SOMMAIRE
ÉDITORIAL: UNE CRISE POLITIQUE ENCORE EN ATTENTE DE SOLUTION
- UN DEUXIÈME MEETING DU RASSEMBLEMENT EMPÊCHÉ
- LE RASSEMBLEMENT SE PRONONCE À FAVEUR DE LA MÉDIATION DE LA CENCO
- LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE PRÔNE UN DIALOGUE PLUS INCLUSIF
- LES NOUVELLES PROPOSITIONS DU RASSEMBLEMENT POUR UN ACCORD PLUS CONSENSUEL
ÉDITORIAL: UNE CRISE POLITIQUE ENCORE EN ATTENTE DE SOLUTION
1. UN DEUXIÈME MEETING DU RASSEMBLEMENT EMPÊCHÉ
Le 17 novembre, Jean-Marc Kabund, secrétaire général de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), a déclaré avoir saisi l’autorité provinciale pour l’informer du meeting que le Rassemblement des Forces politiques et sociales acquises au changement va organiser le 19 novembre, sur le terrain du boulevard Triomphal, à Kinshasa. Pour lui, la décision sur l’interdiction de manifestations publiques à caractère politique viole la constitution. «Comme le prévoit la Constitution, nous avons saisi le gouverneur pour l’informer de notre meeting de ce samedi 19 novembre. La décision sur l’interdiction de manifester viole notre constitution en ses articles 26 et 24. Elle est aussi discriminatoire, dans le sens que les gens de la majorité présidentielle tiennent des réunions publiques et des carnavals tous les jours. Est-ce qu’ils ne sont pas concernés par cette décision?», a dit Jean-Marc Kabund. Le secrétaire général de l’UDPS a donc refusé de se soumettre à la décision de l’autorité provinciale et, en invitant tout le monde à la retenue, il s’est dit convaincu que le meeting du Rassemblement se tiendra ce 19 novembre comme prévu.[1]
Le 18 novembre, en guise de réponse à la correspondance de l’UDPS, le vice-gouverneur de la ville province de Kinshasa, Clément Bafiba, a rappelé l’interdiction de toutes les manifestations publiques à caractère politique et il a appelé la police à faire respecter cet ordre.
Côté Rassemblement, Jean Marc Kabund, Secrétaire général de l’UDPS a affirmé cependant que le meeting est maintenu et qu’il se tiendra conformément à la constitution qui garantit à chaque citoyen congolais la liberté de manifester.
Toutefois, le porte-parole de la Police Nationale Congolaise (PNC), le colonel Mwana Mputu, a affirmé avoir pris toutes les dispositions nécessaires pour faire respecter la décision du gouvernement provincial de Kinshasa. Pour le porte-parole de la PNC, le dispositif mis en place le 5 novembre [lors du meeting empêché du Rassemblement] sera reconduit et renforcé, pour empêcher la tenue d’une quelconque manifestation politique. Il a martelé que tout attroupement de plus de dix personnes sur toute l’étendue de la ville de Kinshasa sera dispersé.
Par sa part, la Majorité présidentielle (MP) a appelé la population de Kinshasa à vaquer librement à ses occupations ce samedi. Dans une déclaration à la presse, le secrétaire général adjoint de la MP, le député Joseph Kokonyangi, a fait remarquer que le temps n’est plus aux meetings et autres manifestations, d’autant plus que les pourparlers entre les filles et fils de la RDC ont porté du fruit avec la nomination d’un opposant à la tête du gouvernement. «Le chef de l’Etat a donné le pouvoir au Rassemblement, à l’UDPS. Pourquoi [encore parler] de carton jaune. Il n’y a plus question de carton jaune. C’est fini ça! Le 19 novembre, tout comme le 19 décembre, ce sont des jours normaux. Il n’y aura rien!», a affirmé le député Joseph Kokonyangi.[2]
Le 19 novembre, à Kinshasa, le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement n’a pas pu tenir son meeting, comme il l’avait prévu, pour réclamer le départ de Joseph Kabila à la fin de son mandat en décembre. Un important dispositif sécuritaire a été déployé dans plusieurs endroits de la ville, notamment à proximité du stade des Martyrs de Kinshasa, où le meeting devait se tenir. Cet espace, l’esplanade du Boulevard Trionphal, a été occupé par des équipes de football, comme lors du meeting avorté du 5 novembre dernier. Des policiers ont également été déployés, à Limete, autour de la résidence d’Etienne Tshisekedi, leader du Rassemblement et devant le siège de l’UDPS. Ce déploiement massif des forces de sécurité a empêché toute tentative de regroupement.
A Lubumbashi aussi, le Rassemblement n’a pas pu organiser aucune manifestation, à cause de la présence massive des éléments de la police au lieu prévu pour le meeting, le Foyer social de la commune Katuba. La police a empêché par ailleurs Gabriel Kyungu wa Kumwanza, président du Rassemblement dans l’ex-Katanga, de rejoindre le lieu prévu du meeting. Et les résidences privées de Charles et Christian Mwando, deux cadres du regroupement politique, ont été attaquées à coup des pierres par un groupe des jeunes non identifiés. À en croire Christian Mwando, ancien ministre provincial des Finances, l’assaut s’est déroulé en présence de deux jeeps de la police.[3]
Le 19 novembre, à Bunia, le mouvement citoyen « Filimbi » a organisé une opération nommée: « Piga Filimbi » (Sifflez) dans différents artères de la ville, pour rappeler la fin du mandat de Joseph Kabila en décembre. Les manifestants ont été dispersés par la police quelques minutes après leur rassemblement. Trois d’entre eux ont été arrêtés. Selon les organisateurs, l’objectif de l’opération « Piga Filimbi » était de rappeler aux autorités la fin du mandat du président de la République le 19 décembre prochain. A cet effet, cinq mille sifflets et cartons jaunes ont été distribués aux habitants à la veille de cette activité. La coordonnatrice de ce mouvement, Naguy Godhi, dénonce l’arrestation de trois de leurs compagnons par les services de sécurité. Les autorités locales avaient été informées de cette manifestation, mais le maire intérimaire de Bunia avait déjà interdit verbalement l’organisation de toute manifestation à caractère politique sur l’ensemble de sa juridiction.[4]
Le 21 novembre, deux jours après leur interpellation, les trois militants du mouvement citoyen Filimbi ont été transférés au Parquet de grande instance de l’Ituri, à Bunia. La police les accuse de trouble à l’ordre public et d’incitation à la rébellion. L’un des militants est un mineur qui a été remis au Tribunal pour enfants. Selon la coordonnatrice de Filimbi en Ituri, Naguy Godi, le premier activiste a été arrêté au cours de la manifestation et les deux autres ont été arrêtés parce qu’ils portaient des polos de couleur jaune (carton jaune).[5]
2. LE RASSEMBLEMENT SE PRONONCE À FAVEUR DE LA MÉDIATION DE LA CENCO
Le 19 novembre, dans un communiqué signé par Étienne Tshisekedi, président du Conseil des Sages du Rassemblement des Forces politiques et sociales acquises au changement et lu par Jean-Marc Kabund, secrétaire général de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), le Conseil des Sages «– Proteste contre l’interdiction générale et absolue des manifestations publiques pacifiques décrétée sur toute l’étendue de la République, en flagrante violation de l’article 26 de la Constitution, par les autorités provinciales à la solde de Joseph Kabila et de son gouvernement.
– Condamne la violence avec laquelle les éléments des forces armées et de la police, instrumentalisés par le pouvoir, ont (1) opéré des rafles dans les quartiers et enlevé des responsables des mouvements de jeunes du Rassemblement, (2) barricadé l’accès aux lieux du meeting et (3) encerclé des résidences des leaders du Rassemblement.
– Constate que Kabila et son régime sont prêts à toutes les dérives et entraves pour empêcher le peuple congolais de défendre la Constitution et d’exercer ses droits fondamentaux.
– Réaffirme sa conviction à l’aboutissement heureux de la crise par la tenue d’un dialogue réellement inclusif et encourage la mission des bons offices menée par la CENCO, soutenue par l’ensemble de la Communauté internationale.
– Invite tous les Congolais, toutes les plateformes, partis politiques, associations membres de la Société Civile à une mobilisation générale, et déclenche, à dater de ce jour, le compte à rebours de la fin du mandat de Monsieur Joseph Kabila, qui interviendra le 19 décembre 2016 à minuit».[6]
Le 21 novembre, dans une déclaration politique publiée à conclusion d’une réunion extraordinaire du parti, le Conseil National du Mouvement Social pour le Renouveau (MSR) a déclaré que:
«1. La non organisation des élections dans les délais requis par la constitution en vigueur, alors que le second et dernier mandat du Président de la République expire le 19 décembre 2016, est une occasion historique manquée au peuple congolais de vivre cette année sa première passation pacifique du pouvoir au sommet de l’Etat.
- L’accord conclu le 18 octobre 2016 à la Cité de l’Union Africaine, n’est pas considéré par le peuple congolais et les partenaires de la RDC comme une solution véritablement consensuelle à la crise sociopolitique qui prend des proportions de plus en plus inquiétantes dans notre pays et qui risque de le plonger dans le chaos.
- Bien qu’ayant reconnu les imperfections de l’Accord de la Cité de l’UA et confié à la CENCO une mission de bons offices pour rapprocher les positions de ses partisans avec celles du Rassemblement des Forces Politiques et Sociales acquises au changement, telles qu’exprimées dans les résolutions du conclave du 04 octobre 2016, le Président Joseph KABILA met en œuvre l’accord décrié sans attendre les conclusions de la CENCO, en nommant un Premier Ministre de manière cavalière. Son discours sur l’état de la nation du 15 novembre 2016, prononcé sur un ton des plus agressifs, exacerbe davantage la crispation du climat politique dans le pays.
- Bafouant la Constitution et les lois de la République, le Président Joseph KABILA considère abusivement les activités et manifestations pacifiques des Forces Sociales et Politiques comme des actes terroristes. Les actes de répression à l’endroit de l’opposition ne font qu’éloigner le climat de sérénité dans les pourparlers politiques, indispensables à une issue heureuse à la crise.
- Les participants aux présentes assises soutiennent la démarche actuellement menée par la CENCO.
- En vue de contribuer à la recherche de la paix et des solutions consensuelles pour l’intérêt supérieur de la nation, le Conseil National du MSR considère qu’il y a lieu d’aplanir les divergences sur un calendrier électoral réaliste, raccourcissant les délais de l’enrôlement pour avoir des élections présidentielle et législatives nationales au troisième trimestre 2017 ainsi que les élections provinciales au quatrième trimestre 2017.
- En ce qui concerne la gouvernance du pays pendant la période transitoire allant du 20 décembre 2016 à l’installation des nouvelles institutions issues des urnes, le Conseil National du M.S.R. réaffirme la mise en place d’un régime de large consensus, dont les missions et les compétences des institutions seront bien fixées dans un accord et orientées essentiellement vers l’organisation des élections libres, transparentes et crédibles à des dates convenues.
- Pour plus de garanties, l’Accord global et inclusif en vue doit énoncer clairement que le Président Joseph KABILA n’est pas candidat à la prochaine élection présidentielle, la Constitution du 18 février 2006 ne sera l’objet ni d’une révision, ni d’un changement, moins encore d’un quelconque référendum. Les actes de dédoublement des Partis politiques, les poursuites judiciaires arbitraires à l’endroit des hommes politiques de l’Opposition doivent impérativement être abandonnées particulièrement à l’endroit de Moïse KATUMBI candidat à la prochaine élection présidentielle. Les prisonniers politiques et d’opinion doivent recouvrer leurs libertés, l’espace politique et médiatique devant être libéré.
- Un Comité d’accompagnement incluant aussi bien la CENCO que des représentants de la communauté internationale est inévitable. Il est souhaitable que la médiation actuelle de la CENCO aboutisse à un accord au plus tard à la fin du mois de novembre 2016, de manière à permettre à toutes les parties prenantes de le vulgariser et le faire accepter à la population avant l’échéance fatidique du 19 décembre 2016.
- Le Mouvement Social pour le Renouveau reste convaincu qu’il est encore possible de sauver la République dans le cadre d’un compromis largement partagé».[7]
Le 25 novembre, dans une interview, le secrétaire général de l’UDPS, Jean-Marc Kabund, a accusé la Majorité présidentielle de bloquer le dialogue inclusif souhaité par le Rassemblement et il à réitéré la position du Rassemblement autour de la date du 19 décembre: Kabila ne traversera pas le 19 décembre. Selon lui, «le Rassemblement envisage deux schémas: dans le premier cas, Kabila quitte le pouvoir par la voie de négociation ou, dans le deuxième cas, le 19 décembre il devra partir conformément à l’article 64 de notre constitution. Pour le Rassemblement, Kabila ne traversera pas le 19 décembre. Ça sera fini à 23h59′ du 19 décembre. S’il peut négocier avec nous, c’est pour nous permettre de mettre en place ce qu’il faut pour le pays après cette date. Ça sera très criminel pour Kabila d’attendre que le peuple le fasse partir de force le 19 décembre. Il serait mieux qu’il accepte de discuter avec nous, afin qu’il y ait passation du pouvoir le 19 décembre, en laissant la place au régime spécial avec ceux qui seront là. Le Rassemblement n’entend pas cogérer le pays avec Kabila après le 19 décembre».[8]
Quelques jours auparavant, luelques e porte parole de la composante Majorité présidentielle (MP) au dialogue, Leonard She Okitundu, avait déclaré que les consultations de la CENCO n’étaient pas faites en vue d’un nouveau dialogue. Selon le sénateur de la MP, sa famille politique maintient le contact avec le Rassemblement de l’opposition pour trouver une solution sur la gestion du pays pendant la transition. «A travers la CENCO, nous voulons maintenir le contact avec le Rassemblement pour trouver une solution particulièrement sur la gestion du pays pendant la période préélectorale. Mais croire qu’il y aura un nouveau dialogue, comme ils le réclament, ce n’est pas faisable. C’est comme si tout ce qui a été fait à la cité de l’Union Africaine ne valait rien du tout, alors que ce dialogue a été tenu en présence de toute la Communauté internationale. Cet accord a été avalisé par la CIRGL lors du sommet de l’Angola et a été considéré comme une étape importante par la délégation du Conseil de Sécurité qui est passée par ici. Par conséquent, nous pouvons maintenir le contact avec le Rassemblement, mais ça ne nécessite pas un forum comme celui qui a eu lieu à l’Union Africaine», avait dit She OKitundu. Le Rassemblement réclame la tenue d’un nouveau dialogue entre d’un côté les signataires de l’accord de la cité de l’UA et de l’autre, le Rassemblement et ses alliés.[9]
3. LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE PRÔNE UN DIALOGUE PLUS INCLUSIF
Le 22 novembre, dans une déclaration, le Département d’État des États-Unis «reconnaît les efforts fournis en vue d’un accord plus inclusif en RDC, tout en affirmant que les prochaines semaines seront essentielles, pour déterminer si la République Démocratique du Congo poursuit une voie de principes démocratiques et de compromis, ou risque de retourner à la violence et à l’instabilité.
Les États-Unis soulignent leur soutien aux discussions facilitées par la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) entre l’opposition politique et le gouvernement de la RDC, afin de parvenir à un consensus vers des élections crédibles et en temps voulu. Le succès de ces discussions, s’appuyant sur et renforçant l’accord du 18 octobre facilité par l’Union africaine, dépendra de la participation de bonne foi, des engagements sérieux et des concessions tangibles de la part de l’opposition politique et du gouvernement de la RDC.
Les États-Unis demandent instamment au gouvernement de la RDC et à l’opposition de travailler avec la CENCO pour répondre aux préoccupations qui subsistent, y compris le calendrier des élections présidentielles de 2017, des garanties que le président Kabila ne cherchera pas à briguer un autre mandat et que la Constitution ne sera pas modifiée et pour permettre une indépendance accrue du leadership de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI), un gouvernement de transition inclusif et un solide comité de surveillance indépendant.
Les États-Unis exhortent la coalition du Rassemblement sous la direction d’Etienne Tshisekedi à faire des propositions constructives et pratiques et à s’abstenir de rhétorique incendiaire ou des actions incompatibles avec les normes démocratiques. Pour sa part, le gouvernement de la RDC devrait saisir l’opportunité offerte par la récente nomination du Premier ministre Samy Badibanga, afin de renforcer la confiance de toutes les parties prenantes et de s’acquitter de sa responsabilité de respecter et de protéger les droits fondamentaux de tous les Congolais, notamment les libertés d’expression et de réunion ainsi que le droit d’accès à l’information.
En travaillant ensemble, le gouvernement, l’opposition et le peuple congolais peuvent tracer un nouveau chemin pacifique pour l’avenir de leur pays, mais le temps presse pour parvenir à un consensus. Les États-Unis sont prêts à aider les Congolais à relever ce défi important».[10]
L’ambassadeur des Etats-Unis en RDC, James Swan, a réitéré l’appel de l’administration américaine pour un accord plus inclusif entre le Rassemblement de l’opposition et la Majorité au pouvoir. Il a aussi renouvelé le soutien de son pays à l’initiative de la CENCO visant à rapprocher les deux parties: «Nous avons lancé un message à la fois aux autorités de la RDC et à l’opposition, soulignant qu’il ne reste que moins d’un mois avant le 19 décembre, date marquant la fin du mandat du président Kabila. Il ne reste donc que très peu de temps pour qu’on arrive à un accord plus inclusif que celui signé le 18 octobre. Nous croyons que l’accord du 18 octobre représente une bonne base. Mais ça serait dans l’intérêt de tout le monde que ça devienne plus inclusif et plus consensuel. Il y a déjà l’initiative entamée par les évêques de la Conférence Episcopale Nationale du Congo». Interrogé sur la position du Rassemblement, le diplomate Américain a affirmé que l’heure n’est plus à la politique de la chaise vide ou du refus: «nous avons encouragé l’opposition à proposer des idées plus concrètes, afin qu’on arrive à un accord inclusif. Je crois que c’est trop tard maintenant pour une politique de la chaise vide ou du refus».
Le Conseil de sécurité et la plupart des chancelleries occidentales appellent la Cenco à poursuivre ses consultations et les acteurs politiques à y participer, malgré la signature de l’accord politique du 18 octobre et la nomination d’un Premier ministre issu des rangs de l’opposition.[11]
Le 23 novembre, dans une déclaration faite depuis Bruxelles, la porte-parole de l’Union Européenne, Catherine Ray, a dit soutenir «les efforts politiques en cours en République Démocratique du Congo». Allusion faite notamment à la mise en place de l’accord politique de la cité de l’Union africaine et aux consultations menées actuellement par la Cenco. Selon cette déclaration, «la nomination d’un nouveau premier ministre, Hon. Samy Badibanga, survient à un moment critique, à quelques semaines de l’échéance constitutionnelle du 19 décembre. Sa responsabilité première consistera à réunir les conditions pour la tenue d’élections apaisées, crédibles et transparentes, conformément aux principes énoncés dans la Constitution et en accord avec la résolution 2277 du Conseil de sécurité des Nations unies. À cet égard, l’Union européenne soutient pleinement l’action en cours de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) qui contribue à forger un consensus indispensable et large sur base de l’accord du 18 octobre. Il est essentiel que le gouvernement et l’opposition coopèrent constructivement. Pour ce faire, un climat politique apaisé est essentiel, sans entraves aux libertés d’expression, d’association et de manifestation».[12]
4. LES NOUVELLES PROPOSITIONS DU RASSEMBLEMENT POUR UN ACCORD PLUS CONSENSUEL
Le 24 novembre, le Rassemblement de l’opposition a confié ses nouvelles propositions aux évêques de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO), dans le cadre des consultations engagées par ces derniers sur demande du président Joseph Kabila. Ces nouvelles proposition comprendraient, entre autres, une cohabitation entre l’opposition et la majorité pendant la transition.
«Le Rassemblement n’insiste plus sur le départ du président Joseph Kabila le 19 décembre prochain, mais propose une gestion commune du pays», a fait savoir un cadre de cette plateforme des opposants, en requérant l’anonymat. «Il s’agit de contre-propositions plus réalistes que nous adressons à la CENCO, en réponse à celles de la Majorité», a-t-il poursuivi. Selon d’autres sources, le Rassemblement aurait «assoupi» ses exigences de voir le président Kabila partir.[13]
Le 26 novembre, le site desc-wondo.org a publié la «Réponse du Rassemblement des Forces politiques et sociales acquises au changement aux pistes de solution de la crise proposées par la CENCO», dont voici quelques extraits:
«1. DU PROCESSUS ÉLECTORAL
1.1. Durée et séquences
Le Rassemblement soutient l’option d’organiser l’élection présidentielle couplée avec les législatives nationales en septembre 2017. Ces élections seront suivies des provinciales en décembre de la même année.
- LES INSTITUTIONS À MANDAT ÉLECTIF
2.1. Principes généraux
- Les parties prenantes s’engagent solennellement à respecter la Constitution et à n’entreprendre aucune initiative susceptible de la réviser ou de la changer, ni par voie parlementaire ni par référendum.
- Le Président actuellement en fonction et dont le second et dernier mandat expire le 19 décembre 2016, ne tentera pas d’un briguer un troisième.
- La durée de la période intérimaire ne peut dépasser douze mois (un an) à compter du 20 décembre 2016.
- Pendant la période intérimaire, le leadership national doit être représentatif des deux familles politiques parties aux présentes négociations et s’exercer dans l’intérêt du Peuple congolais.
- La participation des parties prenantes à l’exercice du pouvoir pendant la période intérimaire sera inclusive et paritaire. Les parties prenantes sont, d’une part, les signataires de l’accord de la Cité de l’UA et, de l’autre, le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement et ceux avec qui il partage les positions.
- Les missions des Institutions nationales et provinciales, pendant la période intérimaire, sont limitées aux besoins de la permanence de l’État et de l’organisation des élections, à l’exclusion de toutes reformes structurelles et des engagements économiques et financiers majeurs qui relèvent normalement de nouveau dirigeants issus des urnes.
2.2. Président de la République
Dans le système politique congolais, l’institution Président de la République joue un rôle central et déterminant dans la conduite des affaires nationales, tant en termes d’imaginaire populaire que d’effectivité de l’exercice du pouvoir d’État.
Le Rassemblement reste ouvert aux discussions avec les signataires de l’accord de la Cité de l’UA sur cette question fondamentale.
2.3. Assemblée nationale et Sénat
Le Rassemblement rappelle que depuis 2012 les mandats des Députés provinciaux et des Sénateurs ont expiré tandis que celui des Députés nationaux touchera à sa fin en février 2017.
Cependant, au regard du besoin ressenti par tous de conduire le processus électoral à son termes et dans le plus bref délais, d’une parte, d’autre part, tenant compte de l’impératif d’assurer la gestion de la République dans le respect des normes minimales de tout État démocratique et de bonne gouvernance, le Rassemblement reconnaît la nécessité d’une institution parlementaire pendant la période de transition dont les missions seront limitativement les suivantes:
- Bloc législatif électoral (la loi électorale et annexes, loi des finances et toutes autres lois nécessaires à la tenue des élections);
- Loi relative aux mesures de décrispation politique;
- Investiture du Gouvernement de transition;
- Contrôle parlementaire sur le Gouvernement.
2.4. Gouvernement de la République
Dans le cadre de la cohabitation et de la participation de deux familles politiques au leadership national pendant la période de transition, le Gouvernement de la République sera dirigé par un Premier Ministre, Chef du Gouvernement, désigné par le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement.
La répartition des responsabilités entre les deux familles politiques au sein du Gouvernement se fera par concertation et sur une base paritaire dans un arrangement particulier.
Les missions essentielles du Gouvernement de transition sont notamment:
- L’exécution de l’accord politique issu des négociations en cours.
- L’application des mesures de décrispation politique convenues dans l’accord politique.
- Le financement des opérations préélectorales et électorales suivant un plan de décaissement convenu par les parties prenantes et consigné dans l’accord politique.
- L’accompagnement de la CENI dans la mobilisation des fonds et des moyens techniques nécessaires à l’organisation des élections dans les délais et selon le calendrier fixé par l’accord politique.
- La sécurisation du pays et du processus électoral.
- La garantie de la justice électorale.
- L’arrêt de la dégradation de l’économie nationale et de la situation sociale (conditions de vie) des populations.
- La préservation de l’unité nationale et de l’intégrité du territoire national.
2.5. Institutions provinciales
Le Rassemblement soutient que les principes fondamentaux ci-haut énumérés et relatifs à la participation inclusive et paritaire des 2 parties prenantes à la gestion de la transition ainsi qu’au leadership national s’appliquent, mutatis mutandis, aux institution provinciales.
En conséquence, le Rassemblement considère que la recomposition des gouvernements provinciaux actuels s’impose afin d’y faire participer les représentants des deux familles politiques. Les modalités pratiques de cette recomposition seront fixées de manière consensuelle par les deux parties, dans un arrangement particulier.
- Décrispation politique
Le Rassemblement affirme avec insistance que les mesures et autres gestes de décrispation politique demeurent une exigence de sincérité et d’engagement réel de la part du pouvoir à la mise en œuvre intégrale de l’accord politique et à la bonne fin de la transition.
C’est dans ce sens que le Rassemblement maintient la liste des actes et gestes de décrispation déjà indiqués dans les documents déposés à la CENCO et à la mission du Conseil de Sécurité de l’ONU qui a séjourné récemment en RDCongo.
Il s’agit des actes et gestes ci-après:
- La libération sans condition de tous les prisonniers politiques et d’opinion, tant à Kinshasa qu’à l’intérieur du Pays;
- L’abandon des poursuites judiciaires injustes et inspirées par des motivations politiques contre les leaders de l’opposition;
- Le retour en toute sécurité et sans ennuis des exilés politiques congolais;
- L’arrêt de toutes formes d’harcèlement, d’intimidations et de menaces contre les membres de l’opposition, tant à Kinshasa qu’à l’intérieur du Pays;
- L’arrêt et l’abandon des tracasseries fiscales, administratives et policières contre les membres de l’opposition et de la Société Civile;
- La suppression et l’interdiction du dédoublement des partis politiques de l’opposition;
- La levée de toute entrave à la liberté de presse et de manifestation;
- Le libre accès des médias publiques à tous les courants de pensée et d’opinion;
- La réouverture de tous les médias proche de l’opposition fermés;
- La liberté de mouvement des membres de l’opposition».[14]
Le 26 novembre, le Conseil des Sages du Rassemblement a dit ne pas reconnaître les propositions dont le document a été remis à la CENCO le 24 novembre dernier et portant les signature de Christophe Lutundula et de Bwassa Butsumba, respectivement président de la commission de stratégie et Rapporteur de ladite commission auprès de cette plateforme. Selon plusieurs sources haut placées auprès du Rassemblement, ce document n’engage nullement la plateforme dans la mesure où le Conseil de Sages n’a pas au préalable été informé ni de sa production ni de sa remise à la CENCO. Au cours d’une réunion convoquée le 25 novembre, le président du Conseil des sages du Rassemblement aurait vivement manifesté son mécontentement pour n’avoir pas été, avec toute son équipe, tenu informé de l’existence de ce document et de son dépôt auprès des évêques de la CENCO. Les hauts cadres du Rassemblement ont laissé entendre que ces propositions n’émanent pas du Conseil des Sages du Rassemblement et n’ont de ce fait aucune valeur. Selon ces cadres, la commission stratégique du Rassemblement à l’obligation stricte de rendre compte au Conseil de Sages de toutes les conclusions qui émanent de son travail et ne peut pas à elle seule engager toute plateforme.
Les propositions contenues dans le document en question se sont articulées autour du maintien de Joseph Kabila au poste de président de la république pour une durée qui ne devra pas dépasser 2017 en contrepartie d’un engagement public de ce dernier à ne pas se représenter pour un nouveau mandat, de la cogestion de la période transitoire, de la restructuration de la CENI, du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC) et de la Cour Constitutionnelle.[15]
Selon le président de la commission stratégique du Rassemblement de l’Opposition (RASSOP), Christophe Lutundula, le document aurait été rédigé sur demande expresse d’Etienne Tshisekedi, lui-même. Sur son compte twitter, il a assuré que le document explicatif des options levées par la plateforme et sur lequel il a basé son travail était bel et bien signé par Étienne Tshisekedi. De son côté, Felix Tshisekedi a réfuté tout offre de partage du pouvoir faite par le Rassemblement en direction du camp Kabila.[16]
Le 27 novembre, à propos du document de la commission stratégique du Rassemblement, Jean-Marc Kabund a reconnu qu’il a été remis à la CENCO, même s’il l’a qualifié de simple «document de travail», en refusant de faire «tout commentaire» sur les différentes versions et en disant n’y voir «aucun problème».[17]
Le 28 novembre, le secrétaire général de l’UDPS, Jean Marc Kabund, a tenu une conférence de presse pour donner la position du parti en rapport avec divers sujets d’actualité, dont l’accord politique signé le 18 octobre à la Cité de l’Union Africaine, la nomination de Samy Badibanga comme Premier Ministre, la nécessité d’un deuxième dialogue réellement inclusif et l’après 19 décembre 2016, date de la fin du 2ème et dernier mandat de Joseph Kabila à la tête de la République.
Voici quelques extraits:
«L’Accord du 18 octobre dernier signé par la majorité de M. Kabila élargie à ses nouveaux alliés issus de l’opposition, n’est autre qu’un «Coup d’État» constitutionnel que Joseph Kabila a tenté d’opérer dans le cadre d’une stratégie de rétention du pouvoir au terme du mandat actuel.
En effet, plusieurs formules de maintien de Kabila au pouvoir ayant lamentablement échoué, les participants au dialogue de la Cité de l’UA lui ont obtenu un accord pour l’aider à traverser, dans un premier temps, l’échéance impérative du 19 décembre 2016, jour prévu de la 1ère passation pacifique du pouvoir entre un président sortant, en l’occurrence, Joseph Kabila et un président élu aux élections tenues dans le délai constitutionnel.
Dans un deuxième temps, Joseph Kabila, après avoir entraîné toutes les autres institutions dans l’illégalité et l’illégitimité, créera les conditions de recours à un référendum, en lieu et place des élections, pour défaire l’article 70 de la Constitution qui limite le mandat du chef de l’État à 5 ans, renouvelable une seule fois, en déverrouillant l’article 220 de la constitution. Sa conquête subtile d’un pouvoir à vie comprend deux grands boucliers: sa CENI et sa cour constitutionnelle. La première lui donne les résultats qu’il exige, comme en 2006 et en 2011, la 2ème confirme ces résultats et annihile toute forme de contestation. Ce sera ainsi, d’élection en élection. La recherche des mandats à l’infini ou la présidence à vie, telle la velléité de M. Kabila.
La nomination de Samy Badibanga comme Premier ministre de Kabila est, pour nous, un non-événement. C’est une nomination qui a pour but de créer la confusion, l’amalgame et de porter un discrédit à l’opposition. Certes, M. Badibanga a été, peu avant les élections de 2011, conseiller spécial du président Etienne Tshisekedi wa Mulumba. Il est aussi vrai qu’à ces mêmes élections, il a été élu député national du Mont-Amba, sur la liste de l’UDPS, derrière le président Tshisekedi. Mais au vu de la fraude qui a privé ce dernier de sa victoire au profit de Joseph Kabila, grand perdant, le président Tshisekedi avait demandé à tous les députés élus sous la bannière UDPS de ne pas siéger au Parlement.
Samy Badibanga était parmi la trentaine d’élus UDPS qui avaient choisi d’ignorer le mot d’ordre du président pour aller donner des béquilles politiques à Kabila et ainsi crédibiliser la fraude électorale, très préjudiciable à l’UDPS et au peuple congolais.
Depuis 2012, Samy Badibanga et ses collègues se sont auto-exclus du parti, auquel ils ne rendent pas compte de leurs activités et ne payent pas leurs cotisations annuelles de membres réguliers.
Cependant, malgré cette auto-exclusion, Samy Badibanga et compagnie ont survécu au Parlement grâce au système de création des satellites de partis favorisé par le gouvernement Kabila pour permettre aux députés dissidents de tirer avantages des structures portant les mêmes nom, sigle, logo et drapeau que le parti d’origine. Ce dédoublement intentionnel des partis racines, encouragé par le gouvernement qui délivre les papiers officiels en violation de la loi en vigueur, vise à semer la confusion et à entamer l’image des principales formations politiques.
C’est exactement ce que nous vivons actuellement avec Samy Badibanga, membre de la structure UDPS et alliés et non du parti UDPS, présidé par Son Excellence Etienne Tshisekedi wa Mulumba.
Nous ne sommes pas concernés par cette nomination qui, dans tous les cas, arrive à échéance le 19 décembre, prochain, dans quelques jours.
L’UDPS et le Rassemblement sont d’avis que seul un dialogue inclusif mettant face-à-face Kabila et ses alliés du camp Tshiatshi d’une part, Tshisekedi et le Rassemblement avec leurs alliés d’autre part, permettra de trouver une solution consensuelle pour la gestion de la période de transition jusqu’aux élections apaisées. Cette voie médiane sera trouvée entre l’Accord du 18 octobre et la feuille de route du Rassemblement. Si cette rencontre se déroule avant le 19 décembre, Kabila en fera partie, autrement, il ne sera plus concerné, étant donné qu’il aura béni le pays et le peuple congolais par son départ, le 19 décembre 2016. Dans ce contexte, nous encourageons donc la démarche engagée par la CENCO pour ouvrir la voie au vrai dialogue entre les fils et les filles de ce pays pour éviter le pire.
En ce qui concerne la question de la date du 19 décembre prochain, date constitutionnelle de la fin du 2ème et dernier mandat de Joseph Kabila, deux hypothèses pointent à l’horizon:
– La première est «le respect de la Constitution dans toutes ses dispositions», comme l’a dit Kabila lui-même lors de son discours à la nation le 15 novembre. En d’autres mots, il réalise que le mandat est fini et tire sa révérence. La classe politique mettra en place un mécanisme de gestion du pays jusqu’à la tenue des élections à une échéance la plus courte possible. Nous pensons à une date en 2017.
– La deuxième hypothèse est le refus de M. Kabila de quitter le pouvoir le 19 décembre à 23H59′.
Il déclenchera, dès lors, une résistance tous azimuts à travers le pays et dans toute la diaspora, en application de l’article 64 de la constitution.
C’est ici que je lance un appel à tout Congolais. Un adage africain dit que «Si un peuple ne prend pas son destin en main, aucun autre peuple ne le fera à sa place». Quel que soit l’endroit où vous serez le 19 décembre, à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, prenez-vous en charge, comme l’a dit notre président. Nous ne laisserons pas Kabila défier 70 millions de Congolais.
Nous sommes encouragés par nos meetings manqués des 5 et 19 novembre. Les policiers nous ont barricadés, mais les deux cartons jaunes ont été livrés au destinataire. Le 19 décembre, nous sortirons le carton rouge et nous jouerons notre match sur le terrain du boulevard triomphal.
Aucun tank d’eau chaude, aucun gaz lacrymogène ne nous fera reculer. Nous sommes déterminés à défendre la Constitution jusqu’au bout pour décourager d’autres Kabila à penser prendre le pays comme leur petit royaume».[18]
Le 29 novembre, après la polémique sur le mémorandum signé par Christophe Lutundula et Buassa Butsumbu, respectivement président et rapporteur de la commission de stratégie du Rassemblement, dans une interview, Jean-Marc Kabund, secrétaire général de l’UDPS et cadre du Rassemblement, a précisé que «C’est un document qui appartient au Rassemblement. M. Lutundula, qui devait le remettre aux évêques, a laissé un paragraphe qui ne devait pas figurer dans le document. Ce n’était pas fait à dessein. Nous avons géré ce problème en famille. Ce paragraphe parlait de la cohabitation avec Kabila. Nous n’avons jamais dit que nous voulons cohabiter avec Kabila. Le Rassemblement a été créé pour faire partir Kabila du pouvoir le 19 décembre. Nous sommes allés à Ibiza et en Italie où on nous proposait tout, mais nous n’avons jamais accepté parce que nous croyons au respect de la constitution. Pour l’instant, il n’est pas question de réfléchir sur la cohabitation avec Kabila. Notre position est claire: Kabila doit quitter le pouvoir avant le 19 décembre. Pour ce faire, nous devons dialoguer avant le 19 décembre et avoir au besoin un accord pour éviter l’affrontement qui risque de coûter les vies humaines».[19]
Le 29 novembre, le dernier gouverneur de la province du Katanga, Moïse Katumbi, était l’invité du think thank Américain « The Atlantic Council ».
Au cours d’un discours prononcé devant ce centre de réflexion, Moïse Katumbi a présenté un plan de sortie de la crise, mais en avertissant d’un printemps congolais si un compromis n’était pas trouvé avant le 19 décembre, date à laquelle prendra fin le second et dernier mandat constitutionnel de l’actuel président Joseph Kabila. Moïse Katumbi a proposé qu’on trouve un accord entre la classe politique dans son ensemble. Il a ainsi rejoint les propositions du Rassemblement (la principale plateforme de l’opposition Congolaise, dirigée par Étienne Tshisekedi), qui propose une conciliation entre ses préalables remise à la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO) et les conclusions du dialogue national clôturé le 18 novembre dernier.
Dans son discours, Moïse Katumbi est revenu sur le fait que le compromis «doit être clair» quant à la non représentation du chef de l’État congolais aux échéances électorales à venir et qui doivent se tenir, selon lui, avant septembre 2017, contrairement à avril 2018 tel que proposé par l’accord du camp Tshatshi. Dans ce plan de sortie mis en avant par l’opposant Moïse Katumbi, il est accordé à Joseph Kabila «un glissement» qui ne dépasse pas septembre 2017, avec une indication claire de sa non représentativité à l’élection présidentielle qui sera organisée par un gouvernement et une commission électorale nationale indépendante renouvelés et ayant pour mission spéciale l’organisation des élections. Cette proposition (la présidentielle au plus tard en septembre 2017 et pas de troisième mandat pour Kabila) viserait, en effet, à limiter la violation de la Constitution, en décalant de quelques mois seulement l’élection présidentielle (qui aurait lieu au plus tard en septembre 2017) et en garantissant l’alternance (à travers l’interdiction faite au chef de l’Etat de se représenter, conformément à la Constitution). Certes, Kabila serait maintenu au pouvoir, mais durant quelques mois seulement et sans aucune possibilité de se représenter pour un nouveau mandat et de modifier la Constitution en ce sens. Ce plan éviterait le chaos à la République Démocratique du Congo, où l’opposition menace de recourir à la rue, si Joseph Kabila n’arrive pas à répondre positivement à la requête d’un consensus plus inclusif.[20]
Le 30 novembre, dans une interview accordée à la Voix de l’Amérique à Washington, Moïse Katumbi a affirmé que «le président Kabila a tout fait pour ne pas organiser la présidentielle. Il ne reste que trois semaines avant la fin de son deuxième et dernier mandat présidentiel et il peut encore sortir par la grande porte, en laissant la démocratie avancer dans notre pays, en écoutant la voix du peuple qui veut le respect de la constitution et en permettant la première alternance démocratique et pacifique au sommet de l’État».
Interrogé sur la possibilité que Joseph Kabila reste au pouvoir après le terme de son mandat, s’il acceptait de ne pas se représenter pour un troisième mandat et d’organise rapidement les élections, Moïse Katumbi a répondu que «la constitution est très claire sur cela».
À propos de la date du 19 décembre, il a affirmé que «la Cenco est en train de consulter le Rassemblement, les forces vives et la majorité présidentielle pour trouver un compromis. S’il n’y a pas de consensus sur une solution négociée, nous allons faire respecter la constitution. Dans ce cas, le 19 décembre, Joseph Kabila ne sera plus président de la république. Le plus important c’est de respecter la constitution et de réaliser la première alternance au sommet de l’Etat».
Il a souligné que «il faut privilégier le dialogue prôné par la Cenco», en ajoutant que, «s’il n’y a pas d’accord, le peuple va récupérer le pouvoir et faire appliquer notre constitution. Le peuple congolais va libérer le pays, car il ne peut pas accepter qu’un groupe s’éternise au pouvoir et continue à le maltraiter».[21]
[1] Cf Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 17.11.’16
[2] Cf Christine Tshibuyi – Actualité.cd, 18.11.’16; Radio Okapi, 18.11.’16
[3] Cf Radio Okapi, 19.11.’16; AFP – Jeune Afrique, 20.11.’16
[4] Cf Radio Okapi, 19.11.’16
[5] Cf Radio Okapi, 22.11.’16
[6] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 21.11.’16
[7] Cf Forum des As – Kinshasa, 22.11.’16 http://www.forumdesas.org/spip.php?article9515
[8] Cf Stanys Bujakera Tshiamala – Actualité.cd, 25.11.’16
[9] Cf Franck Ngonga – Actualité.cd, 22.11.’16
[10] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 23.11.’16 http://www.lepotentielonline.com/fortes-pressions-americaines-sur-kabila-et-tshisekedi-pour-eviter-un-chaos-apres-le-19-decembre-2016
[11] Cf RFI, 23.11.’16
[12] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 24.11.’16 http://www.lepotentielonline.com/dialogue-inclusif-l-ue-sur-les-pas-des-etats-unis
[13] Cf Politico.cd, 25.11.’16
[14] Cf desc-wondo.org, 26.11.’16 http://desc-wondo.org/fr/flash-desc-le-rassemblement-pose-ses-conditions-pour-cautionner-le-glissement-de-kabila/
[15] Cf Actualité.cd, 26.11.’16
[16] Cf Jacques Kini – Actualité.cd, 27.11.’16
[17] Cf Actualité.cd, 28.11.’16; Politico.cd, 28.11.’16
[18] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 29.11.’16
[19] Cf Actualité.cd, 29.11.’16
[20] Cf Politico.cd, 30.11.’16; 7sur7.cd, 30.11.’16
[21] Cf Nicolas Pinault – VOA – Afrique, 30.11.’16; Actualité.cd, 30.11.’16