Congo Actualité n. 182

SOMMAIRE

ÉDITORIAL: Des objectifs clairs et précis.

1. LA VISITE DE MARY ROBINSON À LA RÉGION DES GRANDS LACS

2. LE M23 S’AGITE

3. UNE LENTEUR INJUSTIFIÉE FACE À UNE SITUATION DRAMATIQUE

4. LA REPRISE DES HOSTILITÉ ENTRE LE M23 ET LES FARDC

5. LA VISITE DE BAN KI-MOON EN RDCONGO ET AU RWANDA

 

ÉDITORIAL: Des objectifs clairs et précis.

 

1. LA VISITE DE MARY ROBINSON À LA RÉGION DES GRANDS LACS

Le 28 avril, l’envoyée spéciale de l’Onu pour la région des Grands Lacs, Mary Robinson, est arrivée à Kinshasa, où elle a entamé une tournée régionale consacrée à la mise en œuvre de l’accord d’Addis-Abeba sur la paix dans l’est de la RDC. Elle se rendra aussi au Rwanda, en Ouganda, au Burundi et en Afrique du Sud, avant d’achever sa mission au siège de l’Union africaine (UA) à Addis Abeba, en Ethiopie. Pour Mme Robinson, la solution à la crise au Nord-Kivu, dans l’Est de la RDCongo,  n’est pas seulement militaire, mais passe inévitablement par le respect de l’Accord cadre d’Addis-Abeba signé le 24 février dernier par 11 pays membres de la CIRGL et qu’elle a renommé, pour la circonstance, «accord de l’espoir».[1]

Le 30 avril, Mary Robinson est arrivée à Goma où elle a été reçue par le Gouverneur de la province du Nord Kivu, Julien Paluku, qui dans son discours d’accueil a souligné:

«A ce jour, la province a deux principales menaces :

1) Les menaces constituées des forces négatives étrangères, à savoir les FDLR (venus du Rwanda en 1994) et les ADF-NALU (venus de l’Ouganda en 1986). Ces rebelles continuent à semer pillages, viols et assassinats.

2) Les menaces constituées des groupes armés locaux, à savoir le M23 et plus de 15 groupes armés dits Mai-Mai, tous répertoriés parmi les forces négatives dans la province.

Le M23 constitue la plus grande menace parmi les groupes armés locaux. Suite à une guerre interne qui s’est soldée par la capitulation de Bosco Ntaganda, qui se trouve actuellement à la Cour Pénale Internationale, plus de 700 militaires du M23, ainsi qu’un nombre important des civils, ont traversé les frontières congolaises pour se retrouver au Rwanda.  Parmi eux se trouvent Jean Marie Runiga, ancien président du mouvement, le commandant Badege et les Colonels Baudouin Ngaruye et Innocent Kaina, tous inscrits sur la liste des sanctions de l’Onu. Toutes ces personnes se retrouvent au Rwanda en violation de l’engagement des pays de la région signataires de l’Accord-cadre qui stipule que les Etats s’engagent à ne pas héberger ni fournir une protection de quelque nature que ce soit aux personnes accusées des crimes de guerre, de crime d’agression ou aux personnes sous le régime de sanctions des Nations Unies. Sur le terrain, les nouvelles autorités politiques et militaires du M23, à savoir Bertrand Bisimwa et Sultani Makenga, s’activent pour réorganiser leurs unités, en vue d’opposer une résistance aux troupes de la Brigade d’intervention.

Malgré les différentes intimidations proférées par le M23 à l’endroit de la Brigade d’intervention, on note au sein de ce mouvement, plusieurs défections des hommes de troupe. Selon les statistiques, 519 militaires du M23 se sont rendus dans les différentes bases de la Monusco car, disent-ils, fatigués de la guerre et ne trouvant plus d’avenir dans les groupes armés. Parmi ces 519 éléments du M23, 116 ont déclaré être des rwandais et le département DDR de la Monusco les a déjà rapatriés.

Désormais la Communauté Internationale a compris les causes de la crise à l’Est et connaît les acteurs internes et externes et partant, les solutions à envisager.

L’un des acteurs externes, le Rwanda, a été clairement identifié dans les différents rapports des experts des Nations Unies et à ce sujet, il n’y a plus de doute que le Rwanda vit économiquement de la déstabilisation de l’Est par ses réseaux mafieux d’exploitation illicite des minerais.

C’est pourquoi, le Rwanda a toujours milité pour qu’il y ait au Nord-Kivu des militaires qui lui sont favorables, non pas parce qu’ils doivent traquer les FDLR, mais pour favoriser la fraude minière.

Enfin, quelques propositions à quatre paliers :

– Le 1er palier c’est l’opérationnalisation dans le meilleur délai de la Brigade d’intervention dont le rôle est double: dissuasif et offensif. L’arrivée des troupes à Goma peut constituer en elle seule un élément déclencheur des défections massives des groupes armés disséminés à

travers la Province du Nord-Kivu.

– Le 2ème palier consiste à aider la RDC à mettre en place la force rapide d’intervention. Ici, la Communauté Internationale, à travers des appuis bilatéraux ou multilatéraux, devrait former urgemment des unités spéciales au sein des FARDC capables d’assurer le relai une fois la mission de la Brigade arrive à sa fin. Et en même temps, les Nations Unies devraient appuyer les efforts du gouvernement congolais à former une armée républicaine, bref à réformer le secteur de sécurité (Armée, Police, Justice et services de sécurité).

Le 3ème palier concerne la lutte contre l’impunité dans la région des Grands-Lacs. A ce sujet, nous proposons que le Procureur près de la Cour Pénal International déclenche ses enquêtes sur les massacres, viols, violations des droits de l’homme et autre crimes de guerre, crimes de génocide, … commis par les acteurs déjà identifiés dans les différents rapports des Experts des Nations Unies et de Human RightWatch. Ces enquêtes du Procureur de la CPI, permettront de lancer des nouveaux mandats d’arrêts contre les congolais ou les étrangers qui déstabilisent la Région des Grand-Lacs en général et le Nord Kivu, en particulier.

Le 4ème palier c’est l’appui aux organisations régionales notamment la Communauté Economique des Pays de la Région des Grands-Lacs (CEPGL) qui regroupe le Rwanda, le Burundi et la RDC. Si cette organisation fonctionne normalement et que les intérêts des Etats y sont discutés, l’hypocrisie et le mensonge qu’utilisent certains membres n’auront plus de place, car seuls les intérêts des peuples respectifs seront mis en jeu et les guerres récurrentes peuvent cesser».[2]

Le 1er mai, lors d’un point de presse à Kigali (Rwanda), Mary Robinson a appelé tous les pays signataires de l’accord cadre de Addis Abeba à respecter les dispositions de cet accord, parmi lesquelles l’engagement à ne pas aider ni soutenir des mouvements rebelles dans l’est congolais.

Elle a aussi estimé que la brigade d’intervention de l’Onu pour l’est de la RDCongo n’est pas une fin en soi: « Je vois la brigade d’intervention comme un moyen de renforcer les capacités, mais en aucun cas une solution globale. En effet, la solution globale ne sera pas et ne peut pas être militaire. Elle doit être politique».[3]

Le 2 mai, à Kampala (Ouganda), Mary Robinson a déclaré que «la région devrait se concentrer sur l’application de l’Accord-cadre de Addis Abeba» et que «la coopération politique basée sur cet Accord-cadre devrait demeurer l’axe central des efforts déployés pour résoudre les conflits et réaliser la paix, la sécurité et le développement».[4]

2. LE M23 S’AGITE

Au cours du mois d’avril, les responsables du Mouvement du 23 mars ont établi une petite base à Kiwanja, à côté du camp des déplacés et de l’entrée principale d’une position des casques bleus de la Monusco. Selon plusieurs sources, le but est d’empêcher des éléments du M23, qui voudraient déserter, de se rendre à la Monusco. Les responsables du M23 démentent ces informations. Pour eux, la position du M23 la plus proche est à quelques huit cents mètres de la base des Casques bleus. Des sources locales affirment que les rebelles positionnés à l’entrée de la base de la Monusco ont tiré, dimanche 28 avril, sur deux policiers qui voulaient se rendre avec leurs armes aux Casques bleus. Aucun d’eux n’a été blessé. Ils ont réussi à accéder à l’intérieur du camp de la Mission des Nations unies. D’autres sources ont indiqué que, sur la route Rutshuru-Goma, les rebelles du M23 auraient installé, depuis deux semaines environs, deux autres barrières à Rubare et Munigi, pour rechercher des combattants en fuite. Depuis le début du mois d’avril, quatre-vingt sept rebelles du M23 se sont déjà rendus à la Monusco dans le territoire de Rutshuru. Ils ont été regroupés à la section Désarmement, démobilisation, rapatriement, réintégration et réinstallation (DDRRR) de la mission onusienne à Goma.[5]

Le 27 avril, vers 19h locales, selon les déclarations de Omar Kavota, porte parole de la société civile Nord Kivu, deux camions chargés d’armes et munitions seraient entrés par la frontière de Gasizi, territoire de Nyiragongo, escortés par des militaires Rwandais jusqu’à la position militaire du M23 à Kibati. Selon plusieurs informations concordantes, après son retrait des discussions de Kampala, le M23 projetterait d’attaquer simultanément les villes de Goma, Butembo et Beni.[6]

Trois missiles sol-air auraient été livrés aux rebelles du M23 par la DRF, l’armée rwandaise. Leur localisation a été confirmée par les FARDC (Forces Armées de la RDCongo) dans le territoire de Rutshuru. Le convoi pour leur transport aurait été escorté par trois serveurs (spécialistes), dont deux Rwandais et un Congolais qui venaient d’effectuer une formation au Rwanda.[7]

Le 1er mai, des autorités rwandaises ont invité la presse locale et internationale, ainsi que de nombreux représentants du corps diplomatique, dans le camp d’internement de l’est du Rwanda, où sont confinés les 682 rebelles du M23 de la faction de Jean-Marie Runiga et qui avaient traversé la frontière entre la RDCongo et le Rwanda dans la nuit du 14 au 15 mars dernier, après avoir été mis en déroute par la faction de Sultani Makenga. Selon les autorités, ils ont été accueillis au Rwanda pour des raisons humanitaires, ont été désarmés et ont entrepris des démarches pour être démobilisés. Séraphine Mukantabana, la ministre rwandaise en charge des Réfugiés, a qualifié de «pures inventions» les rumeurs récentes sur le «renvoi» en RDC d’une partie des rebelles du M23. Elle a aussi demandé au Conseil de sécurité des Nations Unies la «levée des sanctions» qu’il avait prises «contre certains membres du M23» installés dans ce camp d’accueil au Rwanda et qui «ont décidé de renoncer à réintégrer le M23». De cette façon, ils pourraient obtenir le statut de réfugiés.[8]

Le 1er mai, le M23 a nommé de nouveaux administrateurs à la tête des territoires de Nyiragongo et Rutchuru. Selon la décision, le territoire de Nyiragongo sera administré par Gaspard Karemera. Il sera secondé par Daniel Manganzini et Janvier Rwagati, respectivement chargés des finances et des questions politiques. A Rutshuru, Pascal Azamukunda Rubumba est désigné administrateur, en remplacement de Benjamin Mbonimpa à la tête de ce territoire, qui est placé au secrétariat exécutif du M23. Le porte-parole de la société civile du Nord-Kivu, Omar Kavota, qualifie ces nominations de provocation. «Nous dénonçons ces nouvelles nominations du M23 qui ne font que renforcer une administration parallèle en province du Nord-Kivu. Par cet acte le M23 témoigne de sa détermination de déstabiliser et de balkaniser cette province», a déclaré Omar Kavota.[9]

Le 2 mai, Bertrand Bisimwa, nouveau président du M23, a exigé un cessez-le-feu avant de reprendre les pourparlers de paix avec le gouvernement à Kampala.[10]

3. UNE LENTEUR INJUSTIFIÉE FACE À UNE SITUATION DRAMATIQUE

Le 6 mai, l’évêque de Goma, Théophile Kaboyi, a rendu publique un rapport sur la situation épouvantable de son diocèse:

«1. C’est de tous les villages que l’on reçoit des cris d’alarme faisant état d’accrochages, d’assassinats, de viols, de pillages, de vols armés… Le grand nombre des milices et des groupes armés sèment la terreur, particulièrement dans les milieux ruraux, à telle enseigne que bien d’activités s’en trouvent sérieusement bloquées.

Il y a des villages où personne peut circuler librement en raison des multiplicités de barrières et de la circulation des jeunes guerriers qui, parfois sous l’effet des stupéfiants, effarouchent tout passant, en exigeant de l’argent et en proférant des menaces de mort. Beaucoup de cultivateurs et surtout les mamans n’osent plus aller dans les champs de peur d’être sauvagement violées.

2. Des écoliers et d’autres jeunes non scolarisés sont condamnés au vagabondage et deviennent par conséquent des victimes faciles d’enrôlement forcé dans les groupes armées ; c’est là qu’on leur « arrache leur enfance » pour leur apprendre à tuer, il y en a aussi qui s’enfoncent dans les carrières minières dont la plupart constituent des « lieux du vice ». Il ne se passe pas une semaine sans que j’apprenne que tel ou tel village a été incendié, le bétail emporté, des morts, des blessés. Les cadavres jonchent souvent les sentiers. Dans la fuite les membres de famille n’ont pas la possibilité d’organiser un minimum des funérailles décentes.

3. Lors d’une visite à Matanda, juste avant de reprendre le chemin de retour sur Goma, un homme tenant un bébé (2 mois) dans ses bras m’aborde, en me suppliant de faire quelque chose pour son enfant qu’il venait de récupérer du dos de sa maman abattue par un inconnu. Avec l’aide des Soeurs Carmélites de la Paroisse, l’enfant a été confié à une jeune maman qui avait déjà son bébé (1 mois) pour l’allaiter et s’en occuper entièrement moyennant l’assistance de l’économat général. Non, il se passe actuellement des choses horriblement inintelligibles.

4. Dans certains coins, c’est le virus du tribalisme (ubaguzi) qui est apparu et qui fait rage. Des milices s’adonnent allégrement à la chasse de tous ceux qui ne sont pas de leur ethnie provoquant ainsi des déplacements massifs de familles entières vers l’inconnu. Aussi longtemps qu’il y aura «LES AUTRES» opposés à «NOUS», l’on peut être certains que la paix est encore loin. Il s’agit de considérer l’autre (peu importe son appartenance tribale) non pas comme une menace mais comme possibilité de découvrir que le «NOUS» par lequel nous nous reconnaissons et qui nous donne une identité est beaucoup plus ample, plus étendu, plus riche que nous ne saurions l’imaginer.

5. L’abominable manie de prendre en otage des personnes pour exiger des rançons est devenue monnaie courante. Les enlèvements enregistrés en territoire de Rutshuru se succèdent en cascade:

– Le mardi 23 avril 2013: Monsieur Roch NZABANDORA, directeur technique affecté à la Centrale Hydroélectrique de Rutshuru.

– Le mardi 30 avril 2013: Monsieur Jean Baptiste KASEREKA, secrétaire à la Paroisse Saint Aloys de Rutshuru.

– Le dimanche 5 mai 2013: Monsieur Gratien BAHATI Conseiller d’enseignement primaire de la Paroisse Saint Aloys de Rutshuru.

6. Toutefois, les difficultés même les plus graves ne doivent pas nous jeter dans le désespoir et dans la résignation».[11]

Le 6 mai, le gouverneur de la province du Nord-Kivu, Julien Paluku, a déclaré que au moins cinq cent dix-neuf rebelles du M23 se sont déjà rendus à l’armée congolaise depuis mai 2012, date de la création de ce mouvement. De sa part, la société civile du Nord Kivu craint pour sa part que ces réintégrations qu’elle qualifie d’«automatiques» ne soient pas une source d’infiltration au sein des Forces armées de la RDC. Selon des officiels, nombre de ces anciens rebelles sont directement réintégrés au sein des FARDC à partir de Bweremana, base actuelle de la 8è région militaire.

Pour le porte-parole de la société civile du Nord-Kivu, Omar Kavota, des préalables devraient être posés avant toute réintégration et il affirme que, «pour permettre qu’il n’y ait pas d’infiltrés au sein de l’armée par ces redditions, il faudrait que le gouvernement organise des centres de transit pour leur identification et formation». De son côté, le porte-parole des FARDC a déclaré que les portes de la structure militaire d’intégration sont déjà fermées aux Nord et Sud-Kivu et il a précisé que «ces ex-combattants sont mis à la disposition de la hiérarchie militaire pour une décision finale».[12]

Le 10 mai, le porte-parole de la Monusco, Madnodje Mounoubai, a affirmé qu’un contingent de militaires tanzaniens est arrivé à Goma, au Nord-Kivu, pour organiser le déploiement de la nouvelle brigade de intervention de la Monusco. «Ce sont des officiers, des éléments d’Etat-major, donc des personnes chargées de la planification qui sont arrivés», a affirmé Madnodje Mounoubai, qui a rappelé que le commandant de cette Brigade, James Mwakibolwa, est déjà sur place avec certains éléments d’Etat-major depuis le 23 avril.[13]

Le 13 mai, le président Joseph Kabila vient de créer le mécanisme national de suivi, pour mettre en œuvre les engagements pris par le gouvernement dans le cadre de l’accord-cadre de l’ONU sur l’Est de la RDC. Ce comité est créé pour une durée d’un an. Le mécanisme est composé de 3 comités: pilotage, exécutif et consultatif. Le comité de pilotage sera présidé par le président de la République, le Premier ministre en est le vice-président. Les membres de ce comité sont le ministre des Affaires étrangères, les ministres de la Défense nationale, de l’Intérieur, de la Justice, du Budget et des Finances et d’un coordonnateur. Le Comité exécutif aura pour tâche d’élaborer un plan de mise en œuvre des engagements souscrits et de veiller à leur mise en œuvre. Le conseil consultatif aura pour tâche d’organiser le dialogue avec les forces vives de la République. Il est constitué de personnalités indépendantes et de représentants de la classe politique et de la société civile.[14]

4. LA REPRISE DES HOSTILITÉ ENTRE LE M23 ET LES FARDC

Le 20 mai, le M23 et les FARDC se sont affrontés à Mutaho (un secteur du groupement de Kibati, dans le territoire de Nyirangongo), à près de 10 Km au Nord de la ville de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu. La Monusco signale que près de mille personnes qui ont fui ces combats se sont réfugiées aux camps de déplacés de Mugunga.

Les FARDC accusent le M23 d’avoir attaqué ses positions à Mutaho. Selon le porte-parole de l’armée, le colonel Hamuli, le M23 a l’intention de passer par cette localité pour atteindre Mugunga et couper toutes les voies de ravitaillement de l’armée. Mugunga, quartier périphérique de Goma, est la principale voie d’entrée de la ville. Le Colonel Hamuli a affirmé que le M23 menaçait, depuis une semaine, d’attaquer à nouveau la ville de Goma, pour entraver le déploiement de la brigade d’intervention de la Monusco chargée de neutraliser tous les groupes armés.

Pour sa part, le président du M23, Bertrand Bisimwa, rejette ces accusations, affirmant que son mouvement voulait déloger les rebelles rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) de Mutaho qu’ils occupaient depuis plusieurs jours. «Quand nos troupes sont allées puiser de l’eau, elles ont trouvé que le puits était déjà assiégé par les FDLR: nous les avons chassés. Les FARDC ont alors commencé à pilonner nos positions», a-t-il déclaré, en accusant Kinshasa d’avoir démontré son intention de «reprendre la guerre, pour précipiter le déploiement de la brigade d’intervention de la Monusco». Après les échanges des tirs, un calme relatif est revenu à Mutaho. Le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku, estime que le M23 a repris les combats pour faire douter la brigade internationale de la Monusco et par crainte de l’arrivée du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, qui est attendu à Kinshasa le mercredi 22 mai. Par ailleurs, la Monusco a exprimé sa préoccupation face à cette reprise des hostilités et a souligné que des solutions diplomatiques et politiques sont envisagées, et que tous les efforts sont déployés pour contenir et mettre fin à ces affrontements.[15]

 

Le 21 mai, les affrontements entre le M23 et les FARDC ont repris dans la matinée à Mutaho. Des sources locales indiquent que les rebelles du M23 ont lancé leur offensive à partir de la localité de Mujoga, située à 4 km de Mutaho. Le colonel Olivier Hamuli assure que la rébellion a reçu un renfort en hommes et en armes venu de Kibati et Kibumba. Le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende, a déclaré que quinze rebelles du M23 ont été tués et vingt et un autres blessés lors des combats. Quatre militaires congolais des FARDC auraient également péri dans ces affrontements. Six autres ont été blessés. Il a aussi signalé que «des armes lourdes et plusieurs caisses de munitions en provenance de l’extérieur ont été récupérées dans deux positions avancées de l’ennemi passées sous le contrôle des forces régulières congolaises». Lambert Mende a, enfin, affirmé que «cette offensive du M23 vise à dissuader, voire empêcher le déploiement de la force spéciale internationale et à perturber l’arrivée du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, à Kinshasa». Selon d’autres sources, l’M23 a repris les hostilités pour obliger le gouvernement congolais à accepter un cessez-le-feu et à reprendre, encore dans une condition de faiblesse, les négociations de Kampala.[16]

Le 21 mai, le vice-président de la société civile du Nord-Kivu, Omar Kavota, a dénoncé la présence des militaires rwandais aux côtés des rebelles du M23. Il a affirmé que la reprise de ces affrontements était «prévisible», expliquant que les rebelles avaient déjà «tout planifié». «C’était prévisible. Nous avons également des informations fiables que l’armée rwandaises est en appui au M23. Nous avons alerté les autorités depuis le week-end dernier sur des manœuvres du M23 visant à attaquer la ville de Goma et défier la Brigade d’intervention de l’Onu», a déclaré Omar Kavota qui a indiqué aussi qu’au début de ces combats, «plus de trois cents personnes de l’armée rwandaise ont franchi la frontière de Gasizi pour se retrouver aux cotés du M23».

Il a ajouté que la société civile du Nord-Kivu avait plusieurs fois alerté les autorités congolaises sur la planification de ces affrontements par le M23. «Nous pensons que les autorités ont traîné les pieds pour prendre des dispositions», a affirmé Omar Kavota qui, par ailleurs, a demandé à la Brigade d’intervention de la Monusco «de se mettre en œuvre», indiquant que «la sécurité des milliers d’habitants de Goma et des périphéries est en danger». Pour sa part, la Monusco n’a ni confirmé, ni infirmé la présence des militaires rwandais aux côtés des rebelles du M23 lors des combats avec les militaires congolais.[17]

Le 21 mai, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon a estimé qu’il fallait « accélérer » le déploiement de la brigade d’intervention de la Monusco. «Vu ce qui se passe, je pense que nous devons accélérer le déploiement pour qu’ils soient pleinement à pied d’oeuvre le plus tôt possible», a déclaré Ban Ki-moon, au cours d’une visite au Mozambique.[18]

Le 22 mai, les activités tournent au ralenti dans la ville de Goma, à cause de l’intensification des combats entre les FARDC et le M23 à Mutaho. Des sources sur place affirment que beaucoup d’écoles maternelles et primaires n’ont pas fonctionné. Les établissements scolaires qui avaient ouvert le matin ont renvoyé les élèves à la maison quelques heures plus tard.

Les mêmes sources indiquent qu’au centre-ville de Goma, les commerces et les banques ont ouvert mais les habitants n’y ont pas afflué. Au niveau des postes douaniers, les agents des services des frontières affirment que l’engouement des populations, qui se rendent au Rwanda ou qui en reviennent, a diminué depuis hier. La psychose est plus manifeste dans les quartiers périphériques du Nord-Est de Goma, notamment à Majengo, Mabanga-Nord, Katoyi, Kasika, Nyabushongo, Ndosho et Mugunga, frontaliers au territoire de Nyiragongo. Des obus sont tombés dans la matinée aux quartiers Ndosho et Mugunga. Des sources hospitalières font état de quatre personnes tuées et dix-sept autres blessées par les obus qui sont tombés dans ces deux quartiers. Selon le porte-parole militaire au Nord Kivu, colonel Olivier Hamuli, tous ces explosifs sont lancés par les rebelles du M23 à partir de leur position de Kibati. Selon des sources sur place, les déplacés du camp Mugunga 3 seraient en train de fuir vers d’autres quartiers, plus au Sud. Les habitants du quartier Ndosho en ferait de même en dehors de quelques personnes qui restent encore terrées dans leurs maisons. Selon le Haut commissariat aux réfugiés de l’ONU, plus de 30 000 personnes ont fui leur camp de déplacés près de Goma. «Le camp de déplacés de Mugunga I, qui compte 55.000 déplacés, s’est vidé à 45% et celui de Mugunga III, où 13.000 personnes sont recensées, s’est vidé à 70% », a déclaré Simplice Kpandji, chargé de communication au bureau régional du HCR à Kinshasa.[19]

Le 22 mai, le M23 s’est déclaré prêt à une cessation immédiate des hostilités avec l’armée, afin de faciliter la visite du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon à Goma. Le chargé de la communication, Amani Kabasha a déclaré, dans la soirée, que le M23 exige une trêve formalisée par un accord de cessez-le-feu dûment signé par les deux parties, réclamant aussi la reprise des négociations de Kampala. Le M23 réagira «vigoureusement» si la trêve n’est pas respectée par l’armée congolaise, menace Amani Kabasha.[20]

5. LA VISITE DE BAN KI-MOON EN RDCONGO ET AU RWANDA

Le 22 mai, le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-Moon, est arrivé à Kinshasa, accompagné du président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, de Mary Robinson, envoyée spéciale des Nations Unies dans les Grands Lacs, et de Hervé Ladsous, chargé des opérations de maintien de la paix à l’ONU. À Kinshasa, il a encouragé le peuple congolais à ne pas renoncer à l’espoir, précisant que sa visite en RDC a pour objectif de lui exprimer la solidarité des Nations Unies et de soutenir la mise en œuvre de l’accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région qui a été signée à Addis-Abeba le 24 février par les onze pays de la Région. Pour ce qui est de la guerre de l’Est de la République, Ban Ki-moon a plaidé pour le respect et l’application de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba dans sa globalité. Il a estimé que cet accord doit être appliqué à l’intérieur et à l’extérieur de la RDC, pour faire régner la paix non seulement en RD Congo, mais dans l’ensemble de la région des Grands Lacs.

À la sortie de son entretien avec le président Kabila, Ban Ki-moon s’est déclaré inquiet de la reprise des hostilités près de Goma et a insisté sur la création de la brigade d’intervention avec un mandat renforcé dans l’Est. C’est une première, a-t-il dit, une première dans les opérations onusiennes.

Au cours d’une conférence de presse, le secrétaire général des Nations Unies s’est dit préoccupé par rapport à la situation sécuritaire tendue au Nord-Kivu. Il a lancé un appel aux deux parties à un cessez-le-feu en vue de résoudre d’une manière pacifique la crise qui secoue la partie Est de la RDC. Il a plaidé pour la reprise des pourparlers de Kampala, pour trouver une solution pacifique et durable à la crise. Ban Ki-moon s’est félicité, ensuite, de la création du Mécanisme national de surveillance qui, selon lui, aide à assurer la mise en œuvre des principales réformes, le dialogue politique et la réconciliation nationale.[21]

De sa part, le président du groupe Banque Mondiale, Jim Yong Kim a annoncé une aide, exempte d’intérêts, d’un milliard de dollars américains destinés à la région des Grands Lacs. Ce fonds va financer les secteurs de l’énergie hydroélectrique, des routes, de l’agriculture, du commerce transfrontalier, de la santé et de l’emploi.

Un communiqué de la Banque mondiale a précisé que le financement de la Banque mondiale comprend environ 100.000.000 USD pour l’agriculture et améliorer les moyens de subsistance en milieu rural pour les populations déplacées à l’intérieur des pays de la région, 340.000.000 USD pour le projet hydroélectrique Rusumo Falls d’une puissance de 80 mégawatts au profit du Burundi, du Rwanda et de la Tanzanie. 150.000.000 USD serviront à la réhabilitation des projets hydroélectriques Ruzizi I et Il et au financement de Ruzizi III qui alimentera en électricité le Rwanda, e Burundi et la RDC. 165.000.000 USD pour construire des routes en RDC dans les deux Kivus et la Province Orientale, ainsi que 180.000.000 USD pour améliorer les infrastructures et la gestion de ressources frontalières entre le Rwanda et la RDC.[22]

Selon le président de la Banque mondiale, «ce financement aidera à relancer le développement économique, créer des emplois et améliorer les conditions de vie des populations qui souffrent depuis bien trop longtemps». Pour sa part, Ban Ki-moon pense que «ces nouveaux investissements permettront de soutenir directement la mise en œuvre de l’accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération signé par le président Kabila aussi». Il a estimé que «la paix et la stabilité ne sont pas simplement une question de sécurité» et qu’il faut «s’attaquer à la pauvreté, qui est une des causes profondes du conflit». C’est dire que l’ONU et la Banque mondiale se sont mises d’accord sur une approche qui conditionne la paix dans les Grands Lacs à la mise en œuvre des projets de développement. Mais, que représente un milliard USD pour un espace où des défis en termes de développement se comptent en termes centaines de milliards USD?

Déjà, dans sa première stratégie pays pour la RDC, la Banque mondiale avait chiffré les besoins en développement de la RDC à environ 5 milliards USD par an. Que l’ONU et la Banque mondiale se félicitent aujourd’hui d’engager à peine un milliard USD dans la région des Grands Lacs, ne peut-il être interprété comme une manière de cracher sur les cinq millions de morts de l’Est de la RDC?

Ce qui est vrai c’est que l’ONU et la Banque mondiale se sont trompées d’analyse. Au lieu de nommer le fauteur des troubles et d’aborder les vrais problèmes, Misters Ban et Jim ont préféré se limiter aux problèmes périphériques qui n’ont aucune influence pour un retour rapide de la paix dans la région. Ils ont raté une belle occasion de lancer un message de confiance au peuple congolais, meurtri par des années de guerre, à cause du Rwanda et de tous les pays occidentaux qui le soutiennent dans l’ombre et tiennent, à tout prix, à poursuivre le pillage systématique des ressources naturelles de la RDC.[23]

Cette visite a une forte dimension économique. En effet, les deux dirigeants arrivent dans la région en faisant le pari qu’un investissement massif dans l’économie engendrerait automatiquement des effets bénéfiques pour la paix. Or, si les investissements dans des projets de développement sont utiles, il n’est pas sûr qu’ils ramènent la paix. Pour être cohérents, Ban Ki-moon et Jim Yong Kim ne doivent pas laisser de côté l’un des principaux facteurs du conflit dans la région des Grands Lacs. En effet, ce conflit a une dimension économique forte. Depuis la fin des années 90, plusieurs belligérants se nourrissent des richesses minières des régions du Kivu pour s’armer et se renforcer. Cette situation perdure d’abord à cause de l’incapacité des États à sanctionner leurs ressortissants et les opérateurs économiques dont la participation à cette économie de guerre est avérée. Cela concerne pas seulement la DCongo, mais le Rwanda et l’Ouganda aussi et d’autres Pays tiers. Cette impunité dans le pillage des ressources naturelles au profit de groupes armés est aussi la conséquence de l’absence ou de l’insuffisance de dispositifs internationaux pouvant empêcher que ces ressources dites du conflit n’accèdent au marché international.

Si Ban Ki-moon et Jim Yong Kim veulent enrayer le cycle de violences armées dans cette région du monde, ils doivent aussi s’engager à promouvoir, au niveau international, des initiatives contraignantes qui imposeraient aux acteurs économiques le «devoir de diligence», une simple démarche pour les obliger à exclure de leurs chaînes d’approvisionnement des minerais dont l’exploitation et le commerce financent la violence. Ce qui finalement les ramènera à contraindre le Rwanda à mettre fin son entreprise de déstabilisation de la région des Grands Lacs.[24]

Le 23 mai, dans la matinée, Ban Ki-Moon est arrivé à Goma, où il a été accueilli à l’aéroport par le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku. Après les affrontements entre le M23 et les FARDC à Mutaho, la situation est calme depuis le matin. Selon Julien Paluku, la visite de Ban Ki-moon traduit la volonté des Nations unies de matérialiser la signature de l’accord-cadre d’Addis-Abeba ainsi que la Résolution 2098 créant la Brigade d’intervention de la Monusco chargée de traquer les groupes armés dans l’Est de la RDC.[25]

Ban Ki-Moon a annoncé que le déploiement de la brigade d’intervention sera effectif «d’ici un à deux mois». «Cette fois-ci, nous allons au-delà du mandat traditionnel des opérations de maintien de la paix. Le mandat est particulier parce qu’il veut imposer la paix lorsque c’est nécessaire», a-t-il déclaré.

M. Ban a visité l’hôpital Heal Africa, qui prend notamment en charge les victimes de violences sexuelles. Selon William Bonane, médecin à Heal Africa, l’hôpital a recensé 6.500 cas de viols en 2012 et 2.500 au premier trimestre 2013. Devant l’hôpital, une petite manifestation de femmes a été organisée. Parmi leurs messages: « Non à Kampala », « Refusons toutes négociations » et « Négociations jusqu’à quand?  » – une référence aux pourparlers de sortie de crise en cours à Kampala.

Selon la directrice associée en RDC de la confédération d’organisations Oxfam, Joanna Trevor, «la brigade d’intervention pourra apporter une certaine sécurité, mais elle seule ne va pas résoudre les causes réelles de la violence en RDC». Selon elle, il faut aussi investir dans des forces de sécurité « fortes et fiables », un pouvoir « au service du peuple » et un système judiciaire obligeant ceux qui violent les droits de l’Homme à en rendre compte.[26]

Les manœuvres du Rwanda pour maintenir le Nord-Kivu sous le feu permanent ont été clairement dénoncées par le Chef de l’Exécutif provincial, Julien Paluku, qui a souligné que c’est à partir des mouvements rebelles créés délibérément par le Rwanda que celui-ci continue à travers eux à piller les richesses congolaises.

Julien Paluku a évoqué deux causes majeures qui expliquent la persistance de l’insécurité à savoir: la présence sur le sol congolais des rebelles hutu rwandais (Fdlr), des rebelles ougandais (Adf-Nalu) ainsi qu’une dizaine des groupes armés nationaux (Mai-Mai) et l’exploitation illicite des ressources naturelles par le Rwanda. Pour y arriver, ce pays a réussi à concevoir tout un programme de création des milices locales, en se servant des congolais que Kagame avait utilisés au Rwanda dans l’armée patriotique rwandaise vers les années 1990. Ces miliciens sont revenus en Rdc à travers les différentes rébellions (Afdl, Rcd, Cndp, dont est issu l’actuel M23) qui les ont intégrés dans les Forces armées de la Rdc, car se réclamant congolais. Et pire encore, le Gouvernement de Kigali renvoie combattre aux côtés du M23 d’anciens FDLR démobilisés à travers le DDRRR de la Monusco. Beaucoup d’entre eux ont été capturés ou se sont rendus dans les différentes bases de la Monusco puis rapatriés au Rwanda.

Julien Paluku a insisté sur le déploiement des drones de surveillance avant le début des opérations et ce dans l’immédiat pour permettre de constater tous les passages nocturnes et appuis en logistique du Rwanda au M23, car les armes neuves, les minutions et l’artillerie lourde qu’utilisent le M23 est une preuve éloquente de l’appui extérieur dont bénéficie cette machine de la mort.
Profitant de l’annonce faite, celle d’appuyer les pays de la Région avec un milliard de dollars, Julien Paluku a estimé que «comme les pays de la Région et particulièrement le Rwanda ont saigné la Rdc par des pillages à répétition, il ne serait pas logique de financer ces pays qui se sont déjà enrichis sur le dos de la misère congolaise en détruisant toutes les infrastructures socio-économiques de base. Pour cela le milliard de dollars devrait être accordé essentiellement à l’Est pour son relèvement économique en vue de rattraper le retard lui imposé par les guerres à répétition. Cela créerait suffisamment de l’emploi aux jeunes souvent victimes de recrutement dans des rébellions diverses».[27]

Après le départ de Ban Ki-moon, la société civile du Nord-Kivu s’est dite «profondément déçue du bref passage» de Ban Ki-Moon, à Goma. Son président, Thomas-D’acquin Mwiti, a estimé que le secrétaire général de l’Onu aurait dû recevoir les différentes couches de la population, pour mieux comprendre la situation qui prévaut dans cette province en proie aux groupes armés depuis plus de deux décennies. «Il a écouté certaines personnes dont le gouverneur de province. Il n’a pas réservé assez de temps pour écouter les gens et comprendre la situation», a-t-il déclaré.[28]

Après Goma, le secrétaire général des Nations Unies traversera la frontière pour le Rwanda voisin, où il rencontrera le président Paul Kagame. Pas besoin d’être devin pour savoir ce que dira le maître de Kigali à son hôte. Une vieille antienne sécuritaire qui, remontant aux années du génocide, relève plus du virtuel que du réel et qui s’est mué dans un véritable fond de commerce. Le refrain se termine invariablement par le côté « Ponce Pilate » du président rwandais par rapport au « conflit congolo-congolais » en cours à l’est de la RDCongo. Ce disque-là est archi connu. Face à ce déni d’agression, et donc d’atteinte à l’intégrité du territoire congolais, que peut Ban -Ki- moon? Terrible question. Pourtant, la clé de la tournée dans les Grands lacs dépendra de la réaction du premier des diplomates onusiens aux sempiternelles thèses de Kigali. Dans l’hypothèse où Ban -Ki- moon se retrancherait derrière la langue de bois diplomatique et refuserait de qualifier la nature du conflit armé en cours dans les Kivu, l’on continuerait à tourner en rond. Le M23 étant comparable à de la fièvre dont la maladie causale se trouve bien de l’autre côté de la frontière. C’est bien le Rwanda- et, dans une certaine mesure, l’Ouganda- le problème. C’est avec Paul Kagame que le numéro 1 de l’ONU devrait jouer franc jeu. Diplomate chevronné, Ban-Ki- moon sait que la vérité est tout à fait soluble dans le langage diplomatique. C’est ce langage de vérité qu’il importe de tenir à Kigali pour espérer restaurer la paix par des voies pacifiques. La jurisprudence des guerres à répétition dans l’Est congolais renseigne que les différentes rébellions nées prétendument des entrailles de l’Armée régulière obéissent aux ordres de Kigali. C’est donc dans la capitale rwandaise que se trouve la solution à la énième guerre d’agression qui prolonge le martyr du peuple congolais.[29]

Le 24 mai, Ban Ki-Moon est arrivé à Kigali en provenance de Goma. Il a affirmé que le Rwanda a un rôle «essentiel» à jouer pour garantir la paix dans l’Est de la RDCongo et il a demandé au chef de l’Etat rwandais, Paul Kagame, «d’user de son charisme politique pour la paix, la sécurité et le développement dans la région des Grands Lacs». Selon lui, le Rwanda a un rôle essentiel à jouer dans la mise en oeuvre de l’accord de Addis Abeba, un accord qui interdit aux pays signataires de soutenir les groupes armés actifs dans l’Est de la RDCongo. Toutefois, dans la rapide déclaration devant la presse, à aucun moment, l’aspect politique de l’accord de Addis Abeba n’a été évoqué, ni le déploiement prochain de la brigade d’intervention dans l’est de la RDCongo, ni la question de l’appui rwandais au M23. Ban Ki-moon et Jim Yong Kim se sont contentés de saluer le développement économique du Rwanda et ses succès en matière de parité homme/femme.[30]



[1] Cf Radio Okapi, 28.04.’13

[3] Cf RFI, 02.05.’13

[4] Cf Angelo Mobateli – Le Potentiel – Kinshasa, 04.05.’13

[5] Cf Radio Okapi, 30.04.’13

[6] Cf Christian Elongo Selemani – La Référence Plus – Kinshasa, 02.05.’13

[7] Cf Angelo Mobateli – Le Potentiel – Kinshasa, 30.04.’13

[8] Cf RFI, 01.05.’13; Angelo Mobateli – Le Potentiel – Kinshasa, 01.05.’13

[9] Cf Radio Okapi, 01.05.’13

[10] Cf Xinua, 03.05.’13

[12] Cf Radio Okapi, 06.05.’13

[13] Cf Radio Okapi, 10.05.’13

[14] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 14.05.’13

[15] Cf Radio Okapi, 20.05.’13

[16] Cf Radio Okapi, 21.05.’13

[17] Cf Radio Okapi, 22.05.’13

[18] Cf Belga – Rtbf, 21.05.’13

[19] Cf Radio Okapi, 22.05.’13

[20] Cf Radio Okapi, 22.05.’13

[21] Cf Radio Okapi, 22.05.’13; Gode Kalonji Muk – La tempête des Tropiques – Kinshasa, 23.05.’13; Mathy Musau – Forum des As – Kinshasa – Kinshasa, 23.05.’13

[22] Cf La Référence – Kinshasa, 23.05.’13

[23] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 23.05.’13

[24] Cf Le Nouvel Observateur/Le Potentiel – Kinshasa, 23.05.’13

[25] Cf Le Potentiel – Kinshasa, 23.05.’13

[26] Cf AFP – Belga – 7 sur 7, 23.05.’13

[27] Cf L’Avenir – Kinshasa, 24.05.’13

[28] Cf Radio Okapi, 24.05.’13

[29] Cf José Nawej – Forum des As – Kinshasa. 23.05.’13

[30] Cf Radio Okapi, 24.05.’1; RFI, 23.05.’13