Congo Actualité n. 325

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: LES MASSACRES AU KASAÏ → SYMPTÔMES DE LA CRISE POLITIQUE

  1. LE KASAÏ ENCORE PLONGÉ DANS L’INSÉCURITÉ
  2. LA DÉCLARATION DES ÉVÊQUES MEMBRES DE L’ASSEMBLÉE ÉPISCOPALE PROVINCIALE DE KANANGA
  3. L’OUVERTURE DU PROCÈS CONTRE LES MILITAIRES PRÉSUMÉS AUTEURS DE LA TUERIE DE MWANZA LOMBA
  4. UN GROUPE D’EXPERTS INTERNATIONAUX POUR LE KASAÏ

 

ÉDITORIAL: LES MASSACRES AU KASAÏ → SYMPTÔMES DE LA CRISE POLITIQUE

 

 

 

 

1. LE KASAÏ ENCORE PLONGÉ DANS L’INSÉCURITÉ

 

Le 19 juin, dans une note technique sur les violences commises au Grand Kasaï et, plus particulièrement sur les dommages soufferts par les institutions ecclésiastiques, la Nonciature apostolique en RDC évoque, à partir du 13 octobre 2016 (date de la première attaque d’une paroisse),  le chiffre de 3.383 « décès signalés » et plusieurs structures ecclésiastiques endommagées ou fermées, notamment 60 paroisses, 34 maisons religieuses, 31 centres de santé catholiques, 141 écoles catholiques, cinq séminaires et un évêché détruit. La note indique par ailleurs que 20 villages ont été « complètements détruits », dont « 10 par les FARDC (armée congolaise), 4 par les miliciens, 6 par des auteurs inconnus ». Elle mentionne aussi 30 fosses communes, au lieu des 42 signalées par l’ONU et 3.698 habitations privées détruites.[1]

 

a. Actes de violences attribués aux miliciens Kamwina Nsapu

 

Depuis le début de l’année, à Luiza et à Kazumba, dans la province du Kasaï-Central, près d’une vingtaine de chefs coutumiers ont été décapités par des personnes se réclamant de la milice Kamuina Nsapu. A ces victimes s’ajoutent d’autres personnes, dont le nombre reste inconnu.

Les autorités traditionnelles invitent les habitants de cette province à se désolidariser des auteurs de ces crimes et à cultiver la paix, pour favoriser la tenue de l’enrôlement des électeurs.[2]

 

Le 3 juin, des miliciens présumés Kamwina Nsapu ont décapité le chef coutumier Mupoyi Mwanangana, chef du groupement de Bena Kambulu (village Luvula) et ses deux fils, à 130 km au sud de Tshikapa, dans la province du Kasaï. Le même jour, les miliciens ont également décapité un enseignant de l’École Primaire du même village. Un membre de la société civile locale a affirmé que les miliciens règnent en “maîtres” dans le secteur de Kasadisadi.[3]

 

Le 9 juin, dans la matinée, des hommes armés non identifiés ont tué Kalala Muzembe, chef de groupement de Bena Mpunga, dans la chefferie de Bakwa Kalonji, au Kasaï-Oriental. Selon le président de la société civile de Tshilenge, Jean-Claude Ngandu, «des gens armés, au nombre de vingt, sont entrés dans le groupement de Bena Mpunga. Ils ont commencé d’abord par bruler les cases. [Ils sont] arrivés chez le chef de groupement de Bena Mpunga, Kalala Muzemba. A sa sortie, l’une de ces personnes a tiré directement sur lui et il est décédé sur place. Et celui qui a tiré sur lui, c’est l’enfant de son frère, mais qui est rival, prétendant au même pouvoir coutumier».

Le président de la société civile a par ailleurs demandé aux autorités de prendre les dispositions nécessaires et urgentes pour sécuriser la population locale et de s’impliquer pour mettre fin aux tensions sociales liées à la contestation de pouvoir coutumier dans la chefferie de Bakwa Kalonji.​[4]

 

Le 10 juin, douze personnes en provenance du territoire de Kapanga (Lwalaba) ont été décapitées à Kalala Diboko, une localité du territoire de Luiza (Kasaï-central). Selon des sources locales,

les victimes s’étaient rendues à Luiza pour sensibiliser les jeunes de la contrée à quitter les rangs de la milice Kamwina Nsapu et favoriser le retour de la paix dans la région. Des miliciens qui ont mal accueilli cette initiative ont encerclé les douze émissaires et les ont décapités. Des sources sur place indiquent qu’au lendemain de cet incident, l’armée a lancé une offensive contre ces miliciens.[5]

 

Le 21 juin, des présumés miliciens Kamwina Nsapu ont décapité deux (2) agents de service de renseignement militaire et blessé neuf (9) autres par machette au village Nsaka Simon (Kasaï central), situé à 50 kilomètres au sud de la cité de Luiza, (Territoire de Luiza). D’après des sources locales, les infortunés se rendaient à Masuika, 350 kilomètres au Sud-est de Kananga. Le Chef de secteur de Loatshi, qui a confirmé la nouvelle, a attribué l’attaque aux miliciens Kamwina Nsapu.

L’armée, qui mène une opération de “ratissage” sur le tronçon Masuika, n’a cependant pas confirmé ni infirmé les faits.[6]

 

Le 15 juin, la société civile a révélé que trois jeunes hommes qui travaillaient dans un centre d’inscription de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) sont portés disparus depuis plus de dix jours dans le territoire de Tshilenge, au Kasaï-Oriental. Selon le président de la société civile de Tshilenge, Jean-Claude Ngandu, les trois personnes auraient été enlevées par des miliciens Kamuina Nsapu. Les trois agents travaillaient dans le centre d’enrôlement installé à l’école primaire Dinsanga, dans le groupement de Bena Tshiswaka. Selon Jean-Claude Ngandu, «pendant qu’ils avaient eu échos que leur village ferait l’objet de l’attaque de la milice, ils ont voulu sortir. Et c’est à leur sortie qu’ils ont croisé les miliciens qui entraient. Ils ont été [emmenées] par les miliciens, jusqu’à une destination inconnue».[7]

 

Le 24 juin, après l’incendie d’une soixantaine de cases par des présumés miliciens Kamuina Nsapu, les habitants du groupement de Bena Mpunga, dans le territoire de Tshilenge, au Kasaï-Oriental, ont déserté leurs villages. Le président de la société civile de Tshilenge, Jean-Claude Ngandu, rapporte que les miliciens ont attaqué le groupement vers 14 heures (heure locale). «A leur arrivée, la sécurité commise dans cette localité s’est échappée. Les miliciens ont brûlé plus de soixante-six cases», affirme-t-il. Cette attaque a contraint les habitants à quitter leurs villages et à trouver refuge dans la brousse et dans les agglomérations environnantes. Le gouverneur Ngoyi Kasanji s’est rendu à Bena Mpunga le même jour après l’attaque. Il a décidé un renforcement de la sécurité. Des militaires y ont été déployés en renfort à la police.[8]

 

b. Actes de violence attribués à l’armée ou aux autorités

 

Le 20 juin, le Haut Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, a accusé les autorités de la République démocratique du Congo d’armer une milice menant d' »horribles attaques » contre les civils dans le Kasaï. «Je suis consterné par la création et l’armement d’une milice, Bana Mura, qui soutiendrait les autorités dans la lutte contre la rébellion Kamwina Nsapu, mais qui a mené des attaques horribles contre des civils des groupes ethniques luba et lulua», a déclaré M. Zeid, devant le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU réuni à Genève. Selon un porte-parole de l’ONU,  le Haut Commissaire aux droits de l’Homme n’a pas dit clairement quelles étaient les autorités qui avaient apporté leur soutien à cette milice.

Alarmé par les rapports faisant état d’atrocités et étant donné les difficultés d’accès pour aller dans le Kasaï, le Haut-Commissaire a décidé, la semaine dernière, d’envoyer dans les pays proches de la RDC une équipe d’enquêteurs pour y rencontrer les réfugiés du Kasaï ayant fui les violences.

Suite aux rapports reçus, Zeid Ra’ad Al Hussein a affirmé que «les réfugiés de plusieurs villages du territoire de Kamonya ont indiqué que les Bana Mura ont au cours des deux derniers mois tués, mutilés ou brûlés à mort des centaines de villageois, y compris des enfants de deux ans et moins, et ont détruit des villages entiers. Dans le village de Cinq, la milice aurait été mise sur place par un chef local bien connu, qui a fourni des machettes, des fusils de chasses et du carburant. Des attaques similaires semblent avoir eu lieu dans plus de 20 villages à Kamonya au cours des deux derniers mois».

D’après le Haut commissaire de l’ONU, de nombreuses victimes et des témoins ont déclaré que «la milice est organisée et armée par les autorités locales. Des agents de l’Etat aussi sont impliqués dans l’armement et la direction de la milice. En effet, des membres des unités locales de l’armée et de la police congolaises, ainsi que des chefs traditionnels, étaient présent lors des attaques des Bana Mura».

Selon Thierry Monsenepwo, Président de la ligue des jeunes de la CCU (Convention des congolais unis) et membres de la Majorité Présidentielle, «l’ONU a des informations biaisées, car le nom de « bana mouras » est celui qui est attribué à une branche de l’armée qui a été formée à Moura. Donc ce n’est pas une milice».[9]

 

Le 22 juin, la députée nationale Eugénie Tshika Mulumba a dénoncé les barrières érigées entre la ville de Mbuji-Mayi et le territoire de Kabeya Kamwanga (Kasaï-Oriental), par les agents de service de sécurité, à la recherche des miliciens de Kamuina Nsapu. D’après elle, les autorités doivent mettre fin à cette pratique qu’elle considère comme «une tracasserie». Elle a affirmé que «on brime beaucoup les gens de chez nous, on incendie les maisons et pillent même le peu qu’ils ont… Sur le tronçon Mbuji-Mayi-Munkamba, il y a dix barrières et à chaque passage, on doit payer 1 000 FC (6.66 USD) et, si tu n’as pas cet argent, on te tape. Même ceux qui viennent dans les camions, on les fait tous descendre et chacun doit payer». Eugénie Tshika Mulumba est députée nationale élue de Kabeya Kamwanga pour le compte de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).[10]

 

c. Quelques signes d’espoir

 

Le 8 juin, à Kananga, l’armée a présenté au gouverneur intérimaire du Kasaï Central des « armes récupérées des mains des miliciens Kamwina Nsapu« . Le général Marcellin Issa Assumani, commandant du secteur opérationnel, a présenté un arsenal constitué de 1500 calibres de chasse, 268 Ak 47, 78 Gp, 72 fusils d’assaut automatiques, 7 lances roquettes, 7 boîtes de cartouches de chasse et plusieurs munitions de guerre; matériels récupérés dans plusieurs localités du Grand Kasaï. En plus des armes présentées, 11 motos et 4 véhicules dont un camion militaire étaient dans le lot dévoilé par l’opération militaire. Le vice-gouverneur Justin Milonga en a profité pour lancer un appel aux miliciens qui traînent encore les pas “à se rendre aux autorités” et a considéré cet acte comme la suite d’un processus de “pacification de l’espace Grand Kasaï”. Avis partagé également par le général Assumani qui a parlé d’un “retour à la normalisation de la situation au Kasaï”.[11]

 

Le 14 juin, dans la commune de Nganza, nonante-sept (97) miliciens Kamuina Nsapu se sont rendus aux autorités du Kasaï Central. Les miliciens ont rendu 4 armes à feu, dont 1 kalachnikov, 1 calibre 12 et 2 armes traditionnelles de chasse, une dizaine d’armes blanches et des amulettes. Le gouverneur intérimaire du Kasaï Central, Justin Milonga, a salué ce geste qui, selon lui, va consolider la paix et il a remis une somme d’argent aux ex-combattants en guise d’encouragement. Ces derniers viennent s’ajouter aux 680 autres ayant déjà déposé les armes.[12]

 

Le 23 juin, le vice-gouverneur du Kasaï-Oriental, Jean-Pierre Mutanda, a annoncé que «les trois agents de la CENI [Commission électorale nationale indépendante] aux mains de présumés miliciens de Kamuina Nsapu depuis plus deux semaines, seront de retour dans quarante-huit heures». Toutefois, il n’a donné aucun détails sur leur libération.[13]

 

 

2. LA DÉCLARATION DES ÉVÊQUES MEMBRES DE L’ASSEMBLÉE ÉPISCOPALE PROVINCIALE DE KANANGA

 

Le 31 mai, dans une déclaration, les Évêques membres de l’Assemblée Épiscopale Provinciale de Kananga (ASSEPKA) ont affirmé que, «depuis l’indépendance, le Kasayi est l’une des régions dont le développement a peu préoccupé l’Etat congolais. Les frustrations et le désespoir, déjà fruit de la mauvaise gouvernance et de cette marginalisation, sont aggravés au Kasayi par le phénomène Kamwina-Nsapu et par la répression excessive des forces de l’ordre. Des croyances et des pratiques fétichistes qui séduisent une bonne partie de nos frères et sœurs, l’enrôlement des enfants et des jeunes dans des groupes armés et criminels, les massacres de nombreux compatriotes aussi bien par les partisans de Kamwina-Nsapu que par les Forces de l’ordre, la destruction méchante des biens publics, l’incitation à des antagonismes claniques, les intimidations et l’insécurité généralisée, le déplacement forcé de plusieurs milliers de personnes, l’hostilité contre l’Eglise catholique manifestée par la maltraitance des agents pastoraux et la destruction des églises, des écoles, des centres de santé, des hôpitaux, des couvents… sont autant des facteurs négatifs qui désintègrent les bases spirituelles, fraternelles et matérielles de la société».

Selon les Évêques, «cette crise est politique et ses solutions sont dans l’avènement d’un véritable Etat de droit». C’est pourquoi ils exhortent les dirigeants du pays et de leurs provinces à un véritable amour de la patrie: «Leur devoir est de rechercher le bien-être de la population, en s’attaquant aux véritables causes de la misère». A cet égard, ils se disent convaincus que «l’application intégrale de l’Accord politique global et inclusif du Centre Interdiocésain de Kinshasa, parrainé par la CENCO, reste la meilleure voie pour réconcilier le pays et poser les bases d’un avenir rassurant pour tous». Selon les Évêques, «les fausses solutions mises en place ne contribuent pas au bien commun et ne font qu’aggraver la souffrance du Peuple. La voie choisie par les partisans de Kamwina-Nsapu est une impasse. Ce n’est ni par la violence ni par la culture de la mort qu’on peut contribuer à la démocratisation et au développement du pays». C’est pourquoi, ils demandent à tous ceux qui ont pris les armes de «revenir à la raison, renoncer à la haine et à la violence et s’engager sur le chemin de la paix».

Les Évêques demandent à la Justice de «établir les responsabilités et sanctionner les coupables». Par rapport à la découverte des fosses communes dans la Région, ils estiment  urgent que «une enquête indépendante soit diligentée, pour faire la lumière sur l’ampleur des massacres».

Enfin, selon les Évêques, «il est impérieux que les gouvernants s’investissent dans la création des conditions de sécurité pouvant permettre à toute la population du Kasayi de se faire enrôler et de participer au processus électoral, car l’avènement de l’Etat de droit en dépend. Toute entrave à ce processus privera la population de la possibilité de renouveler la classe politique congolaise et se donner les responsables de son choix».[14]

 

 

3. L’OUVERTURE DU PROCÈS CONTRE LES MILITAIRES PRÉSUMÉS AUTEURS DE LA TUERIE DE MWANZA LOMBA 

 

Le 5 juin, la cour militaire de Mbujimayi, de la province du Kasaï oriental, a ouvert le procès au premier degré des neuf militaires des FARDC accusés d’avoir commis des massacres sur la population de Mwanza Lomba, plus précisément de la localité de Bena Tshikasu, en territoire de Miabi (Kasaï-Oriental). Dans le box des accusés: sept militaires des forces armées congolaises. Deux, toujours en fuite, sont jugés en leur absence. Huit d’entre eux sont accusés de crime de guerre par meurtre, mutilation, traitement cruel, inhumain et dégradant. Un neuvième militaire est quant à lui accusé de non-dénonciation d’une infraction relevant des juridictions militaires. Il serait le premier à avoir reçu la vidéo de la tuerie sur son téléphone. Toutes ces infractions sont punissables par l’article 223.3 de la loi Nº15/022 du 31 décembre 2015, modifiant et complétant le code pénal militaire congolais. L’audience du 5 juin a été principalement consacrée à l’identification des prévenus et à la lecture des charges respectives. La vidéo a été visionnée à huis clos par la cour, les avocats et les accusés.. À ce propos, les militaires connaissaient-ils l’existence de la vidéo? Les réponses sont contradictoires. Son auteur affirme avoir informé ses compagnons et la leur avoir montrée. Faux, répondent les autres.

Le 18 mars, l’auditeur général des FARDC, le général major Joseph Ponde Issambwa, avait annoncé que sept suspects, tous des éléments FARDC, avaient été arrêtés suite à une vidéo qui circulait sur internet, mettant en cause des hommes en uniforme présentés comme des FARDC, en train de tuer des adeptes de Kamuina Nsapu. «En rapport avec cette vidéo, nous avons mis la main sur sept suspects, tous éléments FARDC. Il s’agit de Major Nyembo, celui qui commandait les opérations, Major Bitshunda Martin Pitshou, commandant en second des opérations, Capitaine Séraphin Palimbio, chef de la première section pendant les opérations, Lieutenant Silavuvu Dodokolo, fusilier pendant les opérations, adjudant-chef Mohindo, bien que n’ayant pas fait partie de l’expédition, a pourtant été surpris en possession d’une copie de la vidéo lui transmise par le sergent Major Mameno Katembo, lui-même aussi fusilier de la première section, auteur de l’enregistrement vidéo et l’adjudant deuxième classe Amani, fusilier de la première section», avait affirmé le Général major Joseph Ponde Issambwa.[15]

 

Le 9 juin, quatre jours à peine après l’ouverture du procès, l’audience devrait être consacrée au réquisitoire du ministère public et à la plaidoirie de la défense. Lors des deux premiers jours du procès, le ministère public a interrogé les prévenus. Le major Urbain Nyembo Bwanamoya, commandant des opérations, a reconnu que ses soldats avaient tué des hommes et des femmes. Mais il a refusé de les qualifier de «civils». Pour lui, il s’agit de «miliciens». Il s’est en revanche révélé incapable de dire combien de personnes ses hommes ont tués. Il a insisté: la 21e région miliaire les a envoyés dans la région de Mwanza Lomba, au Kasaï central, pour mettre en déroute les éléments fidèles au chef coutumier Kamuina Nsapu sur ce territoire. Les avocats de la défense qui avaient demandé plus de temps pour s’imprégner du dossier n’ont pas été entendus.[16]

 

Le 14 juin, au cours de l’audience du procès des militaires accusés de massacre dans la localité de Mwanza Lomba au Kasaï-Oriental, les prévenus ont affirmé avoir tué sept personnes qu’ils ont ensuite enterrées, en dehors du village. La cour militaire leur a demandé pourquoi ils n’avaient pas laissé les familles des victimes organiser dignement les obsèques. L’un des prévenus, le major Nyembo, commandant des opérations de Mwanza Lomba, a répondu qu’il en est toujours ainsi, citant des opérations auxquelles il a participé à Moba, dans l’ex-Katanga ainsi que dans la partie Est du pays. Questionnés à ce sujet, des experts de l’Etat-major de l’armée qui ont rejoint la défense ont expliqué qu’il existe une pratique militaire consistant à ensevelir les cadavres de toute personne morte sur le terrain de combat pour des raisons de santé publique et dans le souci de ne pas affecter le moral des troupes qui viennent en renfort.

La cour militaire du Kasaï-Oriental a décidé, sur demande de la défense, une descente sur le terrain à Mwanza Lomba où le présumé massacre a été commis. Elle estime qu’une descente à Mwanza Lomba est importante pour une bonne instruction du dossier. Pour sa part, le ministère public juge superflue cette descente à Mwanza Lomba. Selon lui, la cour et la défense n’ont qu’à compulser les rapports des experts qui s’étaient rendu à Mwanza Lomba, à la suite de la diffusion sur les réseaux sociaux d’une vidéo où on voit des hommes en uniforme, présentés comme des militaires congolais, en train de tuer des présumés partisans du chef traditionnel Kamuina Nsapu.[17]

 

Le 24 juin, le tribunal militaire de Mbuji-Mayi, au Kasaï-oriental, a abandonné les accusations de crime de guerre et de crime contre l’humanité contre sept soldats poursuivis après un massacre présumé de civils à Mwanza Lomba. L’avocat de la défense, Jimmy Bashile, a affirmé que, «sur décision du tribunal, les sept accusés ne seront plus poursuivis que pour des infractions du droit interne, à savoir: meurtre, dissipation de munitions et outrage aux bonnes mœurs».

L’avocat de la défense, Jimmy Bashilé, a donc plaidé pour l’acquittement pur et simple de ses clients, car il estime que la qualification de crime de guerre ne pouvait être retenue. Selon lui, les militaires ont agi en légitime défense après une embuscade. Et la vidéo ne permettrait pas à elle seule d’identifier qui était ou non armé ce jour-là.

Pour son confrère, l’avocat Daisy Mukebayi, qui observe le procès en indépendant, la vidéo est au contraire tout à fait explicite: «C’est une volonté manifeste de la cour de vouloir démontrer que des violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire n’ont pas été commises. C’est minimiser la gravité des faits. En réalité, quand vous visualisez la scène, tous les actes qui sont commis rentrent dans la définition de ce que l’on entend par crimes de guerre, crimes contre l’humanité».[18]

 

Le 26 juin, le Bureau de l’ONU aux droits de l’homme en RDCongo (BCNUDH) a regretté la décision du tribunal militaire du Kasaï de ne pas poursuivre pour crime contre l’humanité les sept militaires congolais poursuivis pour le meurtre de civils à Mwanza Lomba.

«Les charges de crime de guerre qui sont tombées peuvent être justifiées parce qu’il n’y a pas de conflit déclaré dans le Kasaï», a commenté le directeur du BCNUDH, José-Maria Aranaz. En revanche, a-t-il poursuivi, il aurait été important que l’accusation de «crime contre l’humanité» soit retenue contre ces soldats car cela aurait constitué «un signal fort en direction de tous ceux qui sont impliqués dans les violences au Kasaï». «Juger ces crimes est une manière de prévenir d’autres violations de droits de l’homme et l’usage excessif de la force par les forces armées», a-t-il ajouté.

L’ONU accuse les rebelles Kamuina Nsapu d’enrôler des enfants-soldats et d’avoir commis des atrocités, tout en dénonçant l’usage disproportionné et indiscriminé de la force par l’armée congolaise ainsi que la mobilisation et l’armement des milices supplétives par les autorités.

Le BCNUDH estime que «les officiers doivent garantir l’usage proportionné de la force par des éléments, militaires ou policiers, sous leur commandement», balayant tout argument qui consiste à attribuer ces excès à «des éléments isolés de l’armé».[19]

 

Le 26 juin, l’auditeur militaire a requis la perpétuité contre deux majors, dont le commandant de l’opération, le sergent-major qui a filmé la fameuse vidéo et deux autres soldats toujours en fuite. Vingt ans ont été requis contre un capitaine et un lieutenant, dix ans contre un adjudant et douze mois dont six avec sursis pour un adjudant-chef.

Pour la défense, la cour devrait déclarer non recevable l’infraction de dissipation de munitions de guerre, car les militaires n’auraient utilisé que le tiers de la dotation en cartouche. Les avocats de la défense ont enfin plaidé la relaxe, affirmant que ces soldats n’avaient fait que leur devoir pour défendre le territoire face aux miliciens.[20]

 

 

4. UN GROUPE D’EXPERTS INTERNATIONAUX POUR LE KASAÏ

 

a. Le Haut Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme plaide pour une commission d’enquête internationale indépendante

 

Le 1er juin, une coalition de 262 organisations non gouvernementales congolaises et de 9 organisations non gouvernementales internationales a demandé au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies la création d’une commission spéciale pour mener une enquête internationale sur les violences meurtrières commises au Kasaï depuis septembre 2016. Selon ces Ong, «une enquête internationale indépendante est nécessaire pour documenter les abus, identifier les responsables et aider à garantir la justice pour les victimes».[21]

 

Le 5 juin, l’ambassadrice des États-Unis auprès du Conseil de Sécurité, Nikki Haley, a demandé au secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, la création d’une commission d’enquête sur le meurtre des deux experts de l’ONU  et sur les violations des droits de l’homme commises dans la province de Kasaï.[22]

 

Le 6 juin, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, a indiqué attendre deux jours pour obtenir du gouvernement congolais des engagements clairs sur des investigations sur les violences commises dans la province du Kasaï. «A moins que je reçoive d’ici le 8 juin des réponses appropriées du gouvernement concernant une enquête conjointe, j’insisterai sur la création d’un mécanisme d’enquête international pour le Kasaï», a déclaré le Haut-Commissaire Zeid Ra’ad Al Hussein, à l’ouverture de la 35e session du Conseil des droits de l’Homme à Genève (du 6 au 23 juin). A l’issue de chaque session du Conseil, ses 47 Etats membres peuvent en effet décider, à travers l’adoption de résolutions, de créer des enquêtes internationales, comme il en existe pour la Syrie.[23]

 

Le 6 juin, la ministre des Droits humains, Marie-Ange Mushobekwa, a répliqué que «on ne donne pas d’ultimatum à un État souverain». Toutefois elle a affirmé que le gouvernement congolais reste ouvert et accepte la collaboration de l’ONU pour une enquête internationale sur les violences au Kasaï. «Le gouvernement de la RDC n’a rien à cacher. Nous restons ouverts à tout appui logistique et technique. Si l’ONU veut nous envoyer des experts en appui aux enquêteurs congolais pour faire la lumière dans l’assassinat de Sharp et Catalan et d’autres Congolais assassinés par la milice de Kamuina Nasapu, ces équipes sont les bienvenues», a affirmé Marie-Ange Mushobekwa. Selon la ministre des Droits humains, la RDC n’est pas opposée à une «collaboration de l’ONU», mais devra garder la direction de l’enquête. «Je souligne que le gouvernement de la RDC va garder la direction de l’enquête», a-t-elle insisté.[24]

 

Le 7 juin, la ministre des Droits humains, Marie Ange Mushobekwa Likulia, a confirmé que la RDC a accepté la proposition de l’ONU de mener une enquête conjointe sur les violences observées dans le Kasaï depuis plusieurs mois. Mais elle a affirmé aussi que le gouvernement congolais veut garder la direction de l’enquête en question. Selon la Ministre, «la justice internationale ne peut intervenir qu’en cas de mauvaise volonté des politiques, ce qui n’est pas le cas sur cette affaire».[25]

 

Le 9 juin, le Haut Commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU, Zeid Ra’ad Al Hussein, a reconnu que « c’est le droit souverain du gouvernement de la RDC de mener des enquêtes judiciaires sur les violations des droits de l’Homme commises sur son territoire« . Toutefois, il a accusé Kinshasa de ne pas enquêter de manière sérieuse et suffisante sur les violences au Kasaï et a exigé une enquête internationale. Il a donc enjoint le Conseil des Droits de l’Homme de mettre sur pied une commission, afin d’enquêter sur les graves abus commis dans la région, notamment les exécutions sommaires, les meurtres d’enfants, le recrutement d’enfants soldats et les violences sexuelles. « L’étendue et la nature de ces violations des droits de l’Homme, ainsi que les réponses constamment inadéquates des autorités locales nous obligent à demander une enquête internationale pour compléter les efforts nationaux« , a-t-il dit dans un communiqué.

Le Haut Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, a clairement écarté l’option d’une enquête conjointe RDC-ONU et s’est dit favorable à une enquête internationale car, selon lui, la réponse de Kinshasa se réservant la direction de l’enquête et limitant la participation de l’Onu à un appui technique est largement insuffisante au regard de la gravité et de la nature généralisées des violations de droits de l’homme au Kasaï et de l’impérieuse nécessité pour que justice soit rendue aux victimes.

Toutefois, cela ne veut pas dire qu’une équipe d’enquêteurs internationaux va se rendre en RDC. En réalité, cette demande d’enquête internationale est maintenant formellement soumise aux 47 pays membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. C’est à eux de décider. Pour cela, il faut que plus de la moitié, donc 24 Etats membres, soient d’accord pour qu’on envoie des enquêteurs internationaux. Or le sujet est loin de faire l’unanimité. En outre, vers le 20 juin, le gouvernement congolais devra présenter son point de vue sur la gestion de la crise dans les Kasaï. Le Conseil des droits de l’homme aura ensuite jusqu’au 23 juin pour prendre une décision finale.[26]

 

Le 20 juin, à Genève, lors de la réunion du Conseil des droits de l’Homme et à la demande de l’Union européenne, le Haut commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, a redemandé la création d’une commission d’enquête internationale indépendante, retenue nécessaire, car les enquêteurs de l’ONU au Congo voient leur travail régulièrement entravé par les autorités congolaises. Le représentant des Etats-Unis a apporté son soutien à la création d’une telle commission d’enquête.

Par contre, le gouvernement congolais a rejeté l’option d’une commission d’enquête internationale indépendante  de l’ONU et a même menacé de ne pas accorder l’accès à son territoire aux membres de cette commission. Le gouvernement congolais a rappelé sa position sur la question, proposant l’option d’une enquête conjointe menée sous son leadership et appuyée techniquement par l’ONU.[27]

 

Le 20 juin, dans une interview à Jeune Afrique, Marie-Ange Mushobekwa, ministre congolaise des Droits humains, a déclaré: «la RDC est un pays souverain et, donc, nous disons oui à une enquête internationale, mais pas sans nous! Nous ne refusons donc pas la collaboration. Car nous sommes conscients que nous n’avons pas des moyens suffisants pour mener ces enquêtes jusqu’au bout sans le soutien technique et logistique de la Monusco et du Bureau conjoint des droits de l’homme des Nations unies. Il y a en effet des zones où nous ne pourrons accéder qu’au moyen d’hélicoptères ou de petits avions que l’armée congolaise ne possède pas».

À propos de l’existence de fosses communes au Kasaï, la ministre congolaise des Droits humains, Marie-Ange Mushobekwa, a affirmé que c’est aussi dans les centres d’initiation des miliciens de Kamwina Nsapu qu’il faut les chercher et elle a ajouté: «Je reviens de Kananga, dans le Kasaï. J’ai pu discuter avec des autorités provinciales et j’ai constaté que dans certains dossiers, les enquêteurs de la Monusco ne jouent pas franc-jeu. Tenez, dans la commune de Ngaza par exemple, ces enquêteurs avaient longtemps fait état d’à peu près six fosses communes. En réalité, le gouvernement provincial et son équipe n’en ont trouvé que deux: l’une avec deux personnes, l’autre contenant un calibre 12 de fabrication locale. Mais la Monusco n’en a jamais parlé à la radio, pour corriger ce qu’elle avait rapporté auparavant. Il y a une dizaine de jours les enquêteurs congolais ont ouvert une soi-disant fosse commune dans laquelle il n’y avait qu’une moto. Ils supposent que cet engin devait appartenir aux accompagnateurs congolais de Michael Sharp et de Zaida Catalán. Pourquoi la Monusco n’en parle-t-elle pas?

C’est comme dans l’Irak de Saddam Hussein. On nous a parlé des armes de destruction massive, tous les médias du monde ont été embarqués dans cette affaire, le président irakien pendu. Quelques années plus tard, on nous dit que ces armes n’ont jamais existé alors que le peuple d’Irak continue à payer un lourd tribut jusqu’aujourd’hui. C’est pourquoi, dans le cas du Kasaï, les enquêtes doivent être transparentes et impartiales pour qu’on ne se retrouve pas dans la même situation que l’Irak».[28]

 

Le 20 juin, à Genève, Ida Saywer, Directrice Afrique Centrale de Human Right Watch, a plaidé devant le Conseil des Nations-Unies aux Droits de l’homme (CDH) pour qu’une enquête internationale indépendante soit diligentée urgemment sur les violences dans le Kasaï.

Ses raisons, étayées devant le Conseil, les voici.

  1. Faillite du gouvernement: «Le gouvernement congolais a failli à ses obligations d’enquêter sur les abus présumés commis dans les Kasaï».
  2. Le gouvernement veut cacher ses crimes: «Si le gouvernement congolais n’a rien à cacher, il ne devrait pas s’opposer à une telle enquête».
  3. Une justice aux ordres, pas indépendante: «Le gouvernement congolais a un lourd bilan en matière d’ingérence dans les affaires judiciaires politiquement sensibles et le système judiciaire s’est jusqu’à présent montré incapable d’effectuer des enquêtes crédibles sur les allégations de crimes».
  4. Pour que justice soit rendue aux victimes: «Le Conseil devra d’urgence organiser une enquête internationale indépendante, afin d’aider pour que justice soit rendue aux victimes de violences perpétrées dans les Kasaï».[29]

 

b. Mais le Conseil des droits de l’homme de l’ONU décide de la création d’un simple « groupe d’experts internationaux »

 

Le 23 juin, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a adopté à Genève une résolution qui demande au Haut-commissaire des droits de l’homme de désigner une équipe d’experts internationaux, incluant aussi des experts régionaux, pour collecter les informations liées aux violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire dans les Kasaï, déterminer les faits, préciser les circonstances dans lesquelles ces violations des droits de l’homme ont eu lieu et identifier les auteurs et les commanditaires de ces violences.

Selon cette résolution, ces experts devront fournir au Conseil des droits de l’homme de l’ONU ainsi qu’aux autorités judiciaires congolaises les conclusions de leurs investigations après une année, pour établir la vérité et s’assurer que les auteurs des crimes soient traduits en justice.

Le conseil a aussi demandé au Haut-commissaire aux droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, de présenter un rapport oral de l’évolution de l’enquête en septembre 2017, lors de sa prochaine session ordinaire.

Le conseil a par ailleurs demandé au bureau du Haut-commissaire aux droits de l’homme de fournir l’assistance technique nécessaire au gouvernement congolais dans les investigations que ce dernier mène sur les allégations des violations des droits de l’homme et des abus commis dans la région des  Kasaï.[30]

 

Il s’agit donc d’une équipe d’experts internationaux, pas d’une commission d’enquête internationale indépendante, comme certains pays européens, dont la France, la Grande-Bretagne et la Belgique avec l’Union européenne, le demandaient. Au final, c’est un compromis avec les pays africains, dont la Tunisie, l’Egypte, l’Afrique du Sud et l’Angola avec l’Union africaine qui a été adopté.

De leur part, les autorités congolaises se sont engagées à accueillir sur leur sol ces experts internationaux. Mais elles ont déjà dit qu’il s’agit d’un appui uniquement technique et logistique à la justice congolaise, car la République démocratique du Congo compte bien garder la direction des enquêtes en cours.

Que la RDC garde la direction des enquêtes, c’est ce qui inquiète certains défenseurs des droits de l’homme car, pour ces organisations, c’est problématique que les autorités congolaises, qui sont elles-mêmes accusées d’usage excessif de la force, soient impliquées dans l’enquête. «Comment être juge et partie?», s’interroge la Fédération internationale des droits de l’homme, par exemple, qui parle d’une résolution a minima qui risque «de ne pas suffire à empêcher les massacres». Pour elle, seule une enquête totalement indépendante peut faire la lumière sur ce qui s’est passé.[31]

 

Un groupe d’ «experts internationaux» pour enquêter sur les graves violences dans le Kasaï en RDC plutôt qu’une commission d’enquête internationale indépendante. Voilà le compromis sur lequel les 47 pays membres du Conseil des droits de l’homme de l’Onu se sont mis d’accord. Un compromis qui laisse pas mal d’incertitudes sur le pouvoir qu’auront ces experts de l’Onu pour mener une véritable enquête dans la région des Kasaï.

– Première interrogation: à quel point ces experts vont-ils pouvoir enquêter de façon indépendante des autorités congolaises?

Pour Kinshasa, leur mandat se limite à un appui technique aux enquêtes congolaises déjà en cours. Faux, répond le Haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Onu qui assure que ses experts opéreront «en totale indépendance». Mais cette exigence ne figure pas «écrite» dans la résolution qui s’intitule bien «assistance technique à la RDC»…

– Une autre question concerne les ressources financières pour mener à bien cette enquête à grande échelle: 42 fosses communes, 3200 civils tués et plus d’1 million de déplacés… De quels fonds et de combien d’experts le Haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Onu va-t-il disposer? La résolution ne répond pas à cette question.

– Enfin il y a aussi la question cruciale de l’accès aux sites où des crimes ont été commis dans les Kasaï. C’est la principale difficulté de l’Onu à ce jour. Depuis des mois ses employés font face à des entraves quasi quotidiennes qui les empêchent de mener des enquêtes approfondies dans cette région.

Les autorités congolaises se sont engagées à accueillir ces experts sur son territoire et les laisser travailler. A condition de garder la direction des enquêtes. Or c’est tout le problème: les autorités congolaises étant elles-mêmes accusées d’usage excessif de la force, toute participation de leur part à une enquête internationale risque fort d’entamer sa crédibilité.

Pour Jason Mack, représentant des Etats-Unis auprès du Conseil des droits de l’homme, le compromis trouvé est bien plus faible que la commission d’enquête internationale indépendante voulue au départ. C’est pour cela qu’il dit «s’attendre du gouvernement congolais qu’il coopère pleinement avec cette équipe d’experts et qu’il leur donne accès à l’ensemble de son territoire».

Le langage n’est pas «si fort et si clair» que nous l’aurions souhaité, reconnaît Ida Sawyer de l’association Human Rights Watch, mais c’est un «bon début» et il faut «maintenir la pression sur les autorités congolaises, pour qu’elles acceptent de laisser cette équipe d’experts internationaux faire son travail d’enquête d’une manière indépendante».

Le Haut-Commissaire des Nations-Unies aux droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, a déclaré: «Nous comptons sur la pleine coopération des autorités, en particulier pour nous octroyer un accès illimité à tous les sites, dossiers, individus et lieux concernés par l’enquête».[32]

[1] Cf AFP – Africatime, 20.06.’17; Patrick Maki – Actualité.cd, 20.06.’17  https://actualite.cd/2017/06/20/rdc-3300-personnes-mortes-debut-violences-aux-kasai-eglise-catholique/

[2] Cf Radio Okapi, 31.05.’17

[3] Cf Sosthène Kambidi – Actualité.cd, 05.06.’17

[4] Cf Radio Okapi, 09.06.’17

[5] Cf Radio Okapi, 15.06.’17

[6] Cf Sosthène Kambidi – Actualité.cd, 23.06.’17

[7] Cf Radio Okapi, 15.06.’17

[8] Cf Radio Okapi, 26.06.’17

[9] Cf AFP – Africatime, 20.06.’17; 7sur7.cd, 21.06.’17

[10] Cf Radio Okapi, 23.06.’17

[11] Cf Sosthène Kambidi – Actualité.cd, 08.06.’17

[12] Cf Sosthène Kambidi – Acualité.cd, 14.06.’17

[13] Cf Radio Okapi, 23.06.’17

[14] Cf http://fr.allafrica.com/stories/201706040054.html

[15] Cf Radio Okapi, 06.06.’17; RFI, 09.06.’17

[16] Cf RFI, 09.06.’17

[17] Cf Radio Okapi, 14.06.’17

[18] Cf AFP – Radio Okapi, 25.06.’17; RFI, 26.06.’17

[19] Cf AFP – Radio Okapi, 26.06.’17

[20] Cf RFI, 27.06.’17; Radio Okapi, 28.06.’17

[21] Cf Zabulon Kafubu – 7sur7.cd, 01.06.’17

[22] Cf AFP – Radio Okapi, 06.06.’17

[23] Cf AFP – Radio Okapi, 06.06.’17

[24] Cf Radio Okapi, 06.06.’17

[25] Cf Ange Kasongo – Jeune Afrique, 07.06.’17

[26] Cf AFP – Africatime, 09.06.’17; RFI, 09.06.’17

[27] Cf AFP – Jeune Afrique, 20.06.’17

[28] Cf Trésor Kubangula – Jeune Afrique, 20.06.’17

[29] Cf Israël Mutala – 7sur7.cd, 20.06.’17

[30] Cf Radio Okapi, 23.06.’17

[31] Cf RFI, 23.06.’17

[32] Cf RFI, 24.06.’17; Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 23.04.’17