les conflits étaient concentrés dans une partie du territoire de Djugu, la deuxième vague s’est étendue à des zones auparavant stables, tels que l’ouest du territoire de Djugu (Nizi, Kobu, Kilo) et le territoire de Mahagi. Ceci explique que les victimes comptent des membres de la communauté Hema mais également d’autres communautés ethniques, tels que les Alur.
Entre décembre 2017 et septembre 2019, le BCNUDH a documenté 325 violations et atteintes aux droits de l’homme: 212 atteintes par des assaillants Lendu (à partir de septembre 2018, moment à partir duquel le BCNUDH considère ces assaillants comme appartenant à un groupe armé), ainsi que 109 violations commises par des militaires des FARDC et quatre par des agents de la PNC.
Il s’agit de:
– 91 violations au droit à la vie par exécutions extrajudiciaires ou sommaires (420 victimes, dont 304 hommes, 66 femmes et 50 enfants),
– 45 violations du droit à l’intégrité physique (135 victimes dont 96 hommes, 22 femmes et 17 enfants),
– 66 cas de violences sexuelles (142 victimes, dont 136 femmes et 6 filles),
– 31 violations du droit à la liberté et à la sécurité de la personne (113 victimes, dont 63 hommes, 31 femmes et 19 enfants),
– 2 cas de travaux forcés (32 victimes dont 13 hommes, 10 femmes et neuf enfants) et
– 90 violations du droit à la propriété (destruction et incendie de maisons privées et de villages).
Les 420 victimes d’exécutions extrajudiciaires ou sommaires incluent au moins 136 membres de la communauté Hema, 21 membres de la communauté Lendu et 135 membres d’autres communautés. Les 135 victimes d’atteintes à l’intégrité physique incluent au moins 40 membres de la communauté Hema, 27 membres de la communauté Lendu et 14 membres d’autres communautés.
Les 142 victimes de violences sexuelles incluent au moins 83 membres de la communauté Hema, 3 membres de la communauté Lendu et 4 membres d’autres communautés.
Les 113 victimes de violations du droit à la liberté et à la sécurité de la personne incluent au moins 26 membres de la communauté Hema, 34 membres de la communauté Lendu et 10 membres d’autres communautés.
B. Atteintes aux droits de l’homme commises par des assaillants présumés Lendu
* De décembre 2017 à mai 2018, les attaques perpétrées par des membres de la communauté Lendu ont:
– causé la mort de 277 personnes (dont 91 femmes et trois enfants),
– blessé 31 personnes (dont une femme et un enfant),
– privé 9 personnes de leur liberté (dont 8 femmes), et
– entraîné 125 crimes contre la propriété (destruction et incendie de villages et vol de biens).
Aucun cas de violence sexuelle par des membres de la communauté Lendu au cours de cette période.
C’est à partir de septembre 2018 que la nature des violences évolue, avec l’émergence d’attaques planifiées et organisées, ce qui permet de considérer l’existence d’un ou de groupes armés.
* Entre septembre 2018 et mai 2019, le BCNUDH a documenté 24 atteintes aux droits de l’homme attribuables à des assaillants Lendu présumés appartenir à un groupe armé, avec
60 victimes d’exécutions sommaires (dont 42 hommes, 10 femmes et 8 enfants),
21 victimes d’atteintes au droit à l’intégrité physique (dont 15 hommes, 2 femmes et 4 enfants),
10 victimes de violences sexuelles (toutes des femmes),
17 victimes d’atteintes au droit à la liberté et à la sécurité de la personne (dont 3 hommes, 9 femmes
et 5 enfants),
14 victimes de travaux forcés (dont 9 femmes et 5 enfants) et
3 atteintes au droit à la propriété.
Cette seconde période de violences a été marquée par des attaques ciblées de positions des FARDC. Le nombre d’atteintes aux droits de l’homme est donc relativement bas en proportion à la troisième période durant laquelle la population a été la cible principale des violences.
* En effet, à partir de juin 2019, le BCNUDH a documenté 188 atteintes aux droits de l’homme attribuables à des assaillants Lendu, avec :
333 victimes d’exécutions sommaires (dont 244 hommes, 50 femmes et 39 enfants),
88 victimes d’atteintes au droit à l’intégrité physique (dont 64 hommes, 16 femmes et 8 enfants),
91 victimes de violences sexuelles (dont 89 femmes et 2 filles),
56 victimes d’atteintes au droit à la liberté et à la sécurité de la personne (dont 27 hommes, 19
femmes et 10 enfants) et
42 atteintes au droit à la propriété.
Au cours de cette troisième période la nature des violations des droits de l’homme a changé, avec un nombre plus élevé d’exécutions sommaires (333 victimes contre 60 au cours de la deuxième phase), des mutilations documentées pour la première fois depuis le début de la crise et des violences sexuelles. En effet, alors que 10 femmes ont été violées au cours de la seconde phase, au moins 89 femmes et deux filles ont été victimes de violences sexuelles pendant la troisième vague. La majorité des cas de violences sexuelles sont des viols, y compris collectifs, commis alors que les victimes se trouvaient isolées, sur la route ou dans des champs. Dans certains cas, les assaillants tuaient les hommes qui les accompagnaient avant de les violer sous la menace d’une arme blanche. Dans certains cas, les victimes ont été exécutées à l’arme blanche. Parmi les 101 victimes des violences sexuelles, au moins 51 sont membres de la communauté hema.
* En ce qui concerne les violations des droits de l’homme commises par des assaillants Lendu pendant la période comprise entre septembre 2018 et septembre 2019, on a pu constater que:
– les 393 victimes d’exécutions sommaires incluent au moins 136 membres de la communauté Hema et 135 membres d’autres communautés, dont 87 membres de la communauté Alur;
– les 109 victimes de violations du droit à l’intégrité physique incluent au moins 39 membres de la communauté Hema et 14 membres d’autres communautés;
– les 101 victimes de violences sexuelles incluent au moins 51 membres de la communauté Hema et 2 membres d’autres communautés;
– les 73 victimes d’atteintes au droit à la liberté et à la sécurité de la personne incluent au moins 26 membres de la communauté Hema et 10 membres d’autres communautés.
C. Crimes internationaux
Les enquêtes du BCNUDH ont permis de conclure que les atteintes aux droits de l’homme et les violences documentées dans ce rapport ont été commises dans la cadre d’attaques généralisés ou systématiques contre des civils, spécialement la population Hema, et pourraient de ce faitprésenter des éléments constitutifs de crimes contre l’humanité notamment par meurtre, torture, viol et autres formes de violences sexuelles, pillages et persécution. Comme les faits ont eu lieu dans le cadre d’un conflit armé interne par les parties au conflit, ces actes pourraient également constituer des crimes de guerre.
La grande majorité des victimes des attaques semble avoir été visée en raison de leur appartenance à la communauté Hema (au moins 402 membres de cette communauté tués et 79 blessés entre décembre 2017 et septembre 2019). Des membres d’autres communautés ont également été affectés (118 membres d’autres communautés ont été tués et 13 blessés), notamment des communautés Alur et Mambisa.
Les attaques ont notamment provoqué le déplacement des populations, causant l’abandon total ou partiel des localités ciblées, ce qui pourrait également avoir été l’intention des assaillants, et pourraient établir des éléments constitutifs de persécution ainsi que de transfert forcé de la population. La destruction systématique des habitations appartenant à des membres de la communauté Hema semble confirmer la volonté d’empêcher la présence et le retour des membres de cette communauté dans les localités attaquées de manière durable.
Compte tenu des éléments susmentionnés, en particulier le mode opératoire qui semble viser particulièrement la communauté Hema, le nombre élevé de civils tués, mutilés et de victimes de violences sexuelles, la volonté au cours des attaques de tuer les blessées, les attaques sur les camps de déplacés et la destruction systématique des habitations Hema, les violences documentées par le BCNUDH dans les territoires de Djugu et Mahagi pourraient présenter au moins certains des éléments constitutifs de crime de génocide par meurtre et atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe. Toutefois, les enquêtes menées à ce jour ne démontrent pas à suffisance l’intention de détruire les Hema en tant que groupe ethnique.
D. Déplacement des populations
Les violences dans le territoire de Djugu ont entrainé un vaste déplacement de populations, dont des Hema et des Lendu qui ont trouvé refuge dans des familles d’accueil ou se sont installés dans des sites de déplacés internes. Au 20 juin 2019, OCHA avait enregistré plus de 300.000 personnes déplacées de force, dont 209 504 déplacés internes ayant fui les violences dans les territoires de Djugu et Mahagi. Selon le HCR, près de 2 000 personnes de ces territoires ont fui vers l’Ouganda à partir de juin 2019. La situation humanitaire dans les sites des déplacés demeure très préoccupante. Alors que l’assistance humanitaire en aliments et en produits non alimentaires est limitée et se fait progressivement dans les sites à travers le territoire de Djugu, le BCNUDH a constaté que les sites créés dans le territoire de Mahagi ne reçoivent pas de l’aide régulièrement. Dans certains cas, l’aide est inexistante en raison de difficultés d’accès pour les humanitaires, les déplacés étant éparpillés dans la brousse et dans des zones inaccessibles sur le rivage du lac Albert. Le manque de nourriture, d’eau potable, de soins de santé, l’impossibilité d’aller à l’école, sont autant de problèmes auxquels font face les déplacés.
III. CONCLUSIONS
Alors que la première période de violences dénote un mode opératoire sporadique et un niveau d’organisation peu développé, le mode opératoire et la nature des violences a évolué lors des deuxième et troisième vagues de violence. Dès septembre 2018, les attaques ont été vraisemblablement planifiées et organisées suivant un mode opératoire quasi identique, indiquant que les assaillants auraient reçu des instructions. Les attaques ont été extrêmement rapides et violentes, laissant peu de temps à la population pour fuir. A ce jour, les violences continuent avec un degré de violences considérable, y compris contre des personnes vulnérables telles que les personnes déplacées.
Au moins une partie des violences documentées dans les territoires de Djugu et Mahagi pourraient présenter des éléments constitutifs de crime contre l’humanité par meurtre, persécution ou transfert forcé de populations.
Les populations ont totalement ou partiellement abandonné les localités attaquées, ce qui pourrait avoir été l’intention des assaillants. L’ampleur, la récurrence et la virulence des attaques ciblant la communauté Hema, y compris des violences sexuelles, la destruction systématique des habitations appartenant à des membres de cette communauté, la présence menaçante d’assaillants Lendu armés autour des sites de déplacés semblent confirmer l’intention d’empêcher le retour des Hema dans les localités attaquées. Les périodes durant lesquelles les attaques sont perpétrées sont révélatrices: juin correspondant à la période des récoltes, et décembre celle des semailles. Ceci réduit la possibilité d’exploitation des champs par les Hema et exacerbe le manque de nourriture.
IV. RECOMMANDATIONS
* Aux Autorités congolaises:
➢ Traiter les causes du conflit liées à la terre.
➢ Renforcer la présence des institutions étatiques dans le territoire de Djugu, en garantissant leur impartialité afin d’assurer la promotion et la protection des droits de toutes les communautés; renforcer notamment la présence des FARDC et de la PNC, et assurer que ses agents bénéficient d’équipement et de formations adéquats pour mener à bien leur mission de maintien de l’ordre public et de protection des civils en conformité avec les standards internationaux;
➢ Garantir la sécurité des sites de déplacés internes et des villages les plus touchés par les attaques afin de permettre le retour de leurs habitants;
➢ Poursuivre les efforts visant à mener des enquêtes judiciaires indépendantes et impartiales sur l’ensemble des attaques, dans le respect des standards internationaux;
➢ Assurer le droit à un recours et aux réparations pour les victimes, y compris les victimes de violences sexuelles, ainsi que leur accès à des services de soins médicaux et psychosociaux, sur la base d’une démarche axée sur les victimes;
➢ Initier des efforts de réconciliation et de dialogue entre les communautés.
* A la MONUSCO:
➢ Prolonger la présence militaire temporaire (SCD) dans le territoire de Djugu afin de prévenir des violences, rassurer les populations déplacées sur leur possible retour, et mener des interventions de protection;
➢ Installer des SCD stratégiques afin de sécuriser les zones à haut risque et prévenir l’escalade de la violence, et appuyer les FARDC dans la mise en place d’une stratégie militaire plus efficace;
➢ Poursuivre et renforcer les capacités de la PNC dans le territoire de Djugu, notamment par des formations en droits de l’homme dans le cadre du maintien et du rétablissement de l’ordre public;
➢ Poursuivre les efforts pour initier un système d’alerte précoce dans la zone affectée et dans les zones alentours qui pourraient être affectées;
➢ Renforcer le soutien aux autorités locales dans les efforts de réconciliation entre les communautés, notamment à travers des projets à impact rapide pour la réhabilitation conjointe d’écoles et de centres de santé par des membres des différentes communautés;
➢ Fournir un soutien plus accru à la justice civile et militaire pour la conduite effective des enquêtes, notamment par des missions d’enquête conjointes et la tenue de procès.
* A la communauté humanitaire:
➢ Poursuivre les efforts d’assistance humanitaire dans les territoires de Djugu et les zones avoisinantes affectées;
➢ Effectuer une évaluation multi-sectorielle des besoins humanitaires dans le territoire de Djugu et les zones avoisinantes affectées;
➢ Poursuivre le suivi auprès des personnes réfugiées en Ouganda et des personnes déplacées internes pour identifier d’éventuels cas de violences sexuelles et mettre en place des services de prise en charge appropriés.
2. VIOLENCES À DJUGU ET À MAHAGI (ITURI) : L’IMPLICATION DE LA CODECO
Le 3 janvier, dans la matinée, quatre personnes, dont trois hommes et une femme, ont été tuées dans une embuscade tendue par des hommes armés identifiés à des éléments de la Coopérative pour le Développement du Congo (CODECO), un groupe armé conduit par Ngudjolo. Les faits se sont déroulés dans la localité d’Adye dans le territoire de Djugu à une centaine des Kilomètres au nord de Bunia (Ituri). Selon des sources de la société civile locale, avant de se retirer dans la forêt, les assaillants ont emporté tous les biens des victimes. Selon des sources de la société civile locale, les victimes étaient des déplacés qui provenaient de la localité de Bule pour se ravitailler en produits de première nécessité.[2]
Le 14 janvier, deux miliciens du groupe armé Coopérative pour le développement du Congo (CODECO) ont été tués et cinq autres blessés lors des combats que les FARDC ont entrepris contre ce groupe armé, dans le village de Tsoro. en secteur de Walendu Djatsi, dans le territoire de Djugu (Ituri). Ces combats ont entrainé le déplacement de plusieurs familles. Au moins quatre mille personnes ont fui dépourvues de tout: pas de vivres, pas de nattes, pas de couvertures, pas de médicaments.[3]
Le 16 janvier, neuf personnes, dont trois enfants, ont été tuées, d’autres blessées et plusieurs maisons incendiées, lors d’une attaque perpétrée par des hommes munis d’armes blanches dans le village d’Angolo, en chefferie des Anyals, dans le territoire de Mahagi. Selon des sources coutumières locales, ces hommes armés non identifiés provenaient du territoire de Djugu et de Walendu Watsi en territoire de Mahagi. Ils ont incendié plus de 150 maisons dans le village Tokomeka. Ils ont également blessé par machette le commandant de la police de la localité d’Ali et l’ont dépouillé de son fusil. Ils se sont enfin rendus au village voisin de Djalasiga, où ils ont incendié plusieurs cases.[4]
Le 18 janvier, le porte-parole de l’armée en Ituri, le lieutenant Jules Ngongo, a annoncé que, dans les quatre derniers jours, dix personnes ont été tuées dans les affrontements entre les FARDC et les miliciens du groupe Coopérative pour le développement du Congo (CODECO), dans les localités de Tsoro et Djogo, dans le territoire de Djugu, et de Katanga, en territoire de Mahagi. Parmi les victimes, l’on compte huit miliciens (3 à Tsoro, 1 à Djogo et 4 à Katanga) et deux militaires FARDC à Katanga. Selon le porte-parole de l’armée en Ituri, les miliciens se cachent ces derniers temps parmi la population locale, dans l’objectif de détourner l’attention des forces de l’ordre. C’est ce qui pousse l’armée à les traquer dans des milieux habitables.[5]
Le 18 janvier, des miliciens du groupe armé CODECO (Coopérative pour le Développement du Congo) ont tué 7 personnes et incendié plusieurs maisons, lors d’une incursion au village Ngopka, dans la chefferie des Bahema-Nord en territoire de Djugu, province de l’Ituri. Selon le président de la société civile locale, Charité Banza, «il y a eu une incursion des miliciens de CODECO basés à Lidjo dans le groupement Masumbuko, secteur des walendu-Tatsi. Ils sont allés tout droit au village Ngokpa, où ils ont massacré plusieurs civils qui venaient de rentrer dans cette localité après des mois passés au site des déplacés de Drodro».[6]
Le 20 janvier, douze miliciens de la CODECO ont été tués, lors des combats que les Forces Armés de la RDC (FARDC) ont engagés contre ce groupe armé dans les localités de Jogoo et Lida, en territoire de Djugu (Ituri). Selon le porte-parole de l’armée en Ituri, Jules Ngongo, l’armé a récupéré huit armes AK-47 et un PKM.[7]
Le 20 janvier, le président de la société civile de Djugu, Jules Tsuba, a révélé que certaines écoles du territoire de Djugu ont été pillées et incendiées par des miliciens de CODECO. Plusieurs écoles sont également fermées car, selon le président de la société civile, tous les enseignants ont fui. Cette insécurité influe négativement sur les activités économiques aussi. Une mesure d’haricot par exemple de 10 kg se négocie actuellement sur les marchés locaux à 18 000 francs congolais (10, 77 USD) au lieu de 4 000 francs (2,39 USD). Cette majoration des prix se justifie par le fait que la population n’a pas accès aux champs.[8]
Le 22 janvier, sept corps ont été découverts à Ucha et Djedja, deux groupements de la chefferie de Bahema-Nord et Bahema Badjere, en territoire de Djugu (Ituri). Selon le président de la société civile locale, Charité Banza, ces corps ont été récupérés par la population, après les affrontements qui ont opposé les militaires des FARDC aux miliciens du groupe armé CODECO dans ces entités. 11 personnes sont toujours portées disparues.[9]
Le 24 janvier, le député national Daniel Huma, élu de Mahagi, a déclaré que, depuis une semaine, deux groupements de la chefferie de Mokambo, en territoire de Mahagi, sont sous le contrôle d’hommes armés identifiés aux miliciens de la CODECO. Il a rapporté que des centaines d’assaillants armés de CODECO ont installé leur quartier général à Terali, une localité située à la limite entre les territoires de Mahagi et Djugu. Ils tracassent la population de Aree et Musongwa, en leur exigeant de leur apporter des vivres (un bidon d’huile de palme, une chèvre, des poules et du manioc) pour leur alimentation et 2000 shillings ougandais par ménage pour le maintien de leurs bases. En cas de résistance, les habitants et les chefs locaux sont soumis à des traitements inhumains.[10]
Le 25 janvier, dans une correspondance adressée au Président Félix Tshisekedi, la société civile de Mahagi, en Ituri a dressé un bilan de 194 personnes tuées par des miliciens en une année (de janvier 2019 à janvier 2020) dans ce territoire frontalier avec l’Ouganda. Les auteurs sont les miliciens de CODECO actifs surtout dans le territoire de Djugu. Selon le président de la société civile de Mahagi, Patrice Ufoyuru, «dans la chefferie de Mokambo, ils ont massacré 134 personnes. Dans la chefferie de Panduru 42 personnes, dans la chefferie de Jukoth 13 personnes et enfin 5 personnes tuées dans la chefferie de Ang’hal».[11]
Le 27 janvier, trois personnes, dont un militaire des FARDC, son épouse et un creuseur artisanal, ont été tuées par des présumés assaillants du groupe armé CODECO respectivement aux villages de Tchendji, en chefferie de Bahema Nord, et de Sube, en chefferie de Mambisa, dans le territoire de Djugu (Ituri).[12]
Le 2 février, plus de 350 miliciens de CODECO qui étaient dans le site de transit de Kpadroma, dans le secteur de Walendu-Pitsi, en territoire de Djugu, province de l’Ituri, ont déserté le site pour regagner la brousse et continuer la lutte armée. D’après des sources locales, la désertion du site est intervenue après qu’un autre groupe des miliciens a attaqué ceux qui s’étaient déjà rendus.
Selon une source de l’armée, «les miliciens traversaient des conditions de vie très précaire dans le site de transit de Kpadroma. Cette situation n’a pas été apparemment bien digérée par Ngudjolo (chef de la milice) qui a envoyé un autre groupe des miliciens, pour obliger ceux qui s’y trouvaient à le déserter». C’est ainsi que ces miliciens se seraient retirés dans un village situé à 1 km du site de transit. Il sied de noter que ces éléments du groupe CODECO s’étaient le 08 janvier 2020, suite à un accord de paix qui aurait été signé entre cette milice et le gouvernement provincial de l’Ituri. Il y a peu, ces miliciens avaient lancé un ultimatum de sept jours au gouvernement congolais pour exiger le respect de l’accord qu’ils affirment avoir signé avec les autorités congolaises.[13]
Le 9 février, le chef du secteur de Walendu Pitsi, dans le territoire de Djugu, Jérôme Ndalo, a annoncé que le groupe armé Coopérative pour le développement du Congo (CODECO) contrôle la totalité de cette entité coutumière. Il a expliqué que cette occupation s’est effectuée après le retrait des Forces armées de la RDC (FARDC) de toute ses positions et celui des éléments de l’Unité spéciale de la Légion nationale d’intervention (LENI) de la police basée à Kpadroma. Cette dernière unité s’est installée à Bule, dans la chefferie voisine de Bahema Bajere, depuis mercredi 5 février. Depuis ce jour, ce sont des assaillants de CODECO qui contrôlent tous les onze groupements composant les 340 villages du secteur de Walendu Pitsi. Ils exigent non seulement des taxes dans tous les marchés, mais ils ont aussi installé un tribunal coutumier en exigeant des amandes transactionnelles, renchérit Lonjiringa ZABU, un de notable de cette entité. Des notables de ce secteur plaident pour un déploiement rapide des forces de défense pour sauver cette population prise en otage.[14]
[1] Cf Texte complet:
https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=38&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwjPuqOS5qvnAhUZiFwKHRk5DSc4HhAWMAd6BAgIEAE&url=https%3A%2F%2Fwww.ohchr.org%2FDocuments%2FCountries%2FRDC%2FRDCRapportpublicDjugu.pdf&usg=AOvVaw2ftHnrPwzyQCr7lUVRsdkE
[2] Cf Radio Okapi, 04.01.’20
[3] Cf Radio Okapi, 14 et 16.01.’20
[4] Cf Radio Okapi, 17.01.’20
[5] Cf Radio Okapi, 18.01.’20
[6] Cf Séraphin Banangana – 7sur7.cd, 19.01.’20
[7] Cf Radio Okapi, 20.01.’20
[8] Cf Radio Okapi, 21.01.’20
[9] Cf Radio Okapi, 23.01.’20
[10] Cf Radio Okapi, 24.01.’20
[11] Cf Franck Asante – Actualité.cd, 31.01.’20
[12] Cf Radio Okapi, 28.01.’20
[13] Cf Franck Asante – Actualité.cd, 03.02.’20 ; Séraphin Banangana – 7sur7.cd, 03.02.’20
[14] Cf Radio Okapi, 09.02.’20