Congo Actualité n. 315

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: RÉSOUDRE RAPIDEMENT LES DIVERGENCES POUR ACCÉLERER L’ORGANISATION DES ÉLECTIONS

  1. LE MESSAGE DE LA CENCO: NON AU BLOCAGE DE L’APPLICATION DE L’ACCORD DU 31 DECEMBRE
  2. LE DIALOGUE DU CENTRE INTER – DIOCESAIN
    1. La reprise des travaux
    2. La question de la présidence du Conseil National de Suivi de l’Accord
    3. La question de la modalité de la désignation du nouveau Premier Ministre
    4. La question de la répartition des postes ministériels
    5. Le Président de la Cenco et le Ministre des Affaires Étrangères devant le Conseil de Sécurité
  3. LA CRISE AU SEIN DU RASSEMBLEMENT DE L’OPPOSITION

 

 

ÉDITORIAL: RÉSOUDRE RAPIDEMENT LES DIVERGENCES POUR ACCÉLERER L’ORGANISATION DES ÉLECTIONS

 

 

 

 

 

1. LE MESSAGE DE LA CENCO: NON AU BLOCAGE DE L’APPLICATION DE L’ACCORD DU 31 DECEMBRE

 

Le 22 février, les Evêques membres de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO), réunis en Assemblée Plénière Extraordinaire à Kinshasa, ont publié un message dans lequel ils affirment que «l’actuelle situation socio politique est préoccupante et prend de plus en plus une allure très inquiétante, au risque de plonger le pays dans un désordre incontrôlable. Cette crise est née de l’impasse du processus électoral dont la régularité et la continuité ont été interrompues. * Dès le début de cette crise, la CENCO a exhorté les filles et fils de la RD Congo à emprunter la voie du dialogue. En effet, sur convocation de Son Excellence Monsieur Joseph KABILA, Président de la République, un dialogue a eu lieu à la Cité de l’Union Africaine et a abouti à l’Accord politique du 18 octobre 2016, Malheureusement, cet Accord a souffert d’un manque d’inclusivité.

Encouragée par le Chef de l’Etat, la CENCO a mené la mission de bons offices auprès des signataires et des non-signataires dudit Accord, en vue d’un large consensus pour l’organisation des élections crédibles, transparentes et apaisées.

* C’est pourquoi, au Centre Interdiocésain de Kinshasa et sous la médiation de la CENCO, des négociations politiques directes entre les parties prenantes ont donné naissance à l’Accord politique global et inclusif du Centre Interdiocésain, signé le 31 décembre 2016. Cet Accord historique de la Saint-Sylvestre, salué avec un grand enthousiasme tant par la population congolaise que par la Communauté internationale, est un compromis politique consensuel et inclusif et s’avère l’unique feuille de route réaliste, devant permettre à notre pays de sortir de la crise socio-politique.

* Malheureusement, plus d’un mois et demi la signature de cet Accord, l’Arrangement particulier destiné à assurer sa mise en œuvre peine à se conclure. En effet, on constate un blocage sur les points de divergence ci-après:

  1. le mode de désignation du Premier Ministre. A ce propos, l’article III.3.3. de l’Accord stipule que « Le Gouvernement de la République est dirigé par le Premier Ministre présenté par l’Opposition politique non signataire de l’Accord du 18 octobre 2016/Rassemblement et nommé par le Président de la République conformément à l’article 78 de la Constitution ». Cependant, les parties prenantes ont convenu à l’article III.3.4. que « Les modalités pratiques de la mise en œuvre des principes énoncés ci-dessus (dont le mode de désignation du Premier Ministre) sont déterminées par un arrangement particulier conclu entre les parités prenantes et faisant partie intégrante du présent Accord ».

A la lumière de ces deux articles, il ne se justifie nullement l’intransigeance de présenter un ou plusieurs noms en vue de la nomination du Premier Ministre. Il y a nécessité d’un dialogue franc, basé sur la bonne foi et la confiance mutuelle, entre la Majorité présidentielle et le Rassemblement.

  1. la répartition des portefeuilles ministériels entre les composantes. Les uns exigent que l’affectation des ministères soit connue avant la désignation du Premier Ministre, d’autres l’envisagent à la formation du gouvernement. Ce serait dommage que cette question puisse constituer un point de blocage, d’autant plus que la recherche du bien commun va bien au-delà des intérêts privés.

* Au regard de ce blocage, nous constatons que la longue attente du Peuple congolais qui tient à l’alternance démocratique pacifique se manifeste par l’impatience et la montée de tension même à l’égard de la CENCO qui pourtant n’assure que la médiation. À cela s’ajoutent des menaces voire des violences récurrentes, fruit des manipulations dirigées contre l’Eglise catholique pour des raisons inavouées.

* C’est ici pour nous l’occasion de fixer l’opinion sur la mission de bons offices de la CENCO qui consiste à offrir aux Acteurs politiques et sociaux un cadre propice aux concertations et à les exhorter à trouver un consensus, en privilégiant les intérêts de la population et le bien supérieur de la République. La CENCO ne jouant que le rôle de médiation, on ne peut lui attribuer la responsabilité du blocage. Toutefois, fidèle à sa mission prophétique, la CENCO est décidée à accompagner le Peuple congolais dans la mise en œuvre de l’Accord de la Saint-Sylvestre.

* Face aux tribulations du moment et pour plus de justice et de paix, nous disons « non au blocage de l’application intégrale et rapide de l’Accord du 31 décembre 2016 ». Aussi en appelons-nous vivement: a. Au Président de la République, en sa qualité de garant de la Nation:

de s’impliquer davantage dans la mise en œuvre de l’Accord de la Saint-Sylvestre particulièrement dans le processus de nomination du Premier Ministre chargé de former le Gouvernement ayant pour priorité l’organisation des élections;

  1. A la Majorité présidentielle, à l’Opposition et à la Société civile:

 – d’être sensibles au cri de détresse du Peuple congolais qui attend impatiemment l’application de l’Accord du 31 décembre 2016;

de ne pas bloquer l’application de cet Accord par des manœuvres et par des intransigeances irréalistes; – d’aplanir sans délai les points de divergence quant à l’Arrangement particulier afin de parachever les négociations en cours.

  1. A la CENI:

de bien organiser les élections dans le délai convenu;

  1. A la population congolaise et en particulier aux Jeunes:

de s’approprier l’Accord de la Saint-Sylvestre, notamment en participant aux sessions de vulgarisation;

– de rester debout et d’exiger, en tant que souverain primaire, des Acteurs politiques le strict respect de l’Accord politique et la tenue des élections dans le délai;

de se faire enrôler massivement, en vue de doter notre pays des dirigeants responsables;

 – de faire preuve d’esprit critique et de responsabilité dans l’usage des réseaux sociaux (facebook, immo, twitter, viber, whatsapp, etc).

  1. A la Communauté internationale et en particulier à la MONUSCO:

– de soutenir le processus électoral en cours et d’accompagner le Peuple congolais dans la recherche du consensus entre les Acteurs politiques et sociaux afin de trouver une issue pacifique à la crise actuelle aux conséquences imprévisibles».[1]

 

 

 

 

2. LE DIALOGUE DU CENTRE INTER – DIOCESAIN

 

a. La reprise des travaux

 

Le 15 mars, l’abbé Donatien Nshole, secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), a annoncé que les discussions directes entre l’opposition et la Majorité présidentielle sur les modalités d’application de l’accord du 31 décembre vont reprendre jeudi 16 mars au centre interdiocésain à Kinshasa. Il a ajouté que, pour la médiation de ces négociations, le répondant, l’interface du Rassemblement sera Félix Tshisekedi, récemment désigné président du Rassemblement.[2]

 

Le 16 mars, au Centre Interdiocésain on a repris les travaux sur l’arrangement particulier de l’accord signé le 31 décembre entre la Majorité présidentielle, l’opposition et la Société civile. Vingt-huit délégués sur les trente-deux attendus participent aux travaux.

Le président de la CENCO, Mgr. Marcel Utembi, a exhorté les parties prenantes à «privilégier l’intérêt général de la nation au détriment des intérêts partisans», pour clôturer les négociations dans le plus bref délai.

Selon Mgr Utembi, quelques divergences subsistent encore et nécessitent d’être vidées, pour finaliser l’arrangement particulier. Il cite principalement le mode de désignation du Premier ministre issu du Rassemblement, la répartition des postes ministériels par composantes au sein du prochain gouvernement, la question de la succession d’Étienne Tshisekedi à la présidence du Conseil national de suivi de l’accord, le chronogramme de la mise en œuvre de l’accord et le rôle de la CENCO dans le processus après la signature de l’arrangement particulier.

Pour le président de la CENCO, les travaux éteint suspendus pour permettre aux parties prenantes d’assister aux funérailles du président du Rassemblement Etienne Tshisekedi et de restructurer les organes de direction de cette plateforme. Il a remarqué que le désaccord persiste encore entre le pouvoir et la famille du défunt sur l’organisation des obsèques. Mais pour la restructuration du Rassemblement, le vide a été comblé parce qu’il y a désormais des interlocuteurs reconnus pour engager cette plateforme dans ces négociations.

La CENCO espère un atterrissage le plutôt possible. Ce n’est pas par hasard que la reprise de ces discussions intervient un jour après l’ouverture de la session parlementaire du mois mars. Une session qui devrait notamment statuer sur le CNSA et l’installation du nouveau gouvernement issue de l’Accord du 31 décembre. La dernière plénière des négociations directes avait eu lieu le 28 janvier.[3]

 

Le 16 mars, la Majorité Présidentielle (MP) a soulevé ses inquiétudes quant à la dissidence au sein du Rassemblement qui doit être aplanie, selon elle, avant de continuer les négociations.

Les évêques du bureau de la mission de bons offices estiment eux que cette affaire est interne au Rassemblement et ne concerne pas la Majorité. Le vide à la tête du Rassemblement a déjà été comblé, a affirmé le président de la CENCO, Mgr Marcel Utembi.

Mgr. Marcel Utembi s’est dit indigné du comportement des acteurs politiques qui participent à ces négociations et qui ont oublié, selon lui, la finalité principale de ce dialogue et il a affirmé que «la CENCO sera attentive de manière à déceler toute manœuvre dilatoire et en établir les responsabilités». Il a rappelé que «il est inadmissible de voir que les travaux de l’arrangement particulier prennent plus de temps que ceux consacrés à l’élaboration et à l’adoption de l’accord proprement dit. Il n’est pas normal que les négociateurs s’enlisent sur des questions du partage du pouvoir, oubliant que la finalité principale de l’accord consiste en l’organisation des élections dans le délai. Le peuple congolais est à bout de patience. Les congolais qui tiennent à élire leurs dirigeants de manière démocratique nous obligent à aller vite à l’essentiel».

Le vice-président de la Cenco, Mgr. Fridolin Ambongo, a ajouté: «On remarque une insensibilité face à la gravité du moment, une sorte d’inconscience. Notre pays est en train de vivre un moment critique avec tout ce qui se passe dans le Kasaï, les nouvelles qui nous parviennent de l’est. Et il suffit de se promener dans la ville de Kinshasa pour se rendre compte de la misère du peuple. Mais on dirait que c’est une classe politique qui vit dans un autre monde, qui ne voit pas ces réalités. Si vous voyiez le contenu des discussions actuelles, plus personne ne parle des élections. Tout le monde parle de postes, et chacun pense aux intérêts qui seront les siens dès que le nouveau gouvernement sera là, donc c’est plutôt une sensibilité vers ce qui me revient à moi et à ma famille ou à mon groupe politique que l’intérêt supérieur de la nation».[4]

 

b. La question de la présidence du Conseil National de Suivi de l’Accord

 

Le 16 mars, à l’issue de la première séance de travail après le décès d’Etienne Tshisekedi, Adolphe Lumanu, délégué de la MP a déclaré que le poste de Président du Conseil National de Suivi de l’accord du 31 décembre (CNSA) devra impérativement faire l’objet d’un consensus. «Pour le poste de CNSA, il faut qu’il y ait un président désigné par consensus. Parce que Tshisekedi était désigné par consensus au niveau de la plénière de la CENCO par toutes les parties prenantes», a-t-il affirmé. Pour ce cadre de la Majorité présidentielle (MP), la présidence du CNSA était confiée au défunt président de l’UDPS « à titre personnel ». «Vu le rôle que Tshisekedi a joué dans l’univers politique congolais pour la démocratie dans ce pays, ce poste lui avait était confié à titre personnel. Maintenant qu’il est décédé, ce poste doit faire l’objet d’un consensus par toutes les parties prenantes pour lui trouver un remplaçant», a expliqué Adolphe Lumamu.

Côté Rassemblement, on n’est pas prêt à céder à ce qu’on qualifie de « chantage ». La plateforme de l’opposition balaie d’un revers de main l’exigence de la MP et appelle à la désignation du président du CNSA conformément à l’accord du 31 décembre. Dans ce contexte, le président de la plateforme Alternance pour la République (AR), Delly Sesanga, a déclaré que «l’accord signé précise que le président du Conseil des sages est le président du Conseil National de suivi de l’accord. Cela n’appelle à aucune interprétation, il est clair. Nous ne comprenons pas ce débat de consensus. Nous appelons donc la MP à la mise en œuvre rapide de cet accord».[5]

 

Le président de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC), Vital Kamerhe, et les signataires de l’accord de la Cité de l’Union africaine soutiennent la remise sur la table de la question de la présidence du CNSA. Il a affirmé que «on avait accepté à ce poste Etienne Tshisekedi compte tenu de son envergure, de son aura, de sa capacité à booster le processus pour un atterrissage apaisé. Sa personne à la tête du CNSA sécurisait tout le monde et apportait du crédit. C’était par consensus. On l’avait bien spécifié en son temps. Si c’était une autre personne on n’aurait pas accepté. On avait fait exception».

Kamerhe annonce qu’il n’est pas seul dans cette démarche: «L’Opposition signataire, le Front pour le respect de la Constitution (FRC) et d’autres groupes estiment que la question devra être remise sur la table et être résolue par consensus. Ceci dit, il n’est pas exclu que le président du CNSA provienne du Rassemblement. Ce que nous refusons que le Rassemblement considère cela comme un acquis».

Vital Kamerhe trouve cependant qu’il n’est pas obligatoire de renégocier l’accord du 31 décembre. Il propose un addendum dans le but de redéfinir les équilibres. «Personne ne prévoyait la mort de Tshisekedi le 1er février. On ne va pas donc rouvrir l’accord. On peut faire un addendum ou le discuter dans le cadre de l’arrangement particulier».[6]

 

Le 17 mars, le Front pour le Respect de la Constitution (FRC) a appelé à une «renégociation» sur le poste de président du Conseil national de suivi de l’accord (CNSA), après le décès d’Etienne Tshisekedi, qui était désigné à assumer ces fonctions. La coordonnatrice de la plateforme Front pour le respect de la constitution, Eve Bazaïba, a ainsi déclaré: «Ce poste-là était réservé au président Etienne Tshisekedi intuitu personae […] Maintenant qu’il y a une donne nouvelle, nous pensons que le Front est en droit de revenir à sa position initiale: nous sommes la composante qui ne sera pas juge et partie, qui ne sera pas impliquée dans la gestion de la chose publique et nous sommes à même de diriger l’institution [de suivi de la] mise en œuvre de l’accord».

Même son de cloche du côté de la MP. Au cours d’un point de presse, son porte-parole Alain André Atundu, a appelé à la relance de négociation sur ce poste: «Pour la Majorité présidentielle et pour tout homme politique bien pensant, la disparition de Monsieur Etienne Tshisekedi entraine logiquement la renégociation du poste de président du CNSA en faveur d’une personnalité consensuelle au regard des exigences de toutes les parties prenantes». Il a aussi insisté sur la désignation consensuelle du président du comité des sages au sein du Rassemblement. «Il est évident par ailleurs que la désignation d’un président consensuel du comité des sages au sein du rassemblement débloquera le processus de la désignation du Premier ministre sur la base de la présentation d’une liste des trois personnalités», a-t-il poursuivi.[7]

 

Le 18 mars, au cours d’un meeting organisé à Lubumbashi, le coordonnateur du Rassemblement de l’opposition dans les provinces issues de l’ancien Katanga, Gabriel Kyungu, a affirmé que l’un des points qui bloquent l’application de l’accord du 31 décembre est la présidence du CNSA et il a donc proposé que la présidence du CNSA soit confiée à la CENCO qui assure la médiation dans les discussions entre le pouvoir et l’opposition et qui jouit d’une crédibilité unanime au sein de la classe politique. Selon l’accord, la présidence du CNSA est attribuée au président du conseil des sages du Rassemblement, poste occupé par Etienne Tshisekedi jusqu’à sa mort le 1er février dernier. Depuis sa mort, certains regroupements et personnalités politiques réclament que l’attribution de ce poste soit rediscutée.[8]

 

Le 21 mars, le président de l’UNC, Vital Kamerhe, a fait savoir que l’opposition signataire de l’accord du 18 octobre réclame la direction du CNSA. D’après lui, cette question doit encore faire objet d’un consensus entre les différentes parties qui participent aux discussions sur l’arrangement particulier: «La question doit encore requérir un consensus comme c’était avec le cas d’Etienne Tshisekedi. Si on donne la primature au Rassemblement, faut-il encore lui donner le CNSA? Il faut équilibrer les choses. Nous ne disons pas que cette personne ne pourra pas venir du Rassemblement, mais nous disons que l’opposition signataire réclame aussi ce poste, comme les autres peuvent le faire».[9]

 

Le 24 mars, à propos du CNSA, chaque partie prenante a maintenu ses positions. Le camp présidentiel a insisté sur ce qu’il appelle l’esprit qui a conduit à la désignation de l’ancien président du Conseil des sages du Rassemblement. Pour la Majorité présidentielle, le Front pour le Respect de la Constitution et les signataires de l’Accord du 18 octobre, le décès d’Etienne Tshisekedi exige qu’on reconsidère cette question, parce qu’il avait été désigné à ce poste au titre de ce qu’il représentait en tant que personne dans l’échiquier politique congolais. Cet argument a été rejeté par le Rassemblement qui a demandé de suivre ce qui est écrit dans l’Accord du 31 décembre 2016: « Le CNSA est présidé par le président du Conseil des Sages du Rassemblement ».[10]

 

c. La question de la modalité de la désignation du nouveau Premier Ministre

 

Le 16 mars, au cours de la plénière, le Rassemblement de l’Opposition a proposé que la question de la primature soit examinée entre Joseph Kabila et Félix Tshisekedi. Cette proposition a été rejetée par la Majorité Présidentielle. Au sortir de la séance, la CENCO a affirmé que «Majorité présidentielle et Opposition n’ont pas évolué dans leurs discussions. La Majorité continue d’exiger trois noms tandis que le Rassemblement insiste sur la présentation d’un seul nom».[11]

 

Le 17 mars, la CENCO a proposé que le futur premier ministre soit nommé au terme de consultations entre le président de la République et le président du Conseil des sages du Rassemblement. La formulation trouvée par les évêques est destinée à permettre un consensus entre le Rassemblement et la Mp toujours divisés sur le mode de désignation du futur premier ministre.

Les délégués de la Majorité présidentielle ont souhaité amener prochainement une formulation à ce sujet; ils reconnaissent toutefois que c’est une avancée.[12]

 

Le 20 mars, au cours de l’assemblée plénière, la Majorité présidentielle a communiqué sa proposition sur la formulation relative à la modalité de désignation du futur Premier Ministre:  «le Premier ministre est nommé parmi les candidats présentés au terme des consultations entre le président de la République et le président du Rassemblement». Le Rassemblement ne veut pas entendre parler de plusieurs noms; en revanche, ses membres se sont dits d’accord sur le fait qu’il y ait consultation avec le chef de l’Etat.

À propos de la répartition des postes ministériels, on a créé une commission composée d’une dizaine de personnes pour discuter de cette question et faire des propositions concrètes.

On a fixé le lundi 27 mars prochain comme date pour l’adoption et la signature de l’Arrangement particulier. La prochaine plénière est prévue le mercredi 22 mars 2017 à 15h00′.[13]

 

Le 20 mars, le secrétaire général de l’UDPS, Jean-Marc Kabund-A-Kabund, a suspendu sa participation aux négociations directes organisées sous les auspices de la CENCO. Selon lui, il a claqué la porte à cause de «la mauvaise foi de la majorité présidentielle» qui ne veut pas que ces pourparlers aboutissent.

A propos de la modalité de désignation du premier ministre, Jean Marc Kabund dit ne pas comprendre pourquoi la MP ne s’en tient qu’au mode de désignation par liste qu’on ne retrouve nulle part, ni dans l’accord, ni dans la constitution. Il rappelle que les évêques ont formulé une proposition, «saluée par tous», pour décanter cette question qui divisait la MP et l’opposition: «Les évêques nous ont demandé d’accepter que le nouveau leadership du Rassemblement discute avec le président de la République. Nous avons pensé que c’était une voie de sortie, mais nos amis de la MP sont venus avec d’autres stratagèmes pour bloquer la signature de l’arrangement particulier». Jean-Marc Kabund est le seul à avoir décidé de quitter la salle où se déroulent les négociations. Tous les autres délégués de l’UDPS y sont restés.[14]

 

Le 21 mars, le secrétaire général de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS),  Jean-Marc Kabund, a dit avoir pris acte de l’annonce de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) pour signer l’arrangement particulier lundi 27 mars. Il a promis d’entreprendre des actions si l’accord n’est pas signé à cette date. Selon lui, il y a deux possibilités qui s’offrent:

«Soit Kabila va appliquer l’accord de Saint Sylvestre ou soit nous allons appliquer l’article 64 de la constitution». Cet article stipule: « Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution. Toute tentative de renversement du régime constitutionnel constitue une infraction imprescriptible contre la nation et l’Etat. Elle est punie conformément à la loi ». [15]

 

Le 24 mars, aucun accord n’a été trouvé sur le mode de désignation du Premier ministre du futur gouvernement. Pour rappel, le Rassemblement insiste sur la proposition d’un seul nom à la primature et que cette question soit directement discutée entre le chef de l’Etat et le président du Conseil des sages du Rassemblement. Cette proposition est rejetée en bloc par la Majorité présidentielle qui n’envisage pas à ce stade une rencontre Kabila-Lumbi sur cette question et insiste sur la proposition d’une liste d’au moins trois noms.[16]

 

d. La question de la répartition des postes ministériels

 

Le 21 mars, les délégués membres de la Commission sur la formation du prochain gouvernement ont trouvé un accord  sur la nomenclature du prochain gouvernement.

D’après un membre de cette commission, les 4 ministères de souveraineté ne sont pas concernés à ce stade de négociation. Selon lui, les ministères de la Justice, de la Défense, de l’intérieur et des Affaires étrangères; feront plutôt l’objet des discussions entre le président de la République et le premier ministre. Le futur gouvernement sera composé de 54 personnes soit un premier ministre, 45 ministres et 8 vice-ministres. Le principe sur la répartition au regard des composantes a aussi été réaffirmé, à savoir: 17 pour la majorité présidentielle, 13 pour l’opposition non signataire (Rassop), 12 pour l’opposition signataire de l’accord de l’Union Africaine, 2 pour l’Opposition Républicaine et 2 pour la Société civile.[17]

 

Le 22 mars, la Majorité Présidentielle (MP) et l’opposition signataire de l’accord du 18 octobre, deux composantes déjà présentes au gouvernement Badibanga, ont proposé de céder certains de leurs postes ministériels pour que le Rassemblement intègre ses membres.

Selon un membre de la MP et délégué dans la commission chargée de la répartition des postes ministériels, il s’agirait des ministères suivants: Droits humains, Tourisme, Education et nouvelle citoyenneté, Sports et loisirs, Affaires coutumières, Relations avec le parlement, PME, Agriculture, Santé et PTNtic Selon la MP et l’opposition signataire de l’accord du 18 octobre, le prochain premier ministre devrait discuter avec le Chef de l’Etat sur la répartition de quatre ministères dit de souveraineté, à savoir: l’intérieur, la défense, les affaires étrangères, et les finances publiques.

Le Rassemblement a de sa part boudé ces propositions et a réclamé  entre autres: les ministères de l’économie, du plan, des postes et télécommunications, du budget, de la fonction publique et de la communication et médias, tout en acceptant aussi les ministères de l’agriculture et de la santé.[18]

 

Le 22 mars, le Président de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC) et chef de file de l’Opposition signataire de l’Accord du 18 octobre 2016, Vital Kamerhe, a invité le Rassemblement à ne pas tergiverser sur la question du partage des postes. «L’objectif ce sont les élections. Nous invitons les uns et les autres et surtout ceux qui, hier nous donnaient le conseil de ne pas aller à la Cité de l’Union africaine pour les postes, nous leur retournons le même conseil aujourd’hui: Ne soyez pas à la Cenco pour vous cramponner sur les postes», a-t-il déclaré.[19]

 

Le 23 mars, les parties prenantes aux discussions sur l’arrangement particulier n’ont pas réussi à boucler le travail de commission chargée de la répartition des postes ministériels. À ce stade, la répartition des postes se présentent comme suit: MP: 12 postes déjà acquis sur les 17 alloués; Opposition signataire: 4 postes acquis sur les 8 alloués; Rassop: 3 postes acquis sur les 12 alloués;

Opposition républicaine: 1 postes sur 2 alloués; Société civile signataire: 1 poste alloué et acquis;

Société civile non-signataire: pas encore de poste pourvu que 1 alloué.[20]

 

e. Le Président de la Cenco et le Ministre des Affaires Étrangères devant le Conseil de Sécurité

 

Le 21 mars, devant le Conseil de sécurité de l’ONU, le président de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), Mgr. Marcel Utembi, a exprimé sa vive inquiétude quant à la persistance de l’impasse dans les négociations pour la mise en œuvre effective de l’accord de la Saint-Sylvestre. D’après lui, le retard que connaît la conclusion de l’arrangement particulier risque de rendre l’accord politique du 31 décembre obsolète et de donner occasion à l’organisation d’un référendum à défaut de la tenue des élections prévues en décembre 2017. Il a déclaré que, «étant donné que toutes les institutions électives du Pays ont épuisé leur mandat, la RDC traverse une période sans précédent de son histoire depuis son indépendance. Les constituants n’ayant pas prévu une telle situation, l’accord global et inclusif du centre interdiocésain s’avère la seule feuille de route réaliste pouvant sortir le pays de la crise institutionnelle. Malheureusement, l’arrangement particulier destiné à assurer la mise en œuvre dudit accord peine à se conclure. Alors que la population attend impatiemment les élections, le statu quo politique dû à l’intransigeance des négociateurs sur quelques points de divergence restants et entretenu par des manœuvres politiciennes et par le manque de volonté politique, risque de retarder indéfiniment l’application de l’accord de la Saint-Sylvestre».

Mgr Marcel Utembi estime que pour arriver à l’application de cet accord, il faut un «réel engagement» des acteurs politiques et sociaux congolais. La CENCO a invité à ce sujet la communauté internationale notamment l’Union Africaine, l’Union Européenne, la Grande-Bretagne et les États-Unis à presser les acteurs politiques congolais pour qu’ils s’engagent effectivement dans la mise en œuvre de l’accord politique du centre interdiocésain.[21]

 

Le 21 mars, devant le Conseil de sécurité de l’ONU, le ministre des Affaires Etrangères, Léonard She Okitundu, a insisté sur la liste d’au moins trois candidats au poste de Premier ministre.

«S’agissant de la nomination du Premier ministre, le Rassemblement est appelé à présenter une liste comportant au moins trois noms des candidats à ce poste parmi lesquels le Chef de l’Etat aura à en nommer un, conformément à l’article 78 de la Constitution», a déclaré le chef de la diplomatie congolaise. She Okitundu s’est empressé d’ajouter qu’il n’existe aucune manœuvre dilatoire de la part du gouvernement congolais de nature à retarder la mise en œuvre de l’Accord. Pour lui, le retard que connaît le processus est dû à des circonstances objectives, plus particulièrement le décès d’Etienne Tshisekedi qui a poussé la CENCO à suspendre les travaux.

Au sujet du remplacement du président du Conseil National de Suivi de l’Accord (CNSA), le ministre congolais des Affaires étrangères a renvoyé la balle au Rassemblement: «Pour ce qui est du président du CNSA, celui-ci avait été désigné par consensus. Il devrait en être de même pour son remplacement qui devra se faire de manière consensuelle. Etant donné que le président du CNSA devra provenir de l’opposition, le Gouvernement exhorte cette dernière, plus particulièrement le Rassemblement, à surmonter ses dissensions actuelles afin de se mettre d’accord sur la personne du candidat qui devra remplacer le défunt Etienne Tshisekedi».[22]

 

 

3. LA CRISE AU SEIN DU RASSEMBLEMENT DE L’OPPOSITION

 

La disparition d’Etienne Tshisekedi a occasionné une crise leadership au sein du Rassemblement. Félix Tshisekedi (UDPS) et Pierre Lumbi (G7) ont été élus jeudi 2 mars président du Rassemblement des forces sociales et politiques acquises au changement et président du conseil des sages de cette même plateforme. Ce qui n’a pas plu à quelques cadres du Rassemblement, qui ont désigné de leur côté Joseph Olenghankoy comme président du conseil des sages.[23]

 

Le 14 mars, la Dynamique de l’Opposition aile Joseph Olengha Nkoy a fait savoir, à l’issue d’une réunion tenue à Kinshasa, sa volonté de réunifier l’opposition. Dans un communiqué publié à Kinshasa, Bruno Tshibala, porte-parole de cette dissidence du Rassemblement, a appelé à une médiation pour la réunification de ce mouvement.[24]

 

Le 15 mars, la Dynamique de l’Opposition aile Martin Fayulu a décidé d’exclure de ses rangs les dissidents Joseph Olenghankoy, président du FONUS, Freddy Matungulu, président du parti Congo na Biso et Gilbert Kiakwama, qui dirige la Convention des Démocrates chrétiens (CDC), Eva Matwasa, Oscar Lungedo, Ingele Ifoto, Tshibangu Kalala, Omer Kutumisa, Lusamba Thatcher, Emery Okundji, Lumea Maleki et Fiyou Ndondoboni. La quasi-totalité des opposants exclus par cette décision forment l’aile qui soutient Joseph Olenghankoy comme président du Conseil des sages du Rassemblement, contestant Pierre Lumbi et Félix Tshisekedi.[25]

 

Le 18 mars, lors d’un point de presse à Kinshasa, Bruno Tshibala, porte-parole du Rassemblement et membre du conseil de sages de ce regroupement – aile Olenghankoy, a appelé les uns et les autres au respect des «fondamentaux de la rencontre de Genval» pour absorber la crise née de la restructuration du Rassemblement après la disparition d’Etienne Tshisekedi.

Selon lui, «les participants avaient signé un pacte autour de Tshisekedi. Et ce pacte prévoyait qu’il ait deux organes [du rassemblement]: le conseil des sages et la coordination des actions. On ne peut pas, avant qu’Etienne Tshisekedi [dont le corps se trouve toujours à Bruxelles depuis le 1er février] soit enterré, changer ça!». Bruno Tshibala s’est dit toutefois favorable à la restructuration du regroupement, mais à deux conditions: «la première chose, c’est l’enterrement du président [Etienne Tshisekedi] et la deuxième chose, c’est l’adoption du règlement intérieur».[26]

 

Le 21 mars, le président de Congo Na Biso, Freddy Matungulu, a annoncé dans une interview que, le Rassemblement a retrouvé son unité après une rencontre entre lui, Jean Claude Vuemba, Fiyou Ndondoboni, Gilbert Kiakwama et le président du Rassemblement, Felix Tshisekedi, en la résidence d’Etienne Tshisekedi, à Limete. Freddy Matungulu a affirmé cependant que les discussions sont en cours avec les autres membres qui demeurent encore hésitants.[27]

 

Le 22 mars, le porte-parole du Rassemblement, Bruno Tshibala, qui soutient la dissidence de Joseph Olengankoy, a affirmé que «la crise au Rassemblement demeure». Il continue à contester la dernière restructuration intervenue au sein de cette plate-forme de l’opposition portant le duo Tshisekedi-Lumbi à sa tête. Pour Bruno Tshibala, il est démagogique d’affirmer que la crise est finie au Rassemblement. A l’en croire, l’un des préalables à la restructuration et à la réunification du Rassemblement est l’inhumation du président Etienne Tshisekedi. «Comment voulez-vous que l’initiateur du Rassemblement, Etienne Tshisekedi, ne soit pas encore enterré mais qu’on se précipite sur les postes!», s’étonne-t-il.

D’autre part, Peter Kazadi, ancien conseiller juridique de feu Etienne Tshisekedi affirme que la crise au Rassemblement est belle et bien terminée. «La situation est redevenue normale. Le Rassemblement est composé de neuf composantes et les neuf ont toujours été avec nous. Certains membres de ces composantes posaient problème et ils sont revenus», explique Me Peter Kazadi. Parmi les personnalités de retour au Rassemblement, il cite notamment les députés Gilbert Kiakwama et Jean-Claude Vuemba, ainsi que le professeur Freddy Matungulu et Fiyou Ndondoboni. L’ancien conseiller juridique d’Etienne Tshisekedi rappelle par ailleurs que Bruno Tshibala est exclu de l’UDPS et qu’il n’est plus compétent pour parler au nom du parti.[28]

 

Le 22 mars, le député Jean-Claude Vuemba a affirmé que la rencontre du jour précédent entre Félix Tshisekedi et lui, Gilbert Kiakwama, Freddy Matungulu et Fiyou Ndondoboni ne concernait finalement pas le Rassemblement. A en croire le député congolais, cette rencontre visait plutôt la réunification de la plateforme Dynamique de l’opposition où deux camps, celui de Martin Fayulu et celui de Gilbert Kiakwama, s’opposent depuis plusieurs mois. Selon Jean-Claude Vuemba, la réunification de la Dynamique concerne également Joseph Olenghankoy qui, soutenu par certains dissidents, dont Roger Lumbala et Bruno Tshibala, a été désigné président du Conseil de sages du Rassemblement. Par ailleurs, la CENCO a reçu les dissidents, dont M. Lumbala et M. Tshibala, qui ont persisté: «La réunification du Rassemblement ne peut se faire que si la restructuration est abandonnée».[29]

[1] Cf Forum des As – Kinshasa, 28.02.’17   http://www.forumdesas.org/spip.php?article10592

[2] Cf Radio Okapi, 15.03.’17

[3] Cf Radio Okapi, 16.03.’17

[4] Cf Radio Okapi, 17.03.’17; RFI, 17.03.’17

[5] Cf Will Cleas Nlemvo – Actualité.cd, 17.03.’17

[6] Cf Rachel Kitsita – Actualité.cd, 17.03.’17

[7] Cf Radio Okapi, 18.03.’17

[8] Cf Radio Okapi, 20.03.’17

[9] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 22.03.’17

[10] Cf Actualité.cd, 25.03.’17

[11] Cf Actualité.cd, 16.03.’17

[12] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 17.03.’17

[13] Cf Actualité.cd, 20.03.’17

[14] Cf Radio Okapi, 20.03.’17

[15] Cf Radio Okapi, 22.03.’17

[16] Cf Actualité.cd, 25.03.’17

[17] Cf Élysée Odia – 7sur7.cd, 21.03.’17

[18] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 22.03.’17; Élysée Odia – 7sur7.cd, 23.03.’17

[19] Cf Joseph Kazadi Mamba – 7sur7.cd, 22.03.’17

[20] Cf Actualité.cd, 23.03.’17

[21] Cf Radio Okapi, 22.03.’17; Will Cleas Nlemvo – Actualité.cd, 22.03.’17

[22] Cf Actualité.cd, 22.03.’17

[23] Cf Radio Okapi, 19.03.’17

[24] Cf Politico.cd, 15.03.’17

[25] Cf Politico.cd, 15.03.’17

[26] Cf Radio Okapi, 19.03.’17

[27] Cf Stanys Bujakera – Actualité.cd, 21.03.’17

[28] Cf Radio Okapi, 23.03.’17

[29] Cf Politico.cd, 22.03.’17