« Ca va aller…Même les plus pessimistes osent à nouveau respirer, Goma ne sera probablement pas attaquée… »
L’appel téléphonique du président Obama au chef de l’Etat rwandais Paul Kagame a rasséréné Goma, où la population redoutait un mouvement des forces rwandaises, sous prétexte d’une attaque imminente des miliciens hutus FDLR. De nouveaux combats auraient rendu difficile sinon impossible le déploiement de la « force neutre » composée de pays d’Afrique australe (Tanzanie, Zimbabwe, Afrique du Sud sinon Angola). Ce détachement de 800 hommes, sitôt qu’il sera à pied d’œuvre, aura pour mission de désarmer les « forces négatives » c’est à dire les miliciens hutus mais aussi les militaires mutins du M23 et il se chargera de surveiller la frontière entre le Congo et le Rwanda.
Sous l’influence de Susan Rice qui représentait son pays aux Nations unies et qui vient de renoncer à prendre la succession d’Hillary Clinton au département d’Etat, la diplomatie américaine s’était jusqu’à présent montrée très circonspecte, refusant d’évoquer explicitement la responsabilité rwandaise dans la déstabilisation de l’Est du Congo. L’appel du président Obama vient de briser cette omerta : selon un communiqué de la Maison Blanche, le chef de l’Etat a mis en garde son homologue rwandais contre « tout soutien au groupe rebelle M23, incompatible avec le désir de paix et de stabilité du Rwanda ». Les deux hommes ont aussi discuté des problèmes de gouvernance en République démocratique du Congo au Congo et le président Obama, prenant sans doute Paul Kagame au mot, a salué son engagement « à promouvoir la recherche d’une solution pacifique dans l’Est de la RDC. » et il a lancé un appel en faveur d’un accord politique, adressant le même message à Joseph Kabila.
Entre les lignes et au delà des formules de politesse, le message d’Obama représente un tournant dans la politique américaine, puisque Kigali se voit directement interpellé, sinon mis en garde, à quelques heures peut-être de nouveaux bouleversements dramatiques qui avaient déjà plongé Goma en état de psychose.
Didier Reynders, en voyage au Koweit, ne s’y est pas trompé : il a qualifié d’ « important » l’engagement du président Obama dans le dossier, rappelant que toute solution passe aussi par la restauration de l’Etat de droit en RDC et par la « transparence » de la frontière entre le Rwanda et l’Ouganda.
A Kampala aussi, les négociateurs ont compris que la donne avait changé : alors que, les jours précédents, les porte parole du M23 avaient haussé leur niveau d’exigence, allant jusqu’à revendiquer l’administration de la ville de Goma et mettre en cause le président Kabila, ils ont choisi mercredi de suspendre les pourparlers avec la délégation gouvernementale. De leur côté, les représentants de Kinshasa s’étaient plaints du climat de peur et d’insécurité régnant à Goma, l’attribuant à des actions de propagande menées par les rebelles. Ils avaient aussi rappelé le dernier incident en date : après avoir volé un million de dollars dans un fourgon de la banque BIAC, des inconnus ont traversé avec leur butin la frontière rwandaise avec leur butin, laissant derrière eux un blessé et des armes.