Congo Actualité n. 150 – Editorial par la Réseau « Paix pour le Congo »
Depuis deux semaines, les affrontements entre l’armée nationale de la République Démocratique du Congo (RDC) et les rebelles du Mouvement de 23 Mars (M23) se sont concentrés sur trois collines: Mbuzi, Chanzu et Runyonyi, dans le territoire de Rutshuru (Nord Kivu), près de la frontière avec le Rwanda et l’Ouganda, forçant les civils à la fuite.
Les rebelles affirment d’avoir déserté l’armée et fondé un nouveau mouvement armé car, à leur avis, le gouvernement n’aurait pas donné suite aux engagements pris dans les accords de 2009.
S’il s’agissait de revendications politiques, il convient de noter que le Congrès National pour la Défense du Peuple (CNDP), dont les rebelles du M 23 sont issus, a été reconnu comme parti politique, membre aussi de la Majorité Présidentielle. C’est dans le cadre de cette plate-forme que les rebelles auraient dû présenter leurs requêtes, sans pour autant recourir aux armes.
S’il s’agissait de revendications d’ordre militaire (salaires, logistique, reconnaissance des grades), les rebelles sont désormais intégrés dans l’armée nationale, conformément aux accords précédents et, par conséquent, ils devraient se référer à leur hiérarchie militaire. Par ailleurs, le commandement militaire au niveau national et, en particulier dans les deux Kivus, est généralement entre les mains d’officiers du CNDP et du RCD, un ancien mouvement politico militaire similaire au CNDP. En effet, jusqu’à il y a quelques semaines, le commandement des opérations militaires Amani Leo était dans les mains de Bosco Ntaganda, au Nord-Kivu, et de Sultani Makenga, au Sud-Kivu.
En tout cas, toute revendication, même juste, jamais peut justifier l’usage des armes. Il est donc raisonnable de soupçonner que, derrières certaines revendications officielles du M 23, il peut y avoir des intentions cachées.
Voila que le mensonge est utilisé comme une arme de guerre.
En réalité, la guerre contre les FDLR et la protection des Tutsis sont des prétextes fallacieux pour ne pas accepter le déploiement de troupes issues du CNDP dans d’autres districts militaires autres que ceux du Kivu, afin de poursuivre leur activité d’exploitation illégale des ressources minérales du Kivu.
Les différents rapports du Groupe d’experts des Nations Unies pour la RDC a dénoncé à plusieurs reprises, l’implication de certains officiers des FARDC, y compris le « Général » Bosco Ntaganda et le «colonel» Makenga Sultani dans des circuits mafieux liés à la contrebande des minerais du Kivu.
Ce n’est pas un secret. En plus, tout le monde sait que le commerce illicite de minerais passe par le Rwanda, ainsi que par l’Ouganda et le Burundi, comme rapporté par les rapports cités.
Une autre raison pour laquelle, bien qu’intégrées à l’armée nationale, les troupes du CNDP ont toujours refusé de servir le Pays dans d’autres régions militaires en dehors des Kivus est la présence, en leur sein, de militaires rwandais restés au Congo depuis l’époque des deux guerres de 1996-1997 et de 1998-2003 aux côtés de l’AFDL et du RCD ou après l’opération militaire conjointe Umoja Wetu, menée en 2009 contre les FDLR.
Etant donné que les troupes de l’armée nationale déployées dans les deux Kivu sont infiltrées par des militaires rwandais, il s’ensuit que, pour rester près de leur patrie, le Rwanda, elles n’accepteront jamais d’être permutées ailleurs.
Cette réalité semble être confirmée par les dernières informations selon lesquelles parmi les rebelles du M23 il y a aussi des soldats recrutés au Rwanda, comme révélé par un rapport «confidentiel» de l’ONU, dont la BBC a pris connaissance.
Il est désormais clair: comme certains mouvements politico militaires précédents (l’AFDL, le RCD et le CNDP), qui ont semé la terreur et la désolation parmi la population congolaise et tué huit (8) millions de personnes innocentes et sans défense, le M 23 aussi a été créé et est soutenu par l’actuel régime rwandais de Paul Kagame. Comme d’habitude, le Rwanda nie, en affirmant que l’instabilité actuelle dans l’Est du Congo est une question du gouvernement congolais et de l’armée congolaise. Le Rwanda a toujours réagi de cette façon, même quand on dénonçait son soutien aux mouvements rebelles précédents de l’AFDL, du RCD et du CNDP. Il a toujours nié. Mais il a toujours été démenti par les divers rapports internationaux, y compris ceux de l’ONU. Comme l’Ouganda, le Rwanda demeure, en fait, un pion important dans les mains de certaines puissances occidentales et sociétés multinationales qui sont à la recherche de matières premières, notamment minérales, du Kivu.
Essayer de faire ressortir la vérité des faits est la première étape essentielle pour trouver de bonnes solutions pour mettre fin, dans la justice et la non violence, aux graves violations des droits de l’homme au Congo.
Coincés ces derniers jours par l’armée congolaise, les rebelles du M 23 ont demandé au gouvernement congolais un cessez-le, en vue de négociations et pourparlers.
Non, on ne peut pas négocier avec qui a choisi la voie des armes pour leur propre bénéfice et pour servir des intérêts étrangers, au détriment du bien commun du peuple congolais: ils doivent être désarmés et répondre de leurs actes devant la justice!