SOMMAIRE
- LES RÉVÉLATIONS D’UN NOUVEAU RAPPORT DE L’ONU
- Des rebelles burundais recrutés et entraînés au Rwanda puis infiltrés en RDCongo
- Des soldats congolais accusés d’avoir tiré sur des Casques bleus tanzaniens
- LES FORCES DÉMOCRATIQUES POUR LA LIBÉRATION DU RWANDA (FDLR)
- Tension entre Hutu et Nande dans les territoires de Lubero et Walikale
- Accrochages entre FDLR et Maï-Maï
- Les dessous de la violence
- LES FORCES DÉMOCRATIQUES ALLIÉES (ADF)
1. LES RÉVÉLATIONS D’UN NOUVEAU RAPPORT DE L’ONU
a. Des rebelles burundais recrutés et entraînés au Rwanda puis infiltrés en RDCongo
Dans un rapport encore confidentiel et datant du 15 janvier, des experts onusiens accusent le Rwanda de recruter et d’entraîner des réfugiés Burundais accueillis sur son propre territoire, pour renverser le président Pierre NKurunziza et confirment, pour la première fois, l’infiltration de ces rebelles burundais sur le sol congolais. Dix-huit réfugiés, dont six mineurs, munis de fausses cartes d’identité congolaises, ont confirmé avoir été recrutés dans le camp de réfugiés de Mahama, dans l’est du Rwanda, en mai et juin 2015. «Ils ont déclaré que leur but ultime était de chasser du pouvoir le président burundais Nkurunziza», indique le rapport qui a été transmis au Conseil de sécurité. Selon le document, des réfugiés burundais ont reçu des armes et un entraînement militaire de deux mois de la part d’instructeurs de l’armée rwandaise. Une formation qui «comprenait des tactiques militaires, l’utilisation et l’entretien de fusils d’assaut et de mitraillettes, ainsi que des sessions d’endoctrinement idéologique». Les dix-huit réfugiés ont affirmé avoir vu au moins 4 compagnies, de 100 hommes chacune, en phase d’entraînement au cours de leur formation dans une forêt rwandaise. Après l’entraînement initial, les rebelles ont été conduits au Sud Kivu nantis de faux documents congolais fournis par les autorités rwandaises.[1]
b. Des soldats congolais accusés d’avoir tiré sur des Casques bleus tanzaniens
Le rapport des experts onusiens revient aussi sur «l’incident» qui a eu lieu le 5 mai 2015, à 17 heures locales, à Mayi Moya, dans le territoire meurtri de Beni, au Nord Kivu. Ce jour-là, deux Casques bleus tanzaniens avaient été tués et 26 autres blessés dans un accrochage.
Très rapidement, les investigations internes au sein de la Monusco ont pointé les rebelles ougandais des Forces démocratiques alliées (ADF), très actifs dans cette partie du territoire de la RDC. Mais selon les experts onusiens, ces derniers n’y étaient pour rien. Au cours de son enquête, le Groupe [d’experts] a constaté que l’ADF n’était pas responsable de l’attaque, mais plutôt des éléments de la 31e brigade des FARDC qui avaient tiré sur des Casques bleus tanzaniens.
Comment cela est-il arrivé? Selon des experts onusiens, il ne s’agirait pas d’une quelconque embuscade. Se fondant sur des témoignages des personnes qui prétendent avoir assisté à l’incident mais aussi sur d’autres sources, y compris parmi les officiers congolais, ils affirment que deux soldats congolais, qui se trouvaient à Kisiki, près du lieu de l’incident, avaient été alerté d’un éventuel ravitaillement en armes des rebelles de l’ADF par des Casques bleus.
Ces deux éléments de l’armée congolaise ont alors réquisitionné un chauffeur de taxi-moto pour se rendre à Mayi Moya. «À leur arrivée, des éléments de l’ADF ont tiré sur eux, tuant le conducteur et blessant les deux soldats», rapportent les experts onusiens, qui soulignent que ces derniers avaient tiré et touché les rebelles ougandais et les Casques bleus tanzaniens qui s’y trouvaient avec eux.
Pour l’instant, l’armée congolaise se refuse à tout commentaire officiel sur cette affaire jugée très sensible. En tout cas, l’Etat-major congolais assure que s’il était avéré que des casques bleus tanzaniens avaient ravitaillé les ADF, ce serait un scandale que les autorités congolaises seraient les premières à dénoncer, mais que les premiers éléments de l’enquête ne semblent pas confirmer cette thèse.
Plusieurs versions de l’incident circulent. Les troupes locales sont-elles venues au secours des casques bleus tanzaniens? Y a-t-il eu un accrochage entre les deux forces ou même une attaque de soldats congolais contre les casques bleus? Les hypothèses sont nombreuses. Toutefois, il y a un point sur lequel tout le monde semble d’accord, à savoir qu’un camion contenant de la bière était arrêté au milieu de la route, à 500 mètres d’une position de l’armée congolaise. Selon le spécialiste du Congo Jason Stearns, certains témoignages récoltés par son équipe indiquent plutôt que des soldats congolais étaient en train de piller le camion de bière quand les casques bleus sont arrivés.[2]
Dans une déclaration du 7 février, le CEPADHO a affirmé ne pas partager le point de vue du Groupe des Experts. Le CEPADHO suspecte par contre les ADF dans cette attaque du fait que ces terroristes avaient des motifs légitimes pour réaliser ce crime: à côté du soutien des Casques bleus Tanzaniens aux FARDC dans les opérations de traque contre eux, les ADF se seraient vengées contre la capture quelques jours plus tôt en Tanzanie de JAMILI MUKULU, leur leader.[3]
2. LES FORCES DÉMOCRATIQUES POUR LA LIBÉRATION DU RWANDA (FDLR)
a. Tension entre Hutu et Nande dans les territoires de Lubero et Walikale
Le 26 janvier, des présumés rebelles des Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR) ont kidnappé une cinquantaine de familles dans la localité de Bushalingwa, en groupement Ikobo, à cheval entre les territoires de Lubero et Walikale (Nord-Kivu). Selon la société civile de Luofu, ces combattants rwandais ont emmené ces ménages vers une destination inconnue après avoir incendié leurs habitations. La même source indique que ces combattants occupent le village de Bushalingwa depuis le mois d’octobre dernier.[4]
Le 27 janvier, des altercations ont opposés entre 10 et 11h00 les agriculteurs Nande aux sujets Hutu
hébergés au camp de regroupement de Miriki (Territoire de Lubero). Les Nande ont accusé les Hutu d’être sortis du Camp de regroupement pour s’infiltrer dans leurs champs, en vue d’y récolter frauduleusement des vivres. L’on fait état des blessés de part et d’autre. Il a fallu l’intervention des FARDC pour départager les antagonistes. Ce qui paraît inquiétant, les membres de la communauté Nande, basés à MIRIKI et dont les vivres seraient volés dans les champs, ont menacé d’aller incendier le Camp hébergeant les Hutu.
Selon des sources locales, le camp d’hébergement de MIRIKI héberge 246 dépendants-FDLR venus du Groupement IKOBO, en Territoire de WALIKALE et des déplacés Hutu retournés, ce qui alimente, dans les communautés locales (Nande), la confusion entre déplacés Hutu et FDLR ou dépendants-FDLR. Depuis plusieurs mois, les chefs nande de la région de Miriki s’opposent au retour de déplacés hutu congolais, qu’ils accusent de complicités avec les FDLR.
Le CEPADHO considère que, à défaut du rapatriement, la délocalisation des dépendants FDLR du sud-Lubero est un besoin urgent. Il limiterait les incidents qui opposent presque régulièrement les membres de la communauté Nande à ceux de la Communauté Hutu dans cette zone.[5]
Le 1er février, à Miriki l’on observe un déplacement massif des membres de la communauté Nande. Nombreux nande ont fui vers Luofu, Kirumba, Kayna et Kanyabayonga.
Ceux qui ont quitté la localité de Miriki disent craindre pour leur sécurité. La goûte qui aurait fait débordé le vase c’est la sortie de plusieurs dépendants-FDLR (venus d’Ikobo) et de certains autres déplacés Hutu de leur site d’hébergement (de Miriki) vers Yalika, à 2 km à ouest de Miriki (en localité Mulinde, Groupement Itala). Les Hutu sortis du camp disent qu’ils sont allés s’approvisionner en vivres dans les champs voisins, ce que les Nande rejettent en bloc, disant que ceux-ci seraient sortis du camp pour rejoindre les rebelles rwandais FDLR-RUD signalés depuis deux jours dans les parages. Pour les Nande, ceux qui sont sortis du camp sont allés planifier un nouveau génocide avec les FDLR contre les Nande. Il s’observe que, dans cette zone, les Nande dans la zone considèrent tous les Hutu comme des FDLR; parallèlement les Hutu considèrent tous les Nande comme des miliciens Maï-Maï.[6]
Le 2 février, 6 membres de la Communauté Hutu ont été tués lors d’une embuscade leur tendue entre les villages de Kalevya et de Katundula, en localité Mulinde, à 12 km à ouest de Miriki, dans le Groupement Itala. Les auteurs de ce massacre, des présumés Maï-Maï, auraient accusé ces Hutus d’avoir quitté leur village de Kalevya pour apporter un appui aux FDLR qu’ils affrontaient à Katundula. Ils disent les avoir trouvés avec les effets militaires. Cette version est rejetée à bloc par les membres des familles des victimes qui soutiennent que ces civils Hutu étaient allés s’approvisionner en vivres dans leurs champs avant de croiser sur leur chemin des miliciens Maï-Maï qui les ont tués. Les proches de personnes massacrées parlent de l’intolérance ethnique de la part des Maï-Maï d’ethnie Nande.[7]
Le 3 février, un groupe de retournés hutu ont quitté leur village de Luhanga, en Groupement Itala, pour s’approvisionner dans le marché de Luofu, un village situé entre Kayna et Miriki, dans le Groupement de Tama. Sur leur chemin de retour, ces déplacés hutu extorquaient des biens et tabassaient les paysans nande qui revenaient des leurs champs. En réplique, un groupe de jeunes nande auraient tenu tête jusqu’à tuer un Hutu, lors des altercations. Visiblement, c’est la goûte qui a fait débordé le vase. Les déplacés hutu seraient revenus à Luofu avec la dépouille mortelle en vue de prendre à témoins les habitants et les Autorités de la mort d’un des leur par les Nande. Cette nouvelle épisode a ravivé la tension; les Hutu et les Nande se sont à nouveau affrontés. On déplore plusieurs blessés dans les deux camps. Il est fait état de 7 blessés nande (dont 5 à Luofu et 2 à Vusongo) e 6 blessés hutu. Nombreux habitants de Luofu, principalement de la Communauté nande, ont commencé à vider le village à partir de 18h30, à destination de Kayna, Kirumba et Kaseghe.[8]
Le 5 février, vers 9h00 du matin, à Kasiki, à 13 km au NO de Luofu, dans la localité de Bunyakaisinga, en Groupement Tama, un groupe des Nande (membres d’une mutualité) étaient en plein travail communautaire cultivant le champ, lorsqu’ils ont été attaqués par un groupe de Hutu.
Vers 11h00 locale, les Nande à leur tour et au nom de la vengeance ont commencé à incendier les habitations des Hutu à Kasiki. Face à la menace, tous les Hutu de Kasiki fuient le village à direction de Luhanga (à 8 km-ouest) où ils sont majoritaires.[9]
Le 9 février, vers 16h00 locale, les membres de la communauté Hutu en colère ont incendié les maisons de Nande dans les villages Kalevya (en Groupement Itala, au nord de Miriki) et à Kasenge (en Groupement Tama, localité Busongo), à 9 km au nord-ouest de Luofu, dans le Sud du Territoire de Lubero. En réplique contre ces actes, vers 21H00, le même jour, des sujets Nande se sont mis à incendier les habitations de Hutu à Mbuavinywa, en Groupement Tama, à 28 km-Ouest de Luofu. Suite à ces tensions, dans ces villages toutes les activités restent paralysées.[10]
Le 18 février, l’administrateur du territoire de Lubero, Bokele Joy, a affirmé que, suite à une campagne de sensibilisation de la population pour une cohabitation pacifique, la situation s’est nettement améliorée et la confiance a commencé à se rétablir entre les membres des deux communautés Hutu et Nande. Il assure aussi que l’armée sécurise correctement la population locale.
Une délégation constituée de ministres nationaux et provinciaux s’est rendue dans la région, pour écouter les représentants des deux communautés et tenter de résoudre la crise. De sa part, le porte-parole de la société civile des groupements Tama et Itala, a toutefois affirmé que, malgré cette visite, la tension est encore perceptible entre Hutu et Nande. Selon lui, la situation est encore loin d’être maitrisée.[11]
b. Accrochages entre FDLR et Maï-Maï
Le 7 février, quinze personnes ont été tuées et cinq autres blessées, dans un accrochage entre les rebelles FDLR et les Maï-Maï du groupe NDC/Rénové de Guidon, à Mukeberwa, en territoire de Lubero (Nord-Kivu). L’administrateur du territoire de Lubero, Bokele Joy, souligne que ce combat a éclaté aux environs de 8 heures, lorsqu’un groupe de Maï-Maï, venus de la région de Buleusa dans le territoire de Walikale, a attaqué la localité de Mukeberwa, tenue par les rebelles rwandais, les FDLR, qui ont réussi à repousser les hommes de Guidon de la localité de Mukeberwa. C’est depuis novembre dernier que les Maï-Maï du groupe NDC/Rénové de Guidon appuyés par d’autres jeunes mai-mai de Lubero, font pression sur les FDLR. Ces derniers administrent depuis des années, plusieurs localités du Sud de Lubero ainsi que de l’Ouest de Walikale, provoquant ainsi le déplacement de milliers populations.[12]
Les morts du weekend seraient la conséquence de combats opposant la rébellion hutue rwandaise des Forces Démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) à deux milices congolaises: l’Union des patriotes pour la défense des innocents (UPDI), à dominante nande, et le Nduma defence of Congo (NDC) de Guidon, majoritairement nyanga.
Mais le porte-parole des FDLR, La Forge fils Bazeye, a nié l’implication de son groupe: «Dans ces endroits où il y a eu les affrontements, il n’y a aucun FDLR».
Le Cercle international pour la défense des droits de l’Homme, la paix et l’environnement (Ciddhope) souligne aussi que cette rébellion n’est plus présente dans la région. En revanche, il explique qu’une faction dissidente y reste active: le Ralliement pour l’unité et la démocratie (RUD), du « général » Jean-Damascène Ndibabaje (alias Musare). La Forge fils Bazeye assure que «depuis 2005, c’est une organisation à part» des FDLR, mais un rapport d’experts de l’ONU basé sur 2014 dément cette version. Il indique que le RUD et les FDLR ont combattu le NDC «à plusieurs reprises en mai-juin et en septembre-octobre 2014». Cinq anciens combattants du RUD interrogés évoquent en outre de «bonnes relations» entre ces deux groupes qui, selon un ex-officier du RUD et un employé de la Mission de l’ONU (Monusco), ont même signé un «pacte de non agression».
Le RUD compterait quelque 650 hommes. Qui le ravitaille? «Il échangerait du chanvre contre des armes avec des militaires et des armes contre des minerais avec des Casques bleus », rapporte Delly Mbambu, secrétaire exécutif du Ciddhope. Les experts de l’ONU, eux, pointent du doigt des soldats congolais, en précisant que certains fournissent entre autres les FDLR.[13]
c. Les dessous de la violence
Le 9 février, le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku, s’est rendu à Miriki, dans le Sud de Lubero, pour y rencontrer les communautés Hutu et Nande. À l’issue de ces consultations, il a accusé les rebelles rwandais des FDLR d’être à la base des violences observées ces derniers temps entre ces deux communautés. Selon lui, les rebelles rwandais qui se sont installés dans le Sud du territoire de Lubero ont une administration, manipulent ces deux communautés et tentent pour l’instant d’y changer le pouvoir coutumier. A Lubero, le pouvoir coutumier est tenu par les Nande. Les FDLR veulent changer d’autorité coutumière et y placer des chefs de leur obédience, a déploré le gouverneur. Pour le gouverneur du Nord-Kivu, la restauration de l’autorité de l’Etat et la neutralisation de tous les groupes armés actifs dans la région s’impose pour mettre fin à cette situation: «La grande disposition que nous venons de prendre ici avec l’armée est de relancer très rapidement les opérations contre les FDLR, mais également contre les Maï-Maï. Parce que, les populations de part et d’autres ont tendance à chercher protections les unes chez les FDLR et les autres chez les Maï-Maï». Il a ajouté qu’il faudrait «coupler ce travail avec une enquête diligentée par les magistrats militaires, pour que les tireurs des ficelles, qui sont localisés même en dehors de cette région, soient identifiés et éventuellement mis aux arrêts, pour qu’ils cessent d’instrumentaliser les populations qui sont pourtant disposées à vivre en paix».[14]
Le 11 février, la société civile de Kanyabayonga a affirmé que la population ne veut plus de la présence des ex-combattants FDLR cantonnés dans le camp de transit de cette localité dans le cadre du processus DD3R (Démobilisation, Désarmement, réinsertion, réintégration et rapatriement) depuis un an. Les représentants de la société civile exigent le démantèlement de ce camp et le transfert de ces ex-combattants dans un autre site. Selon eux, ce camp ne répond plus à son but initial, celui de transit. Et la présence d’ex-combattants FDLR crée un climat de psychose dans le chef des habitants. Depuis le massacre de dix-huit personnes en janvier dernier à Miriki par les FDLR, certains habitants des quartiers riverains de ce camp à Kanyabayonga ne passent plus la nuit dans leurs maisons, craignant d’être attaquées par ces ex-militaires démobilisés, a indiqué Joseph Malikidogo Mutsuva, porte-parole de la société civile de Kanyabayonga. Selon des sources proches de la section DD3R de la Monusco, des discussions sont déjà en cours entre le gouvernement et la Monusco, pour apporter une solution satisfaisante à cette question.[15]
Le 22 février, dans un mémorandum adressé au secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, le caucus des députés du Nord-Kivu, dénonce un génocide des Nande par les Hutu congolais militairement soutenus par les Hutu rwandais des FDLR. En outre, les députés du Nord-Kivu font part à Ban Ki-moon de leurs préoccupations sur l’expropriation illégale des terres des Nande dans tout le sud-Lubero par les Hutu rwandais des FDLR qui les ont arbitrairement attribuées à des Hutu congolais de la région. Selon ces députés, ce sont les Hutu rwandais des FDLR qui sont responsables de la crise entre les deux communautés hutu et nande. Sur de vastes territoires qu’ils administrent dans le sud-Lubero, les Hutu rwandais des FDLR ont accordé plusieurs privilèges aux Hutu congolais qu’ils traitent en frères. On apprend de la Société civile de Lubero que dans le sud-Lubero, les FDLR ont révoqué les chefs coutumiers Nande et les ont remplacés de force par des Hutu congolais. Dès lors la haine vivace entre les deux communautés devient inévitable dans tout le Nord-Kivu. La solution, c’est de neutraliser les FDLR dans le sud-Lubero, même si, au regard de la végétation locale, cela est plus facile à dire qu’à faire.[16]
3. LES FORCES DÉMOCRATIQUES ALLIÉES (ADF)
Le 13 janvier, vers 13 heures (locales), des présumés ADF ont attaqué simultanément une position des FARDC et une autre des casques bleus de la Monusco à Opira, un village situé à environ 50 kilomètres au nord-est de la ville de Beni (Nord-Kivu). Selon les sources militaires, ces assaillants avaient pour objectif de se ravitailler en vivres et munitions, sans y parvenir, car ils ont été repoussés par les FARDC et la Monusco après une quarantaine des minutes de violents affrontements. Selon le porte-parole des opérations Sokola 1, lieutenant Mak Hazukay, deux assaillants ont été tués et sept militaires ont été grièvement blessés au cours de l’attaque. Quatre ont succombé à leurs blessures dans la matinée du jour suivant.[17]
Le 20 janvier, au terme d’un séminaire de quatre jours organisé par l’ONG des droits de l’homme CEPADHO, plusieurs notables du territoire de Beni ont confirmé l’existence d’une collaboration entre les rebelles ougandais des ADF et «certains fils et filles» de Beni pour planifier des attaques dans la région. «Les participants à ce séminaire, dont les notables de Beni-Mbau et ceux du secteur Ruwenzori, ont affirmé avoir identifié des collaborateurs et complices locaux des ADF à Beni ainsi que certains réseaux financiers de la région qui alimentent ces jeunes», a indiqué Omar Kavota, président du CEPADHO. Ils ont promis de travailler dorénavant en groupe, pour débusquer ces complices internes. Les ADF se sont illustrés ces deux dernières années par des attaques meurtrières contre la population civile à Béni dans la province du Nord-Kivu.[18]
Le 12 février, entre 17h00 et 20h00, les ADF ont attaqué les villages de Lesse et de May-Safi, à 7 km à Est d’Eringeti, dans le Secteur de Beni-Mbau. Les ADF ont aussi attaqué simultanément les positions des FARDC dans ces deux villages. Pendant qu’une partie entre eux attaquait les FARDC, une autre partie se livrait à piller des vivres (surtout des poules et des chèvres), à kidnapper des personnes, à massacre d’autres, à incendier des maisons. Le bilan provisoire de ces attaques fait état de 6 civils tués, 14 kidnappés et 29 habitations incendiées. les civils kidnappés ont été utilisés comme porteurs des biens pillés par les assaillants qui auraient pris la direction du Parc National de Virunga. Suite à cette situation, les habitants ont quitté les villages de Lesse et de May-Safi, en direction d’Eringeti ou de Tsabi (en Ituri voisin).[19]
Le 14 février, les ADF ont attaqué le village de Kambi ya Chui (à environs 18 km à Est d’Eringeti), dans le Secteur de Beni-Mbau, à la limite avec la Province de l’Ituri. Selon un bilan provisoire fourni par le Cepadho, entre 16 et 21 personnes auraient été massacrées au cours de cette attaque.[20]
[1] Cf Agence Fides – Bujumbura, 04.02.’16 ; Trésor Kibangula – Jeune Afrique, 06.02.’16; RFI, 05.02.’16
[2] Cf Trésor Kibangula – Jeune Afrique, 06.02.’16 ; RFI, 05 et 06.02.’16
[3] Cf Déclaration du Cepadho, 07.02.’16
[4] Cf Radio Okapi, 27.01.’16
[5] Cf CEPADHO – Bulletin d’Information du 27 Janvier 2016
[6] Cf CEPADHO – Bulletin d’Information du 1er Février 2016
[7] Cf CEPADHO – Bulletin d’Information du 2 Février 2016
[8] Cf CEPADHO – Bulletin d’Information du 4 Février 2016
[9] Cf CEPADHO – Bulletin d’Information du 5 Février 2016
[10] Cf CEPADHO – Bulletin d’Information du 10 Février 2016
[11] Cf Radio Okapi, 18.02.’16
[12] Cf Radio Okapi, 09.02.’16
[13] Cf Habibou Bangré – Jeune Afrique, 10.02.’16
[14] Cf Radio Okapi, 10.02.’16
[15] Cf Radio Okapi, 11.02.’16
[16] Cf Kandolo M. – Forum des As – Kinshasa, 23.02.’16
[17] Cf Radio Okapi, 13 et 14.01.’16
[18] Cf Radio Okapi, 22.01.’16
[19] Cf CEPADHO – Bulletin d’Information du 13 Février 2016
[20] Cf CEPADHO – Bulletin d’Information du 15 Février 2016