Congo Actualité n. 291

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: ÉLECTIONS EN DANGER, PARLONS-EN!

  1. DIALOGUE NATIONAL
    1. L’appui de la Communauté Internationale au facilitateur du dialogue
    2. Les consultations du groupe de soutien à la facilitation
    3. Les consultations des Évêques de la Conférence Épiscopale
    4. Des mesures de décrispation du climat politique

ÉDITORIAL: ÉLECTIONS EN DANGER, PARLONS-EN!

 

 

1. DIALOGUE NATIONAL

a. L’appui de la Communauté Internationale au facilitateur du dialogue

Le 2 août, dans un communiqué, la délégation de l’Union Européenne en RDC a exhorté le gouvernement congolais et toutes les autres parties concernées à créer «les conditions nécessaires pour le démarrage effectif et rapide du dialogue» censé baliser la voie à des élections apaisées.[1]

Le 3 août, au cours de la conférence de presse hebdomadaire de la Monusco à Kinshasa, le porte-parole intérimaire de la mission onusienne en RDC, Théophane Kinda, a déclaré que la Monusco réaffirme son soutien au facilitateur du dialogue national en RDC désigné par l’Union africaine (UA), Edem Kodjo. Pour la Monusco, a souligné Théophane Kinda, le dialogue reste le cadre par excellence de règlement des divergences observées dans la classe politique congolaise en vue d’un processus électoral crédible et transparent. Le porte-parole intérimaire de la Monusco a également invité les Congolais à surpasser leurs divergences et à se concentrer sur le dialogue.[2]

Le 3 août, le groupe des ambassadeurs des pays africains accrédités à Kinshasa ont exprimé leur « soutien total » à Edem Kodjo, facilitateur désigné de l’Union africaine pour le dialogue politique.

Pour les diplomates africains, M. Kodjo a fait preuve de « bonne foi en direction des membres de l’opposition radicale en vue de créer un climat favorable devant rapprocher toutes les parties« .[3]

Le 4 août, le groupe de soutien à la facilitation s’est réuni autour d’Edem Kodjo pour faire le point sur les avancées et les points de blocage rencontrés par le facilitateur de l’Union africaine. Chaque représentant des organisations qui le composent (ONU, UE, UA, OIF et les deux organisations sous-régionales, la Communauté de l’Afrique australe et la Conférence des Grands lacs) a pris la parole pour donner sa vision.[4]

Le 4 août, à Kinshasa, au cours de la réunion du groupe de soutien à la facilitation, le chef de la Monusco, Maman Sidikou, a remercié le facilitateur du dialogue Edem Kodjo pour ses efforts afin de faciliter la tenue de ce forum: «Certes, le chemin est semé d’embuches, mais force est de reconnaître qu’il ne ménage aucun effort pour aider nos frères et sœurs congolais à dépasser leurs divergences pour se focaliser sur l’essentiel: la préservation de la paix et la stabilité chèrement acquises, en les en encourageant à se mettre ensemble pour se parler». Il a également salué les initiatives de la Cenco et des ambassadeurs africains et européens qui exhortent les Congolais à «privilégier le dialogue comme voie royale de résoudre leurs divergences».[5]

b. Les consultations du groupe de soutien à la facilitation

Le 3 août, à Kinshasa, l’envoyé spécial des Etats-Unis dans les Grands lacs, Thomas Perriello, a rencontré le coordonnateur du Rassemblement de forces acquises au changement, Etienne Tshisekedi. La visite de Thomas Perriello intervient dans un contexte de contestation du facilitateur Edem Kodjo par le Rassemblement de forces acquises au changement. Le président de l’UDPS avait publiquement qualifié le facilitateur du dialogue national de «Kabiliste» au cours de son meeting du 31 juillet dernier. Selon Augustin Kabuya, attaché de presse d’Etienne Tshisekedi, le président de l’UDPS a réitéré auprès de Thomas Perriello les mêmes préalables qu’il avait déjà posés pour participer au dialogue national citant entre autres la libération des détenus politiques, la fin des poursuites à l’encontre de Moïse Katumbi ainsi que la transformation du groupe de soutien en celui de facilitation.[6]

Le 4 août, le groupe de soutien à la facilitation a rencontré l’opposant Etienne Tshisekedi à son domicile de Limete. Le groupe de soutien s’y est rendu pour tenter de convaincre le président de l’UDPS et ses alliés de rejoindre au plus vite le dialogue et d’accepter le facilitateur de l’Union africaine, Edem Kodjo qu’ils récusent. De son coté, le Rassemblement est resté ferme dans sa position. «Notre position est irrévocable quelles qu’en soient les conséquences», aurait même dit Etienne Tshisekedi en guise de conclusion.

S’agissant de la récusation du Rassemblement à l’endroit d’Edem Kodjo (pas neutre, grand kabiliste, ndlr), les Envoyés spéciaux pour la Région des Grands Lacs ont affirmé qu’ils n’ont pas mandat pour se prononcer sur cette question. Le Groupe de soutien a également fait remarquer que la désignation d’un autre facilitateur demanderait beaucoup de temps et que, justement, le temps presse. A l’issue de la rencontre, Bruno Tshibala, de l’UDPS, a pris la parole au nom du Rassemblement de l’opposition: «Le Rassemblement a rappelé le préalable qu’il avait posé lors de la rencontre de Bruxelles au groupe de facilitation. Il s’agit de : 1/ l’application stricte de la Résolution 2277 du Conseil de sécurité de l’ONU, 2/ la transformation du groupe de soutien à la facilitation en un groupe international de facilitation, 3/ l’inopportunité d’avoir un comité préparatoire, 4/ la décrispation effective de la situation politique par la libération immédiate et inconditionnelle des prisonniers politiques et d’opinion et 5/ le non dédoublement des partis politiques».[7]

Le 4 août, à Kinshasa, au cours de la réunion du groupe de soutien à la facilitation, le chef de la Monusco, Maman Sidikou, a appelé les acteurs politiques congolais à agir pour éviter au pays de plonger dans la violence: «Face à l’approche des échéances électorales, il est essentiel que les acteurs politiques de différents bords de l’échiquier politique se ressaisissent et agissent rapidement pour éviter que l’impasse actuelle dégénère en crise grave susceptible de plonger le pays dans la violence». Le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en RDC a exhorté tous ses interlocuteurs congolais à «faire preuve de responsabilité» dans leurs actes et leurs déclarations, «afin d’éviter d’envenimer davantage la situation actuelle».[8]

Le 5 août, à Kinshasa, après la réunion avec le groupe de soutien à la facilitation, le vice-président de l’Alternance pour la République (AR), Franck Diongo, a réitéré la récusation du facilitateur du dialogue national, Edem Kodjo. L’AR est membre du Rassemblement de forces acquises au changement. «Que le groupe de soutien se transforme en comité de facilitation parce que pour nous, le facilitateur pose un problème de crédibilité et de confiance», a déclaré Franck Diongo.

Le vice-président de l’AR a rappelé quelques préalables que pose son camp politique pour prendre part au dialogue, notamment la libération des prisonniers politiques et l’abandon des poursuites judiciaires contre Moïse Katumbi, candidat déclaré à la prochaine présidentielle. Cette plateforme de l’opposition a également recommandé au gouvernement de rouvrir les médias fermés (Canal Kin, Canal Futur, Congo Media Chanel et autres) et de mettre fin au dédoublement des partis politiques. Cette plateforme de l’opposition est composée de partis Envol de Delly Sessanga, MLP de Franck Diongo, ECCO d’Adam Bombole, ATD de José Makila, SCODE de Jean-Claude Muyambo, CNRP de Bernard Beya Mubiayi.[9]

Le 5 août, à Kinshasa, au sortir d’une réunion avec le groupe de soutien à la facilitation, le coordonnateur du G 7, Charles Mwando Nsimba, a réitère l’attachement de cette plateforme politique aux préalables du Rassemblement de forces acquises au changement pour participer au dialogue politique. Le Rassemblement de l’opposition exige entre autres, le départ d’Edem Kodjo comme facilitateur du dialogue et la libération des prisonniers politiques et d’opinion.[10]

Le 5 août, en début d’après-midi, le sénateur Leonard She Okitundu, représentant de la MP, a rencontré deux des membres du groupe de soutien, l’envoyé spécial pour les Grands Lacs Said Djinnit et le patron de la Monusco Maman Sidikou.

À propos de l’élargissement de la facilitation et le remplacement d’Edem Kodjo, le facilitateur de l’Union africaine, She Okitundu a rappelé que la demande d’une facilitation internationale venait de l’UDPS et que Édem Kodjo a été choisi par la communauté internationale. «Pas question de revenir là-dessus», dit-il. Pas question non plus d’aller au dialogue sans comité préparatoire. «On ne peut pas décider de l’ordre du jour le premier jour du dialogue», estime l’émissaire de la majorité. Les mesures de décrispation? La libération de tous les prisonniers politiques? Le président a déjà fait un geste important en libérant des militants du mouvement citoyen la Lucha et un opposant. Des mesures de liberté provisoire sont envisagées, tout comme la réouverture de certains médias, assure le sénateur She Okitundu, qui ajoute avoir expliqué aux deux responsables onusiens que les mesures de décrispation doivent aller dans les deux sens. Le rassemblement doit arrêter ses appels au soulèvement, dit en substance She Okitundu. Pour ce qui est du dédoublement de certains partis politiques, notamment ceux du G7, l’émissaire de la majorité parle d’un problème interne aux partis politiques, qui ne concerne ni la majorité, ni le gouvernement.[11]

Le 8 août, lors d’une interview, le chargé de communication de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC) à l’interfédérale de Kinshasa, Cele Yemba, a affirmé que l’UNC accorde sa confiance au Groupe de soutien à la facilitation pour le dialogue et a, au nom de sa hiérarchie, salué la démarche du facilitateur Edem Kodjo. Ce cadre de l’UNC a par ailleurs invité ses collègues de l’Opposition à revenir sur leur décision de récuser Kodjo. Pour sa formation politique, désavouer l’actuelle facilitation c’est faire le jeu du pouvoir qui ne veut pas organiser les élections dans le délai constitutionnel. Il a enfin recommandé à l’Opposition politique de claquer la porte au cas où les choses ne marchaient pas au dialogue.[12]

Le 9 août, le représentant spécial adjoint du secrétaire général des Nations unies en RDC, Mamadou Diallo, a déclaré à la presse que, «au delà des questions techniques et logistiques, il faudrait que les acteurs politiques congolais de la majorité et de l’opposition puissent se rencontrer pour s’écouter, discuter et trouver un consensus sur la façon dont ils veulent conduire le processus électoral». Pour M. Diallo, le dialogue a pour ambition de «créer des conditions pour que les acteurs politiques congolais puissent entre eux prendre acte que le processus actuel peut conduire à un report de la présidentielle et décider comment est-ce qu’ils vont le gérer», et dicter une ligne de conduite à la Commission électorale.[13]

Le 10 août, au cours d’un point de presse tenu à Kinshasa, le Front des Démocrates (FDE), plate-forme politique membre de la Dynamique de l’opposition, a réaffirmé sa position sur le respect de la Constitution et la tenue de l’élection présidentielle dans le délai constitutionnel. Le coordonnateur et porte-parole de cette plate-forme, Jean-Lucien Bussa, a fait un plaidoyer en faveur de la mise œuvre rapide de la résolution 2277 du Conseil de Sécurité des Nations unies en prenant en compte la nécessité d’écourter le délai du dialogue, de reconsidérer le format du comité préparatoire, de faire assurer la modération par la facilitation, en ce compris le groupe international de soutien. «Tout ceci est exigé de sorte que soit convoqué le scrutin présidentiel le 19 septembre 2016 et d’éviter ainsi le chaos à notre peuple. Pour le Front des démocrates, la réponse à toute question politique, notamment celle relative à l’élection présidentielle, est donnée par la Constitution, même dans la pire hypothèse de la vacance », a déclaré Jean-Lucien Bussa. Et de poursuivre: «Pour le Front des démocrates, la Constitution s’applique avant le 19 décembre 2016; elle s’applique tout autant après le 19 décembre 2016». De ce point de vue, le coordonnateur et porte-parole du FDE n’est pas d’avis que le dialogue débouche sur une transition. «Avoir l’élection présidentielle dans le délai est une question de volonté politique. Et lorsque la volonté politique est forte, les contraintes techniques sont minimisées», a-t-il souligné. Le FDE se situe ainsi dans la tendance politique qui s’oppose à une transition extraconstitutionnelle après le 19 décembre 2016.[14]

c. Les consultations des Évêques de la Conférence Épiscopale

Le 10 août, les évêques de la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO) ont rencontré le facilitateur du dialogue, Edem Kodjo. Ils ont proposé leur soutien au groupe de facilitation du dialogue politique, pour débloquer l’impasse observée pour le démarrage du dialogue national. D’après le secrétaire général de la CENCO, l’Abbé Leonard Santedi, les évêques se disent prêts à rencontrer, le plus tôt possible, les acteurs politiques congolais tant de la Majorité que de l’opposition.

Il faut dire que le dialogue est bloqué sur deux points essentiels, avant même d’avoir commencé:

la personnalité du facilitateur, récusé par le rassemblement de l’opposition, mais soutenu par la majorité; et les mesures dites d’apaisement: libération des prisonniers politiques, fin des poursuites contre des opposants comme Moïse Katumbi, réouverture des médias fermés par le gouvernement…

Sur le premier point, à l’issue de sa rencontre avec les évêques, Edem Kodjo a insisté: «Je ne vais pas démissionner et je n’en ai pas l’intention. Ceux qui m’ont mandaté m’ont renouvelé leur confiance et je reçois tous les jours de larges tranches de la société civile, et même des partis politiques, des corps diplomatiques, qui viennent me renouveler leur confiance. Donc je n’ai pas l’intention de démissionner». Concernant les mesures d’apaisement – qui ont été demandées non seulement par le rassemblement de l’opposition mais également par plusieurs acteurs de la communauté internationale – le facilitateur de l’Union africaine dit en avoir parlé en début de semaine avec le ministre de la Justice et espérait une suite favorable.[15]

Le 11 août, après une rencontre entre une délégation de l’UDPS et les évêques de la CENCO, le coordonnateur et porte-parole de la plateforme « Front du peuple », Lisanga Bonganga, a affirmé que, concernant Edem Kodjo, les opposants de l’UDPS ont continué, comme ceux de la Dynamique de l’Opposition avant eux, de récuser le diplomate togolais, malgré le soutien affiché de la communauté internationale à son égard. «Pour nous, c’est un problème réglé. Nous avons demandé aux évêques de chercher un autre facilitateur», a confirmé, Lisanga Bonganga.[16]

Le 11 août, dans un communiqué de presse, Charles Mwando Nsimba, président en exercice du G7, membre actif du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement, a réitéré ses idéaux qui demeurent du reste intangibles. Il s’agit du respect de la Constitution par l’organisation de l’élection présidentielle dans les délais légalement prescrits. Sur cette question, la G7 ne transige pas. Tout comme, il s’accroche à la récusation d’Edem Kodjo, facilitateur de l’Union africaine au dialogue politique national. Sur ces deux questions précises, le G7 n’entend pas lâcher prise. Le G7 exige enfin la fin du harcèlement judiciaire contre son candidat à la présidence de la République, Monsieur Moïse Katumbi, victime des procès injustes et sans fondements, afin qu’il revienne dans son pays en homme libre pour participer au dialogue politique.[17]

Le 11 août, le vice-président de l’Alternance pour la République (AR), Franck Diongo, a déclaré que cette plateforme, qui soutient la candidature de Moïse Katumbi à la présidentielle, pose quelques préalables pour prendre part au dialogue, notamment la libération des prisonniers politiques et l’abandon des poursuites judiciaires contre Moïse Katumbi. Elle recommande également au gouvernement de rouvrir les médias fermés (Canal Kin TV, Canal Futur, Congo Media Chanel et autres) et de mettre fin au dédoublement des partis politiques. Selon le vice-président de l’AR, Edem Kodjo devrait répondre aux préalables de l’opposition, «en faisant pression sur le président Kabila».[18]

Le 12 août, après avoir rencontré la Cenco, la Secrétaire Général du MLC, Eve Bazaïba, a déclaré que la crise actuelle est une crise artificielle et que le jour que le Président va réaliser qu’il est dans son deuxième et dernier mandat, cette bombe sera désamorcée. Le MLC ne s’inscrit pas dans la logique d’un dialogue politique qui dérogerait au principe «sacrosaint de la constitution» relatif au nombre et à la durée du mandat présidentiel. Le MLC propose un dialogue technique permanent entre la Commission électorale, la majorité et l’opposition. Le MLC n’est donc pas concerné par la problématique sur la «facilitation» du dialogue. Le MLC pense qu’il est possible d’organiser l’élection présidentielle dans le délai constitutionnel avec l’ancien fichier électoral. Pour le MLC, il serait convenable découpler les présidentielles des législatives nationales, car seul le scrutin présidentiel est soumis à un calendrier constitutionnel.[19]

Le 12 août, chez les évêques catholiques, Vital Kamerhe a réitéré que «le Dialogue ne peut pas se faire sans la décrispation du climat politique. En ce qui concerne la nature du dialogue, il s’agit du dialogue dans le cadre de la résolution 2277 qui exige le strict respect de la constitution. Le dialogue doit accoucher d’un calendrier électoral. Il y a trois possibilités:

– Organiser les élections dans les délais constitutionnels avec l’actuel fichier électoral qualifié par tous comme corrompu. Dans ce cas, il y aurait 8,5 millions d’électeurs (nouveaux majeurs) qui ne pourraient pas voter, sans compter les Congolais vivant à l’étranger.

– Organiser les élections après une révision partielle du fichier électoral (enrôlement des nouveaux majeurs). Selon l’OIF, cette révision partielle pourrait se faire en 8,5 mois.

– Organiser les élections après une refonte totale du fichier électoral. Selon l’OIF, pour cette opération il faudrait 10,5 mois.

L’objectif du dialogue est celui d’avoir un calendrier électoral, afin qu’on puisse dire au peuple la date des prochaines élections présidentielles et législatives nationales. Le dialogue demeure important pour déterminer le jour du scrutin présidentiel et non le partage du pouvoir. L’UNC ira au dialogue mais à condition de respecter les préalables, dont la libération des prisonniers politiques».[20]

Le 12 août, l’Alternance pour la République (AR) a été reçue par la CENCO. Au sortir de la réunion, Franck Diongo a affirmé que «l’AR est membre du Rassemblement. Nous réitérons nos positions dont la récusation irrévocable d’Edem Kodjo. Néanmoins, nous sommes disponibles pour un dialogue qui va ramener la paix au pays et qui dépendra de la résolution 2277».

L’AR demande que le groupe international de soutien à la facilitation cesse d’être observateur, qu’il fasse partie de la facilitation et que les préalables du Rassemblement trouvent les réponses.[21]

d. Des mesures de décrispation du climat politique

Le 19 août, le ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, a annoncé la libération de vingt-quatre prisonniers politiques et d’opinion en vue de décrisper le climat politique à l’approche du dialogue national. Les noms des bénéficiaires de cette décision figurent sur une liste transmise au gouvernement par la représentation de l’Union européenne en RDC le 4 août, a détaillé M. Thambwe. Sur la liste de 26 prisonniers dits politiques et d’opinion transmise à la délégation de l’Union européenne par le Rassemblement de l’opposition, seuls les détenus pour viol et escroquerie n’ont pas bénéficié de cette mesure de grâce. Il s’agit d’Eugène Diomi Ndongala, président de la Démocratie chrétienne (DC) et Jean-Claude Muyambo, président de la Solidarité congolaise pour la démocratie et le développement (SCODE). Il s’agit de deux partis d’opposition..
A l’occasion, le ministre de la Justice a également annoncé la réouverture des chaînes de télévision Canal Kin-Télévision (CKTV), proche de l’opposant Jean-Pierre Bemba et Canal Futur (CF), proche de l’opposant Vital Kamerhe.[22]

Parmi les 24 detenus dont on a annoncé la libération, définitive ou provisoire, il y a Fred Bauma et Yves Makwambala, respectivement membres des mouvements citoyens Lucha (Lutte pour le changement) et Filimbi (« Coup de sifflet » en swahili). Poursuivis par la justice congolaise pour complot contre le président Joseph Kabila, les deux jeunes hommes sont détenus à la prison de Makala à Kinshasa. Il y a aussi Jean Marie Kalonji, de 4e voie, et Christopher Ngoy, un militant des droits de l’Homme, en détention depuis les manifestations de janvier 2015 contre la reforme de la loi électorale.[23]

Les avocats de plusieurs personnes concernées affirment que seuls 4 prisonniers (Fred Bauma, Yves Makwambala, Christopher Ngoyi et Jean-Marie Kalonji) sont réellement concernés par la mesure du ministre de la Justice congolais, car les 20 autres avaient déjà quitté la prison ou étaient en liberté provisoire. Dans un communiqué, Human Rights Watch affirme également que quatre sur les 24 seulement vont effectivement être remis en liberté. Les autres ont tous été libérés au cours des semaines ou des mois précédent cette annonce du ministre.[24]

En ce qui concerne la liste publiée par le ministre de la Justice, le mouvement citoyen LUCHA relève l’«omission» de quatre de ses militants et d’un activiste de Filimbi encore en détention à la Prison centrale de Makala (Marcel-Héritier Kapitene, Victor Tesongo, Bienvenu Matumo, Godefroy Mwanabwato et Jean-Marie Kilima). Ce mouvement réclame également la cessation pure et simple des poursuites en faveur de Fred Bauma et Yves Makwambala en plus de la mesure de mise en liberté provisoire dont ils bénéficieront.[25]

Voici une liste de 26 prisonniers politiques et d’opinion qui restent encore en prison:

  1. Kinshasa
  2. Eugène DIOMI Ndongala, Président de la Démocratie Chrétienne (DC)
  3. Jean-Claude MUYAMBO, Président de la solidarité Congolaise pour la Démocratie et le Développement (SCODE)
  4. Bienvenu MATUMO, 4. Héritier Marcel KAPITENI, 5. Victor TESONGO, membres de Lucha,
  5. Jean de Dieu KILIMA, membre de Filimbi,
  6. Yannick KIBINDA MUKEBA, 8. Franck MWASHILA, 9. IDI SEFU, proches de Moise Katumbi.

Cachot ANR:

  1. KABULO SIMBI ZAZOU, 2. KALENGA KINYANGO KAKOKO, membres de l’UNAFEC / Kyungu

A LUBUMBASHI

Prison de la Kasapa:

  1. KAZADI BUKASA, 2. KAPENDA BUPE, 3. KABEMBA LUHEMBE, 4. MASANGU UMBA,
  2. TSHIBWABWA KABONGO, 6. NKULU KISAMBWA, 7. KALONJI MUKEBA, 8. MBAV KABWAND, 9. TWITE KALUMBA, 10. KABALA MULIMBA Olivier, 11. MULUMBA MUTOMBO, 12. NGONGO KASONGO Joseph, tous membres de l’UNAFEC/Kyungu.
  3. KABWISHE MWENYE Yousouf (refugié burundais considéré à tort comme membre de l’UNAFEC/Kyungu)

Cachot ANR :

  1. LWEMBE MUNIKA Lumbic, beau-fils du député Gabriel Kyungu wa Kumwanza, président de l’UNAFEC, 2. KAPENDA Lemal, membre de l’UNAFEC/Kyungu.[26]

Le 20 août, dans une déclaration faite à Kinshasa par son vice-président, Gabriel Kyungu wa Kumwanza, le G7 a dit ne pas être prêt à participer au dialogue national si tous les prisonniers politiques incarcérés dans les prisons du pays n’en sont pas libérés et a accusé la majorité présidentielle de bloquer la tenue du dialogue.

Par contre, la Majorité présidentielle (MP) pense qu’en publiant la liste des prisonniers politiques à libérer, le chef de l’Etat a répondu à tous les préalables posés par l’opposition pour participer au dialogue politique. A en croire le secrétaire général-adjoint de la MP, Joseph Kokonyangi, l’opposition n’a plus de prétextes pour barrer la voie du dialogue. Il estime que le chef de l’Etat a répondu aux exigences des opposants. Il a notamment cité la tenue du dialogue, la présence d’une facilitation internationale, la constitution d’un panel international d’appui au facilitateur, la libération des prisonniers politiques et la réouverture des médias de l’opposition fermés.[27]

Le 20 août, dans une déclaration lue par Jean-Marc Kabunda, secrétaire général de l’UDPS, le Rassemblement des force politiques et sociales acquises au changement s’est dit insatisfait des mesures de décrispation politique annoncées par le ministre de la Justice. Le Rassemblement charge le gouvernement de n’avoir libéré que quatre détenus sur une liste de 112 personnes présentée par l’opposition. Toujours selon cette déclaration, au moins 83 autres personnes croupissent dans les prisons de Kinshasa pour des raisons politiques en dépit du fait qu’elles ont été amnistiées depuis plus de deux ans. La déclaration du Rassemblement fait également état de la poursuite des harcèlements judiciaires, de la répression et des arrestations arbitraires contre des membres de l’opposition. La même déclaration note aussi qu’aucun média proche du Rassemblement frappé d’interdiction n’est autorisé de reprendre ses émissions. Le Rassemblement de l’opposition estime donc que tout cela est une preuve de la mauvaise foi de la part du chef de l’Etat.[28]

Le 26 août, une semaine après l’annonce de la libération de 24 « prisonniers politiques et d’opinion », le ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, a communiqué celle de cinq militants pro-démocratie en détention à Kinshasa depuis plusieurs mois. Il s’agit de quatre activistes de Lucha: Bienvenu Matumo, Victor Tesongo, Héritier Kapitene, Godefroy Mwanabwato ainsi qu’un activiste du mouvement Filimbi: Jean de Dieu Kilima. Les cinq hommes «vont devoir quitter la prison de Makala dans les deux, trois jours», a précisé le ministre. Le 19 août, le gouvernement avait déjà annoncé la libération de 24 prisonniers, dont Fred Bauma (Lucha) et Yves Makwambala (Filimbi), mais les deux hommes sont encore en détention.[29]

Le 27 août, le défenseur des droits de l’homme, Jean-Marie Kalonji, est désormais en liberté provisoire. Pour l’instant, il s’agit seulement d’une liberté provisoire. Jean-Marie Kalonji reste poursuivi pour atteinte à la sûreté de l’Etat et appel à la désobéissance civile.[30]

Le 29 août, les militants du mouvement pro-démocratie Lucha Fred Bauma et Yves Makwambala ainsi que l’activiste des droits de l’homme Christopher Ngoy ont été libérés sur décision de la Cour suprême de la justice. Dans un message publié sur sa page Facebook, la Lucha fait savoir que Bauma et Makwambala bénéficient d’une «liberté provisoire, après 18 mois et 15 jours de détention sans procès». Le même communiqué indique que les poursuites contre Christopher Ngoy ont été levées. Serges Sivya, militant de la Lucha, salue la libération de ses camarades mais il dit attendre la libération des autres militants de la Lucha qui sont encore en détention.

  1. Ngoy avait été arrêté en janvier 2015 dans la foulée des manifestations contre la révision de la loi électorale. Il était poursuivi par le parquet général de la République pour cinq chefs d’accusation dont l’incitation à la haine raciale et atteinte à la sécurité intérieure de l’État.

Fred Bauma et Yves Makwambala ont été arrêtés à Kinshasa le 15 mars 2015, lors d’une rencontre sur la bonne gouvernance en Afrique organisée par le mouvement Filimbi. Ils sont poursuivis pour complot contre le président Kabila. Les noms de ces trois activistes figurent sur la liste des 24 prisonniers politiques et d’opinion annoncée le 19 août.[31]

Le 31 août, Bienvenu Matumo, Victor Tesongo, Héritier Kapitene et Godefroy Mwanabwato viennent d’être libérés. Ces quatre militants de la LUCHA bénéficient d’une liberté conditionnelle. Par ailleurs, l’activiste de Filimbi Jean de Dieu Kilima est encore en détention. Ces militants de la LUCHA avaient été interpelés mardi 16 février à l’aube, jour décrété ville-morte par l’opposition congolaise et des organisations de la société civile, pour appeler le président Kabila à respecter la constitution dans ses dispositions portant sur les mandats présidentiels.[32]

[1] Cf Radio Okapi, 03.08.’16

[2] Cf Radio Okapi, 03.08.’16

[3] Cf AFP – Radio Okapi, 04.08.’16

[4] Cf RFI, 05.08.’16; Didier Kebongo – Forum des As – Kinshasa, 05.08.’16

[5] Cf Radio Okapi, 05.08.’16

[6] Cf Radio Okapi, 03.08.’16

[7] Cf RFI, 05.08.’16; Didier Kebongo – Forum des As – Kinshasa, 05.08.’16

[8] Cf Radio Okapi, 05.08.’16

[9] Cf Radio Okapi, 05.08.’16

[10] Cf Radio Okapi, 05.08.’16

[11] Cf RFI, 06.08.’16

[12] Cf Julie Muadi – La Tempête des Tropiques – Kinshasa, 09.08.’16

[13] Cf AFP – Africatime, 10.08.’16

[14] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 11.08.’16

[15] Cf Radio Okapi, 11.08.’16 ; RFI, 11.08.’16

[16] Cf Politico.cd, 11.08.’16

[17] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 12.08.’16

[18] Cf Radio Okapi, 11.08.’16

[19] Cf Actualité.cd, 12.08.’16

[20] Cf Actualité.cd, 12.08.’16

[21] Cf Actualité.cd, 12.08.’16

[22] Cf Radio Okapi, 19.08.’16

[23] Cf AFP – Onewovision, 19.08.’16

[24] Cf RFI, 20.08.’16

[25] Cf Actualité.cd, 20.08.’16

[26] Cf Politico.cd, 19.08.’16  http://www.politico.cd/encontinu/2016/08/19/liberation-de-prisonniers-politiques-voici-restent-prison.html

[27] Cf Radio Okapi, 21.08.’16

[28] Cf RFI, 21.08.’16; Le Potentiel – Kinshasa, 22.08.’16  Texte complet de la déclaration :

 http://www.lepotentielonline.com/index.php?option=com_content&view=article&id=15018:premier-avertissement-du-rassemblement-a-kodjo-et-complices-appel-a-la-ville-morte-ce-mardi&catid=85&Itemid=472

[29] Cf AFP – Radio Okapi, 26.08.’16

[30] Cf RFI, 29.08.’16

[31] Cf Radio Okapi, 29.08.’16

[32] Cf Actualité.cd, 31.08.’16