SOMMAIRE:
1. VERS LA FIN DES CONCERTATIONS NATIONALES
2. LA CLÔTURE DES CONCERTATIONS
3. LE DISCOURS DU PRÉSIDENT DEVANT LE PARLEMENT
4. APRÈS LE CONCERTATIONS
1. VERS LA FIN DES CONCERTATIONS NATIONALES
Le 29 septembre, les groupes thématiques sur « Gouvernance, Démocratique et Réformes constitutionnelles » et « Economie, secteur productif et finances publiques » ont déposé leurs conclusions au comité de présidence des concertations nationales. Ceux ayant trait au « Désarmement, démobilisation, intégration sociale ou rapatriement de groupes armés », « Conflit communautaire, paix et réconciliation nationale », « Décentralisation et renforcement de l’autorité de l’Etat » avaient déposé les leurs au courant de la semaine.[1]
Les participants aux concertations nationales sont d’accord sur la nécessité d’une gestion consensuelle du pouvoir mais peinent à en définir les modalités en raison de profondes dissensions.
Certains veulent le partage du pouvoir, d’autres estiment qu’il faut seulement ouvrir une brèche.
Un délégué de la société civile, Robert Kabakela, a déclaré que l’on a constaté que la démocratie de la majorité a montré ses limites. Donc on a dit qu’il fallait adopter une démocratie consensuelle (…) pour éviter les frustrations qui nous ont menés dans la situation que nous connaissons, a-t-il ajouté. Interrogé sur le concept de démocratie consensuelle, il a expliqué qu’il s’agissait d’un modèle où le camp qui gagne des élections (…) doit tenir compte des autres sensibilités, comme l’opposition, la société civile…. Ces dernières doivent être associées à la gestion de la chose publique car c’est leur pays aussi, a-t-il souligné.[2]
Le 1er octobre, un membre du présidium a confirmé que les travaux au sein des états généraux des Concertations nationales sont bel et bien finis. En attendant la tenue de la plénière de validation et d’adoption du rapport final de ces travaux, le présidium s’attelle à synthétiser et à faire le toilettage de toutes les recommandations.
Une de principales recommandations du premier groupe thématique gouvernance, démocratie et réforme institutionnelle porte sur la mise en place d’un gouvernement de large ouverture.
Selon un délégué de la majorité, «il ne sera pas question de changer l’architecture institutionnelle établie mais de l’ouvrir aux autres forces politiques». Bref, assurer une gestion consensuelle en RDC.
Dans le deuxième groupe ayant trait à l’économie, les participants ont recommandé de mettre fin au paradoxe entre les performances économiques, dont se vante le gouvernement Matata, et la misère dans laquelle vit la population congolaise.
Ne plus gratifier les acteurs des groupes armés et ne jamais amnistier les auteurs des crimes, telles sont les recommandations les plus en vue du troisième groupe thématique désarmement. L’idéal est de combattre les groupes armés et mettre fin à toutes leurs velléités en renforçant l’autorité de l’Etat et en mettant en place une armée forte.
En ce qui concerne le quatrième groupe thématique conflit communautaire, les recommandations ont abondé dans le sens du renforcement de l’administration et de l’autorité coutumière. Les participants ont aussi recommandé d’éviter les injustices sociales pour permettre une cohabitation pacifique entre les peuples.
Enfin, le découpage immédiat des provinces et l’organisation dès 2014 des élections pour le renouvellement du Sénat et des assemblées provinciales ont constitué l’essentiel des recommandations du cinquième groupe consacré à la décentralisation.
Autres sujets longuement débattus dans ce forum: la libération des prisonniers politiques et la réouverture de plusieurs médias fermés par les autorités. Les délégués ont écarté tout projet de réforme de la Constitution et en particulier la révision de l’article 220, qui limite à deux le nombre de mandats du chef de l’Etat. Mais l’opposition est restée très prudente. Et pour cause: toutes ces propositions ne sont que des recommandations et n’ont aucun caractère contraignant. Toutes ces recommandations ne sont pas nécessairement reprises sur le rapport officiel. Mais, «elles résultent des négociations politiques », ont indiqué certains délégués aux concertations nationales, sans autres détails.
Une fois validées par la plénière, ces recommandations devraient être transmises au chef de l’Etat, qui devrait alors en rendre compte à la nation devant l’Assemblée nationale et le Séant réunis en congrès. Selon l’ordonnance instituant ces assises, le suivi de l’application de ces conclusions est confié au président de la République, aux présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale et au chef du gouvernement.[3]
Gouvernement d’union nationale, d’ouverture ou de large ouverture?.
Un gouvernement d’union nationale induit le changement obligatoire de Premier ministre, le partage des postes ministériels entre le Pouvoir et l’Opposition et de manière expresse le choix d’un Premier ministre issu de l’Opposition. Cette formule s’est toujours révélée favorable à l’Opposition.
A l’opposé, un gouvernement de large ouverture signifie le maintien du chef du gouvernement ou à tout le moins le maintien de la primature au compte de la Majorité. Quitte à intégrer un nombre assez représentatif d’opposants au sein de cette équipe gouvernementale.
Dans le premier cas de figure, la composition gouvernementale ne reviendrait pas à l’initiative du Chef de l’Etat seul. Alors que dans le second cas, il possède toute la latitude de décider qui il veut intégrer au gouvernement ou pas. Cette deuxième formule n’est pas du tout intéressante pour les opposants. Elle les met en position de faiblesse et ne fait pas d’eux des partenaires capables d’imposer leur vision.[4]
Le 3 et 4 octobre, les recommandations des groupes thématiques ont été validées à l’assemblée plénière. Les conclusions des groupes thématiques présentées sont diversement appréciées dans la classe politique. Pour Olivier Kamitatu, délégué de la majorité, ces recommandations sont le fruit d’un travail de qualité destiné à remettre le pays sur les rails. Mais le député de l’opposition, Jean-Lucien Busa, estime que les travaux des participants n’ont rien apporté de nouveau à ce que l’on savait déjà sur la situation du pays.
Lors de la présentation de leurs conclusions, les membres du groupe thématique désarmement ont notamment recommandé l’accélération du processus de restructuration des Forces armées de la RDC (FARDC), de la police et des services de sécurité.
Les délégués du groupe gouvernance, démocratie et reformes institutionnelles ont demandé au chef de l’Etat d’agir en faveur des prisonniers politiques. Ils ont également plaidé pour une ouverture politique.
Les membres du groupe thématique Economie ont recommandé la mise en œuvre, par le gouvernement, d’une politique volontariste axée d’une part sur une agro-industrie, et d’autre part sur le développement. Selon les membres de ce groupe, la politique agro-industrie aura pour mission de produire à partir de la base, afin de satisfaire les besoins de la nation. Celle axée sur le développement aura pour socle la justice sociale, la reconstruction des infrastructures de base et l’émergence de la classe moyenne.
Les délégués de ce groupe recommandent aussi que l’économie congolaise ne soit plus toujours tournée vers l’extérieur, c’est-à-dire ne plus dépendre en grande partie de l’étranger.
Ils ont également mis l’accélération sur la mise en place du conseil économique et social et le renforcement de la transparence dans la gestion publique et dans l’attribution des marchés.
Un accent particulier a par ailleurs été mis sur l’amélioration du traitement des agents et fonctionnaires de l’Etat, la facilitation de l’accès au crédit et à la micro-finance.[5]
Dans son rapport, le groupe thématique chargé de la Bonne gouvernance, Démocratie et Réforme institutionnelle a suggéré la levée des mesures de restriction des libertés imposées au président national de l’UDPS, Etienne Tshisekedi, et invité le gouvernement à assurer le suivi du dossier judicaire de Jean-Pierre Bemba, détenu depuis 2008 au centre pénitencier de la CPI (Cour Pénale Internationale ), à La Haye, aux Pays-Bas. Le même texte préconise, dans le cadre de la décrispation de la vie politique, la grâce présidentielle au bénéfice notamment de Fernando Kutino, Diomi Ndongala, Palata, Mohindo, Firmin Yangambi, Kikunda et Jacques Chalupa.
La libération des personnes détenues illégalement et irrégulièrement sans procès et depuis des années dans les prisons de Ndolo et amigos de l’ANR et de l’ex-DEMIAP a été vivement recommandée.
Ce groupe thématique demande aussi à l’exécutif national de procéder à la réouverture des chaînes fermées, notamment RLTV et Canal FUTUR, tout en proposant le renforcement de l’indépendance du CSAC et l’adoption au Parlement du projet de la nouvelle Loi -cadre sur la liberté de la presse devant amender et rénover la loi du 22 juin 1996.
Mettre en œuvre l’aide publique à la presse par l’insertion de cette rubrique dans le budget annuel ordinaire de l’Etat, amorcer des enquêtes sérieuses sur les cas d’assassinats des journalistes, et procéder à libération inconditionnelle des journalistes détenus illégalement et la dépénalisation des délits de presse figurent au nombre des recommandations présentées à la plénière.
S’agissant du gouvernement d’union nationale, les rapports de tous les Etats généraux sont restés ambigus. Au niveau de la Bonne gouvernance, Démocratie et Réforme institutionnelle, on a parlé d’un gouvernement qui devrait être vecteur de la cohésion nationale. Aux Etats généraux consacrés aux conflits communautaires, on a recommandé une architecture gouvernementale qui reflète les préoccupations, les défis et les enjeux relatifs à la réconciliation nationale et à la cohésion nationale.
Dans les Etats généraux sur la Décentralisation et renforcement de l’Autorité de l’Etat, on a recommandé un compromis politique pour les institutions hors mandat.
Quant aux Etats généraux réservés à la «Démobilisation et rapatriement des groupes armés», ils ont exigé l’exfiltration des éléments étrangers des services de sécurité (armée, police et renseignement).[6]
2. LA CLÔTURE DES CONCERTATIONS
Le 5 octobre, lors de l’Assemblée plénière clôturant les concertations, le coordonnateur du secrétariat technique, Bernard Mena, a procédé à la lecture du rapport final des travaux, avant sa remise officielle au chef de l’Etat par les deux présidents de deux chambres du parlement et membres du présidium. Bernard Mena a indiqué que les délégués aux concertations nationales ont réaffirmé l’engagement de toutes les parties à «consolider la cohésion nationale et à sauvegarder le pacte républicain, notamment par le strict respect de la constitution, particulièrement dans ses dispositions voulues intangibles par le souverain primaire et relatives au respect de la forme républicaine de l’Etat, du principe du suffrage universel, de la forme représentative du gouvernement, du nombre et de la durée du mandat du Président de la République». Le rapport contient plusieurs recommandations faites au président de la République, parmi lesquelles:
le recensement et l’identification des citoyens avant les prochaines élections;
le respect strict de la constitution;
l’affectation des militaires hors de leurs provinces d’origine;
la lutte contre l’enrichissement illicite des membres du gouvernement;
l’éradication des groupes armés nationaux comme étrangers;
la promotion de la culture de la paix et de la bonne gouvernance;
la libération des prisonniers politiques;
le suivi du dossier du sénateur et ancien vice-président Jean-Pierre Bemba détenu à la CPI;
la réouverture des medias fermés.
Dans son discours de clôture des concertations nationales, le président Joseph Kabila s’est engagé à présenter le rapport de ces travaux aux membres du Parlement réunis en congrès, dans le plus bref délai. Il annoncera aussi, à cette occasion, des mesures importantes prises en réponse aux recommandations contenues dans le rapport final des concertations. Dans son adresse, Joseph Kabila ainsi résumé son message aux participants: «D’une part, vous tenez au respect du cadre institutionnel qui régit notre pays. D’autre part, face aux enjeux de l’heure, vous estimez qu’il ne faut pas sacrifier les impératifs de la pacification et du développement accéléré du pays sur l’autel d’une orthodoxie démocratique qui voudrait que la majorité tienne la minorité éloignée de la gestion de la chose publique … Soyez rassurés que je vous ai entendus et que je vous ai compris». [7]
Le 5 octobre, des partis politiques, des groupes parlementaires et des députes nationaux de l’opposition qui n’ont pas participé aux concertations nationales ont publié une déclaration selon laquelle
1. Les concertations nationales n’ont marqué aucune avancée réelle en rapport avec les défis politiques, économiques, sociaux et les attentes de l’ensemble de la population Congolaise.
2. Les Concertations nationales auront été l’occasion donnée au Président KABILA d’identifier et de constituer sa nouvelle majorité présidentielle. De ce fait, aucune analyse approfondie sur les causes profondes de la guerre à l’Est du pays incluant les complicités internes n’a été faite. De même, les Concertations n’ont pas permis de mettre en cohérence l’appui de la communauté internationale, les discussions de Kampala et une approche interne crédible pour une sortie définitive de crise sécuritaire à l’Est du pays.
3. La question de la légitimité du pouvoir a été superbement escamotée par la nouvelle majorité présidentielle qui a manqué le courage politique et l’occasion de rencontrer le Président Etienne Tshisekedi à cet effet et exiger des élections crédibles et rapides des députés provinciaux en vue d’arrêter la prise en otage du Sénat, des Assemblées provinciales et Gouvernements provinciaux par des autorités illégitimes n’agissant depuis 2012 qu’en leurs propres noms sans devoir de recevabilité.
4. Quant au processus électoral, les recommandations des concertations nationales ont laissé libre cour à des prolongations des délais par l’absence d’un agenda précis et d’un chronogramme clair qui devraient traduire la volonté de mettre fin à l’incertitude politique et à la crise de légitimité désormais renforcée.
5. Au plan social, les Concertateurs sont restés muets et incapables de proposer des réponses réelles aux préoccupations des Congolais dans le domaine de l’emploi, de la santé publique, de l’enseignement, du niveau minimum des salaires, du pouvoir d’achat ainsi que de la pauvreté qui touche 71% de la population.
De ce qui procède, les Partis politiques, Groupes parlementaires et Députés nationaux membres de l’opposition signataires de la déclaration
1. Rejettent la demande faite par les concertateurs à la CENI de décaler les élections des députés provinciaux dans le seul but de prolonger les mandats des Gouverneures des provinces, des sénateurs, et de faire bénéficier au Président Kabila un nouveau mandat.
2. Exigent que soit résolue, par le biais des élections provinciales, sénatoriales et des Gouverneurs à organiser en urgence, la crise de légitimité du pouvoir.
3. Constatent l’absence de cohésion nationale, étant donné le non règlement politique du contentieux électoral entre le Président Tshisekedi et la nouvelle majorité présidentielle issue des concertations nationales.
4. Exigent du président Kabila et sa nouvelle majorité de mettre définitivement un terme aux souffrances des Congolais victimes d’une guerre dont les complices internes tardent à être démasqués.
5. Mettent en garde la nouvelle majorité contre toute tentative de coup d’Etat institutionnelle en vue de remettre en question les acquis Démocratique chèrement obtenus par le peuple Congolais et parfois aux pris du sacrifice suprême.
Parmi les signataires: Le Groupe Parlementaire UDPS et Alliés, accompagné par d’autres Députés nationaux notamment: Jean Lucien BUSA, du Courant Démocratique Rénovateur, Franck DIONGO du MLP, Jacques MASUMBU du RECO et d’autres Députés Nationaux du froupe parlementaire UNC et Alliés.[8]
Le 8 octobre, le chef de la maison civile du Président Joseph Kabila, Théodore Mugalu, a rendu visite à l’opposant Etienne Tshisekedi à Kinshasa. Rien n’a filtré de leur entretien qui s’est déroulé pendant une demi-heure à huis clos.[9]
3. LE DISCOURS DU PRÉSIDENT DEVANT LE PARLEMENT
Le 23 octobre, le président de la République, Joseph Kabila, s’est présenté devant le Parlement réuni en Congrès pour annoncer des importantes mesures découlant des recommandations formulées par les délégués aux concertations nationales. Le Président a rappelé que, «quelque pertinente que soit une recommandation, sa capacité contributive à la transformation de la société est fonction de sa mise œuvre. Le défi qui, désormais, se pose à la collectivité nationale, est donc celui de la matérialisation de ce que les Délégués ont, ensemble, proposé au terme de leurs travaux… C’est donc à un changement profond que nous sommes individuellement et collectivement appelés. Changement de mentalités, de méthodes et de comportement… Pour mettre fin aux conflits sous toutes les formes et poursuivre la reconstruction du pays, il nous faut donc plus d’éthique et de sens du bien public; il nous faut plus de participation et de consensus; il nous faut plus de solidarité et plus de cohésion nationale».
Le Chef de l’État a poursuivi en disant que, «vu le nombre et la diversité des recommandations, il y a lieu de planifier leur mise en œuvre à court, moyen et long terme, aux niveaux tant national, provincial que local. A cet effet, l’on décidé la mise sur pied, pour une durée initiale d’un an, renouvelable autant que de besoin, d’un Comité national de Suivi des recommandations des Concertations nationales. Il s’agit d’une équipe restreinte, mais représentative, aussi bien des cinq thématiques examinées au cours des Concertations nationales, que de la diversité des participants à ce forum historique. Ce Comité sera placé sous la même co-présidence que les Concertations nationales et, chaque année, il organisera un forum sur la cohésion nationale».
Selon le Président, «la violence persistante, du fait des groupes armés agissant comme bras séculiers de certaines puissances étrangères, est à la base d’un drame humanitaire sans nom dans les Territoires de Rutshuru et Nyiragongo au Nord Kivu, ainsi qu’en Ituri, dans la Province Orientale.
Il est évident que le soutien extérieur, dont ces groupes armés bénéficient, en violation de la loi internationale, procède d’une stratégie de déstabilisation et de fragilisation des institutions de la République, afin de priver notre pays d’une partie de ses terres et de ses ressources naturelles».
À propos des pourparlers de Kampala, entre le gouvernement et le Mouvement du 23 mars (M23), il a fait remarquer que «ils tirent en longueur, sans perspective immédiate de conclusion, et ce malgré la bonne foi du Gouvernement qui ne peut toutefois pas transiger sur les conditions de l’amnistie et l’inéligibilité à la réintégration dans les FARDC des récidivistes impénitents. Le Gouvernement n’a cessé et ne cessera d’accorder une chance au dialogue, comme voie de résolution de cette crise. Il ne pourra cependant exposer plus longtemps la vie des compatriotes du Nord Kivu aux bombardements aveugles et sévices de tous genres».
À propos de la problématique des groupes armés nationaux et étrangers encore opérationnels sur le territoire congolais, il a affirmé que «ces groupes, quels qu’ils soient, n’ont d’autre choix que de déposer les armes et se rendre, ou d’y être contraint par la force. Et à cette fin, nous veillerons à la professionnalisation des FARDC, étant la défense du territoire national et la sécurité des biens et des personnes des prérogatives régaliennes de l’Etat». Pour cela, «la réforme du secteur de sécurité demeure la priorité des priorités. Recrutement de qualité, discipline rigoureuse, formation et équipement conformes aux standards internationaux, organisation interne efficiente et compatible avec le caractère républicain de l’armée, affectation des officiers et hommes de troupes en fonction des besoins opérationnels et dans le strict respect du principe de rotation sur l’ensemble du territoire national en sont les principes directeurs. Le Gouvernement est appelé à allouer un budget conséquent à cette réforme».
Pour renforcer davantage la discipline au sein des FARDC et de la Police, «l’Auditeur général est appelé à accentuer les enquêtes à charge des Officiers supérieurs, subalternes, ainsi que des hommes de troupe, sur qui pèsent des accusations liées au pillage des ressources naturelles, de détournement de la solde des militaires, des munitions et du matériel destiné aux forces armées. L’Auditeur Général doit tout autant, et sans complaisance aucune, engager des poursuites contre toutes les personnes présumées auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, particulièrement les violences sexuelles et l’enrôlement d’enfants et leur utilisation à des fins militaires». Afin de s’en assurer personnellement, le Président va très prochainement, nommer «un Représentant personnel du Chef de l’Etat chargé de promouvoir la lutte contre les violences sexuelles et le recrutement des enfants».
Dans le cadre du programme STAREC, élargi sur l’ensemble du territoire national, il y a lieu de «procéder au rapatriement des compatriotes réfugiés dans les pays voisins et au retour, au lieu de leur résidence habituelle, des personnes déplacées … et d’organiser le retour chez eux des Mbororo et des autres groupes, illégalement présents sur le territoire national».
En matière de paix et de réconciliation nationale, le Chef de l’État a annoncé d’avoir signé ce matin «une ordonnance portant mesures de grâce». Il a, également, «demandé au gouvernement, une fois terminée la libération conditionnelle des prisonniers civils, de procéder, avec diligence, à celle des prisonniers militaires, et de déposer, devant les bureaux des deux chambres législatives, le projet de loi portant amnistie».
À propos de la réforme de l’appareil judiciaire, il a rappelé que, «depuis quelques décennies, le peuple congolais est victime de la perpétration de nombreux crimes internationaux par les insurgés. Il mérite que justice lui soit rendu. Nonobstant les compétences de la Cour Pénale Internationale, il est judicieux d’instituer, au sein des juridictions nationales, des chambres spécialisées dans la répression desdits crimes».
À propos de la gouvernance politique et institutionnelle, Joseph Kabila a prôné «le respect, par tous, de l’esprit et de la lettre de la Constitution de la République dans son ensemble, telle qu’adoptée par référendum populaire en 2005». S’agissant des élections, il a «recommande à la CENI d’envisager, dès ce jour, la présentation au Parlement, dans le meilleur délai, du calendrier électoral et de poursuivre le cycle électoral en vue de procéder avec diligence, à l’organisation des élections locales, municipales, provinciales et sénatoriales». Il a, par ailleurs, «invité les deux chambres du Parlement ainsi que le gouvernement à mener une réflexion prospective sur le mode de scrutin proportionnel et sur les modalités pratiques d’organiser éventuellement les élections provinciales au suffrage universel indirect, afin de minimiser le coût des opérations électorales».
À propos de la proposition de faire obligation aux formations politiques de présenter sur chaque liste de candidats, au moins 30 % de femmes, il a invité le législateur à examiner «la possibilité d’ajouter, dans chaque circonscription de trois sièges ou plus, un siège pour lequel la compétition ne serait ouverte qu’aux femmes». Pour crédibiliser davantage les élections à venir, le Président convient avec les délégués aux concertations qui ont recommandé «un recensement général de la population congolaise, cela d’autant plus que le dernier remonte à 1984, soit il y a près de trente ans. Suite à une opération d’identification, ce recensement général permettra aussi la délivrance de nouvelles cartes d’identité aux Congolais».
Quant au Sénat et aux Assemblées provinciales, il a estimé que «il est nécessaire, et cela conformément à la Constitution, de les maintenir jusqu’à l’installation effective du nouveau Sénat et des nouvelles Assemblées provinciales issus des élections qui doivent être organisées dans un délai court et raisonnable».
En ce qui concerne le Gouvernement, il a annoncé que, «dans le cadre d’une politique d’ouverture, un « Gouvernement de cohésion nationale » sera bientôt mis en place. Il comprendra aussi bien des représentants de la Majorité que ceux de l’Opposition et de la société civile et aura pour missions prioritaires le rétablissement de la paix et de l’autorité de l’Etat à travers le pays, la consolidation de la cohésion nationale, la poursuite de la reconstruction, l’appui au processus de décentralisation et à l’organisation des élections et l’amélioration des conditions sociales des populations».
Quant à la problématique de la nationalité, et en attendant qu’un consensus national puisse se dégager sur cette question, il a «demandé au Gouvernement de tout mettre en œuvre pour accorder des facilités consulaires aux compatriotes qui ont acquis une autre nationalité».
En ce qui concerne la décentralisation et le renforcement de l’autorité de l’Etat, il a annoncé «l’installation progressive de nouvelles provinces et le transfert de leurs compétences, charges et ressources, conformément à la Constitution. C’est là aussi une des raisons fondamentales d’organiser en priorité les élections locales».
En matière économique, selon le Président, les défis ci-après, entre autres, méritent d’être mentionnés: «le caractère extraverti de notre économie; l’inadéquation entre l’évolution positive des indicateurs macroéconomiques et le vécu quotidien des Congolais; les difficultés d’accès au crédit;
l’impératif de rationaliser le système fiscal; la lutte contre la corruption, le détournement des deniers publics et le coulage des recettes. Afin de répondre à ces préoccupations, il paraît indispensable d’intégrer des indicateurs susceptibles de mesurer de façon réaliste le niveau de vie des populations, afin d’établir l’adéquation entre la stabilité du cadre macroéconomique et le vécu quotidien des Congolais pour que les sacrifices consentis ne soient pas vains».
Ainsi, il préconise que soient prises, entre autres, les mesures ci-après: «organiser les Etats Généraux des agriculteurs et des paysans; réformer le système fiscal; poursuivre l’évaluation et la certification des ressources minières, forestières, halieutiques et en hydrocarbures; accélérer la mise en place du Conseil Economique et Social; procéder au paiement de la dette intérieure certifiée en vue de la relance des emplois dans les Petites et Moyennes Entreprises; finaliser la loi sur la Caisse Nationale de Péréquation». À ce propos, il a ajouté que «quels que soient les efforts sur le plan du développement, l’économie nationale ne saurait atteindre sa vitesse de croisière dans une ambiance de corruption, de détournement des deniers publics, de coulage des recettes publiques et d’enrichissement illicite. Une lutte continue s’impose dans ce domaine». Pour sa part, il entend procéder à la «nomination d’un Conseiller spécial du Chef de l’Etat en charge de cette question.
Il aura pour mission principale d’assurer un monitoring permanent de l’évolution des patrimoines, ainsi que des cas de malversation, de corruption et d’enrichissement illicite dans le chef des responsables politiques nationaux et provinciaux, des hauts fonctionnaires et cadres de l’Administration publique, des mandataires publics et autres agents publics». À cet effet, il a instruit le Gouvernement de soumettre au Parlement «un projet de loi généralisant l’obligation de déclarer les biens à tous les mandataires publics».
Le Chef de l’État a, enfin, pris l’engagement de veiller à «l’application stricte de toutes les autres recommandations formulées par les délégués aux concertations, notamment en ce qui concerne la diplomatie, les infrastructures de base, l’environnement, l’eau et l’électricité, l’éducation, la santé, la recherche scientifique, la culture, le sport et la jeunesse».[10]
4. APRÈS LE CONCERTATIONS
Le 15 octobre, le chef de l’Etat, Joseph Kabila, a promulgué la loi portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle. Cette loi avait été adoptée par l’Assemblée nationale et par le Sénat fin octobre 2010. La Cour constitutionnelle est chargée du contrôle de la constitutionnalité des lois et des actes ayant force de loi. Elle a également la compétence de juger le contentieux des élections présidentielle et législatives ainsi que le référendum. Prévue par la constitution de 2006, cette Cour n’avait jamais été mise sur pied. Jusque là, c’est la Cour suprême de justice qui faisait office de Cour constitutionnelle. La Cour constitutionnelle est la seule capable de juger le chef de l’Etat et le Premier ministre dans les cas prévus par la constitution. Elle sera composée de neuf membres nommés pour un mandant de 9 ans non renouvelables. Trois de ses membres seront nommés sur l’initiative du chef de l’Etat, trois autres par le congrès (Assemblée nationale et sénat) et les trois derniers par le Conseil supérieur de la magistrature. Le président de la Cour sera élu par ses pairs pour un mandat de 3 ans renouvelables une fois. La loi promulguée crée aussi un parquet général près la Cour constitutionnelle. La promulgation de cette loi est conforme aux prescrits de la constitution de 2006 qui prévoit aussi un ordre de juridictions judiciaires composé de cours et tribunaux civils et militaires placés sous le contrôle de la Cour de cassation et un ordre de juridictions administratives composé du Conseil d’État et des Cours et tribunaux administratifs. Ces deux dernières juridictions n’existent pas encore.[11]
- Le gouvernement congolais a réclamé lundi de la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23), en pleine déroute dans la province du Nord-Kivu (est de la République démocratique du Congo), qu’il mette fin à toute activité militaire et annonce « sans ambiguïtés » la fin de la mutinerie en cours depuis avril 2012.
« Le M23 doit faire une annonce claire, nette et sans ambiguïtés de la fin de la rébellion armée qu’il lancé voici près de vingt mois dans le Nord-Kivu. Ce qui est attendu, ce n’est pas une cessez-le-feu. C’est la fin de toute activité militaire du M23« , a affirmé le porte-parole du gouvernement de Kinshasa, Lambert Mende Omalanga, dans un communiqué reçu à Bruxelles.
La direction du M23 avait annoncé dimanche un cessez-le-feu unilatéral, mais les combats se sont poursuivis lundi, selon la rébellion.
Les Forces armées de la RDC (FARDC) avaient pilonné pendant huit heures environ les positions du M23, situées à environ 80 km au nord de Goma, le chef-lieu du Nord-Kivu, et les combats s’étaient même intensifiés après la publication, en début d’après-midi de l’ordre de cessez-le-feu de la direction de la rébellion.
Le M23 ne contrôle plus que quelques collines à environ 2.000 mètres d’altitude aux confins du Rwanda et de l’Ouganda, deux pays accusés de soutenir la rébellion – ce qu’ils démentent.
- Le gouvernement congolais a réclamé lundi de la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23), en pleine déroute dans la province du Nord-Kivu (est de la République démocratique du Congo), qu’il mette fin à toute activité militaire et annonce « sans ambiguïtés » la fin de la mutinerie en cours depuis avril 2012.
« Le M23 doit faire une annonce claire, nette et sans ambiguïtés de la fin de la rébellion armée qu’il lancé voici près de vingt mois dans le Nord-Kivu. Ce qui est attendu, ce n’est pas une cessez-le-feu. C’est la fin de toute activité militaire du M23« , a affirmé le porte-parole du gouvernement de Kinshasa, Lambert Mende Omalanga, dans un communiqué reçu à Bruxelles.
La direction du M23 avait annoncé dimanche un cessez-le-feu unilatéral, mais les combats se sont poursuivis lundi, selon la rébellion.
Les Forces armées de la RDC (FARDC) avaient pilonné pendant huit heures environ les positions du M23, situées à environ 80 km au nord de Goma, le chef-lieu du Nord-Kivu, et les combats s’étaient même intensifiés après la publication, en début d’après-midi de l’ordre de cessez-le-feu de la direction de la rébellion.
Le M23 ne contrôle plus que quelques collines à environ 2.000 mètres d’altitude aux confins du Rwanda et de l’Ouganda, deux pays accusés de soutenir la rébellion – ce qu’ils démentent.
Le 23 octobre, Joseph Kabila a signé une ordonnance portant mesures de grâce pour des prisonniers. L’ordonnance, publiée dans la soirée sur la télévision nationale, porte sur la commutation de la peine capitale en celle de servitude pénale à perpétuité, la réduction de la perpétuité à vingt ans de prison. Elle ne concerne pas les personnes condamnées pour assassinat, atteinte à la sûreté de l’état et vol à main armée. Dans le même ordre d’idée, les personnes condamnées à une peine de cinq à vingt ans de prison, bénéficieront d’une réduction de cinq ans. Celles condamnées à une peine de trois à cinq ans bénéficieront d’une réduction de trois ans. Les personnes condamnées à trois de prison obtiennent tout simplement une remise de leurs peines restant à subir égales ou inférieures à trois ans. Ces mesures ne sont pas accordées aux personnes condamnées mais en fuite, des personnes condamnées pour tentative et/ou infractions des violences sexuelles, corruption, concussion, détournement des deniers publics, assassinat, atteinte à la sûreté de l’état, vol à main armée, détention illégale et toute autre infraction contre l’atteinte à la sûreté de l’Etat.[12]
Le 24 octobre, dans une lettre adressée aux membres de son gouvernement, le Premier ministre congolais Matata Ponyo leur demande d’expédier les affaires courantes jusqu’à la formation du prochain gouvernement. Le chef du gouvernement précise qu’il s’agit de se conformer aux décisions prises par «la Haute Hiérarchie» lors de son discours devant les deux chambres du parlement réunies en congrès le 23 octobre. Dans sa correspondance qui porte la mention «URGENT», le Premier ministre invite tous les membres du gouvernement à faire preuve de patriotisme «en maintenant le même esprit de travail et finaliser les actions prévues dans leurs lettres de mission respectives». Matata Mponyo annonce également quelques mesures conservatoires. Les membres du gouvernement et les membres de leurs cabinets sont ainsi interdits d’effectuer des missions à l’extérieur du pays, «sauf pour des dossiers spécifiques à examiner au cas par cas». Le Premier ministre interdit aussi la conclusion des nouveaux engagements financiers, des marchés publics et la signature des contrats. Les recrutements, nominations, promotions et mouvements du personnel sont aussi interdits. Il en est de même de cession, transfert et aliénation des actifs de l’Etat. Le chef du gouvernement enjoint également aux membres de son équipe de préparer des dossiers pour la remise et reprise dans les cabinets ministériels.[13]
[1] Cf L’Avenir – Kinshasa, 30.09.’13
[2] Cf AFP – Kinshasa, 30/09/2013 (via mediacongo.net)
[3] Cf Radio Okapi, 01.10.’13 ; RFI, 01.10.’13
[4] Cf Le Palmarès – Kinhasa, 03.10.’13
[5] Cf Radio Okapi, 04.10.’13
[6] Cf Eric Wemba – Le Phare – Kinshasa, 04.10.’13
[7] Cf Radio Okapi, 05.10.’13
[8] Cf Congo News – Kinshasa, 08.10.’13
[9] Cf Radio Okapi, 09.10.’13
[10] Cf Texte intégral: http://www.digitalcongo.net/article/95538
[11] Cf Radio Okapi, 16.10.’13
[12] Cf Radio Okapi, 24.10.’13
[13] Cf Radio Okapi, 26.10.’13