Congo Actualité n. 316

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: DIALOGUE ENTRE MAJORITÉ ET OPPOSITION → LE RISQUE D’UN FRACASSANT ÉCHEC

  1. LE DIALOGUE ENTRE LA MAJORITÉ ET L’OPPOSITION SUR LES MODALITÉS D’APPLICATION DE L’ACCORD DU 31 DÉCEMBRE
    1. Des positions encore divergentes
    2. La fin des travaux, mais sans aucun consensus et sans aucun compromis
    3. Le Chef de l’État s’engage à s’impliquer personnellement dans la recherche d’un consensus
  2. L’UDPS ET LE RASSOP ANNONCENT UNE SERIE DE MANIFESTATIONS

 

ÉDITORIAL: DIALOGUE ENTRE MAJORITÉ ET OPPOSITION → LE RISQUE D’UN FRACASSANT ÉCHEC

 

 

 

1. LE DIALOGUE ENTRE LA MAJORITÉ ET L’OPPOSITION SUR LES MODALITÉS D’APPLICATION DE L’ACCORD DU 31 DÉCEMBRE

 

a. Des positions encore divergentes

 

Le 20 mars, les Évêques de la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (Cenco) avaient déjà fait savoir que le 27 mars ils auraient bouclé définitivement, accord ou pas accord, les discussions sur l’arrangement particulier. La MP et le Rassemblement peinent à se faire concession notamment sur le mode de désignation du futur premier ministre et sur le prochain président du CNSA.[1]

 

Le 25 mars, la plénière au Centre interdiocésain a essentiellement été consacrée à la répartition des portes feuilles ministériels. Selon le rapport de la médiation, pour faciliter les discussions sur le futur gouvernement, le rapport de la sous-commission a regroupé les ministères en quatre secteurs d’activités parmi lesquels : 9 ministères dans le secteur économie et finances, 11 ministères dans le secteur politique et sécurité, 12 ministères dans les secteurs productifs et 13 ministères dans le secteur social. Les composantes ont convenu d’assurer une représentation équitable dans les quatre secteurs en tenant compte de la proportion des ministères relevant de chacune des composantes.

Tenant compte de la répartition effectuée sur base des prétentions exprimées par les composantes, il est apparu trois catégories:

– Les ministères revendiqués par une seule composante et qui sont considérés comme les ministères attribués;

– Les ministères revendiqués par plus d’une composante et qui sont dits ministères en conflit;

– Les ministères non revendiqués par une composante et considérés comme non attribués.

Les discussions ont continué autour de cette question; les points n’ayant pas recueilli le consensus seront confiés au premier ministre lors de la formation du gouvernement, après la signature de l’Arrangement particulier.[2]

 

Le 25 mars, le porte-parole de la Majorité Présidentielle (MP), André-Alain Atundu, a affirmé que, sur les questions de postes ministériels objets du blocage, la MP pourrait s’en remettre au président Joseph Kabila et au prochain Premier ministre.

«La Majorité Présidentielle a fait montre d’un grand esprit d’ouverture et de conciliation pour permettre que les postes encore litigieux soient l’objet d’un arbitrage du Chef de l’État après consultation avec le Premier ministre», a annoncé l’ancien ambassadeur Atundu.

Toutefois, le Porte-parole de la MP n’a pas dit si cette solution convient aux autres parties prenantes aux négociations. Abordant le sujet de la direction du Comité national de suivie de l’accord (CNSA), il a souligné: «Ce poste doit être occupé par une personnalité acceptée par un large consensus comme ce fut le cas avec le regretté Étienne Tshisekedi, car il aura à jouer un rôle clé qui doit rassurer tout le monde, afin que son travail ne puisse souffrir de contestations inutiles».

André Atundu a cependant fait noter que sa famille politique n’était pas partie prenante à la Présidence du CNSA.[3]

 

Le 26 mars, le président du mouvement de solidarité pour le changement (MSC), Laurent Batumona, a accusé la Majorité présidentielle d’être responsable du blocage actuel aux discussions sur l’arrangement particulier afin, a-t-il dit, de s’en servir comme prétexte pour imposer un référendum. «La MP ne veut pas qu’il y’ait alternance au pouvoir. Elle tire les choses en longueur pour empêcher l’application de l’Accord du 31 décembre. La MP est animée de la mauvaise foi parce qu’elle ne veut pas que nous puissions signer l’arrangement particulier. Elle veut s’éterniser au pouvoir et c’est pour cette raison qu’elle multiplie des manœuvres dilatoires, pour pouvoir modifier les dispositions qui sont contenues dans l’accord signé le 31 décembre 2016», a déclaré le président du MSC. Laurent Batumona a en outre affirmé que la Majorité présidentielle a une volonté intentionnelle de démanteler l’Accord en disant que «le CNSA a été taillé sur mesure du feu Président Etienne Tshisekedi, alors qu’aucune disposition de l’Accord ne cite Etienne Tshisekedi».[4]

 

Le 26 mars, toutes les parties prenantes sont tombées d’accord sur le fait que le Rassemblement doit rencontrer le Président de la République pour régler la question de la désignation du futur Premier Ministre. Cependant, elles s’opposent toujours sur la présentation d’un nom ou d’une liste. Voici les différentes formulations de chaque camp.

Proposition de la CENCO: «Le Premier ministre est nommé par le président de la République, au terme des consultations entre celui-ci et le Rassemblement».

Proposition de la MP: «Le Premier ministre est nommé par le président de la République, au terme des consultations entre celui-ci et le Rassemblement sur base d’une liste de trois noms».

Proposition du Rassemblement: «Le Premier ministre est nommé par le président de la République, au terme des consultations entre celui-ci et le Rassemblement représenté par son chef de délégation au dialogue national inclusif du Centre interdiocésain».[5]

 

Le 26 mars, le débat sur l’Arrangement particulier a également planché sur le rôle que devrait jouer la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) pendant la transition.

Proposition de la CENCO amendant celle de la MP: «La CENCO désigne un représentant pour siéger au sein du CNSA en tant qu’observateur. Chaque fois, en cas de nécessité, les parties prenantes peuvent recourir à la CENCO».

Après débat, il a été retenu uniquement la première partie de la formulation, à savoir: «La CENCO désigne un représentant pour siéger en qualité d’observateur».

Toutefois, le Rassemblement a émis une réserve face à cette formulation, parce qu’il souhaite que la CENCO accompagne le CNSA en jouant un rôle actif. La formule qui l’arrange est la suivante: «la CENCO accompagne et conseille le CNSA dans le cadre de ses bons offices».[6]

 

Le 26 mars, dans un message posté sur Twitter vers 20h00, Delly Sesanga Hipung, président du présidium de l’Alternance pour la République, l’une des plateformes membres du Rassemblement, a écrit: «CENCO: la signature de l’arrangement particulier pour le 27 mars 2017 relève désormais du divin, du miracle!!!». 24 heures plutôt, c’était André-Claudel Lubaya, ex UNC, qui jetait l’éponge, postant sur le même réseau social: «CENCO: atterrissage impossible suite aux conditions météorologiques impossibles. Loin du but. Près du crash». Si ces membres du Rassemblement ont fait porter la responsabilité de l’impasse à la Majorité présidentielle, le ministre de l’ESU, Steve Mbikayi, a riposté sur Twitter en pointant du doigt l’aile dure de l’Opposition: «Le blocage suite au refus de proposer trois candidats premier ministre. L’intérêt individuel placé au-dessus de l’intérêt général. Il est 21 heures».[7]

 

b. La fin des travaux, mais sans aucun consensus et sans aucun compromis

 

Le 27 mars, dans une interview, le Secrétaire Général de la CENCO, l’abbé Donatien Nshole, a affirmé que «les Évêques ont décidé de mettre fin à leur mission à l’issue de la plénière du soir, bien qu’il restent encore deux points de divergence.

Il y a le point sur le mode de désignation du premier ministre. Pour le Rassemblement, c’est une personne qui doit être présentée par le Rassemblement et que le Président de la République doit simplement nommer. Pour la majorité, le Rassemblement doit présenter une liste de 3 personnes parmi lesquelles le Président de la République doit en nommer un.

 Deuxième point de blocage, le président du CNSA. Pour le Rassemblement, la lettre de l’accord est claire: « c’est celui que le Rassemblement choisit comme président du conseil des sages qui sera automatiquement président du conseil de suivi de l’accord ». La majorité et les autres composantes disent « non! Selon l’esprit de l’accord, pour la présidence du CNSA, on avait trouvé  un consensus sur une personne qui comptait sur l’échiquier politique du Pays. Maintenant qu’elle n’est plus là, alors ça devient un poste disponible qui peut être équipé par tout le monde, pourvu qu’il y ait consensus ». Deux point de vue diamétralement opposés. La médiation propose qu’il faut tenir compte de la lettre de l’accord mais aussi de l’esprit. Par rapport à la lettre de l’accord, c’est le Président du conseil des sages qui est président du Conseil National de suivi. Par rapport à l’esprit, ce n’est pas automatique. La personne doit être objet d’un consensus.

Qu’est-ce que la médiation peut faire de plus sinon proposer une voix qui peut mettre ensemble? Si les uns et les autres, pour des raisons d’orgueil personnel, préfèrent sacrifier le pays, qui est déjà au bord de l’implosion économique, les évêques ont seulement la parole, ils n’ont pas de fouet, ils n’ont pas d’armes. Voilà la triste réalité. Je crois qu’ils vont écouter la voix de la raison».[8]

 

Le 27 mars, les évêques catholiques de la RDC, qui assuraient depuis décembre 2016 la médiation entre le pouvoir et l’opposition pour définir les modalités de la cogestion du pays pendant la transition, ont annoncé la fin de leur mission de bons offices, sans être parvenus à concilier les deux parties. Aucun compromis n’a été trouvé sur le mode de désignation du premier ministre qui doit être issu de l’opposition comme le prévoit l’accord signé le 31 décembre dernier entre la majorité et l’opposition. Pas non plus d’accord sur la désignation du président du Conseil national de suivi de l’accord (CNSA), poste autrefois attribué au leader de l’UDPS, Etienne Tshisekedi décédé a Bruxelles début février. Dans son discours prononcé lors de la clôture des discussions, le président de la CENCO, Mgr Marcel Utembi, a affirmé ce qui suit:

«7. Au terme de ce deuxième round des négociations politiques directes, les résultats obtenus sont loin de satisfaire les attentes de la population dont la situation économique et sécuritaire devient de plus en plus préoccupante. En effet, nous trouvons principalement devant deux points de blocage et sur chacun de la CENCO a proposé une voie médiane;

  1. a) Mode désignation et nomination du Premier Ministre: le Rassemblement de l’Opposition tient à présenter un seul nom et les autres, en particulier la Majorité, une liste de trois noms. La médiation a proposé: «le Premier Ministre est nommé par le Président de la République aux termes des consultations avec le Rassemblement». Qui dit consultations dit plusieurs noms.
  2. b) Présidence du CNSA: pour le Rassemblement de l’Opposition, il faut s’en tenir scrupuleusement à la lettre de l’Accord, c’est-à-dire le Président du Conseil des Sages du Rassemblement est le Président du CNSA. Et pour les autres, il faut s’en tenir à l’esprit de l’Accord, c’est-à-dire le Président du CNSA doit faire l’objet d’un consensus par toutes les prenantes. La médiation propose de concilier la lettre et l’esprit, c’est-à-dire que le Président provienne du Rassemblement mais qu’il fasse l’objet d’un consensus.
  3. A ce niveau, la CENCO porte à la connaissance de l’opinion tant nationale qu’internationale l’impasse politique de ces discussions qui traduit le manque de bonne volonté politique et l’incapacité des acteurs politiques et sociaux de trouver un compromis, en mettant au premier plan l’intérêt supérieur de la Nation et le bien de notre peuple.
  4. Convaincue qu’un compromis est possible grâce à un sursaut patriotique de la part de tous, la CENCO lance un appel pathétique aux négociateurs à se montrer plus responsables et plus sensibles aux besoins du Peuple congolais et à ne pas perdre de vue l’objectif principal de ces négociations qui est l’organisation des élections dans moins d’une année.
  5. L’attente de notre peuple se fait trop longue et les jours avancent. Chaque jour de retard est un manque à gagner pour la réalisation de cet objectif. Elle demande aux parties prenantes de se faire violence pour se dessaisir de leurs intérêts égoïstes afin de mettre en place le Gouvernement et le Conseil National de suivi de l’accord et du processus électoral qui conduiront le pays aux élections avant la fin de l’année 2017.
  6. La CENCO n’entend pas conduire les bons offices indéfiniment. Elle en appelle à l’implication personnelle et à la responsabilité du Chef de l’Etat en tant que garant de la Nation, dans la mise en œuvre rapide de l’Accord de la Saint-Sylvestre. Toutefois, fidèle à sa mission prophétique, la CENCO est décidée à accompagner le Peuple congolais dans la mise en œuvre de l’Accord de la Saint-Sylvestre».

Les négociations du centre interdiocésain ont débuté le 8 décembre 2016. Prévues initialement pour trois jours, ces discussions se sont étendues sur plus de 3 mois sans que les parties prenantes n’arrivent à rapprocher leurs points de vue à propos de quelques divergences.[9]

 

c. Le Chef de l’État s’engage à s’impliquer personnellement dans la recherche d’un consensus

 

Le 28 mars, après la rencontre entre les évêques de la CENCO et le chef de l’État, le secrétaire général de la CENCO, l’abbé Donatien Nshole, a affirmé que le président Joseph Kabila s’est engagé à trouver un consensus sur les sujets qui ont divisé le pouvoir et l’opposition lors des discussions sur la mise en œuvre de l’accord du 31 décembre 2016: «Les évêques sont allés rendre compte au chef de l’État de la fin de leur mission de bons offices au stade actuel et s’en remettre à lui comme garant de la nation. Le chef de l’État a suivi avec attention le rapport des évêques. Il a reconnu que les évêques ont fait un grand travail qu’il côte à 98% et que lui s’engageait à obtenir les 2% qui manquaient pour faire les 100%. Le chef de l’État s’est engagé à partir des propositions de la CENCO pour obtenir un consensus sur les deux points de divergences». Selon le secrétaire général de la CENCO, Joseph Kabila a aussi fait observer «le fait qu’il a l’impression qu’on oublie l’essentiel qui est l’organisation de bonnes élections crédibles dans les meilleurs délais».[10]

 

Le 28 mars, dans un communiqué publié après sa rencontre avec les Evêques de la CENCO, le président de la République, Joseph Kabila, a annoncé qu’il va s’adresser à la nation devant le parlement réuni en congrès. Joseph Kabila dit s’être réjoui que les Évêques ne se soient pas limités à constater les divergences, mais à proposer aussi des pistes de solutions sur lesquelles il compte partir pour aboutir à des solutions adéquates.

Joseph Kabila déclare que, pour sa part, l’impasse actuelle ne devrait pas constituer la rupture totale du dialogue. Il soutient que les parties devraient continuer à échanger pour aboutir, dans un plus bref délai, à des voies «les plus adéquates» pour la mise en œuvre de l’Accord de la Saint Sylvestre.

Le président de la République dit avoir pris acte du fait que le Premier ministre devrait être issu du Rassemblement. Pour la présidence du CNSA, Joseph Kabila rejoint la position de sa famille politique qui exige la désignation une personnalité consensuelle.[11]

 

Le 29 mars, le président Joseph Kabila a institué une commission chargée de recueillir les avis, considérations et propositions sur la meilleure résolution des problèmes restés sans réponse à la clôture du dialogue du Centre Interdiocésain. En tête de la commission se trouve Aubin Minaku, le président de l’Assemblée nationale et Secrétaire général de la Majorité présidentielle. Il est secondé par le trio Me NKulu, le professeur Adolphe Lumanu et le patron de l’Anr, Kalev Mutond. Cette commission a déjà initié des contacts informels avec des différentes parties prenantes aux négociations directes tenues sous l’égide de la Cenco, pour baliser le terrain par rapport aux deux questions d’achoppement: les modalités de désignation du Premier ministre et la présidence du CNSA. D’après certaines sources, quelques leaders du «Rassemblement» aile Kasavubu sont déjà passés. On parle de la délégation des FAC Opposition conduite par Ingele Ifoto, de Roger Lumbala et de l’Udps auto-exclu Bruno Tshibala.

Mais l’opposition menée par Félix Tshisekedi et Pierre Lumbi refuse de souscrire à ces consultations car, selon elle, il s’agit d’un nouveau piège, puisque les personnes désignées pour les mener appartiennent à la majorité présidentielle, partie adverse dans les négociations directes. En effet, le Rassemblement fait noter qu’Aubain Minaku, le président de l’Assemblée nationale, et Adolphe Lumanu, qui consultent au nom du président Kabila, figurent parmi ceux-là même qui ont récusé la candidature de Pierre Lumbi à la tête du CNSA au motif que l’ancien conseiller spécial en matière de sécurité ne réunit pas le consensus.[12]

 

Le 30 mars, dans un communiqué signé par son président, Félix Tshisekedi, le Rassemblement de l’Opposition accuse le pouvoir d’avoir orchestré l’échec du dialogue du Centre interdiocésain, pour éviter la mise en œuvre de l’accord du 31 décembre et l’organisation des élections en 2017.

Le Rassemblement accuse le pouvoir de tenter de débaucher plusieurs de ses membres à travers les consultations initiées par le président Kabila et menées par Aubin Minaku, Secrétaire Général de Majorité présidentielle, afin de contourner sa hiérarchie interne. Le Rassop  juge ces manœuvres irresponsables et improductives. Pour le Rassemblement, des véritables consultations ne peuvent être envisagées qu’entre le Président de la République et le président du Rassemblement.[13]

 

 

2. L’UDPS ET LE RASSOP ANNONCENT UNE SERIE DE MANIFESTATIONS

 

Le 28 mars, à Kinshasa, au lendemain de l’annonce de la fin des négociations politiques, sous la médiation des évêques catholiques, entre la majorité et l’opposition pour cogérer la transition jusque fin 2017, des jeunes gens ont barricadé des tronçons routiers et brûlé des pneus sur les chaussées. Des boutiques et autres commerces sont restés fermés. Plusieurs écoles ont renvoyé les élèves, en demandant aux parents d’aller reprendre les plus petits. Les taxis et taxi-bus assurant le transport en commun ont réduit leurs prestations. La police est intervenue pour disperser quelques attroupements

de jeunes et pour débarrasser les barricades. En début d’après-midi, le porte-parole de la police, le colonel Mwana Mputu, a indiqué que la situation était sous contrôle et a qualifié ces manifestations de «mouvement spontané, sans mot d’ordre» qui n’a entraîné aucun dégât.[14]

 

Le 28 mars, dans une conférence de presse tenue à Kinshasa, le secrétaire général de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), Jean Marc Kabund-A-Kabund, a affirmé que «l’accord politique inclusif du Centre Interdiocésain du 31 décembre 2016 est et demeure l’unique source de légitimité de toutes les institutions à mandat électif de la RDC pendant cette période transitoire et que sa non-exécution, de par la volonté du régime en place, entraînerait l’illégitimité de tous les animateurs des institutions de notre pays». Commentant la conclusion des travaux du dialogue entre la majorité et l’opposition sous la médiation de la CENCO sans la signature du texte sur l’arrangement particulier, le secrétaire général de l’UDPS a déclaré que, «à dater de ce mardi 28 mars, l’UDPS constate que le pays est dans l’impasse. Il n’y a plus des doutes sur les intentions de M. Kabila et sa famille politique de ne pas aller aux élections pour favoriser l’alternance à la tête du pays. Nous allons maintenant nous prendre en charge. J’appelle les millions des combattants de l’UDPS, du Rassemblent et le peuple congolais de se prendre en charge par des actions de résistance pacifique contre la dictature qui vise à s’enraciner dans notre pays». Il a ensuite invité la communauté internationale à «ne plus reconnaître Joseph Kabila comme chef de l’État» et il a annoncé «une marche pacifique, le 10 avril prochain, pour protester, conformément à l’article 64 de la constitution, contre la non-application de l’Accord de la Saint Sylvestre et contre la présidence à vie programmé par Monsieur Kabila». Dans sa communication, Jean-Marc Kabund a appelé également les services de sécurité (armée et police) à ne pas respecter les ordres du pouvoir en place, d’ailleurs illégitime, et d’être derrière le peuple pour protéger les manifestants.[15]

 

Le 29 mars, dans une déclaration politique, le président du Rassemblement de l’Opposition, Félix Tshisekedi, a déclaré ce qui suit:

«4. En vue d’assurer uniquement la continuité de l’Etat et l’équilibre institutionnel et de préserver la paix civile, le Rassemblement avait renoncé à son exigence initiale du départ de Joseph Kabila de la Présidence de la RDcongo à l’échéance de son deuxième et dernier mandat le 19 décembre 2016.

  1. La contre partie à cette concession faite à Joseph Kabila a été le droit reconnu au Rassemblement de diriger le Gouvernement de la République et de présenter, à cet effet, le Premier Ministre à sa nomination ainsi que le droit pour le Rassemblement d’animer, par le président du Conseil des Sages, le CNSA (Cf. points III.3.3 et VI.2.2 de l’Accord du 31 décembre 2016).
  2. Il apparait aujourd’hui que la bonne foi du Rassemblement s’est butée à la mauvaise foi de Joseph Kabila qui ne veut pas quitter le pouvoir et qui, par conséquent, sabote toute initiative tendant à organiser les élections crédibles pour une alternance démocratique en RDCongo.
  3. Dès lors que le processus devant conduire à la mise en œuvre de l’Accord est ainsi compromis, le consensus dégagé pour l’acceptation de Joseph Kabila comme Chef de l’Etat pendant la courte période préélectorale et électorale est rompu.
  4. Pour y parvenir, Joseph Kabila et sa famille politique, déterminés plus que jamais à rester au pouvoir par la force, font fi des mesures de décrispation politique préconisées dans l’Accord. Ils orchestrent l’insécurité sur toute l’étendue du Pays. Ils multiplient les violations massives des droits de l’homme et des libertés fondamentales. (…)
  5. De tout ce qui précède, le Rassemblement tire la conclusion que Joseph Kabila ne veut ni de l’Accord du 31 décembre 2016 ni d’une issue pacifique à cette crise. Il n’a pas renoncé ni à son projet de rester indéfiniment au pouvoir ni à celui d’organiser à cet effet un referendum constitutionnel.
  6. Le Rassemblement rappelle à l’opinion nationale et internationale que, en bloquant délibérément le processus démocratique et en désacralisant les institutions républicaines, réduites en simples instruments de conservation du pouvoir, Joseph Kabila et sa famille politique sont les seuls responsables de la situation de crise politique, sécuritaire, économique et sociale que connait actuellement la RDCongo et qui frappe durement le peuple congolais.
  7. Dès lors, comme toutes les autres institutions de la République, Joseph Kabila est dépourvu de toute légitimité. Il ne peut par conséquent s’ériger en arbitre d’une crise qu’il a intentionnellement créée. Joseph Kabila est l’incarnation de la crise. Il est lui-même le problème de la RDCongo et il ne peut en aucun cas en être la solution. (…)
  8. Le Rassemblement réaffirme son attachement à l’Accord du 31 décembre 2016 et récuse toute solution initiée en dehors de sa mise en œuvre diligente et conforme.

C’est pourquoi le Rassemblement lance un appel solennel au peuple congolais à se prendre en charge et annonce le suivant plan de mobilisation générale contre la tentative de restauration de la dictature en RDCongo:

– Contribuer à la réussite de la journée ville morte sur toute l’étendue du territoire national, le lundi 3 avril 2017;

– Soutenir la grève générale décrétée par les syndicats le mercredi 5 avril 2017 ;

– Participer massivement à la marche pacifique annoncée par l’UDPS pour la date du 10 avril et d’autres manifestations publiques pacifiques pour revendiquer l’application de l’Accord de la Saint-Sylvestre du 10 au 24 avril 2017».[16]

 

Le 29 mars, dans une correspondance adressée au Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Guterres, et signée par son président, Félix Tshisekedi, le Rassemblement accuse la MP de tenter de remettre en cause le compromis politique et ses équilibres en essayant par des manœuvres de toutes sortes de remettre sur la table certaines de ses dispositions: «Pour le Rassemblement, revenir sur le moindre élément de cet Accord, c’est remettre en cause l’ensemble du compromis politique et des équilibres qu’il comporte. La mise en œuvre de cet Accord ne peut souffrir d’aucun retard ni conditionnalité fantaisiste quelconque».[17]

 

Le 30 mars, selon un communiqué rendu public par le Secrétariat de la Majorité Présidentielle (MP), en réaction à l’annonce d’une journée villes mortes, d’une grève générale et d’une marche pacifique prévues par le Rassemblement de l’Opposition pour exiger l’application de l’Accord de la Saint-Sylvestre, la Majorité Présidentielle a accusé l’opposition de «vouloir semer le chaos, en créant une situation pré-insurrectionnelle, pour prendre le pouvoir par la rue, ce qui était son projet initial». D’après le document signé par le Porte-parole de la MP, Alain André Atundu, «la Majorité Présidentielle exhorte la jeunesse à ne pas être l’artisan de son propre malheur, en participant à des actions de destruction de la cohésion nationale programmées par le Rassemblement». Pour rappel, en prenant acte de l’échec des négociations directes, le Rassemblement a programmé une ville morte le lundi 3 avril, une grève générale le 5 avril et la participation à une marche prévue le 10 avril par l’UDPS. Il a aussi dit qu’il ne reconnait plus Joseph Kabila comme président de la République.[18]

 

Le 31 mars, l’UDPS et le RASSOP ont adressé une lettre au Gouverneur de Kinshasa, André Kimbuta, pour l’informer de la marche du 10 avril prochain. Dans sa correspondance, Jean-Marc Kabund, secrétaire général de l’UDPS, a souligné que «cette marche a pour objectif d’exiger l’application de l’Accord du 31 décembre comme l’unique voie de sortie de crise dans notre pays. Elle vise aussi le dépôt d’un mémo au Palais de la Nation». Le point de rencontre de militants de l’UDPS et du Rassemblement pour cette marche est fixé à la Place triomphale (en face du stade des martyrs). Du Boulevard Triomphal, les militants emprunteront le Boulevard de la libération (Ex-24 novembre) avant d’atteindre le Boulevard du 30 juin en passant par l’Avenue Batetela, le Boulevard Tshatshi, Avenue Okito, Avenue Lemera pour atterrir au Palais de la Nation, siège du cabinet de travail du Président de la République.[19]

[1] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 27.03.’17

[2] Cf Actualité.cd, 26.03.’17

[3] Cf Aline Engbe – Politico.cd, 26.03.’17

[4] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 27.03.’17

[5] Cf Actualité.cd, 27.03.’17

[6] Cf Actualité.cd, 27.03.’17

[7] Cf AfricaNewsRDC , via www.congosynthese.com, 27.03.’17

[8] Cf Actualité. cd, 27.03.’17

[9] Cf Forum des As – Kinshasa, 29.03.’17  http://www.forumdesas.org/spip.php?article10976 ; Radio Okapi, 28.03.’17

[10] Cf Radio Okapi, 28.03.’17

[11] Cf Radio Okapi, 28.03.’17; Jacques Kini – Actualité.cd, 28.03.’17

[12] Cf Alphonse Muderhwa – 7sur7.cd, 30.03.’17 ; RFI, 31.03.’17

[13] Cf Actualité.cd, 01.04.’17

[14] Cf Radio Okapi, 28.03.’17

[15] Cf Radio Okapi, 28.03.’17; Actualité.cd, 28.03.’17; Jeff Kaleb Hobiang – 7sur7.cd, 28.03.’17

[16] Cf Actualité.cd, 29.03.’17  https://actualite.cd/2017/03/29/rassemblement-annonce-journee-morte-3-avril-greve-generale-5-avril/

[17] Cf Jacques Kini – Actualité.cd, 29.03.’17

[18] Cf Israël Mutala – 7sur7.cd, 30.03.’17

[19] Cf Franck Ngonga – Actualité.cd, 31.03.’17; Actualité.cd, 01.04.’17