SOMMAIRE
1. LES MESURES ADOPTÉES POUR LA GRATUITÉ DE L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE
2. L’ADOPTION DE LA LOI DES FINANCES POUR L’ANNÉE 2020
3. LE DISCOURS DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE DEVANT LE PARLEMENT
1. LES MESURES ADOPTÉES POUR LA GRATUITÉ DE L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE
Le 5 octobre, le vice-ministre des finances Junior Mata a déclaré que le gouvernement vient de
décaisser une enveloppe complémentaire de 41.678.475.595 FC, soit 24,972 millions USD, pour financer le premier palier additionnel des salaires des enseignants du mois de septembre 2019.
Ce décaissement vient matérialiser la volonté du Gouvernement à prendre en charge 34.740 enseignants sur le stock de 132.614 non payés et de réajuster le salaire des 410.284 enseignants payés. L’objectif consiste à faire passer le salaire du dernier enseignant à 100 USD contre 74 USD payé actuellement. Et que le salaire moyen soit élevé à 410.284 FC soit 245 USD le mois.
Dans l’ensemble, l’enveloppe de rémunération pour les 445.024 enseignants, proposée par le Ministère de l’EPST, passe de 42,045 millions USD à 67,540 millions USD le mois, soit un additionnel mensuel de 25,495 millions USD, soit 76,485 millions USD d’octobre à décembre 2019. Ce qui porte l’enveloppe de la rémunération de 126,135 millions USD à 202,650 millions USD pour le dernier trimestre de l’année 2019, soit d’octobre à décembre.
Cependant, même si le salaire de 445.024 enseignants est assuré, un stock de 199.261 enseignants, dont 97.874 enseignants non payés et un effectif de 104.387 nouvelles unités continueront à revendiquer leurs prises en charge par le Gouvernement.
Un autre problème, qui demeure encore sans réponse jusqu’à ce jour, c’est la prise en charge de frais de fonctionnement des écoles publiques et des bureaux gestionnaires. Sur 51 574 répertoriées par le Ministère de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Technique 42.170 écoles primaires publiques et bureaux gestionnaires seulement vont bénéficier de ces frais de fonctionnement. Pour ce faire, le Gouvernement prévoit de débloquer une enveloppe additionnelle mensuelle à 37.500 FC (22,4 USD) par écoles, soit 947 498 USD le mois et 2,842 millions USD d’octobre à décembre 2019. Ainsi, l’enveloppe sera portée à 50 USD (82.500 FC) le mois contre 26,9 USD (45.000 FC) payés actuellement.[1]
Le 17 octobre, le ministre congolais des Finances, José Sele Yalaghuli, et le vice-président de la Banque mondiale pour la Région Afrique, Hafez Ghanem, ont trouvé un accord pour que la Banque Mondiale puisse débloquer 5 milliards USD sur 5 ans, pour soutenir plusieurs projets déclenchés par le gouvernement congolais. Parmi les projets qui seront financés il y aura la gratuité de l’enseignement de base. Le premier décaissement ne sera disponible que dans les six prochains mois, si le Gouvernement remplit les conditions posées par la Banque Mondiale, notamment la présentation des statistiques fiables des élèves scolarisés ; enseignants payés, non payés et nouvelles unités ; des écoles publiques viables, non viables et à construire.
Selon Jean-Christophe Carret, directeur des opérations de la BM, les 5 milliards ne sont pas une aide budgétaire, mais plutôt une enveloppe à la portée de la RDC qui peut l’aider à réaliser d’autres projets, comme la couverture santé universelle, promise par le Chef de l’État.[2]
Le 20 novembre, le Premier ministre, Sylvestre Ilunga Ilunkamba, a affirmé que, «comme toute réforme importante, la gratuité de l’enseignement ne pouvait qu’entrainer diverses conséquences sur le système éducatif. Pour ce faire, le gouvernement est conscient des problèmes posés par la mise en œuvre de cette gratuité. Parmi les difficultés, il faut citer: les sureffectifs dans les classes, l’insuffisance du personnel enseignant, la carence des matériels didactiques, les menaces des mouvements sociaux dans quelques écoles conventionnées».Il a toutefois ajouté que le gouvernement a pris des mesures de réajustement des salaires des enseignants à tous les niveaux concernés. Il a également décidé de la mécanisation des enseignants non payés, de la prise en charge des frais de fonctionnement des écoles et des bureaux gestionnaires, ainsi que de l’octroi d’une indemnité de transport et de logement aux enseignants des grandes villes.[3]
Le 6 décembre, au cours de la 13ème réunion ordinaire du Conseil des ministres qu’il a présidée, le chef de l’État Félix Tshisekedi a informé les membres du Conseil des pourparlers positifs qui ont eu lieu entre, d’une part les membres de son Cabinet et des représentants de l’EPST, et d’autre part, les représentants des écoles conventionnées. «Ils ont abouti à l’engagement de la mécanisation des enseignants Non Payés (NP) à la fin du mois de janvier 2020 et à celle des enseignants Nouvelles Unités (N.U) au deuxième trimestre 2020», lit-on dans le compte rendu dudit conseil rendu public par le porte-parole du gouvernement, Jolino Makelele. Le président de la République a également exhorté le gouvernement à poursuivre ses efforts pour la construction de 300 écoles qui étaient programmées, dans le cadre de la concrétisation de la gratuité de l’enseignement de base. Le président Tshisekedi a rappelé que cette mesure de la gratuité est prévue dans la Constitution, et ne concerne que l’enseignement primaire.[4]
Le 13 décembre, en réagissant après le discours de Félix Tshisekedi sur l’état de la nation devant les deux chambres du parlement, le cardinal Fridolin Ambongo Besungu a affirmé que «il faut payer les enseignants. Actuellement dans le réseau catholique, tous les enseignants, les non payés et les nouvelles unités, vivaient des interventions des parents. Aujourd’hui, ils ne sont pas payés. Pour nous, c’est une grande préoccupation. Il faut que cette situation soit résolue le plus tôt possible. On ne doit pas attendre jusqu’au mois de février ou mars pour les prendre en charge. C’est maintenant parce que ce sont des pères et des mères de famille».[5]
Le 15 décembre, lors d’une conférence de presse, le secrétaire général de la CENCO, l’Abbé Donatien Nshole Babula, a donné la position de l’Eglise catholique sur la question de la gratuité de l’enseignement primaire. Après une réunion d’évaluation qui a réuni les coordinateurs diocésains et provinciaux sous l’égide de la Coordination Nationale des Ecoles Conventionnées Catholiques, il a d’abord constaté les avancées suivantes:
– Un afflux massif des enfants jadis déscolarisés ou dont les parents furent essoufflés par le paiement des frais de motivation.
– L’augmentation des salaires des enseignants des établissements publics.
– L’augmentation des frais de fonctionnement des écoles primaires.
– La suppression des frais de motivation à tous les niveaux (maternel, primaire et secondaire).
– La suppression des autres frais scolaires au niveau primaire.
– 166.649 (71,4%) enseignants des écoles conventionnés catholiques sont payés.
– 11.565 (70,7%) écoles conventionnées catholiques sont mécanisées et budgétisées.
Il a ensuite signalé les défis suivants:
– 22.698 (9,7%) enseignants ne sont pas payés (NP).
– 44.138 (18,9%) enseignants sont des nouvelles unités (NU) non enregistrées et ,donc, non payés.
– 1.898 (11,6%) écoles sont mécanisées, mais non budgétisées.
– 1.317 (8,1%) écoles ne sont ni mécanisées ni budgétisées.
– 1.330 (8,1%) écoles sont non agrées, mais opérationnelles.
– 243 (1, 5%) écoles sont agrées, mais non opérationnelles.
– La démotivation des enseignants NP et NU ainsi que tous les agents d’appoint en Provinces (directeurs de discipline, surveillants, sentinelles, secrétaires, ouvriers) qui ne sont pas payés.
– Grèves passives ou actives des enseignants dont la rémunération est non satisfaisante
– Difficulté de fonctionnement des écoles non budgétisées par manque des frais de fonctionnement.
– Effectifs pléthoriques entraînant l’insuffisance des infrastructures.
– Manque de matériels didactiques et de manuels scolaires particulièrement dans les classes de 7ème et 8ème pour certains cours inscrits au programme.
– Manque d’équité dans l’octroi des frais de fonctionnement aux écoles et aux bureaux des gestionnaires.
– L’arrêt de tous les projets entrepris au niveau des écoles notamment ceux de construction des nouvelles infrastructures et d’équipement.
Il a enfin proposé les recommandations suivantes:
– Exécuter la promesse du Chef de l’Etat de rémunérer les Non Payés (N.P) en janvier 2020;
– Rassurer les Nouvelles Unités (NU) qu’ils seront payés avec effet rétroactif pour les motiver,
– Identifier les écoles mécanisées et non budgétisées, aussi celles non mécanisées et non budgétisées et procéder au payement de leur frais de fonctionnement;
– Exécuter la promesse du Chef de l’Etat de mettre fin au moratoire de création des écoles, par l’harmonisation de la carte scolaire et la révision des structures des classes;
– Prendre en charge les frais des examens d’Etat afin d’éviter la corruption et d’encourager la rigueur dans ces épreuves, et mettre en place un comité d’organisation indépendant au niveau national et provincial, comprenant tous les partenaires éducatifs;
– Mettre en place un plan de construction et de réhabilitation des écoles.
– Assurer l’équipement en bancs et en outils didactiques;
– Procéder à la suppression ou à la fusion des bureaux gestionnaires pléthoriques et budgétivores créés en dehors des normes;
– Procéder à la réforme urgente du service de contrôle de la paie (SECOPE) pour garantir la transparence du fichier du personnel enseignant et la traçabilité des fonds mis à sa disposition;
– Promouvoir efficacement l’éthique par le contrôle et l’application rigoureuse des sanctions administratives et pénales en cas de pratiques de monnayage des actes éducatifs;
– Interdire les interventions intempestives de l’ANR, des partis politiques et autres services spéciaux dans les écoles.[6]
2. L’ADOPTION DE LA LOI DES FINANCES POUR L’ANNÉE 2020
Le 27 septembre, le Gouvernement a approuvé le projet de loi des finances pour l’exercice 2020. Il est chiffré à 7 milliards USD, soit 11.853,4 milliard de Francs Congolais, équilibré en recettes et en dépenses. Par rapport au budget 2019, le taux d’accroissement est de l’ordre de 14,5%. Le taux de croissance est arrêté à 5,4%. [7]
Compte tenu des priorités du chef de l’Etat, ce budget paraît très faible. Par exemple, les dépenses de l’éducation devraient atteindre le seuil de 20%, soit 1,7 milliards USD; la sécurisation de l’est du pays, qui nécessite d’énormes moyens pour les opérations militaires, est de 328 millions USD sur 330 millions USD prévus pour la dépense nationale; environs 1,412 milliards USD seront dépensés pour assurer le fonctionnement des institutions et des ministères; 2 milliards serviraient pour la rémunération des agents de l’Etat, etc.
Il faut rappeler que, en 2019, la capacité de mobilisation des recettes de l’Etat est de 4,9 milliards USD, contre une prévision de 5,9 milliards USD et que ce budget est inférieur à celui de 9 milliards USD, présenté en 2015, par l’ex Premier Ministre Augustin Matata, année où l’économie congolaise a enregistré un taux de croissance de 9,7%.[8]
Du côté de la majorité parlementaire, Gary Sakata Tawab, élu de Bagata, a estimé que ce budget ne permettra pas au gouvernement d’exécuter son programme et de répondre aux attentes des Congolais: «Je ne vois pas comment les 7 milliards peuvent être de nature à donner espoir à notre population. Déjà quand, sur les 7 milliards de USD, vous en prenez presque 3 pour appliquer la mesure sociale la plus importante qui a été prise par le chef de l’Etat, la gratuite de l’enseignement, il en reste 4 seulement. Par conséquent, pour les grandes infrastructures, les routes, la pacification du pays, il n’en reste pas grand-chose».[9]
Pour beaucoup d’observateurs, avec un modique budget de 7 milliards USD prévu en 2020, Félix Tshisekedi ne pourra pas tenir ses nombreuses promesses. Mettre en œuvre les mesures de lutte contre la corruption reste le premier moyen efficace pour accroitre les revenus publics en RDC et faire face aux besoins des populations. Les prévisions budgétaires du gouvernement contrastent avec les nombreuses promesses faites aux Congolais par le président de la République, Félix Tshisekedi.
La gratuité de l’enseignement de base et des soins de santé pour les militaires, la mise en œuvre du Plan national du numérique, la modernisation de l’agriculture, la création d’un fonds de garantie pour soutenir les jeunes entrepreneurs, l’indispensable augmentation des salaires des fonctionnaires, des militaires et des policiers, les travaux de construction d’infrastructure de base ou encore l’impérieuse nécessité de pacifier l’ensemble de la RDC, sont des chantiers qui nécessitent beaucoup de moyens.
Bien que le gouvernement prévoit un endettement extérieur de 7,5 milliards USD durant les trois prochaines années, pour soutenir ses politiques économiques au-delà des recettes locales à mobiliser, il apparait tout de même que Félix Tshisekedi n’aura pas les moyens de concrétiser ses promesses, du moins durant l’exercice 2020. D’autant plus que, selon plusieurs rapports, au moins 15 milliards de dollars (80 % des recettes publiques) échappent au trésor public chaque année à cause de la corruption, la fraude fiscale et le détournement de fonds publiques. Pour stopper cette hémorragie, qui reste la principale cause du sous-développement de la RDC, le chef de l’État avait annoncé la création d’une agence spécialisée de lutte contre la corruption et la mise en œuvre de mesures essentielles pouvant endiguer ce fléau national.[10]
Le 11 octobre, le Conseil des Ministres a adopté un projet de loi des finances pour 2020 chiffré à 10 milliards de dollars américains. «S’il y parvient, ça sera un exploit: 50% d’augmentation des recettes budgétaires c’est du jamais vu», commente un analyste. Pour plusieurs observateurs, sur la foi des rapports de réddition des comptes, le taux de mobilisation des recettes budgétaires n’a jamais dépassé 60%. Chaque fois qu’un gouvernement a dit qu’il mobilisera 100$, il n’a au mieux mobilisé que 60$. Selon certaines sources, les experts du gouvernement tablent sur 17% de ressources venant des partenaires extérieurs, soit environ 1.700.000 USD.[11]
Le 18 novembre, l’Assemblée Nationale a entamé l’examen du projet de loi de finances pour l’exercice 2020, déposé le 8 novembre et présenté le 18 novembre par le Premier ministre, Sylvestre Ilunga Ilunkamba. Le projet est évalué en recettes et en dépenses à 10 milliards USD. Les recettes extérieures sont chiffrées à 1,425 milliard USD contre 695,634 millions USD prévu en 2019, soit un taux d’accroissement de 104,9%. Les recettes internes sont évaluées à hauteur de 7,912 milliards USD contre 5,059 milliards USD en 2019, soit un taux d’accroissement de 56,4%.
Les recettes internes représentent 84,7% du budget général et les recettes extérieures représentent 15,3%. L’assemblée Nationale a déclaré recevable le projet du budget 2020 et l’a envoyé en commission Ecofin pour un examen approfondi.[12]
Pour le Premier ministre, Sylvestre Ilunga Ilunkamba, la hauteur de ce budget renvoie à la paradoxale question de savoir pourquoi et comment un pays aussi grand, aussi peuplé comme la RD. Congo, avec un potentiel économique aussi extraordinaire et des ressources naturelles inégalables, est-il classé parmi les pays disposant d’un budget des plus faibles au monde.
«Notre système fiscal fonctionne-t-il encore efficacement? Les recettes perçues par les agents des régies financières atterrissent-elles en totalité dans la caisse de l’Etat? Ceux qui détournent l’argent de l’Etat sont-ils réellement sanctionnés?», s’est-il interrogé.
«Le Gouvernement s’engage à poursuivre tous ceux qui s’adonnent au détournement des deniers publics, au coulage des recettes, à la corruption, ainsi qu’aux autres pratiques illégales, privant ainsi l’Etat de ses moyens d’action en faveur de la population», a assuré Ilunga Ilunkamba. Et s’il le faut, a-t-il dit, puisque le mal est profond, rien ne nous empêchera d’envisager la multiplication d’enquêtes déclenchées à partir des signes extérieurs d’enrichissement rapide et illicite. «Ceci concerne également et en premier lieu les membres du Gouvernement, ainsi que tous les autres responsables de l’Etat».
En gros, les principales innovations qu’apporte ce projet de budget sont la mise en œuvre de la gratuité de l’enseignement primaire, initiée à partir de septembre 2019, par l’augmentation salariale en faveur des enseignants, la mécanisation des enseignants non payés, la prise en charge adéquate des frais de fonctionnement des écoles, la construction et la réhabilitation des infrastructures scolaires et l’acquisition des matériels didactiques. Mais aussi la couverture santé universelle, par la construction, la réhabilitation et l’équipement des infrastructures sanitaires, le renforcement de la recherche biomédicale et l’acquisition des médicaments génériques pour ravitailler les hôpitaux et les centres de santé, en vue de permettre l’accès aux soins de santé pour tous.[13]
Alors que le Gouvernement a inscrit la lutte contre les groupes armés et le retour de la paix dans la partie Est de la RDC, comme l’une des priorités, le projet de loi de finances 2020 accorde les crédits de 355 millions de dollars à la défense, soit 3,7% des dépenses du budget général, dont 352 millions aux opérations militaires. En plus, la proposition du Gouvernement prévoit une enveloppe de 304 millions de dollars pour la rémunération d’un effectif de 204.898 militaires, contre celui de 221.333 militaires inscrits dans la loi des finances 2019. S’agissant des investissements, le projet de Loi de finances 2020 accorde un crédit de 24 millions de dollars pour financer 12 projets, notamment la réhabilitation du camp militaire de Bokala à Mbandaka, la base militaire de Kitona et celui de Kamina, la réhabilitation et l’extension de l’hôpital militaire camp Kokolo et Centre d’entrainement des troupes aéroportées (CETA).
En comparaison à celui de 2019, qui prévoyait une enveloppe de 330 millions USD et 328 millions USD affectés aux opérations militaires, on note une augmentation de 25 millions USD en 2020. Pas non plus d’augmentation significative de traitement de base pour le personnel militaire, dont le salaire de base se situe entre 75 USD à 150 USD. Comme en 2019, 80% de ce budget est affecté pour les besoins de la rémunération et de fonctionnement des services militaires.
Même si le budget de l’armé est très faible, en 2020, le gouvernement prévoit de former 128.749 militaires, dont 18.000 sous-officiers, de procéder au recrutement de 18.000 civils pour renforcer ses effectifs et de construire 14 États-majors et bases militaires.
Face à la nécessité de lutter contre les groupes armés encore actifs dans l’Est du Pays, pour y restaurer l’autorité de l’Etat, il est impérieux que le Gouvernement trouve les ressources suffisantes pour le faire.[14]
Dans le cadre de la gratuité de l’enseignement primaire, dans le projet de loi de finances 2020, le gouvernement congolais a prévu de mécaniser 45.000 enseignants sur le stock de 97.874 restés non payés après l’alignement de 34.740 au dernier trimestre 2019. Outre les infrastructures scolaires à construire, à réhabiliter et à équiper, l’exécutif compte également réajuster et prendre en charge les frais de fonctionnement de plus de 27.000 écoles.
Par conséquent, l’enveloppe de 2.784,6 milliards de FC (1,638 milliard de n$) a été alloué au ministère de l’enseignement primaire, secondaire et technique, dont 2.345,7 milliards de FC (1,38 milliard de $) pour la gratuité de l’enseignement primaire décrétée au début de cette année scolaire.
«S’agissant de la gratuité de l’enseignement de base, le gouvernement a prévu dans le projet de loi de finances 2020 sous examen, de construire et réhabiliter les écoles pour un montant de 222,5 milliards de FC (131 millions de $)et de les doter des équipements et mobiliers, pour un montant de 94,7 milliards de FC (55,7 millions de $) ainsi que les matériels didactiques et fournitures scolaires, pour 28,9 milliards de FC (17 millions de $); de réajuster les frais de fonctionnement de 27.448 écoles et de 2.791 bureaux gestionnaires; de mettre en place les cantines scolaires, en concurrence de 23,9 milliards de FC (14 millions de $), action importante pour éviter la déperdition scolaire; d’améliorer la base salariale des enseignants pour un effectif de 449.151 et d’instituer la prime de brousse pour 105.766 enseignant, dont 45.000 non payés», a déclaré au Sénat le vice-premier ministre, ministre du budget, Baudouin Mayo Mambeke.
Le salaire est toujours fixé à 410.284 FC soit 245 USD. Les enseignants habitant la ville de Kinshasa et Lubumbashi bénéficient, en dehors du traitement de base, du frais de transport et de l’indemnité de logement, alors que ceux des milieux ruraux continueront à gagner plus ou moins 100 $.[15]
Le 6 décembre, au cours d’un point presse tenu à Kinshasa, le représentant résident du Fonds Monétaire International (FMI) en RDC, Philippe Egoumé, tout en saluant la bonne volonté du gouvernement dans sa quête à mobiliser plus des recettes publiques internes, a affirmé que, une augmentation de 50 à 60% d’une année à une autre n’est pas réaliste. En effet, le FMI table sur accroissement des recettes publiques entre 1 et 2% du PIB (50 milliards $), soit 500 millions et 1 milliard $. En tenant compte des prévisions du FMI sur la trajectoire des recettes publiques, il risque d’avoir un gap de 4 à 5 milliards $ dans l’exécution du budget 2020. La mobilisation des recettes internes s’annoncent difficiles d’autant plus qu’une de grandes mines de la RDC, Matanda Mining, a fermé. Qui dit fermeture dit moins d’impôts et des taxes. Cette mine représentait 20% de la production minière de la RDC (cuivre et cobalt).[16]
Le 13 décembre, le vice-premier ministre, ministre du budget Baudouin Mayo Mambeke, a révélé que «le projet de loi de finances 2020 prévoit d’une part, l’électrification progressive des villes à partir de micro barrages qui seront construits et réhabilités et d’autre part, l’électrification de 145 territoires à l’aide des panneaux solaires en raison de 45 territoires par an», Actuellement, selon les données consultées par ACTUALITE.CD, 121 centres de population (agglomérations, bourgades, villes, villages) sont électrifiés. Aussi, 62 % de la longueur totale des lignes de distribution se trouvent dans le Kongo-Central et la ville de Kinshasa, et 15 % au Katanga. Au niveau national, le taux d’électrification moyen oscille autour de 9%. Par ailleurs, sur une puissance totale installée en RDC évaluée à 2.516 MW, la Société nationale de l’électricité (SNEL) dispose d’un parc de production d’environ 2.416 MW, soit 96 % de la puissance nationale installée, constitué essentiellement des centrales hydroélectriques.[17]
Le 15 décembre, au Palais du Peuple, l’Assemblée nationale et le Sénat ont voté la version finale du budget 2020, après harmonisation de vues entre les deux commissions mixtes paritaires.
En effet, les deux chambres du Parlement avaient adopté le projet de budget en des termes différents. Ce texte avait été envoyé en commission mixte paritaire pour harmonisation des vues, avant son adoption. Au Sénat, sur les 81 sénateurs présents, 79 avaient voté pour et 2 s’étaient abstenus. Ensuite, à l’Assemblée nationale, sur 361 députés qui ont pris part au vote, 353 ont voté oui, 2 ont voté non et 6 se sont abstenus. Le budget national de l’exercice 2020 a connu une légère augmentation de 1.324 milliards de Francs congolais (778 823 USD, au taux de 1.700 Fc pour un dollar). Cette hausse a été repérée par le Sénat dans le secteur des Mines et de l’Intérieur notamment. Ces recettes supplémentaires ne se retrouvaient pas dans le projet du budget introduit par le Gouvernement et voté par l’Assemblée nationale.[18]
3. LE DISCOURS DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE DEVANT LE PARLEMENT
Le 13 décembre, lors de son discours sur l’état de la nation, prononcé devant les deux chambres réunies en congrès, le Président de la République, Félix Tshisekedi, a affirmé que deux millions cinq cent mille enfants à l’âge de scolarisation et jadis exclus du système éducatif sont retournés à l’école, grâce au programme de la gratuité de l’enseignement de base. Il a souligné que la gratuité de l’enseignement primaire consiste en la suppression de tous les frais de scolarité jusqu’aujourd’hui payés par les parents. Par ailleurs, en vue de mettre fin à la prise en charge des enseignants par les parents, le Président Tshisekedi dit avoir instruit le gouvernement, depuis septembre 2019, à procéder au réajustement des rémunérations du personnel enseignant ainsi que des frais de fonctionnement des écoles et Bureaux gestionnaires. «Il sied de noter que depuis lors, aucun retard de paiement de salaire n’a été enregistré», s’est-il réjoui.
Prenant en compte les observations du Cardinal Fridolin Ambongo Besungu, lors de la célébration de sa messe de prémices à Kinshasa en date du 17 novembre 2019, Félix Tshisekedi a dit avoir engagé son cabinet dans les pourparlers avec les gestionnaires des écoles conventionnées catholiques et le Ministère de l’Enseignement Primaire Secondaire et Technique, «pour apporter des réponses idoines à la prise en charge des enseignants non payés et des nouvelles unités ainsi qu’à l’insuffisance des infrastructures scolaires, en vue d’éviter que cette mesure salutaire ne produise des effets pervers susceptibles de porter atteinte au système éducatif … A cet effet, sur 132.617 enseignants Non Payés, le Gouvernement a procédé depuis le mois de septembre dernier à la prise en charge de 34.740 enseignants Non-Payés du primaire. Les 97.877 enseignants non payés de la maternelle et du secondaire sont programmés pour le premier trimestre 2020. A cela il faut ajouter la prise en charge des nouvelles unités après leur identification au courant du deuxième trimestre 2020». Pour pallier l’insuffisance des écoles et contenir l’afflux des élèves dû à la mise en œuvre effective de la gratuité de l’enseignement primaire, le programme du Gouvernement prévoit la construction et l’équipement de 10.000 salles de classe opérationnelles dans les premiers mois de 2020, a souligné le Chef de l’Etat, qui a aussi signalé que, «dans le cadre du programme des 100 jours, sur 150 écoles prévues, 132 sont totalement achevées».[19]
Dans son discours sur l’état de la nation, le Président de la République, Félix Tshisekedi, a dit ne pas être d’accord avec ceux qui, convaincus du fait que les recettes attendues ne pourront dépasser 6,3 milliards de dollars, pensent que la loi des finances pour l’année 2020 est irréaliste et utopique. Il a indiqué que ce n’est pas avec un budget de 4 milliards USD que le gouvernement va mettre fin à la pauvreté dans laquelle vivent les Congolais. Selon certaines évaluations, dans ce pays béni des dieux quant aux ressources en eau, terre et minerais, la misère frappe entre trois quarts et deux tiers de la population congolaise. «J’ai entendu des gens qualifier ce budget d’utopique, d’irréaliste et de trop ambitieux. Je ne suis pas d’accord avec eux car, pour un Grand Congo, il faut une grande ambition», a estimé le Chef de l’Etat, en ajoutant que l’Angola, pays post-conflit comme la RDC et ravagé après plus de 25 ans de guerre, a aujourd’hui un Budget de 32 milliards USD, pour une population de 29 millions. «Comment peut-on s’étonner que le gouvernement congolais propose un budget de 10 milliards USD avec 80 millions de congolais?», s’est-il interrogé.
Le Président Tshisekedi en a appelé à tous les Congolais à faire preuve du civisme fiscal, tout en promettant de s’assurer que les revenus fiscaux servent effectivement à répondre aux besoins du peuple. «Je suis au courant de la persistance des pratiques de corruption et de l’existence des réseaux de prédation et de fraudes massives qui occasionnent des détournements et des manques à gagner au Trésor public. Tous ces réseaux seront démantelés», a déclaré le Chef de l’Etat, en restant catégorique au sujet de la lutte contre la corruption: «Je serai intraitable dans la lutte contre la corruption. C’est l’un des moyens de regagner la confiance de notre peuple d’abord, et celle de nos partenaires ensuite». Dans un pays où les recettes s’évaporent avant d’arriver dans les caisses de l’État, Félix Tshisekedi appelle à ce que un système informatique de traçabilité de recette soit effectif d’ici à six mois. Dans ce contexte, al a même évoqué la «mise en place d’une structure judiciaire, voire même d’une juridiction spécialisée dans la lutte contre la fraude fiscale, le blanchiment de capitaux ainsi que le détournement des deniers publics».[20]
Sur le plan politique, le Président de la République, Félix Tshisekedi, a appelé à la vigilance pour le respect des articles intangibles de la Constitution, mais il a cependant relancé l’idée d’une réforme du texte fondateur de la RDC sur plusieurs points. Premier d’entre eux: le retour à une présidentielle à deux tours, afin que «le vainqueur puisse être revêtu de la légitimité suffisante pour appliquer sa vision». Le président Tshisekedi a aussi appelé les députés à revoir le modalités des élections indirectes des gouverneurs et sénateurs, notamment en raison d’allégations de corruption sur les scrutins de 2018. Il a aussi appelé le législateur à intégrer le principe de la double nationalité, pour que le Congo s’adapte enfin, «à l’évolution du monde».
Sur le plan sécuritaire, Félix Tshisekedi a fait observer une minute de silence en mémoire des victimes des violences dans le pays, et s’est félicité des offensives de l’armée dans les provinces du Nord et Sud-Kivu contre les groupes armés.[21]
[1] Cf VM Goffman – Actualité.cd, 08.10.’19
[2] Cf Siméon Isako – Cas-info.ca, 18.10.’19; VM Goffman – Actualité.cd, 08.10.’19
[3] Cf Radio Okapi, 21.11.’19
[4] Cf Jephté Kitsita – 7sur7.cd, 07.12.’19
[5] Cf Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 13.12.’19; Radio Okapi, 14.12.’19
[6] Cf http://cenco.org/la-cenco-se-prononce-sur-la-gratuite-de-lenseignement-primaire/
Ange Makadi Ngoy – 7sur7.cd, 16.12.’19; Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 16.12.’19
[7] Cf Fonseca Mansianga – Deskeco.com, 28.09.’19
[8] Cf VM Goffman – Deskeco.com, 30.09.’19
[9] Cf Radio Okapi, 30.09.’19
[10] Cf Amédée Mwarabu – Deskeco.com, 30.09.’19
[11] Cf Alphonse Muderhwa – 7sur7.cd, 11.10.’19
[12] Cf Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 18.11.’19
[13] Cf La Prospérité / MCP, via mediacongo.net, 19.11.’19
[14] Cf VM Goffman – Actualité.cd, 21.11.’19
[15] Cf Fonseca Mansianga – Actualité.cd, 13.12.’19
[16] Cf Israël Mutala – 7sur7.cd, 06.12.’19
[17] Cf Fonseca Mansianga – Actualité.cd, 13.12.’19
[18] Cf Radio Okapi, 16.12.’19; Berith Yakitenge – Actualité.cd, 15.12.’19
[19] Cf Radio Okapi, 13 et 14.12.’19
[20] Cf Radio Okapi, 13.12.’19
[21] Cf RFI, 13.12.’19