SOMMAIRE:
ÉDITORIAL: LES ENJEUX D’UN DIALOGUE POLITIQUE FACE À UNE CRISE POLITIQUE
- LE COMITÉ PRÉPARATOIRE DU DIALOGUE
- La convocation
- Les travaux
- Quelques effets secondaires
- LA POSITION DU RASSEMBLEMENT DE L’OPPOSITION
ÉDITORIAL: LES ENJEUX D’UN DIALOGUE POLITIQUE FACE À UNE CRISE POLITIQUE
1. LE COMITÉ PRÉPARATOIRE DU DIALOGUE
a. La convocation
Le 19 août, le facilitateur du dialogue, Edem Kodjo, a convoqué les délégués des parties prenantes au dialogue le mardi 23 aout 2016 pour le début des travaux du comité préparatoire. L’annonce par les autorités congolaises de la libération d’une vingtaine de « prisonniers politiques et d’opinion » a été considérée par le facilitateur comme une réponse positive à l’un des préalables de l’opposition.[1]
Le 20 août, dans une déclaration lue par Jean-Marc Kabunda, secrétaire général de l’UDPS, le Rassemblement de l’opposition a dit considérer la convocation du comité préparatoire du dialogue comme une provocation du facilitateur Edem Kodjo, déjà récusé. Le Rassemblement a donc décrété que le 23 août serait une journée ville morte sur toute l’étendue du territoire national. De son côté, le parti majoritaire, le PPRD, à travers la voix de son secrétaire adjoint, le député Emmanuel Ramazani Shadary, a assuré que toutes les conditions préalables à l’ouverture du dialogue ont été remplies. Le parti majoritaire a annoncé que, le 23 août, il ira à la table des négociations.[2]
Le 20 août, l’Union pour la Nation Congolaise (UNC) de Vital Kamerhe a annoncé sa participation aux travaux du comité préparatoire pour le Dialogue. Pour l’UNC, trois sujets doivent être débattus au Dialogue: la libération des tous les prisonniers politiques, la publication d’un calendrier électoral clair et le départ de Joseph Kabila, qui est à son deuxième et dernier mandat. le Secrétaire général de l’UNC, Jean-Bertrand Ewanga, a précisé que son parti et ses alliés seront «prêts à claquer la porte à n’importe quel moment si tous les préalables ne sont pas respectés». Selon lui, «il n’est pas question de participer à ce dialogue pour partager le pouvoir (…) C’est pour obtenir un calendrier électoral concernant le temps de l’enrôlement des électeurs, la date du vote et le jour de la passation du pouvoir (…)». Et d’ajouter: «Nous sommes solidaires de nos amis de l’opposition, y compris le Rassemblement, même si nos approches diffèrent».[3]
Le 23 août, l’appel à la journée « ville morte » a été inégalement suivi. À Kinshasa, la journée a démarrée avec des heurts entre forces de l’ordre et militants de l’UDPS. Mais les manifestants et les barrages qu’ils avaient érigés dans le quartier de Limete ont été rapidement dispersés à coup de gaz lacrymogène. Dans le reste de la capitale congolaise, l’activité a été largement ralentie. Peu de véhicules circulaient dans le centre-ville et les quartiers périphériques sont restés plutôt calmes une bonne partie de la journée. Au grand marché de Kinshasa, deux magasins sur cinq ont ouvert, mais les vendeurs se plaignaient de la rareté des clients. À Lubumbashi, l’activité économique n’a pas été perturbée. Idem à Kisangani ou Goma, où la police, selon plusieurs témoins, était largement déployée dans ces villes. À Bukavu, la situation est restée normale et les boutiques sont restées ouvertes. À Mbuji May, jusqu’à la mi-journée le centre-ville est resté désert et la plupart des magasins fermés. Des accrochages ont eu lieu autour du siège de l’UDPS. Une vingtaine de militants on été interpellés, après avoir monté des barricades pour empêcher la circulation, selon la police.[4]
b. Les travaux
Le 23 août, les travaux du comité préparatoire du dialogue ont débuté à l’Hôtel Béatrice de Kinshasa. Ces travaux sont censés se dérouler pendant cinq jours.
Le facilitateur du dialogue, Edem Kodjo, a affirmé que «le dialogue se tiendra conformément à la Constitution congolaise et à la résolution 2277 du 30 mars 2016 du Conseil de sécurité des Nations unies» et que «le comité préparatoire a pour objectif principal de préparer les aspects normatifs, matériels et logistiques du dialogue national». Il a souligné que «les questions de fond seront traitées lors des pourparlers proprement dits entre les parties prenantes».
La cérémonie d’ouverture a connu notamment la participation de la Majorité Présidentielle et des quelques opposants dont Jean-Lucien Bussa, Président de CDER et de la plateforme Front des démocrates; José Makila, membre de l’Alliance des travaillistes pour le développement (ATD); Bruno Mavungu, ancien secrétaire général de l’UDPS; Albert Moleka, ancien porte-parole d’Étienne Tshisekedi; Samy Badibanga, président du groupe parlementaire UDPS et alliés; Azarias Ruberwa, et d’autres délégués des partis politiques et de la société civile. L’UNC était bien présente, mais pas Jean-Bertrand Ewanga.
Mais plusieurs partis et personnalités de l’opposition regroupées au sein du « Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement », l’UDPS de Étienne Tshisekedi, le G7 et l’Alternance pour la République (AR) ont boudé le début des travaux préparatoires. Parmi les absents, le MLC de Jean Pierre Bemba et les partis membres de l’Opposition Républicaine (OR) de Kengo wa Dondo. Après avoir constaté l’absence de ces partis de l’opposition, Edem Kodjo les a invités à «rejoindre le train du dialogue dont les portes restent toujours ouvertes», car «l’objectif de ce dialogue est de relever le grand défi de vivre ensemble». Les participants ont reçu chacun une ébauche de la feuille de route préparée par le groupe du travail. Ils se réuniront à nouveau le 25 août pour en débattre avant adoption.[5]
Le 25 août, l’ambassadeur de l’Union européenne en RDC, Jean Michel Dumond, s’est exprimé sur les ondes de RFI à propos du boycott du dialogue par la plupart des partis de l’opposition à l’exception notable de l’UNC. Il a déploré l’absence de l’UDPS, du G7, du MLC et globalement du Rassemblement. Pour le diplomate européen, boycotter le Dialogue n’est pas la bonne stratégie, car se serait faire le jeu du pouvoir. «Ne pas prendre part au Dialogue politique c’est donner des prétextes au gouvernement pour tergiverser et retarder encore plus les choses» a dit Dumond. «Puisque tant qu’il n’y a pas d’accord, on ne peut pas publier un calendrier électoral. Finalement c’est au pouvoir que ça profite en réalité» a-t-il poursuivi. «Je comprends la méfiance des partis d’opposition», a aussi déclaré l’ambassadeur. «Mais en refusant de participer, ils (les opposants) donnent des arguments pour retarder encore plus les choses» a-t-il enfin lâché.[6]
Le 25 août, le Facilitateur du Dialogue, Edem Kodjo, a rendu public la liste des délégués au comité préparatoire: 5 pour la majorité institutionnelle, 12 pour la majorité présidentielle, 5 pour l’opposition institutionnelle, 12 pour l’opposition, 10 pour la société civile. Il y a lieu de signaler que le facilitateur a ajouté quatre autres personnes.[7]
Selon des sources de Africa News, trois députés aussi du MLC, notamment les honorables Francis Mbengama, Freddy Aundagba et Nicolas Akpanza, ont participé aux travaux du comité préparatoire.[8]
Le 25 août, deuxième jour des travaux du comité préparatoire, les acteurs politiques de la majorité présidentielle (MP) et de l’opposition n’ont pas trouvé de consensus sur l’introduction ou non de la notion « alternance politique ». Pour l’opposition, c’est bien de l’alternance politique qu’il faut discuter au dialogue parce que le président Kabila va achever son deuxième mandat. De son côté, la Majorité estime que le dialogue doit discuter de l’organisation des élections qui pourrait aboutir à l’alternance. Toutefois, toutes les parties sont d’accord pour ajouter un nouveau thème dans l’agenda: «la nécessité d’un accord politique et les mécanismes de sa mise en œuvre. Ce sujet traitera aussi du point relatif à la continuité de l’état, puisque l’élection présidentielle ne se tiendra pas selon les délais prévus par la Constitution». C’est cet accord politique qui va déterminer la manière dont sera dirigé le pays au cas où l’élection présidentielle ne sera pas organisée en novembre prochain, comme le prévoit la Constitution.[9]
Le 26 août, le président de l’Opposition Républicaine (OR) et du Sénat, Léon Kengo wa Dondo, a finalement accepté de participer aux travaux préparatoires au «dialogue politique».[10]
Le 27 août, le comité préparatoire du dialogue politique a terminé ses travaux. Les délégués des composantes (Majorité présidentielle, Opposition, Société civile) et le facilitateur ont signé un document final dénommé « feuille de route du dialogue« .
«– Parmi les principes conducteurs du dialogue, les participants ont cité :
- a) le respect de la Constitution de la République démocratique du Congo de 2006, telle que amendée en 2011, et des lois de la République; ainsi que la mise en oeuvre de la résolution 2277 (2016) du Conseil de sécurité des Nations unies et des autres résolutions et textes pertinents; b) l’engagement à promouvoir le dialogue et la résolution pacifique des différends dans un esprit de compromis, en accordant la primauté à l’intérêt national bien compris;
- c) l’engagement à adopter le consensus comme mode de prise des décisions;
- d) La détermination des parties prenantes à renforcer l’État de droit par le respect des valeurs de la démocratie, notamment la tolérance, la solidarité, le compromis, l’égalité, les libertés publiques individuelles et collectives, l’équité, les élections libres et pluralistes, la séparation des pouvoirs, le respect des institutions, le respect de l’Etat de droit, l’indépendance du pouvoir judiciaire, le respect des décisions de justice, la soumission aux lois et règlements, la redevabilité, la bonne gouvernance et l’alternance démocratique résultant des élections;
- e) L’inclusivité du dialogue dans toute la mesure du possible de sorte qu’il puisse tenir compte des préoccupations pertinentes de toutes les composantes de la Nation congolaise, notamment les femmes, les jeunes et la Diaspora.
– L’objectif du dialogue proprement dit est celui de réfléchir, d’échanger et de débattre, en toute liberté et sans contrainte, des voies et moyens de l’organisation d’élections crédibles, transparentes, apaisées et inclusives, dans le respect de la Constitution et conformément aux autres textes et instruments nationaux et internationaux pertinents.
– En reconnaissant que le processus de dialogue a été engagé pour traiter principalement de la problématique spécifique de l’organisation d’élections apaisées, crédibles et transparentes, conformément aux principes énoncés dans la Constitution, les points suivants sont retenus comme sujets à l’ordre du jour du Dialogue proprement dit:
1) Évaluation du processus électoral;
2) Fichier électoral;
3) Séquence des élections;
4) Mesures de confiance;
5) Calendrier électoral en tenant compte des points précédents;
6) Mesures d’équité et de transparence du processus électoral (fonctionnement de la CENI);
7) Sécurisation du processus électoral;
8) Sécurité des personnes sur toute l’étendue du territoire national;
9) Budget et financement des élections;
10) Code de bonne conduite lors des élections;
11) Accord politique et mécanismes de sa mise en oeuvre et de son suivi.
– Les parties prenantes au processus de dialogue proviennent de: la Majorité présidentielle, l’Opposition politique, la Société civile; ainsi que Personnalités congolaises.
– Au dialogue proprement dit participeront soixante-huit (68) représentants de la Majorité présidentielle, soixante-huit (68) représentants de l’Opposition, trente-neuf (39) représentants de la Société civile. Un quota de 25 autres personnes est laissé à la disposition du facilitateur.
Parmi ces 200 participants, on retrouve les membres du Comité préparatoire qui sont admis d’office.
– Les travaux du Dialogue proprement dit se tiennent à Kinshasa et ont une durée de quinze (15) jours à partir du jour de sa première réunion. Toutefois, en cas de nécessité, le Facilitateur peut fixer une durée supplémentaire raisonnable».
À la clôture des travaux du comité préparatoire, on na annoncé que le démarrage des travaux du dialogue national est fixé au jeudi 1er septembre à Kinshasa.[11]
c. Quelques effets secondaires
Le 24 août, l’Alliance des Travaillistes pour le Développement (ATD) a été exclue de la plateforme de l’opposition Alternance pour la République (AR), plateforme de soutien à Moise Katumbi. La décision a été prise par la conférence des présidents de ce regroupement politique. Il est reproché à l’ATD de José Makila d’avoir pris part à l’ouverture des travaux du comité préparatoire, en contradiction flagrante avec la ligne politique du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement (auquel appartient l’AR), a expliqué le président intérimaire de l’AR, le député national Franck Diongo qui a précisé: «L’AR a récusé d’une manière irrévocable Edem Kodjo, aucun membre de AR n’a été mandaté, ni désigné pour engager AR ou participer pour le compte de AR».[12]
Le 24 août, le rapporteur du groupe parlementaire UDPS et Alliés, le député Papy Niango, a dit que personne n’a été mandaté pour participer au travaux du comité préparatoire du dialogue politique. «S’il se trouve quelqu’un au sein de cette instance, il s’y trouve à titre personnel et ne peut donc pas engager notre regroupement», a affirmé le député Papy Niango. «Nul parmi nous n’a reçu mandat de représenter le groupe parlementaire UDPS dans ce forum et de l’engager», a insisté le député Papy Niango. Il a rappelé que le groupe parlementaire UDPS et alliés est un groupe politique constitué des députés issus des partis politiques membres du Rassemblement de forces politiques et sociales acquises au changement.[13]
Le 24 août, l’UNC de Vital Kamerhe, l’ADT de José Makila, le PK (Parti Kabiliste) de Mwenze Kongolo et le CPR de Fidèle Tingomay ont été exclus de la Dynamique de l’opposition. La décision a été prise dans la soirée au cours d’une réunion qui a regroupé les responsables de la Dynamique autour du modérateur Matungulu. Il leur est reproché de s’être écartés de la ligne du Rassemblement dont fait partie la Dynamique de l’opposition et surtout de participer aux travaux du comité préparatoire du Dialogue.[14]
Le 30 août, le secrétaire général de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC) de Vital Kamehre, Jean Bertrand Ewanga, a démissionné de son poste du secrétaire général de ce parti. Dans sa lettre de démission, l’ancien Secrétaire général de l’UNC explique sa démission par un « désaccord avec son parti sur la question du dialogue » auquel il ne participera pas. «Ma démission est l’expression de mon désaveu vis-à-vis de la démarche actuelle de notre parti en rapport avec la question de la tenue du dialogue que j’estime comporter un danger pour l’avenir démocratique de notre pays», écrit Jean-Bertrand Ewanga qui avait pourtant participé aux travaux du comité préparatoire du dialogue. Jean-Bertrand Ewanga précise qu’il demeure cependant membre effectif et cofondateur de l’UNC et promet, à ce titre, de servir ce parti.[15]
Dans un point de presse qu’il a animé au CEPAS, à Gombe, Jean-Bertrand Ewanga a dénoncé un « coup d’Etat Constitutionnel » planifié au niveau du Comité Préparatoire du dialogue, dans le but d’instaurer une « monarchie présidentielle« .
Il a affirmé que, «dans sa stratégie de se pérenniser au pouvoir, la majorité kabiliste a refusé d’organiser les élections et préféré imposer un dialogue qui conduirait à la modification de la Constitution. Déterminée dans son projet, la majorité au pouvoir s’est procurée l’Arrêt de la Cour Constitutionnelle destiné à maintenir le Président Kabila au-delà de son second et dernier mandat en vue d’une transition et, partant le changement de la Constitution».
Il a dénoncé «un coup d’Etat constitutionnel en gestation, à travers soit la révision constitutionnelle, soit le changement de la Constitution ou encore le référendum inopportun mais évoqué par certains caciques du pouvoir et dont le projet semble à portée de main».
Il a, à cet effet, accusé ses pairs de l’opposition présents aux travaux préparatoires de cautionner un « complot contre la République« , en contrepartie des postes juteux au gouvernement et dans les entreprises publiques.
Des travaux préparatoires où il a pris part comme chef de délégation de l’UNC, Ewanga di avoir noté du début à la fin, «la persistance des questions taboues que personne n’a voulu soulever et pour lesquelles les négociateurs de la Majorité exerçaient une pression sur le facilitateur et certains délégués dits de l’Opposition comme de la Société civile». Il s’agit du principe d’alternance démocratique clairement souligné par la Constitution, du sort de l’actuel président de la République dont le second et dernier mandat échoit le 19 décembre 2016 et de la question des préalables (libération des prisonniers politiques et réouverture des média de l’opposition) soulevés par le Rassemblement. Il a également fustigé les accointances du facilitateur du dialogue, Edem Kodjo, avec la Majorité Présidentielle.[16]
Le 3 septembre, le député élu de Kananga (Ex-Kasaï-Occidental), Claudel-André Lubaya, a démissionné de son poste du premier secrétaire général-adjoint de l’Union pour la nation congolaise (UNC). Il a affirmé avoir pris cette décision pour exprimer son désaccord à la nouvelle ligne de son parti. Claudel-André Lubaya a dit ne pas soutenir la décision du président national de l’UNC, Vital Kamerhe, celle de participer au dialogue national sans tenir compte des préalables fixés par la Dynamique et le Rassemblement de l’opposition.[17]
Le 3 septembre, l’Union pour la Nation Congolaise (UNC) de Vital Kamerhe a déclaré avoir pris acte de l’auto-exclusion du parti de Jean Bertrand Ewanga et de Claudel André Lubaya. La direction politique nationale de ce parti a indiqué dans un communiqué que «Jean Bertrand Ewanga et Claudel André se sont illustrés par des prises de position et déclarations contraires à la ligne de conduite politique du parti, attitude qui entrave le bon fonctionnement de l’UNC et gène la cohésion interne». Pour l’UNC, cette attitude est présentée comme une démission volontaire de ces deux cadres.[18]
Le 5 septembre, le Mouvement de Libération du Congo (MLC) a décidé de radier ses six députés qui ont pris part aux travaux du dialogue politique. Selon un communiqué du comité politique du parti, les députés concernés sont: Akpanza Mumbuli Nicolas, élu de Bansakusu; Bokolo Vicky, élu de Bansakusu; Aundangba Freddy, élu de Lisala; Indole, élu de Lukunga; Kumu Pathy, élu de Bumba et Lomanga, élu de Bokungu. Il leur est reproché d’avoir pris part aux travaux du comité préparatoire du dialogue politique et au dialogue proprement dit sans autorisation de la hiérarchie de leur parti.Par ailleurs, les membres du bureau politique du MLC interdisent à tout cadre ou militant du parti de participer «à ce fameux dialogue politique», au risque de s’exposer aux mêmes sanctions. «Le MLC ne prendra pas part à un forum dont le seul but est de permettre à quelques individus de conclure un accord politique ayant pour finalité le partage des postes dans une transition, en violation de la constitution», explique le même communiqué.[19]
2. LA POSITION DU RASSEMBLEMENT DE L’OPPOSITION
Le 14 août, au cours d’une conférence sur le thème: « Après Genval, qu’attendre du Rassemblement? », le Secrétaire Général adjoint de l’UDPS, Bruno Tshibala Nzenzhe, a expliqué à la base de son parti à Paris, en France, la feuille de route du Rassemblement des Forces politiques et sociales acquises au changement:
«Il faut rappeler qu’en novembre 2011, il y a 4 ans, l’écrasante majorité des Congolais avaient plébiscité Monsieur Etienne Tshisekedi wa Mulumba, Président de la RDC. La contrepartie escomptée était de le voir opérer le changement tant attendu et tant espéré par notre peuple. Le Président Tshisekedi n’a pas pu accomplir cette tâche, à cause du vol de la victoire du peuple. Cette usurpation a replongé le pays dans une crise qui le paralyse jusqu’à ce jour.
Démocrate convaincu et fervent partisan de la non-violence, le Président Tshisekedi a préconisé le Dialogue comme voie royale pour résoudre la crise créée par le hold-Up électoral et pour avoir un processus électoral consensuel et apaisé. La Feuille de Route de l’UDPS, rendue publique le 15 février 2015, confortait cette conviction et contenait des propositions concrètes pour la réussite de ces assises.
Ce qu’il faut attendre du Rassemblement des Forces politiques et Sociales acquises au changement découle tout simplement des conclusions dégagées lors de la Conférence de Genval, tenue du 08 au 10 juillet 2016.
1) Nous avons convenu de faire respecter la Constitution de la République et plus spécialement:
– le nombre maximal de mandats, limité au maximum à deux, pas un jour de plus et il en sera ainsi; – les délais qu’elle fixe en ce qui concerne le processus électoral, à savoir la convocation du corps électoral 90 jours avant la fin du mandat, soit le 19 septembre 2016. Si ce n’est pas le cas, nous constaterons la haute trahison dans le chef de Mr Kabila.
C’est pour cela que nous avons rejeté l’arrêt inconstitutionnel rendu par la Cour Constitutionnelle, laquelle a tenté de prolonger le mandat de Kabila, en violation de l’article 70 de la Constitution.
2) Le Rassemblement œuvre à la mise en application intégrale de la Résolution 2277 qui préconise un Dialogue véritable entre acteurs politiques congolais en vue de trouver un consensus sur le processus électoral apaisé, dans le respect de la Constitution.
3) Le Dialogue aura également pour tâche, après que les préalables formulés par le Rassemblement auront été satisfaits, de trouver une solution politique à la double crise créée par Kabila, dont le deuxième volet est le vide juridique engendré par la non tenue d’élections, conformément à l’article 73 de la Constitution.
4) Le Rassemblement s’est donc engagé à obtenir le départ de Kabila du pouvoir, dans le meilleur des cas, le 19 décembre 2016 à minuit.
A ce propos, au cours du méga-meeting organisé par le Rassemblement le 31 juillet dernier à Kinshasa, le Président Tshisekedi a donné à Mr Kabila un préavis prenant cours le 19 septembre 2016 et au terme duquel, il doit inévitablement et impérativement quitter le pouvoir sans une seule minute de tergiversation. Puisqu’il s’est organisé pour ne pas tenir les élections telles que prescrit par l’article 73 de la Constitution en espérant tirer avantage du fait accompli, pour le Rassemblement, il ne sera jamais question d’accorder la prime aux fossoyeurs de la Constitution et de notre jeune démocratie».[20]
Le 26 août, le Présidium, instance suprême d’inspiration, d’orientation et de décision de la coalition d’Etienne Tshisekedi, s’est réuni en séance extraordinaire, afin d’éclairer l’opinion sur l’actualité du pays. Dans un communiqué final, le Présidium a rappelé:
«1. Son attachement au respect de la Constitution;
- Son soutien indéfectible aux résolutions de la conférence de Genval;
- Son adhésion à la mise en œuvre intégrale de la Résolution 2277;
- Son adhésion à la récusation du Facilitateur Kodjo ainsi qu’aux autres préalables du Rassemblement.
Pour le Présidium, le dialogue politique attendu par notre peuple est celui prôné dans la Feuille de route de l’UDPS … qui mettra, le moment venu, face-à-face, le Président Joseph Kabila et les siens, d’une part, et le Président Etienne Tshisekedi avec les siens, d’autres part.
Par ailleurs, les Alliés du Président Etienne Tshisekedi constatent que, sous la houlette de monsieur Kodjo, devenu chef de file des Kabilistes, le camp de la Mouvance présidentielle, s’élargit et se restructure dans un Hôtel de la capitale.
En conséquence, les Alliés du Président Etienne Tshisekedi ne se sentent pas concernés par les assises de l’hôtel Béatrice et n’y ont délégué personne.
A cet effet, les Alliés du Président Etienne Tshisekedi rappellent à l’opinion tant nationale qu’internationale qu’ils restent mobilisés pour un dialogue véritable, crédible et inclusif.
En définitive, les Alliés du Président Etienne Tshisekedi restent vigilants au mot d’ordre du Rassemblement quant au respect du délai de préavis qui commence le 19 septembre 2016 et expire le 19 décembre 2016».[21]
Le 29 août, suite à une réunion tenue à Limete – Kinshasa, en sa qualité de président du Conseil de sages du Rassemblement des Forces politiques et sociales acquises au changement, Etienne Tshisekedi a publié un communiqué où il décrit la gravité de la crise politique dans laquelle est plongée la RD Congo.
«Edem Kodjo, facilitateur récusé, vient d’aggraver la crise politique que traverse notre pays en réunissant en dialogue les ennemis de la République, désormais bien identifiés, qui acceptent d’accompagner Monsieur Kabila dans sa détermination à obtenir, coûte que coûte, un troisième mandat en violation de la Constitution.
C’est pourquoi, le Rassemblement, tout en réaffirmant son attachement à la tenue d’un dialogue véritable, crédible et inclusif conformément à la Résolution 2277 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, demande au peuple congolais:
- De rejeter toutes les conclusions qui sortiront de ce pseudo dialogue qui est un complot organisé contre la Nation pour liquider le pacte républicain conclu de haute lutte à Sun City;
- De se mobiliser et de participer activement aux actions de résistance pacifique décrétées par le Rassemblement à partir du 1er septembre 2016;
- De participer massivement au sit-in auprès des bureaux de la CENI de différents chef-lieux des provinces et des missions diplomatiques de la RDC à l’étranger, le lundi 19 septembre 2016, afin de réclamer la convocation immédiate de l’élection présidentielle et de déposer le préavis constitutionnel de Mr. Kabila qui doit libérer la présidence de la République le 19 décembre 2016.
Peuple congolais, le moment est arrivé où, conformément à l’article 64 de notre Constitution, nous allons devoir nous prendre en charge pour chasser la dictature.
Pour le Rassemblement, l’alternance démocratique au pouvoir, le 20 décembre 2016, n’est pas négociable».[22]
Le 1er septembre, le Rassemblement des Forces politiques et sociales acquises au changement a déposé, auprès de l’Union Africaine, ses propres « Termes de référence pour la tenue d’un dialogue politique véritable, crédible et inclusif, en vue du déblocage du processus électoral« .
Dans ce document, «le Rassemblement a noté que, dans la perspective de la tenue du dialogue et à l’issue de son conclave tenu à l’Hôtel Béatrice de mardi 23 à samedi 27 août 2016, la mouvance présidentielle, telle qu’elle s’est élargie et restructurée à cet Hôtel, vient de se doter d’un cahier des charges appelé « Feuille de route » … Tout en prenant acte du cahier des charges des participants au conclave de l’Hôtel Béatrice, le Rassemblement présente sa proposition pour la tenue d’un dialogue politique efficace et véritablement crédible et inclusif, auquel il est prêt à participer».
– À propos de la facilitation, «le Rassemblement appelle, une fois de plus, à ce que le groupe international de soutien au facilitateur joue un rôle plus actif, afin d’assurer une facilitation neutre et impartiale».
– En ce qui concerne l’identification des parties au dialogue, «le Rassemblement constate que, depuis la tenue du « Conclave de l’Hôtel Béatrice », les parties au dialogue sont clairement identifiées. D’un côté, la Mouvance Kabiliste élargie et restructurée à l’Hôtel Béatrice et, de l’autre, le Rassemblement des Forces Politiques et Sociales et tous ceux avec qui il partage la vision.
Par conséquent, le Rassemblement invite le Groupe international de Facilitation à procéder sans tarder aux consultations des parties prenantes congolaises au dialogue politique en vue de:
1° harmoniser leurs cahiers des charges respectifs;
2° dégager les éléments permettant de construire graduellement un consensus sur l’organisation des prochaines élections présidentielle et législatives qui respecte la Constitution».
– À propos du format du dialogue politique, «pour le Rassemblement, les participants au dialogue· sont issus exclusivement de l’Opposition Politique, de la Mouvance Présidentielle et de la Société Civile et regroupés en deux composantes à savoir:
- la Mouvance Présidentielle élargie et restructurée à l’Hôtel Béatrice;
- le Rassemblement et tous ceux avec qui il partage la vision.
Le nombre des participants au Dialogue politique ne peut dépasser 100 à raison de 50% par composante. La facilitation, n’étant pas partie prenante au dialogue, ne peut avoir ses invités à elle».
– En ce qui concernes les matières du dialogue, «le point central à débattre au Dialogue politique est le processus électoral, comprenant notamment:
- le fichier électoral;
- le calendrier électoral et l’ordre des priorités des élections;
- la neutralité, l’indépendance et l’impartialité des institutions et services publics impliqués dans le processus électoral, notamment la CENI, la Cour constitutionnelle, le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC), la territoriale, l’Armée, la Police, les services de sécurité, les sociétés d’Etat et les Etablissements publics;
- la sécurisation des élections».[23]
Le Président du MLP et cadre de la plate-forme de l’opposition Alternance pour la République (AR), Franck Diongo, a expliqué que, dans leur feuille de route alternative, les opposants ont posé comme nouvelles conditions:
– La non-prolongation du mandat du président Joseph Kabila, qui expire le 19 décembre 2016
– Des nouvelles négociations directes entre tous ceux qui participent actuellement au Dialogue et le Rassemblement
– La désignation d’un nouveau Facilitateur négocié par les deux parties.[24]
Le 11 septembre, lors d’une rencontre avec le groupe international de soutien à la facilitation du dialogue, le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement a réaffirmé qu’il s’en tenait à ses préalables pour «aller au véritable dialogue». Au sortir de cette rencontre, Bruno Tshibala, porte-parole de l’UDPS, a indiqué à la presse que le Rassemblement continue à ignorer les travaux du dialogue politique ouverts le 1er septembre à Kinshasa à l’initiative du président Joseph Kabila: «Le vrai dialogue va commencer lorsqu’on aura réglé tous les préalables posés par le Rassemblement, parce que nous nous en tenons à un véritable dialogue conformément à la résolution 2277 et à l’Accord-cadre d’Addis-Abeba». Cette plate-forme a rappelé aux membres du groupe de soutien à la facilitation du dialogue «sa position telle qu’elle est résumée dans les termes de référence qu’il a publiés récemment», avant de poursuivre: «Le Rassemblement tient à ses exigences, donc à ses préalables». Parmi ces préalables, il y a la libération de tous les prisonniers politiques et la réouverture de tous médias fermés. Le Rassemblement a aussi demandé à l’Union africaine de remplacer le facilitateur Edem Kodjo, accusé de partialité. Bruno Tshibala a estimé que, après cette rencontre, la balle est restée dans le camp du groupe de soutien à la facilitation: «C’est une première rencontre, il y a eu un échange fructueux. Nous restons en attente de la réaction du groupe de soutien […] S’il y a évolution du côté du groupe de soutien pour nous permettre d’aller au véritable dialogue, il y aura effectivement changement de [notre] position».[25]
[1] Cf Actualité.cd, 20.08.’16
[2] Cf RFI, 21.08.’16
[3] Cf Politico.cd, 20.08.’16
[4] Cf RFI, 23.08.’16
[5] Cf Actualité.cd, 23.08.’16; Trésor Kibangula – Jeune Afrique, 23.08.’16
[6] Cf 7sur7.cd, 25.08.’16
[7] Cf liste complète des délégués au comité préparatoire : Direct.cd, 26.08.’16 http://www.direct.cd/actu/la-une/2016/08/26/quarante-huit-delegues-retenus-comite-preparatoire-dialogue-national.html
Radio Okapi, 26.08.’16 http://www.radiookapi.net/sites/default/files/2016-08/liste_participants_comite_preparatoire_originel_amendee_et_corrigee.pdf
[8] Cf Radio Okapi, 29.08.’16
[9] Cf Texte du rapport de la réunion:
http://www.congoforum.be/fr/nieuwsdetail.asp?subitem=2&newsid=205426&Actualiteit=selected
[10] Cf Pierre Boisselet – Jeune Afrique, 26.08.’16
[11] Cf texte complet de la feuille de route: Le Phare – Kinshasa, 29.08.’16 http://www.lephareonline.net/feuille-de-route-dialogue/
[12] Cf Radio Okapi, 24.08.’16
[13] Cf Radio Okapi, 25.08.’16
[14] Cf Actualité.cd, 24.08.’16
[15] Cf Radio Okapi, 30.08.’16
[16] Cf Le Phare – Kinshasa, 31.08.’16 http://www.lephareonline.net/depute-ewanga-devoile-secrets-de-beatrice-hotel/
[17] Cf Radio Okapi, 03.09.’16
[18] Cf Radio Okapi, 04.09.’16
[19] Cf Radio Okapi, 06.09.’16
[20] Cf Direct.cd,01.09.’16 http://www.direct.cd/actu/2016/09/01/bruno-tshibala-explique-feuille-de-route-de-genval.html
[21] Cf La Prospérité – Kinshasa, 28.08.’16 http://laprosperiteonline.com/index.php/actualites/80-politique/4023-dialogue-politique-et-inclusif-la-coalition-des-allies-de-tshisekedi-reitere-son-soutien-aux-prealables-du-rassemblement
[22] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 30.08.’16
[23] Cf Le Phare – Kinshasa, 05.09.’16 http://www.lephareonline.net/dialogue-rassemblement-rappelle-prealables/
[24] Cf Politico.cd, 01.09.’16
[25] Cf Radio Okapi, 11.09.’16