RDCONGO: OSER AU NOM DU PEUPLE

Congo Actualité n. 151 – Editorial par la Réseau « Paix pour le Congo »

 

Après les révélations d’un document interne de la MONUSCO et d’un rapport de HRW, le gouvernement congolais a dû, lui aussi, reconnaître le soutien du Rwanda au Mouvement du 23 mars (M23) de Bosco Ntaganda et Sultani Makenga. Il est indéniable que des jeunes, y compris des mineurs, de nationalité rwandaise ont été recrutés, formés militairement et infiltré parmi les troupes du M23 pour combattre contre l’armée congolaise. Toujours à partir du territoire rwandais, le M23 a reçu un appui logistique en armes, nourriture et argent.

Tout cela peut paraître une nouveauté, mais il n’en est pas question. Ceux qui suivent de près le drame de la RDCongo en général et du Kivu en particulier, savent très bien que l’occupation rwandaise est commencée en septembre 1996, lors de la première guerre d’agression, abusivement dite de libération de la dictature de Mobutu, à l’époque de l’AFDL. Depuis lors, des personnalités militaires et civiles de nationalité rwandaise ont infiltré les institutions étatiques congolaises (l’armée nationale, le Parlement et le Gouvernement, tant au niveau national que provincial, l’administration locale), avec la complicité de «Congolais rwandophones». Tout cela en vue du contrôle des mines et de l’exploitation illégale des minéraux du Kivu (or, cassitérite, coltan, pétrole), avec la complicité de multinationales et puissances occidentales, dont les noms sont souvent rapportés dans les différents rapports du groupe d’experts des Nations Unies pour la RDCongo. La population le savait depuis longtemps et de nombreuses organisations de la société civile, nationales et internationales, l’ont dénoncé depuis de nombreuses années. Malheureusement, après les divers rapports et les nombreuses plaintes, aucune mesure n’a été prise pour rompre le lien assassin entre l’exploitation illégale des ressources minérales et le financement des conflits armés, en laissant ainsi libre cours à l’impunité qui ouvre le chemin à la poursuite de la violence.

Que fera le Gouvernement congolais vis-à-vis du Rwanda?

Maintenant que le gouvernement a ouvertement reconnu, bien que timidement, cette réalité, qu’est-ce qu’il fera? Se limitera-t-il à la simple constatation de « la passivité des autorités rwandaises, face à ces graves violations de la paix et de la sécurité internationale commises dans la RDCongo à partir de leur territoire»? Pourtant, il ne s’agit pas seulement de passivité. En effet, selon les déclarations de HRW, certains officiers de l’armée rwandaise sont directement impliqués dans cette affaire ou, au moins, en ont connaissance. Le gouvernement congolais se limitera-t-il à chercher des solutions « dans la synergie entre les Etats de la région des Grands Lacs », signant d’autres accords «piégés» avec le régime en place au Rwanda? Désormais, ce dernier a démontré de ne pas être sincère dans ses relations avec la RDCongo et lorsqu’il signe des accords bilatéraux avec la RDCongo, c’est seulement pour défendre ses intérêts, au détriment du sang de millions de Congolais innocents. Le gouvernement congolais osera-t-il rappeler à Kinshasa son ambassadeur à Kigali, pour des consultations? Osera-t-il demander l’intervention du Conseil Sécurité de l’ONU, pour qu’il applique au régime rwandais les sanctions (gel des comptes bancaires, interdictions de voyager à l’étranger) prévues en cas de violation de l’embargo sur les armes fournies aux groupes armés actifs dans la RDCongo? Osera-t-il exiger une enquête internationale pour identifier les officiers militaires rwandais impliqués, d’une manière ou d’une autre, dans le soutien apporté au M23 de Bosco Ntaganda et Sultani Makenga, à partir du territoire rwandais? Osera-t-il dénoncer auprès du Conseil de Sécurité de l’Onu et de la Communauté Internationale (UA, UE,USA) la violation de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale de la RDCongo par un Pays Tiers)

Que fera-t-il vis-à-vis du M23?

Au niveau interne, le gouvernement congolais a promis de battre militairement le M23 et tous les autres groupes armés, nationaux et étrangers, sans accepter aucune forme de négociations avec eux. Maintiendra-t-il sa promesse? Ou se résignera-t-il à de nouveaux accords militaires (de nouvelles intégrations dans les FARDC, d’autres promotions aux grades supérieurs, de nouveaux postes de commandement, la permanence dans les provinces de l’Est) et politiques (de nouveaux postes ministériels tant au niveau provincial que national) qui ne contribueront absolument pas à résoudre les problèmes de l’Est du pays? Osera-t-il poursuivre la réforme de l’armée (nominations d’officiers à l’esprit nationaliste, restructuration des unités militaires basée sur hétérogénéité tribale, la permutation des soldats d’une région à l’autre, le paiement régulier des salaires, la lutte contre le détournement d’argent, etc.). Osera-t-l neutraliser la bande de ces politiciens (parlementaires et ministres, tant au niveau national que provincial), qui, pour des raisons économiques et régionalistes, ont coopéré (et plusieurs d’entre eux le font encore) à la création de mouvements armés, tels que l’AFDL, le RCD, le CNDP, les différentes branches MAÏ-MAÏ et, finalement, le M23? Est-ce que le gouvernement osera arrêter Bosco Ntaganda pour le livrer à la Cour Pénale Internationale qui a délivré un mandat d’arrêt contre lui? Osera-t-il arrêter et traduire en justice les instigateurs de la rébellion du M23 et les différents seigneurs de guerre qui sont à la tête des nombreux groupes armés encore actifs?

Le peuple congolais attend du gouvernement une réponse claire et définitive à son droit inaliénable à la paix, la vérité, la justice et la liberté.

 Réseau Paix pour le Congo